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oncosciences
Coordonné par S. Faivre (hôpital Beaujon, Clichy)
et C. Tournigand (hôpital Saint-Antoine, Paris)
des dommages de l’ADN. Ils jouent
un rôle crucial dans la prévention
de l’instabilité génomique. Toute
altération de l’un d’entre eux peut
potentiellement aboutir à l’ac-
quisition du phénotype tumoral.
Certaines variations dans les
gènes BRCA1, BRCA2, NBS1, ou
CHECK2 sont d’ailleurs associées à
un risque plus élevé de développer
un cancer de la prostate. Dans cette
étude, les auteurs s’intéressent plus
particulièrement au gène p53AIP1
codant pour la protéine 1 associée
à l’apoptose régulée par p53. Cette
protéine est une cible en aval de
p53 qui est activée lors de l’apop-
tose induite par des dommages de
l’ADN. Cette activation est dépen-
dante de la phosphorylation de
p53 sur sa sérine 46. Il existe trois
isoformes de p53AIP1 (α, β et γ)
provenant de trois transcrits du
gène. Les isoformes α et β se locali-
sent au niveau de la mitochondrie et
participent à l’apoptose en faisant
chuter le potentiel de membrane
mitochondrial. Les auteurs montrent
que, contrairement à p53, dont la
fréquence de mutation n’est pas
très élevée dans les cancers de la
prostate, les porteurs de variants
tronqués de p53AIP1 ont un risque
plus élevé de développer un cancer
de la prostate.
Pour cela, les auteurs ont séquencé
la totalité du gène p53AIP1 (exons
et introns) de 132 tumeurs de
patients atteints de cancer primaire
de la prostate. Les résultats obtenus
ont permis d’identifier 3 mutations
induisant des changements d’acides
aminés (alanine en valine en posi-
tion 7, arginine en acide glutamique
en position 102, et proline en sérine
en position 105, avec une fréquence
respective de 4,5 %, 40,9 % et 40,2 %)
et deux mutations induisant la for-
mation d’une protéine p53AIP1
tronquée (mutation d’une sérine
en codon stop en position 32 et
insertion d’un G induisant un codon
stop au niveau de l’arginine 21).
Ces deux variants tronqués sont
retrouvés chez 4 patients. Tous ces
variants sont constitutifs, puisqu’ils
ont aussi été détectés dans les tissus
sains correspondants.
Afin d’évaluer la relation entre
la présence de variants tronqués
de p53AIP1 et le risque de déve-
lopper un cancer de la prostate,
les auteurs ont ensuite réalisé
une étude cas-témoin incluant
393 patients et 327 sujets sains.
Les deux variants tronqués sont
retrouvés chez 3,1 % des patients
et chez 0,6 % des témoins, ce qui
amène les auteurs à conclure que
les sujets possédant un variant
p53AIP1 tronqué ont un risque
5 fois plus élevé de développer un
cancer de la prostate. Ce risque doit
néanmoins être affiné, étant donné
la rareté de ces variations. L’ana-
lyse de 403 autres tumeurs d’ori-
gine tissulaire différente ne révèle
aucun variant tronqué suggérant que
ces variations sont spécifiques au
cancer de la prostate.
Afin d’établir la fonctionnalité
des variants tronqués, les auteurs
surexpriment, dans des cellules en
culture, les deux formes tronquées
de p53AIP1. Ils constatent que
seul un variant est détectable par
western blotting étant donné la trop
petite taille de l’autre. Ils montrent
par microscopie confocale que ce
variant se localise au niveau de la
mitochondrie au même titre que
la forme sauvage de la protéine, mais
qu’il n’est pas capable de faire chuter
le potentiel de membrane mitochon-
drial, ce qui s’accompagne d’une
réduction du nombre de cellules
apoptotiques. Ils montrent égale-
ment que la réduction du niveau
d’apoptose est liée à une rétention
du cytochrome c dans les mito-
chondries des cellules exprimant
la forme tronquée de p53AIP1. Ces
résultats suggèrent que les cellules
exprimant les variants tronqués de
p53AIP1 ont une capacité réduite
à déclencher l’apoptose, ce qui est
confirmé par les tests de survie
montrant que 40 % seulement des
cellules surexprimant la forme
sauvage de p53AIP1 sont capables
de former des clones, alors que ce
taux dépasse 80 % pour les cellules
surexprimant les deux variants
tronqués de la protéine. En conclu-
sion, cette étude montre un lien
entre la présence de deux variants
tronqués de p53AIP1 et le risque
plus élevé de cancer de la prostate,
excepté en ce qui concerne le cancer
familial de la prostate, pour lequel
elle ne montre pas de différence
significative entre cas et témoins,
et suggère que d’autres facteurs
sont impliqués. Ces résultats
contribuent également à mieux
comprendre l’étiologie de ce type
de cancer, en montrant que ces
troncations de p53AIP1 aboutissent
à une perte de fonction de la protéine
se traduisant par une déficience de
la voie de signalisation apoptotique
régulée par p53 en réponse aux
dommages de l’ADN. O
P. Pourquier,
Institut Bergonié, Bordeaux
>
Wang X, Wang F, Taniguchi K et al. Truncating
variants in p53AIP1 disrupting DNA damage-
induced opoptosis are associated with prostate
cancer risk. Cancer Res 2006;66:10302-7.
La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 1-2 - janvier-février 2007