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Correspondances en Onco-hématologie - Vol. II - n° 3 - juillet-août-septembre 2007
Revue de presse
ANTI-CD40 ET LYMPHOME : PAS TOUT
À FAIT “JUSTE UN AUTRE MONOCLONAL”
Le ciblage ne se limite plus aux cellules tumo-
rales mais vise maintenant d’autres acteurs
de la défense antitumorale…
L’immunothérapie par anticorps monoclonaux,
humanisés de préférence, et envisagée par
les immunologistes dès les balbutiements de
cette “biotechnologie”, est devenue une telle
réalité au XXIe siècle que l’on pense presque
immédiatement ciblage et destruction des
cellules exprimant l’épitope visé.
C’est cependant une autre histoire que raconte
l’utilisation d’anti-CD40 à visée thérapeutique,
notamment dans les lymphomes. L’article
analysé ici rapporte des résultats expérimen-
taux chez la souris, mais oriente d’emblée le
raisonnement vers d’autres pistes. En effet, des
anticorps anti-CD40 agonistes ont été étudiés
depuis la fi n des années 1990. Leur capacité à
mimer l’effet de CD154, le ligand de ce récep-
teur de la famille du TNF, a permis d’obtenir
la maturation de cellules dendritiques, telle
qu’elle s’exerce in vivo lors de l’engagement
du CD40 qu’elles expriment. Cette maturation,
comme in vivo, a permis d’obtenir des réponses
cytotoxiques, par la génération de CTL CD8+,
capables notamment de détruire des cellules
tumorales. L’utilisation thérapeutique de tels
anti-CD40 dans l’optique d’une stimulation
des réponses cytotoxiques antitumorales par
l’intermédiaire de la maturation des dendri-
tiques présentes localement a ainsi fait son
chemin.
La maturation dendritique induite par l’en-
gagement de CD40 est d’autre part caracté-
risée par l’expression à la surface des cellules
dendritiques de molécules de costimulation
importantes également pour l’expansion et
la survie de CD8+ cytotoxiques.
Dans l’article analysé ici, les auteurs se sont
penchés sur le rôle apparemment clé joué par
le couple CD27/CD70 (respectivement sur les
lymphocytes CD8 et sur les cellules dendriti-
ques) dans ce contexte.
Le modèle murin utilisé est celui d’un
lymphome induit par l’injection de cinquante
millions de cellules BCL1. Les souris inoculées
ont ensuite reçu de l’anti-CD40 puis des anti-
corps dirigés contre les autres molécules de
costimulation, IBBL ou CD70. Les meilleures
réponses ont été observées avec l’anti-CD40
seul, cela confortant l’importance de la mise
en jeu des autres voies de costimulation et,
notamment, de celle impliquant le couple
CD27/CD70. Pour confi rmer cette hypothèse,
d’autres souris inoculées par les cellules tumo-
rales ont ensuite reçu un anti-CD27 agoniste.
L’éradication tumorale observée était similaire
à celle notée avec un anti-CD40.
Ces résultats suggèrent donc que :
l’activité d’anticorps monoclonaux agonistes
de CD40 passe par l’expansion et la maturation
de cellules dendritiques locales ;
cette maturation est essentiellement carac-
térisée par l’expression de CD70, ligand de
CD27 exprimé par les CD8 spécifi ques de la
tumeur ;
l’activation des CD8+CD27+ peut aussi être
obtenue directement, sans maturation des
dendritiques, avec un anti-CD27 agoniste.
Il est intéressant de noter que, bien que les
cellules BCL1 expriment CD27, leur inoculation,
ainsi que celle d’anti-CD27, à des souris SCID
incapables de montrer une réponse immuni-
taire cognitive, ne conduit à aucune réduction
tumorale. On est donc bien, dans ce système
de monoclonaux agonistes, dans le paradigme
d’une stimulation des réponses immunitaires
antitumorales plus que dans celui d’un ciblage
d’épitopes cibles.
Un autre monde… meilleur peut-être ?
MCB
French RR, Taraban VY, Crowther GR et al. Eradication
of lymphoma by CD8 T cells following anti-CD40 mono-
clonal antibody therapy is critically dependent on CD27
costimulation. Blood 2007;109:4810-5.
LA SPLÉNOMÉGALIE MYÉLOÏDE :
DU NOUVEAU ?
Il s’agit d’une étude, menée chez la souris,
émanant du groupe de William Vainchenker,
de l’unité Inserm 790 de Villejuif (1).
Dans cet essai, l’hypothèse de départ était que
le bortézomib inhiberait l’activation de NF-κB,
avec comme conséquence une diminution
de la sécrétion de TGF-β1 et de l’OPG, ce qui
induirait la réduction de la fi brose et de l’os-
téosclérose dans un modèle murin de myélo-
fi brose avec métaplasie myéloïde, le modèle
TPOhigh. Dans ce modèle murin, la fi brose et
l’ostéosclérose extensive sont considérées
comme secondaires à un processus réactif
provoqué par des médiateurs infl ammatoires
✔
✔
✔
❏
comportant le TGF-β et l’ostéoprotégérine,
médiateurs sécrétés par la prolifération
clonale de mégacaryocytes, de monocytes et
de cellules dérivées du stroma (Chagraoui H et
al., Blood 2002;100:3495-503, et Chagraoui H
et al., Blood 2003;101:2983-9).
Il a été montré que l’activation de NF-κB dans
les monocytes de patients porteurs d’une
myélofi brose primitive conduit à une produc-
tion d’IL-1 qui induit elle-même la production
de TGF-β. La voie NF-κB est également activée
dans les mégacaryocytes et dans les cellules
CD34 positives circulantes chez des patients
porteurs d’une myélofi brose primitive.
L’ensemble de ces éléments, couplé au fait
que le bortézomib est un inhibiteur de NF-κB,
a justifi é la recherche dont les résultats sont
proposés ici.
Dans ce modèle, après 4 semaines de trai-
tement, le bortézomib a diminué les taux de
TGF-β1 au niveau médullaire, et réduit signi-
fi cativement le développement de la fi brose
splénique et médullaire. Après 12 semaines
de traitement, on a également observé une
réduction du développement de l’ostéo-
sclérose en relation avec une inhibition de la
synthèse d’ostéoprotégérine. Point tout à fait
intéressant, l’administration de bortézomib a
signifi cativement amélioré la survie des souris
TPOhigh.
La conclusion est que le bortézomib apparaît
comme un traitement prometteur pour les
patients porteurs d’une myélofibrose avec
métaplasie myéloïde de la rate.
Commentaire. Bien qu’il existe quelques limi-
tations du modèle, par exemple le fait que les
souris TPOhigh meurent plus de problèmes de
myéloprolifération que de problèmes d’os-
téosclérose et que le bortézomib peut avoir
joué un rôle sur la myéloprolifération, il n’en
demeure pas moins que l’impact sur les média-
teurs de l’ostéosclérose et de la myélofi brose
est réel.
Cela ouvre des perspectives de prise en charge
thérapeutique de patients porteurs d’une mala-
die pour laquelle, jusqu’à présent, il n’existe
pas de traitement curatif simple, l’attitude thé-
rapeutique se bornant la plupart du temps à
une simple palliation.
Un tel article, émanant d’une équipe française
particulièrement renommée dans l’étude du
processus myéloprolifératif, est tout à fait
important à considérer et doit faire réfl échir