III – BULLETIN DE L’ASSOCIATION BUREAU NATIONAL 9 février 2013

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III – BULLETIN DE L’ASSOCIATION
BUREAU NATIONAL
9 février 2013
Rédaction du compte rendu : Gérard SCHMITT.
Présents : Édouard Aujaleu, Philippe Blanc, Stéphane Clerjaud, Charles Coutel,
Éric Delassus, Henri Dilberman, Frédéric Dupin, Bernard Fischer, Nicolas Franck,
Bertrand Nouailles, Simon Perrier, Marie Perret, Gérard Schmitt, André Simha,
Patricia Verdeau.
Excusés : Jean-Pierre Carlet, Jean Lefranc.
OUVERTURE DE LA SÉANCE
L’ordre du jour adressé aux membres du Bureau était ainsi libellé :
1. Élections aux fonctions statutaires.
2. Les épreuves des séries technologiques ; informations et perspectives.
3. La création d’Écoles supérieures du professorat. La place de la philosophie. Les
concours.
4. L’enseignement d’une morale laïque.
5. Questions diverses :
– Proposition de la Régionale de Lyon.
– Une page Facebook APPEP ?
– Journée de l’APPEP.
– Le site et la mise en ligne d’articles.
– L’état des expérimentations en seconde et première : l’absence de bilan
critique.
– Propositions pour la revue ou le site.
S. Perrier ouvre la séance en souhaitant la bienvenue aux nouveaux membres du
Bureau. Il propose qu’avant de procéder aux élections, on attende un peu afin qu’il y
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ait le maximum de présents. On commencera donc par une brève communication sur
l’état de la trésorerie. Après avoir fait le point sur les adhésions, B. Fischer fait
observer que les intérêts produits par les fonds communs de placement de La Poste
ont été de 165 euros, alors que les parts sociales B du Crédit mutuel ont rapporté
934 euros. C’est pourquoi il soumet au Bureau la proposition de transférer au Crédit
mutuel la plus grande part de ce qui restait placé à La Poste. S. Perrier met cette
proposition au vote. Elle est admise à l’unanimité des membres présents.
I. ÉLECTIONS AUX FONCTIONS STATUTAIRES
Élection du président
On décide de passer aux élections aux fonctions statutaires. S. Perrier considère
qu’il faudra éviter à l’avenir qu’elles aient lieu aussi tard et par conséquent les placer
aussitôt après l’Assemblée générale. Il annonce qu’il accepte de continuer à exercer la
présidence de l’Association et qu’il est donc candidat pour cette fonction. Personne
d’autre ne se présente.
On vote. S. Perrier est élu avec les 15 voix des 15 membres présents.
Élection des vice-présidents
Il y a trois candidats pour les trois postes de vice-présidents.
– N. Franck entend continuer à prendre en charge les relations avec
l’Enseignement supérieur ;
– Ph. Blanc se propose pour cette année encore, mais envisage de passer la main
ensuite, à cause de la charge de travail que représente la responsabilité de la
Conférence 1. Il reconnaît toutefois qu’au cours de l’année qui vient de s’écouler il a
été moins pris que par le passé du fait que le Ministère n’a pas reçu la Conférence et
n’a pas répondu à ses courriers. S. Perrier, qui confirme ce qui vient d’être dit, impute
ce manque de réaction du Ministère aux difficultés qu’il a rencontrées sur la question
des rythmes scolaires et estime qu’il n’y a sans doute pas lieu de dramatiser.
– M. Perret est également candidate afin d’assurer les relations avec les
Régionales. Elle précise qu’elle souhaite la mise en place d’une liste de discussion
ouverte aux responsables des Régionales, qui leur permettrait de faire des suggestions
au Bureau national. Cette suggestion suscite quelques interrogations. D’abord, quant
à son utilité : puisqu’il y a déjà « appepliste », pourquoi serait-il besoin d’une autre
liste plus restreinte ? Ensuite, quant à sa conformité aux statuts : ne risque-t-elle pas
de conduire plus ou moins insidieusement à la mise en place d’un palier intermédiaire
de pouvoir, ce qui changerait la nature de notre association ? M. Perret répond que ce
n’est pas du tout ainsi qu’elle voit les choses. On se propose donc d’en discuter un peu
plus tard et si possible en fin de réunion, étant donné que l’ordre du jour est déjà
particulièrement chargé.
On passe donc au vote. Les résultats sont les suivants : Ph. Blanc, N. Franck et
M. Perret obtiennent 14 voix sur 15. H. Dilberman qui n’était pas candidat – et tient à
le rappeler – obtient une voix.
Élection du trésorier
B. Fischer est candidat cette année encore pour exercer la fonction de trésorier
parce qu’il n’y en a pas d’autre.
Il est élu à l’unanimité des présents (15 voix sur 15).
