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La métropolisation de l’action publique : impacts sur
l’action sociale
TEXTE D'AUTEUR
Du cadre général aux impacts sur
l’action sociale
Depuis 2010 la loi tente d'imposer "la métropole"
comme une nouvelle institution et de la faire advenir
dans les faits. Avec la loi "de modernisation de
l'action publique territoriale et d'affirmation des
métropoles" (MAPAM du 27 janvier 2014), neuf
métropoles dites de "droit commun" sont créées.
Pour comprendre cette novation au niveau global du
système administratif décentralisé l'auteur, Robert
Lafore, en décortique les motifs et les finalités qui la
commandent, tente d'en apprécier la mise en œuvre
législative et cernent les effets potentiels surle
domaine particulier de l'action sociale. Cette analyse
fouillée, qui ne traite pas du cas particulier de la
métropole de Lyon, laisse cependant entrevoir toute
l'importance historique d'une décision en rupture
avec la seule approche intercommunale.
Tag(s) : Action sociale, Métropolisation
Date : 12/03/2015
Les dénominations choisies pour les lois ne sont rien moins que des ornements formels dénués de sens : si l’on attache
à ce dernier terme une double portée, à la fois de « direction » et de « signification », ces intitulés législatifs ont toujours
revêtu un contenu problématique (quel est le problème que l’on entend régler ?) et une dimension de projection (vers où
entend-on aller ?).
Il en est forcément de même pour la loi « de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des
métropoles » (acronyme MAPTAM) du 27 janvier 2014. La première partie du titre, dans la volonté affirmée de «
moderniser l’action publique territoriale », repose ainsi sur un constat implicite : cette dernière ne serait donc pas «
moderne », à savoir sans doute adaptée à notre époque, et il s’agirait d’y remédier. La seconde partie de l’intitulé de la
loi, qui seule est prise en compte par les développements qui suivent, entend « affirmer » les métropoles. Qu’est-ce à
dire ? Sans doute faut-il entendre cette « affirmation des métropoles » comme l’intention de les instituer avec force et
détermination. Une « affirmation » qui, renouant avec une dimension purement performative de la loi, voudrait imposer la
nouvelle institution et la faire advenir dans les faits. Mais alors pourquoi cette impérieuse nécessité, déjà prise en compte
sans succès en 2010 (loi du 16 décembre 2010) puisque la réforme a été abandonnée par la nouvelle majorité politique
élue en 2012 ?
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Tel est le fil qu’il convient de tirer pour situer ces nouvelles métropoles dans le système politico-administratif territorial et
pour en percevoir les enjeux : il s’agit bien d’une novation sensiblement décalée dans l’héritage institutionnel local, dont
l’affirmation va procéder d’une ingénierie extrêmement complexe, contrepartie inévitable de sa faible légitimité initiale. On
se situe bien quelque part entre la méthode du bon docteur Coué, maître de la prophétie auto-réalisatrice, et le souci
d’en dépasser les probables limites en enserrant la réalité dans un écheveau procédural censé la transformer.
Il convient donc de situer cette novation au niveau global du système administratif décentralisé, tout d’abord en essayant
d’apercevoir les motifs et finalités qui la commandent, pour ensuite tenter d’en apprécier la mise en œuvre législative et
enfin pour en situer les effets potentiels sur le domaine particulier que constitue l’action sociale.
1- Une concession à la nécessité
Si les pouvoirs publics entendent « affirmer » les métropoles, la question qui vient d’emblée est bien celle de savoir
quelles en sont les raisons. Ou, en sens inverse, quelles sont les limites et les incomplétudes des entités territoriales
existantes qui, prises en défaut, justifient que l’on veuille leur substituer une telle institution ?
Depuis le « rapport Balladur » en 2008 jusqu’à la loi MAPTAM de 2014 en passant par le texte mort-né de décembre
2010 , une forme de nécessité semble donc s’imposer aux pouvoirs publics, cela au-delà des clivages politiques : la
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« métropolisation ». De quoi s’agit-il et par là quels sont les impératifs tant externes qu’internes aux institutions publiques
locales en place qui commandent cette innovation ? Depuis une vingtaine d’années les agglomérations les plus
importantes sont affectées par des mutations qui d’un certain point de vue semblent dans la continuité de l’évolution
urbaine des années 1950-1960, mais qui cependant paraissent suffisamment spécifiques pour qu’elles suscitent
l’apparition puis le développement de la notion de « métropolisation ».
