- 5 -
'Préambule'
Marseille vit globalement les mêmes phénomènes que
les agglomérations françaises et européennes – voire
mondiales – avec un contexte bien diérent. La plus
méridionale des grandes villes françaises est avant
tout le produit de son histoire et sa géographie. Les
cinquante dernières années ont vu Marseille évoluer
et ce changement se poursuit. Une nouvelle entité
émerge et nécessite notre attention. Son devenir sur
les prochaines années, sa complexité, l’origine du
phénomène forment le propos de cette exposition.
Socle historique
La seconde partie du XIXe siècle et le tout début du XXe
siècle constituent le moment où Marseille se dessine,
sous l’inuence de l’Empire puis de la République.
Au tournant du XXe siècle, Marseille est le quatrième
port mondial, le premier de toute la Méditerranée.
Durant l’entre-deux-guerres, 75 lignes régulières
relient Marseille au reste du monde. Localement, cette
période se traduit par un réseau de tramway qui va
dépasser les limites communales pour desservir un
large territoire allant d’Aubagne à Aix-en-Provence.
À partir de 1945 et jusqu’au milieu des années 50, la
période de la Reconstruction absorbe les énergies,
même si elle se limite à de rares et spectaculaires
réalisations comme la reconstruction de la rive Nord
du Vieux-Port par Fernand- Pouillon ou la réalisation
de la Cité radieuse par Le Corbusier. C’est au tournant
des années 60 que l’irruption de la modernité à grande
échelle (logement et infrastructures de transport,
principalement) et les conséquences de la n de guerre
d’Algérie vont frapper Marseille et sa région. La n du
modèle colonial bouleverse la structure de l’économie
locale et gone brusquement sa démographie,
impliquant une transformation spatiale radicale de la
ville. C’est ce moment clé qui a été choisi comme point
de départ de cette exposition, qui s’étend des années
60 jusqu’à la période actuelle.
Socle géographique
L’histoire de Marseille est particulièrement inuencée
par son positionnement sur la rive nord de la mer
Méditerranée. Le noyau premier de peuplement fut
la calanque du Lacydon, par la suite diérents milieux
servirent de base à l’extension de la ville, toujours dans
les limites imposées par la ceinture de collines et les
deux seules vallées desservant.
L’agglomération se déploie désormais largement au-
delà des collines, dans deux vallées (celles de l’Arc et
de l’Huveaune) et autour d’une dépression (étang
de Berre). Cet héritage naturel complexe a pesé sur
la croissance urbaine et contribué au morcellement
du territoire en villages, créant ainsi des réseaux
indépendants.
«111 villages» structurent le territoire de la commune
depuis des siècles. Ils se rapprochent de la ville à la n
du XIXe siècle grâce au réseau de tramway. Absorbés
par l’extension urbaine, ils marquent toujours le tissu
urbain de leur empreinte (lacis des chemins, réseau
compliqué de ruelles étroites) et beaucoup d’entre eux
regroupent encore commerces et infrastructures. Les
bastides et le canal de Marseille sont deux autres traits
marquants de l’urbanisme marseillais. Les domaines
des bastides, toujours présents dans la ville sous une
forme resserrée ou par des éléments conservés (mur
de clôture, allée d’arbres, portail, fragments de parc)
témoignent de la permanence de la géographie et des
formes de l’occupation humaine. Les parcs bastidaires
furent des terrains de choix pour la construction des
grands ensembles.