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CONJ • 14/3/04 RCSIO • 14/3/04
institutionnelle des soins hospitaliers en fin de vie. Ils ont
organisé des groupes de consultation pour les médecins et les
infirmières et ont interrogé des membres de la famille des
patients. Ils ont cerné les facteurs, opportunités et obstacles qui
influencent les soins en fin de vie et ils ont mis en œuvre des
changements au moyen d’une approche d’AQ qui encourageait la
participation interdisciplinaire, puis ils ont démontré que les
interventions ne relevaient pas exclusivement de la
responsabilité des médecins.
Après avoir reconnu le besoin d’intégrer les résultats de la
recherche dans la pratique au sein d’un centre de cancérologie,
Patton (1993) a eu recours à la recherche active et au processus
d’amélioration continue de la qualité afin de faciliter la
conduite et l’utilisation de la recherche dans ce milieu. Des
processus et des structures visant à encourager et à appuyer les
efforts des personnes impliquées ont été mis en place pour
tenter d’intégrer la recherche dans la pratique. Patton a résumé
sa recherche ainsi: lorsqu’il est employé dans un système
décentralisé et de gouvernance partagée, un programme
d’amélioration continue de la qualité peut exercer une pression
continue et constructive sur les soins infirmiers et sur la qualité
des soins.
Un dernier exemple implique des infirmières de soins généraux
qui ont contribué au changement dans la pratique liée aux
cathéters vasculaires périphériques (CVP) et à la formation de
thrombus (K. Beattie et J. Wilson, communication personnelle, 15
septembre 2003). Tel que dicté par la pratique d’accès aux CVP en
vigueur dans de nombreux établissements, les infirmières de cette
unité ont aspiré une petite quantité de liquide (héparine) de la
sonde afin de s’assurer de sa perméabilité. Toutefois, l’épouse
d’un patient a demandé aux infirmières d’aspirer toute l’héparine
du CVP et elles ont aspiré un caillot d’une longueur de 5
centimètres. Au cours de la même journée, elles ont trouvé deux
autres caillots dans les sondes d’autres patients. Les infirmières
ont ensuite décidé de réaliser une étude sur l’ensemble des patients
traités à l’aide d’un CVP afin de déterminer si un des types de
sondes de CVP était à l’origine du problème et de documenter les
changements en matière de procédures.
Au cours du premier mois, on a aspiré un caillot chez cinq
patients, tous munis d’un CVP de type A. Les infirmières ont
rencontré un représentant du fabricant de même que divers
intervenants. Malgré le fait que les infirmières étaient confiantes
que leur technique d’irrigation était appropriée (au moyen d’une
pression positive), elles ont initialement choisi d’utiliser un
dispositif anti-reflux. Elles ont donc amorcé un essai de huit
semaines avec le dispositif, mais après quatre semaines, le nombre
de caillots aspirés augmentait! Les infirmières ont compris qu’il y
avait un problème, puisque tous les caillots survenaient dans les
CVP de type A. Donc, après une discussion avec le fabricant du
dispositif anti-reflux, le personnel a accepté de participer à une
autre séance de formation en cours d’emploi sur l’utilisation des
dispositifs anti-reflux. On n’a constaté aucune amélioration après
cette formation et les infirmières ont avisé l’oncologue médical des
résultats et lui ont demandé des suggestions. Elles ont rencontré
l’hématologue et ont obtenu un nouveau protocole pour la gestion
des caillots pour les 20 prochains patients:
Après aspiration d’un caillot, irriguer la sonde avec une solution
d’héparine à 100 unités/ml. Ces patients feront l’objet d’un
examen Doppler dans les jours suivants. Dans les cas d’aspiration
d’un second caillot, augmenter la concentration de l’héparine à
500 unités/ml, puis à 1000 unités/ml si un troisième caillot est
aspiré.
Les infirmières ont évalué 47 patients et trois types de CVP (A,
B et X). Toutes les lignes de CVP étaient faites du même matériau,
le polyuréthane. Seize des 35 patients munis d’une sonde de type A
ou X ont eu des caillots. On a aspiré 20 caillots en tout (4 patients
ont eu plus d’un caillot). Dans tous ces cas, les lignes de CVP
étaient de type A ou X. Les sondes de type B n’ont produit aucun
caillot. Un des patients a obtenu un Doppler positif. Le fait que
certains patients avaient reçu un traitement de coumadin et
d’héparine de faible poids moléculaire avant l’installation du CVP
n’a pas empêché la formation de caillots. Le niveau de frustration
parmi les infirmières était élevé et la suggestion des radiologues,
soit l’irrigation quotidienne, n’était pas réaliste. L’infirmière
gestionnaire et l’infirmière en chef ont donc recommandé de
n’utiliser que la sonde de type B chez les patients en oncologie,
malgré le coût plus élevé que cela représentait pour le programme
d’oncologie. Tous les intervenants ont accepté cette
recommandation et les infirmières étaient très satisfaites. La
pratique continue à ce jour, et on consulte les infirmières pour tous
les changements de dispositifs d’accès vasculaire et pour toutes les
questions s’y rapportant.
L’avenir de l’amélioration de la qualité
Les infirmières doivent fournir des soins basés sur des données
probantes afin de répondre aux exigences de leurs ordres
professionnels. Wallin, Bostrom, Wilkblad et Ewald (2003) ont
observé que la viabilité des changements au sein de la pratique
clinique favorise les soins infirmiers basés sur des données
probantes. Les infirmières qui continuent de participer à des
travaux d’AQ affirment qu’elles lisent attentivement les rapports de
recherche. Elles participent également à des activités liées à la
recherche et elles appliquent les résultats de la recherche dans leur
pratique. La viabilité dans les travaux d’AQ est liée de près à
l’existence d’un leadership fondé sur le soutien, à des ressources
humaines propices à la facilitation, à la recherche active de
résultats de recherche et à l’implantation de ces résultats.
La réussite du processus d’AQ dépend ultimement de la volonté
des professionnels de veiller au respect de normes en matière de soins
dans leurs interactions avec les patients et leur famille. Les cadres
administratifs doivent promouvoir une culture d’amélioration de la
qualité au niveau des processus et des soins, mais les infirmières
peuvent également faire preuve de leadership en intégrant les résultats
de recherche et les nouvelles idées dans leur pratique au moyen d’une
approche d’AQ.
L’AQ est l’examen systématique des processus, des variations et
des systèmes dans le but d’opérer des améliorations. Le processus
de changement et d’amélioration peut se faire de diverses façons et
plusieurs hôpitaux, établissements et organismes utilisent le cycle
PEEA afin d’engager le changement. Bien que l’AQ soit souvent
perçue comme faisant partie des tâches de la direction ou du
département d’assurance de la qualité, elle relève cependant de la
responsabilité de tous. Elle peut être menée par un seul individu qui
déclare une erreur et fait enquête, par une équipe d’infirmières qui
intègre de nouveaux résultats de recherche dans ses interventions
ou par un établissement qui suit les recommandations d’un
organisme directeur. Plus que tout, l’AQ requiert le courage
d’examiner nos processus et pratiques de plus près. Examinons-les
de près et non de loin.
“Vu de loin, nous avons chacun tout ce qu’il nous faut
et personne n’est dans le besoin,
Il n’y a ni canons, ni bombes, ni maladie,
personne ne meurt de faim
Vu de loin, nous sommes les instruments
marchant en harmonie au sein d’un même orchestre,
Jouant des chansons d’espoir,
Jouant des chansons de paix,
C’est la voix de chaque être humain.”
(Julie Gold; traduction libre)
doi:10.5737/1181912x143164167