La Lettre du Gynécologue ̐ n° 370 - mars 2012 | 13
CONGRÈS
vitrification (ou congélation rapide), désormais auto-
risée en France, représente une stratégie efficace dans
l’organisation de l’activité de don en permettant de
dissocier dans le temps le prélèvement et l’attribution
des ovocytes aux couples receveurs (plus de contrainte
de synchronisation des cycles) et d’envisager une orga-
nisation en banque d’ovocytes dans un modèle compa-
rable à celui du don de spermatozoïdes.
Philippe Merviel nous a clairement rappelé que le
citrate de clomifène n’avait d’intérêt que dans les
infertilités d’origine ovulatoire ou associé aux gonado-
trophines en vue d’inséminations intra-utérines et ne
devait pas être utilisé comme placebo. Sylvie Epelboin
et Vincent Izard, qui traitaient des traitements adju-
vants en matière de traitements d’infertilité féminine et
masculine, nous ont confortés dans l’idée qu’il n’existe
pas de traitement adjuvant miracle à ce jour.
La table ronde “Thrombose et reproduction” a réuni
une hématologue Jacqueline Connard, un gynécologue
de l’AMP, Lionel Larue, un obstétricien, Thierry Harvey
et un anesthésiste Dan Benhamou. La discussion anes-
thésiste/obstétricien (et obstétriciens de la salle…) fut
animée, comme on pouvait si attendre ! Jacqueline
Connard nous a rappelé que la grossesse est associée
à des modifications de l’hémostase allant dans le sens
d’une hypercoagulabilité : augmentation des taux de
facteurs de coagulation (fibrinogène, facteurs V, VIII,
von Willebrand), diminution des taux d’inhibiteurs
(antithrombine, protéine S) et résistance à la protéine C
activée. Il en résulte une augmentation des marqueurs
d’activation de la coagulation : D-dimères, complexes
thrombine-antithrombine. De plus, une hypofibrinolyse
est due à des taux élevés d’inhibiteurs : PAI-1 et surtout
PAI-2 qui est d’origine placentaire. Certaines modifica-
tions de l’hémostase sont déjà présentes en tout début
de grossesse (le déficit en protéine S par exemple) mais,
d’une manière générale, elles augmentent progressi-
vement pendant la grossesse. Après l’accouchement,
la normalisation de la fibrinolyse est rapide tandis que
celle des facteurs et des inhibiteurs de la coagulation
prend environ 6 semaines. L’existence d’une throm-
bophilie biologique héréditaire (déficit en antithrom-
bine, protéine C, protéine S, anomalies combinées,
mutations FV Leiden ou prothrombine 20210A homo-
zygotes et, à un moindre degré, les mutations hété-
rozygotes portant sur ces 2 facteurs) majore le risque
de thrombose veineuse. Un anticoagulant circulant
et l’augmentation des anticorps anticardiolipines et
anticorps anti-b2 GP1, présents dans le syndrome des
antiphospholipides, sont aussi des facteurs de risque
de thrombose pendant la grossesse.
Tous ont rappelé l’importance de la maladie throm-
boembolique veineuse, attestée par le risque de morta-
lité maternelle. Aux États-Unis et au Royaume-Uni,
l’embolie pulmonaire est la première cause de décès
maternel direct ont souligné D. Benhamou et T. Harvey.
En France, on recense 5 à 10 décès maternels par an (6 à
12/1 000 000 naissances) liés à une embolie pulmonaire
et dans 1 tiers des cas les soins sont non optimaux. Les
enquêtes réalisées dans plusieurs pays soulignent qu’une
part importante de ces décès est évitable, suggérant tout
autant le besoin de recommandations que de moyens
d’évaluation et d’action pour améliorer les pratiques des
embolies amniotiques. La prévention du risque thrombo-
embolique est au centre de la prise en charge des gros-
sesses. Pour T. Harvey, anticiper est “le maître mot”.
Une consultation préconceptionnelle ou un abord de la
question avant de commencer une grossesse doit être
envisagé, que sa survenue soit spontanément espérée,
mais surtout en cas d’AMP. Lionel Larue a souligné que
les thromboses font partie des accidents rares mais
graves en médecine de la reproduction. Un tiers sont
de localisation artérielle, 2 tiers sont de localisation
veineuse et elles prédominent à la partie supérieure du
corps. Les facteurs de risque sont les thrombophi-
lies, les hyperstimulations ovariennes sévères, et l’effet
des traitements utilisés en infertilité est controversé.
Le dépistage des patientes à risque par le gynécologue
est fondamental, fondé sur un interrogatoire spécifique
et un bilan biologique ciblé. La prévention repose sur
l’adaptation des protocoles de stimulation au cas par
cas, le monitorage des stimulations, les traitements
préventifs par les héparines de bas poids moléculaire
dans les situations à risques et une collaboration étroite
entre spécialistes en cas de terrain prédisposant ou en
cas d’accident déclaré. D. Benhamou a rappelé que la
prévention des événements thromboemboliques repose
essentiellement sur l’emploi des héparines de bas poids
moléculaire dont la sécurité d’emploi au cours de la
grossesse est maintenant établie et qu’il existe des
recommandations des sociétés savantes en matière
de prévention et de traitements mais qu’elles sont trop
peu suivies.
La conférence finale de David Serfaty était sur la préser-
vation de la fertilité au cours des consultations de
contraception. La contraception a d’abord pour but de
prévenir les grossesses non désirées. Elle ne devrait en
aucun cas altérer la fertilité ultérieure des utilisatrices.
De plus, les méthodes contraceptives, hormonales ou
non hormonales, du fait de leurs mécanismes d’action,
peuvent être utilisées pour prévenir et, éventuellement,
traiter un grand nombre de pathologies gynécologiques
pouvant interférer avec la fertilité.
Les consultations de contraception devraient être
des circonstances privilégiées de protection de la
fertilité. ■
Références
bibliographiques
1. Lie Fong S, Baart EB, Martini E,
Schipper I, Visser JA, Themmen AP,
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2. Canis M. Sans la vie, la science
n’est rien. Contre la sélection
avant PMA. Gynecol Obstet Fertil
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3. Belaïsch-Allart J, Merviel P,
Clement P. Questionnaire AMP,
GEFF, BLEFCO, CNGOF,SFG,
FNCGM. Les professionnels
et la révision des lois de bioé-
thique (compte rendu de la
journée d’experts du 1
er
octobre
2009). Gynecol Obstet Fertil
2009;37:104-8.
– Pour en savoir plus : Mises à jour
en gynécologie médicale CNGOF
Vigot Paris 2011.