Des plantes usines dont on «trait» les racines

publicité
SOienoes
VENDREDI
LIBERATION
23 SEPTEMBRE 2005
..
Des plantes usines
dont on «trait» les racines
Cultivéeshorssol, elles libèrent dans l'eaudes molécules ayant un intérêt
pharmaceutique ou cosmétique, au lieu de les expédier dans les feuilles.
e
.
?S
C
ultiverdesplantessousserre pour produire d'autant plus de métabolites Grâce à une longue recherche conduite
d'abord sur la récolte de molécules prorécolter à faible coût des sub- qu'elles en libèrent plus dans l'eau.
stances à fOrte valeur ajoutée: le Cette récolte «ne nécessite pas de tuer la duites par des cellules de racines cultivées
projet
.
a de quoi faire rêver l'indus- plante», souligne le biologiste Eric Gontrie du médicament et des cosmé"- thier (1),à l'origine de ce procédé désormais breveté et exploité par une petite entiques. Traditionnelles consommatrices
"treprise nancéenne créée cet été, Plant
de substances produites naturellement
par des plantes sauvages ou cultivées (de AdvancedTechnologies SAS. «On peut
le la morphine du pavot au taxol anticancé- ainsi envisager decultiverdesplantes rares
e- reux tiré d'unif rare), celles-ci comptent qui produisent naturellement des substancesàpotentielpharmaceùtique, etde
plus que jamais sur le végétal pourrenouveler leur portefeuille de molécules ac- les "traire"plusieursjois parsemaine.»
tives. La culture en plein champs d'OGM La «traite des plantes» a déjà fait ses
produisant des protéines d'intérêt phar- preuves sur quelques espèces, dont l'if
maceutique est une des voies explorées (pour le taxol anticancéreux), la rue (une
I.R.1 dans cette perspective. Elle est épineuse, plante méditerranéenne qui produit un
comme le montrent les fauchages dont elle est la cible en Grâce aux «plantes àtraire» (l'An, mises
au point par une petite équipe de biologistes
France. Une «pharmagriculture» réalisée en milieuconfi- ,de Nancy, le rêve d'tme «pharmagricu!turl:!»
né a longtemps été brandie en milieu confiné pourrait se réaliser.
comme une alternative, futues \ riste. Elle pourrait ne plus être une chi- antipsoriasis) etledatura (fournisseur de
1
.
"
in vitro (récolte très coûteuse), Eric Gontier et ses collègues ont découvert les
deux «gestes); qui permettent de transformer les racines d'une plante en usine à
métabolites.
Sursaturées.Primo, lui apporter dans son
milieu nutritifles éléments qui lui permettent de synthétiser la molécule à
«traire». Secundo, exposer les cellules des
racines à un produit biochimique qui les
rend perméables. Ainsi, les racines deviennent sursaturées de ladite molécule,
laquelle s'échappe des cellules poreuses,
perte aussitôt compensée par une repriSede la fabrication de la molécule, et ain~
si de suite...
La «traite», qui se joue en vingtquatre heures, peut être répétée plusieurs
fois sans épuiser la plante. «On a ainsi
amené le datura à produire jusqu'à deux
~llallllalt:UlI4UCvu lV,)IIIClI4uc,
au
IICU UC IC,) CA~CUICI
uall,)
IC,) ICUIIIC,).
.
.
ultiverdesplantes sous serre pour produire -d'autant plus de métabolites
récolter à faible coût des sub- qu'elles en libèrent plus dans l'eau.
stances à forte valeur ajoutée: le Cette récolte «ne nécessite pas de tuer la
projet a de quoi faire rêver l'indus- plante», souligne le biologiste Eric Gontrie du médicament etdes cosmé- thier (1),à l'origine de ce procédé désormais breveté et exploité par une petite entiques. Traditionnelles consommatrices
treprise nancéenne créée cet été, Plant
de substances produites naturellement
par des plantes sauvages ou cultivées (de Advanced Technologies SAS. «On peut
la morphine du pavot au taxol anticancé- ainsi envisager de cultiverdesplantes rares
reuxtiré d'un ifrare), celles-ci comptent qui produisent naturellement des substancesàpotentielpharmaceùtique, et de
plus que jamais sur levégétal pourrenouveler leur portefeuille de molécules ac- les "traire"plusieursfois par semaine.»