La fortune contemporaine de cette notion est effectivement liée à un constat : certains territoires urbains, en l’occurrence
les grandes agglomérations, se transforment dans la façon dont ils se structurent et se lient, ou, faudrait-il dire, dont ils
se structurent parce qu’ils se lient à d’autres territoires connaissant des mutations identiques. Pour résumer la
quintessence du phénomène, sans doute faudrait-il parler de logiques de polarisation, l’essentiel tenant à ce que, loin de
la représentation héritée du « territoire » comme espace délimité et clos, la « métropole » se présente fondamentalement
comme un centre connecté vers lequel convergent mais aussi d’où partent, du fait même de cette connexion, des flux de
diverses natures, ces flux constituant la substance même du phénomène et lui donnant ses potentialités de dynamisme
économique et social.
Ce que les spécialistes repèrent dans le phénomène de métropolisation consiste en effet dans la superposition de
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processus assez classiques, à savoir la constitution d’un centre de pouvoir commandant un espace qui lui est
subordonné (extension d’un tissu péri-urbain, du mode de vie urbain, polarisation économique faisant converger les
activités vers l’agglomération et dépendance des espaces adjacents constitués en périphéries), ce qui est au fond
constitutif du phénomène urbain dans ses formes les plus anciennes, avec des logiques radicalement nouvelles :
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concentration des activités de commandement économique, politique et culturel, surtout sous la forme de fonctions
tertiaires supérieures de haut niveau, polarisation de la capacité d’influence et d’attractivité, multiplication des réseaux
d’interrelations par connexions avec d’autres centres urbains de même niveau, tout cela selon une logique à la fois
d’autonomisation par rapport aux espaces proches et au contraire de connexions renforcée avec les pôles extérieurs. De
la logique ancienne, la métropole contemporaine hérite du phénomène de croissance quantitative des populations et des
activités, mais sa nature inédite tient dans ce que le processus n’opère plus principalement par la domination des
périphéries mais par les interactions avec des entités extérieures de même nature. Le phénomène métropolitain
contemporain renverse en fait le socle de la dynamique urbaine traditionnelle : ce n’est plus la maîtrise d’un territoire
adjacent et la capacité en en capter les ressources où à en dominer les besoins qui constitue la puissance bien que cette
dimension reste présente à titre d’effet du processus, mais c’est dorénavant la capacité à s’inscrire dans des flux
réticulaires extérieurs et à les maîtriser. Il s’agit non plus seulement d’une « ville-centre », mais de « ville-monde » ou à
tout le moins de ville de « taille européenne » , concentrant les ressources décisives dans une économie globalisée :
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centres de commandement économiques, financiers, culturels, universitaires ; activités tertiaires à haute valeur ajoutée ;
recherche et développement ; fort pouvoir d’impulsion et d’organisation d’activités projetées vers l’extérieur ; main
d’œuvre qualifiée et emplois stratégiques ; inclusion dans des réseaux connectant aux entités de niveaux européen et
mondial ; capacités d’interface assurant un rayonnement et une attractivité forte.
Le phénomène de métropolisation, entendu donc selon les grandes caractéristiques esquissées ci-dessus, s’est ainsi
progressivement imposé comme une donnée pour les spécialistes. Pour les décideurs politiques sa prise en compte ne
s’est opérée que progressivement et finalement assez tardivement , cela dans une tension entre d’un côté la
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constatation de son caractère inéluctable et de l’autre la nécessité de maîtriser un processus considéré néanmoins
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comme très perturbateur. En effet, le phénomène invalide les montages des collectivités et des territoires tels qu’ils sont
établis dans le système politico-administratif local. On peut à cet égard mettre en évidence au moins deux spécificités de
la « métropolisation » qui ne permettent pas de l’articuler simplement et sans difficultés au système de décentralisation
hérité.
