PHILOSOPHIE PROF : WAHIB Page 4
responsabilité est avant tout intérieure : après un acte mal, la conscience généralement regrette et se
culpabilise elle-même. Et ce particulièrement ce que Bergson appelle la « conscience-mémoire » qui
nous lie indélébilement à notre responsabilité morale. La mémoire enregistre tous nos actes, les bons
comme les mauvais. Sans cette conscience qui mémorise notre passé, notre responsabilité morale
serait sans effectivité aucune, et notre identité sans réalité aucune.
IV. La faiblesse de la conscience
Comme on vient de le voir dans ce qui précède, la conscience est une faculté extraordinaire,
un privilège (naturel) attribué à l’homme. Elle constitue, pour le dire comme Pascal, la « grandeur » et
la « dignité » de l’homme. L’homme, en étant conscient et pensant, est supérieur à tout l’univers qui,
lui, est sans pensée et sans conscience. Mais ce cadeau céleste qu’est la conscience humaine est un
cadeau empoisonné. Elle est la misère de l’être conscient. Pascal reconnaît que le « roseau pensant »
est un être « misérable ». Misérable parce que sa conscience n’est qu’un miroir reflétant durement à
l’homme sa condition humaine misérable. Avec sa conscience, il aura conscience de sa condition de
mortel, de sa finitude, il aura conscience de l’infinie immensité de l’univers et de son infinie petitesse,
de sa grande fragilité physique.
Par ailleurs, la conscience sera critiquée d’être passive et déterminée. C’est la thèse de Karl
Marx (de Spinoza). Karl Marx pense que l’être conscient est psychologiquement modelé par son milieu
social. Même avec sa conscience, l’individu serait incapable de se déterminer par lui-même : de
déterminer sa vie. Il est le produit de sa culture et de sa société. Raison pour laquelle il est impuissant
à s’affranchir de sa société, de changer radicalement sa condition de vie matérielle. Précisons que
Karl Marx met l’accent lui sur les conditions économiques des ouvriers et la domination bourgeoise
sur la classe ouvrière. Il regrette l’impuissance de la classe ouvrière majoritaire à mener une
révolution dans le but de réaliser un changement socio-économique.
Si Karl Marx se focalise sur le déterminisme social et économique, Spinoza lui parle d’un
déterminisme plus général. A son avis, la conscience ne se détermine pas pleinement. Elle serait
déterminée extérieurement par des causes multiples. Il souligne la place significative que des causes
externes à la conscience occupent dans l’action de celle-ci. Quand nous désirons par exemple quelque
chose, notre désir n’est pas toujours le choix volontaire de notre conscience. Il pourrait être, par
exemple, le résultat de notre passion (ou du plaisir), une force corporelle et non mentale. Ça serait le
choix de notre corps et non celui de notre conscience. Ainsi, des causes entièrement extérieures à
notre conscience, et d’autres extérieures à notre conscience sans être extérieures à nous (notre
être) (des forces inconscients) interviennent dans nos choix, nos désirs, nos décisions. Mais qu’entend
Spinoza de ces causes intérieures mais non conscientes ?
Il faut attendre Freud pour entendre à haute voix ce que sous-entendait Spinoza à petite voix.
Freud, en s’appuyant sur les analyses de ses prédécesseurs, affirmera que la conscience humaine