tives. La culture en plein champs d'OGM La «traite des plantes» a déjà fait ses
produisant des protéines d'intérêt phar- preuves sur quelques espèces, dont l'if
maceutique est une des voies explorées (pour le taxol anticancéreux), la rue (une
~.1 dans cette perspective. Elle est épineuse, plante méditerranéenne qui produit un
C
.
comme le montrent les fau-
Grâce aux «plantes à traire» (PAn, mises'
au point par une petite équipe de biologistes
France. Une «pharmagriculture» réalisée en milieu confi- J1e Nancy, le rêve d'une «pharmagriculîure»
né a longtemps été brandie en milieu confiné pourrait se réaliser.
comme une alternative, futuriste. Elle pourrait ne plus être une chi- antipsoriasis) etle datura (fournisseur de
sédatifs) que les chercheurs nancéens ont
mère, grâce à une nouvelle technologie
mise au pointparune toute petite équipe choisi comme cobaye. Bien éonnu des
de biologistes de Nancy: celles des pharmacologues, «le datura métabolise
dans ses racinesdes alcaloïdes qui sont dis«plantes à traire», acronyme PAT.
Stimulées.Derrière cette métaphore tribués ensuite dans toute laplante», soumammo-végétale se cachent quinze ans ligne Eric Gontier. «Il en va souvent ainsi
de travail,une cascade d'innovations et, au chez de nombreuses espèces»,précise-t- il.
tnal, un mode d'obtention de biomolé- Exposées à toutes sortes de pathogènes,
cules tout àfait étonnant. Cultivées surun les racines sont un lieu privilégié de promilieu hydroponique, dans une eaû enri- duction de substances toxiques qui serchie en nutriments essentiels, les plantes vent àladéfense des plantes et ont donc
sont amenées, par des moyens biochi- parfois un potentiel en pharmacie. D'où
miques, à surproduire dans leurs racines l'intérêt des biologistes pour le système
les «métabolites secondaires» (des molé- . racinaire.Encore fallait-iltrouver le
cules bioactives) qu'ellesyfabriquentd'or- moyen d'amener la plante à synthétiser
dinaire avecparcimonie. Stimulées telles en quantité «rentable» les métabolites
les mammeJles d'une vache sous l'effet convoités et àles libérer dans l'eau plutôt
d'une trayeuse, les racines sont amenées à que de les expédier vers les feuilles.
chages dont elle est la cible en
.
Grâce à une longue recherche conduite
d'abord sur la récolte de molécules produites par des cellules de racines cultivées
in vitro (récolte très coûteuse),Eric Gontier et ses collègues ont découvert les
deux «gestes» qui permettent de tranSformer les racines d'une plante en usine à
métabolites.
.
Sursaturées.Primo, lui apporter dans son
milieu nutritifles éléments qui lui permettent de synthétiser la molécule à
«traire». Secundo, exposer les cellules des
racines à un produit biochimique qui les
rend perméables. Ainsi, les racines deviennent sursaturées de ladite molécule,
laquelle s'échappe des cellules poreuses,
perte aussitôt compensée par une reprise de la fabrication de la molécule, et ainsidesuite...
La «traite», qui se joue en vingtquatre heures, peut être répétée plusieurs
fois sans épuiser la plante. «On a ainsi
amené le datura àproduire jusqu'à deux
fois plus d'alcaloïdesque la normale», souligne Jean: Paul Fèvre, de PlantAdvanced
Technologies SAS.
Une dizaine d'autres espèces sont à!' étude. Des OGM pourraient à terme les rejoindre dans le pool des «plantes àtraire».
«Nous travaillons à l'introduction de la
transgénèse dans ce système», dit JeanPaul F:èvre. Des protéines animales, voire humaines, pourraient alors être tirées
des racines de «PAT-OGM». Cette alliance radicale permettrait - peut-être- d'en
finir avec les procès faits aux OGM pharmaceutiques et à leurs faucheurs. CORINNE
(1) Institut national polytechnique
de Lorraine (INPL)- Institut national
recherche agronomique (Inra).
BENSIMON
de la
Téléchargement