La première concerne la nature même de la « métropole » : s’agissant d’une entité complexe, sont reliés et
interdépendants une multiplicité d’éléments économiques, sociaux, culturels, qui procède de l’intégration de dynamiques
multiples et enchevêtrées, qui s’organise sur des connexions entre pôles proches et lointains, on perçoit bien que ces
formes sociales et politiques nouvelles sont en total décalage avec la conception traditionnelle des « territoires » ou du «
local » tels que construits avec la stabilisation de l’Etat national décentralisé ; ce dernier se projette sur des espaces qu’il
délimite, contrôle, administre et équipe selon une logique verticale, descendante et sectorielle se concrétisant dans des
découpages et des cloisonnements d’administrations et d’activités juxtaposées ; dans ce cadre s’impose la similarité et la
reproductibilité à l’identique des services, les logiques bureaucratiques d’essence réglementaire, la hiérarchie comme
forme d’intégration des pouvoirs, les découpages fonctionnels qui distinguent et séparent l’économique, le social,
l’éducatif, etc… La métropolisation prend à revers ces conceptions car elle repose au contraire sur des logiques
réticulaires, fluides, transversales, qui mettent en interactions les activités et les politiques et qui supposent une
adaptabilité permanente ; loin de chercher une superposition stricte d’espaces physiques enfermés dans des limites
préétablies et des politiques sectorielles qui y sont développées, loin d’assigner à résidence des populations et des
activités pour en assurer le contrôle et/ou en soutenir le fonctionnement, il s’agit davantage de dynamiques
auto-générées par des systèmes d’acteurs divers mis en synergie dans lesquels les connexions et les coopérations
priment les distinctions fonctionnelles. La métropole constitue un nouveau concept de « territoire », en décalage fort avec
le « local » hérité du vieux modèle républicain.
La seconde spécificité de la métropolisation, au-delà de sa nature, tient au mode de fonctionnement qui en découle.
Fondamentalement, il ne s’agit plus dans ces espaces de développer des politiques publiques descendantes, plus ou
moins réparties entre des collectivités relativement autonomes en charge de les mettre en œuvre, le tout avec une
relative adaptation localisées assurée par compromis entre notables locaux et représentants de l’Etat, tout cela
constituant le modèle de décentralisation en vigueur ; il convient plutôt de susciter des dynamiques constituant les
espaces métropolitains en entités politiques, c’est-à-dire en communautés d’habitants et d’acteurs appelés à produire un
intérêt qui leur est commun et à mobiliser les ressources permettant de le mettre en œuvre. La métropole requiert donc
l’élaboration d’une substance qui lui est propre, une substance singulière qui est au résultat d’une capacité à comprendre
en son sein et à l’égard de l’extérieur les logiques d’interdépendance qui relient l’économique et le social, l’éducation, la
formation et le dynamisme collectif, le logement, l’urbanisme et l’attractivité des espaces, les activités culturelles et la
cohésion, etc… Bref, rien d’autre qu’une mise en relation systématique de ce que le modèle hérité au contraire distingue,
répartit, cloisonne, le tout avec une requête inédite d’autonomie qui invalide l’intégration par la hiérarchie et la
subordination du modèle antérieur.
La métropolisation est, dans ses potentialités, le point d’application le plus significatif de la crise du modèle
d’administration publique locale. Reste à s’interroger sur la façon dont cette contrainte a été apprivoisée au travers de
son institutionnalisation.
2- De nécessité faire loi
Après que le rapport Attali l’ait évoquée en 2008, c’est le rapport Balladur qui avance pour la première fois l’idée de
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création de onze métropoles en France, à quoi s’ajoute la création d’un grand ensemble intégré pour la région
parisienne. Le gouvernement Fillon le suit en prévoyant dans son projet de réforme de l’administration déconcentrée la
création d’une nouvelle collectivité à statut particulier, la « métropole », une dizaine d’entre elles devant être créées
d’office par la loi : cette collectivité doit absorber sur son territoire l’ensemble des intercommunalités existantes et
reprendre les compétences départementales : il s’agit de doter le pays de pôles urbains de dimension européenne,
puissants sur le plan économique et intégrant un ensemble de fonctions les rendant aptes à figurer efficacement dans les
grands flux d’échanges internationaux. Finalement, la loi du 16 décembre 2010 sera en retrait par rapport à cette
première mise en forme : il ne s’agit pas d’une collectivité territoriale mais simplement d’un nouvel établissement public
de coopération intercommunale, créé sur la base du volontariat dans les agglomérations de plus de 500 000 habitants,
dont les attributions de plein droit transférées des départements sont limitées (transports scolaires, voiries, zones
d’activités), les autres domaines supposant un accord de ces derniers. Ce montage passera tel un songe dans notre
système institutionnel local , mis en cause par la nouvelle majorité élue au printemps 2012.
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Cela n’empêche pas cette dernière de reprendre et d’assumer l’idée de « métropole », à telle enseigne d’ailleurs qu’elle
a voulu, selon l’intitulé même de la loi MAPTAM de janvier 2014, procéder à son « affirmation ».
Le caractère obligatoire de la nouvelle structure réapparaît puisque tous les territoires de plus de 400 000 habitants
situés dans une aire urbaine de 650 000 habitants doivent en constituer une.
Il s’agit d’une forme d’intercommunalité, certes plus intégrée, mais qui prend place statutairement, à l’exception de celle
de Lyon également créée par la loi de 2014 , dans la catégorie des établissements de coopération intercommunale à
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fiscalité propre. A côté du droit commun , et outre Lyon, la métropole d’Aix-Marseille et celle du Grand Paris disposent
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d’un statut particulier .
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La loi en donne une définition : la métropole est « un espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet
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d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social du (de leur) territoire afin d’en
améliorer la cohésion et la compétitivité et de concourir à un développement durable et solidaire du territoire régional.
Elle valorise les fonctions économiques métropolitaines, ses réseaux de transport et ses ressources universitaires, de
recherche et d’innovation, dans un esprit de coopération régionale et interrégionale et avec le souci d’un développement
territorial équilibré. »
Enfin, avec des variantes selon qu’il s’agit du droit commun ou des statuts spécifiques concernant le Grand Paris,
Aix-Marseille-Provence ou Lyon, un ensemble d’attributions sont confiées aux métropoles. La liste en est longue et
complexe, aussi n’est-il pas opportun de la reprendre ici. On s’en tiendra à deux séries de remarques : d’une part la
métropole absorbe de nombreuses compétences communales et cela de façon automatique ce qui manifeste une
volonté d’intégrer fortement les communes membres dans une vision métropolitaine des politiques publiques ; d’autre
part, la métropole peut potentiellement absorber de nombreuses attributions des départements, des régions et de
l’administration déconcentrée de l’Etat, mais cela est alors soumis à une procédure consensuelle par laquelle ces
attributions ne lui sont confiées que si elle en fait la demande et que si, en conséquence, une convention peut être
établie entre elle et les collectivités publiques concernées .
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De ce cadre rapidement esquissé que retenir de cette institutionnalisation de la métropole par la loi du 27 janvier 2014 ?
Tout d’abord, sur le plan organique un double constat fait sens. La métropole tente de s’encastrer, sans le bousculer,
dans le cadre du système politico-administratif existant.
Le choix de l’EPCI qui domine en dehors du cas lyonnais, et donc l’exclusion du recours au concept de « collectivité
territoriale », poursuit certes le lent mouvement d’intégration fonctionnelle des collectivités territoriales existantes
(communes essentiellement) , mais en préservant ces dernières de la double concurrence que ne manquerait pas de
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leur imposer cette nouvelles structure si elle était constituée en collectivité territoriale de plein droit : concurrence de
légitimité car l’élection directe des conseils serait inévitable et concurrence fonctionnelle car une collectivité territoriale
n’obéit pas au principe de spécialité qui s’impose au contraire à l’établissement public . Le choix de l’établissement
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public comme forme de droit commun des métropoles manifeste donc la volonté de les situer dans le modèle
politico-administratif territorial hérité en les cantonnant dans une logique essentiellement fonctionnelle (ces structures
sont conçues comme des instruments permettant à des collectivités de gérer en commun leurs compétences) et donc
par-là peu dotée en substance politique (ce qui justifie alors que la gestion soit remise à des représentants des
collectivités membres).
Toujours sur le terrain organique, la multiplication des statuts de métropoles avec un droit commun et des structures
disposant de statuts spécifiques met en évidence le caractère volontairement marginal de cette nouvelle institution. Il
s’agit davantage d’accompagner des espaces où le processus métropolitain est engagé et de l’encadrer que de créer un
cadre véritablement nouveau pour penser différemment les territoires et leurs modes de fonctionnement ; la métropole
de ce point de vue constitue bien davantage une adaptation à la marge du modèle existant, consistant dans un relatif
contournement des collectivités en place, qu’elle n’est la concrétisation d’un projet global de refondation du système
politico-administratif local.
Ensuite, sur le terrain fonctionnel, les nouvelles métropoles tentent de prendre en compte les logiques à l’œuvre dans le
processus de métropolisation en procédant fondamentalement à une intégration forte des attributions antérieurement
dispersées entre les échelons communal, départemental, régional et l’administration déconcentrée de l’Etat. Il s’agit là,
en potentialité, de réunir dans un même espace, l’ensemble des attributions pouvant constituer des politiques publiques
intégrées (économie, social, formation, logement, aménagement, urbanisme, culture, etc…) alors qu’elles obéissent
encore au principe de répartitions sectorielles cloisonnées. Cela dit, l’intégration est relative : elle est obligatoire en ce qui
concerne les communes membres de la métropoles, cela conduisant à une perte indéniable de substance de l’échelon
communal au profit du niveau métropolitain ; elle est facultative en ce qui concerne les transferts en provenance des
autres collectivités publiques (Etat, département et région) puisque qu’ils procèdent d’un dispositif contractuel par lequel
les collectivités maîtrisant ces diverses attributions peuvent ou non en déléguer la mise en œuvre à l’échelon
métropolitain . On le voit, le processus d’intégration par la métropole d’un large ensemble de compétences qu’elle
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pourra alors relier les unes aux autres pour en assurer une mise en œuvre transversale et décloisonnée, ce qui est
l’essence même du phénomène métropolitain, n’est que partiel, le système restant là encore au milieu du gué : d’un côté
on voit bien qu’il s’agit de ne pas affecter radicalement les équilibres antérieurs mais de l’autre on entend néanmoins
ouvrir le jeu pour impulser un mouvement de transformation qui ferait de la métropole un acteur véritablement novateur
dans la structuration des activités et par-là des dynamiques des territoires concernés.
La nécessité, qui s’incarne ici dans le développement de logiques métropolitaines structurant les flux de toute nature
constitutifs des processus contemporains d’urbanisation, dont une grande part sont transnationaux, oblige à une prise en
compte du phénomène car le risque de la marginalisation des pôles urbains français est fortement ressenti ; mais, la voie
de l’adaptation marginale du système local s’est imposée faute de pouvoir sur ce terrain comme sur bien d’autres
enclencher des logiques de véritable changement. La métropole de la loi du 27 janvier 2014, comme sa devancière de
2010, constitue donc une forme de compromis entre le maintien du système existant que l’on se contente d’adapter à la
marge et la volonté d’impulser néanmoins les mutations qu’appelle le contexte.
Ce choix du contournement de problèmes que l’on ne parvient pas à régler peut se révéler hasardeux. Le plein succès
de l’expérience peut paraître en effet douteux : du fait d’une part que ce nouvel établissement public, restant une forme
de confédération de communes pour ne pas avoir réglé clairement la question de l’effacement communal qui est
inéluctable, repose sur une ingénierie organisationnelle d’une grande complexité et très opaque ce qui ne peut que
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porter atteinte à une légitimité déjà faible faute d’une élection directe des responsables ; du fait d’autre part que ces
métropoles se créent sans que leurs conséquences sur les autres collectivités territoriales n’aient été prises en compte,
notamment les départements et les autres intercommunalités, ce qui pose le problème de l’articulation entre les
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territoires et des mécanismes pensables pour les mettre en relative solidarité ; fondamentalement, sur ce plan, c’est
l’ensemble de la doctrine de l’Etat décentralisé qui est en cause : comment penser les pouvoirs et leurs rapports au
divers niveaux de la structure politique et administrative, cela déterminant une conception de leurs attributions et
compétences . Sans préjudice du fait enfin que, si l’on s’en tient aux critères relatifs au phénomène de métropolisation
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tant au niveau mondial qu’européen, il n’y a pas en France quinze métropoles qui puisse les satisfaire ; et il est douteux
que le montage institutionnel de la loi du 27 janvier 2014 parvienne à les placer au niveau minimal requis ; le
volontarisme jacobin, à moins qu’il ne s’agisse de la méthode Coué, risque une nouvelle fois de décevoir…
3- La métropolisation de l’action sociale
Si l’on considère maintenant le domaine de l’action sociale, quel peut être l’impact de la création des métropoles sur ces
dispositifs de nature assistancielle qui concernent, dans leur noyau central diverses catégories de publics dits « en
difficultés » (enfance sous protection publique, personnes âgées, personnes en situation de handicap, personnes «
démunies ») et en cercles concentriques plus ou moins rattachés les politiques d’accès au logement, aux soins, à
l’emploi, à la justice .
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La réponse à cette interrogation peut revêtir deux dimensions : la première consiste à faire le point, sur le fondement de
la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, des attributions remises (ou pouvant l’être) par ce texte au nouvel établissement
public, puisque, potentiellement, une part significative des politiques entrant dans ce champ peuvent se retrouver dans
son giron ; la seconde, de nature plus prospective concerne les effets possibles de ces transferts en ce qui concerne le
modèle d’action sociale lui-même, à savoir la façon dont les problèmes qui y sont traités et, en retour, les modes
organisationnels peuvent être affectés.
En ce qui concerne la première approche et comme indiqué ci-dessus, la loi fait obligatoirement basculer dans le champ
d’attribution de la métropole un ensemble d’attributions sociales en provenance des communes membres, le nouvel
établissement de coopération intercommunal les exerçant alors de plein droit . On peut les ranger en quatre pôles.
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Dans le domaine de la protection de l’enfance, notamment sur le volet de lutte contre la délinquance des mineurs, la
métropole doit prendre en charge les dispositifs locaux de prévention de la délinquance et plus largement d’accès aux
droits. Dans le champ de la politique du logement la métropole distribue les aides et organise les actions en faveur du
logement social et plus spécifiquement des personnes défavorisées à cet égard ; elle intervient aussi pour ce qui a trait à
l’amélioration du parc immobilier et à la réhabilitation/résorption de l’habitat insalubre ; elle a en responsabilité
l’aménagement, l’entretien et la gestion des aires d’accueil des gens du voyage. C’est la métropole qui est substituée
aux communes pour la mise en œuvre de la politique de la ville (programmes entrant dans ce champ et insertion par
l’activité économique). Enfin, à un niveau plus large, les activités et structures de développement social, tels les centres
socio-culturels et socio-éducatifs entrent dans son champ d’attribution. Autrement dit, un ensemble de domaines relevant
des communes antérieurement et concernant soit l’action sociale au sens restreint du terme (protection des mineurs
délinquants) soit qui lui sont adjacents bien que de plus en plus stratégiques du fait du développement des politiques
d’insertion (hébergement et logement, politique de la ville, développement social urbain), entrent dans le champ d’action
des métropoles.
Des attributions d’action sociale peuvent être déléguées aux métropoles par le département . Selon les termes de la loi,
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« par convention passée avec le département, à la demande de celui-ci ou de la métropole, la métropole exerce à
l'intérieur de son périmètre, en lieu et place du département, tout ou partie des compétences » dont le texte fixe la liste.
Il s’agit de l’'attribution des aides au titre du fonds de solidarité pour le logement ; de missions confiées au service public
départemental d'action sociale ; de l'adoption, de l’adaptation et de la mise en œuvre du programme départemental
d'insertion ; d’actions de prévention spécialisée auprès des jeunes et des familles en difficulté ou en rupture avec leur
milieu ou encore d’aide aux jeunes en difficulté. Le département peut en outre transférer à la métropole ses
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