1. La Conférence des présidents d’associations de professeurs spécialistes.
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Élection des secrétaires
Pour l’élection des secrétaires, les candidatures sont les suivantes :
– Henri Dilberman, comme secrétaire général ;
– S. Clerjaud, comme secrétaire général adjoint ;
– G. Schmitt, comme secrétaire de rédaction de la revue.
Tous trois sont élus avec 15 voix sur 15.
H. Dilberman continuera à se charger du dossier de la formation des maîtres.
II. LES ÉPREUVES DES SÉRIES TECHNOLOGIQUES. INFORMATIONS ET PERSPECTIVES
Le groupe de travail sur les épreuves des séries technologiques
Comme cela a été exposé dans les comptes rendus de la réunion du Bureau
national 22 septembre et de l’Assemblée générale du 24 novembre 2, un groupe de
travail chargé de « réfléchir aux évolutions de l’épreuve de philosophie au
baccalauréat technologique » a été constitué par l’Inspection générale et s’est réuni le
10 octobre 2012. À la suite de cette réunion, S. Perrier a reçu un certain nombre de
fichiers faisant état de vives discussions à l’intérieur du groupe de travail et plus
précisément au sein de l’Inspection. Il n’a pas du tout apprécié la manière indirecte et
pour tout dire obscure dont ils lui sont parvenus, puisqu’ils ne lui ont pas été adressés
en tant que Président de l’Association. Néanmoins, il ne peut pas faire comme s’il ne
les avait pas reçus ; il lui faut bien en parler au Bureau qui aura à se prononcer sur le
fond, à savoir sur les seules épreuves des séries technologiques, et en toute
indépendance, c’est-à-dire sans se laisser influencer.
M. Perret procède à un bref rappel de la chronologie des événements. Lors de la
première – et de la seule – réunion du groupe de travail, un clivage est apparu parmi
les Inspecteurs généraux, qui portait sur le mode opératoire. Le Doyen, qui
manifestement ne s’y attendait pas, a fait alors machine arrière et a demandé à deux
IPR de proposer des maquettes. Elle n’a reçu depuis aucune nouvelle. La réunion
prévue pour le 3 décembre a été annulée sans explication et le Doyen botte en touche
dès qu’une demande lui est adressée à ce sujet.
A. Simha rappelle que jusqu’à une époque assez récente, le groupe philosophie de
l’Inspection était coordonné par le Doyen sans qu’il y ait de rapports hiérarchiques entre
ses membres. L’administration a toujours voulu changer cela, mais elle n’a pu produire
aucun texte qui permettait de le faire. Certes, dans les autres disciplines, le Doyen pouvait
donner des ordres aux IPR, mais en philosophie, cela ne se faisait pas. Selon A. Simha, ce
qui se passe depuis quelques années dans l’Inspection n’est pas sans conséquences sur
notre association, car il y avait une confiance en celle-ci qui était congruente avec celle
qu’on avait en celle-là. Désormais, il s’agit pour nous, estime-t-il, de faire des propositions
sans tenir compte de ce que l’on peut apprendre au sujet de l’Inspection.
Ch. Coutel juge particulièrement regrettables ces clivages au sein de l’Inspection.
Tout en reconnaissant qu’ils ne sont pas nouveaux, notamment en ce qui concerne les
classes technologiques, il craint que, sous couvert d’innovations, on aille dans le sens
du pédagogisme.
Les positions que nous devons faire valoir
Une discussion s’engage. Des questions sont soulevées. Est-ce qu’on ne cherche
pas au fond à sauver les apparences en bricolant un peu les épreuves ? Est-ce qu’il n’y
2. Cf. L’Enseignement philosophique, 63 e année, n° 1 (septembre-novembre 2012), p. 84-85, et n° 3
(décembre 2012-février 2013), p. 102-107.
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a pas derrière tout cela comme un mépris des séries technologiques ? Quoi qu’il en
soit, nous n’avons pas à entrer dans ces dissensions à propos desquelles nous avons
été pris à témoin. Et nous devons faire valoir clairement ce que nous voulons, à savoir
qu’il y ait une consultation des professeurs de philosophie – une vraie consultation et
non pas une simple mise à disposition des maquettes sur Éduscol – et que soient
rétablis les dédoublements qui sont une condition tout à fait essentielle de
l’enseignement philosophique dans ces séries.
Il est également proposé que l’APPEP demande que des inspections aient lieu plus
systématiquement dans ces séries. Mais cette proposition suscite certaines réserves.
On observe que beaucoup de collègues ne souhaitent pas être inspectés dans ces
classes parce qu’ils ne sont pas sûrs de pouvoir maîtriser la situation ce jour-là. Il est
vrai que dans ces séries nous travaillons avec des élèves qui peuvent être difficiles,
qui, par exemple, se déplacent pendant les cours, comme ils le font d’ailleurs dans les
autres disciplines. C’est là une réalité, et nous ne devons pas avoir honte de ce que
nous faisons dans ces classes. En effet, ajoute A. Simha, il est important que les
inspecteurs puissent prendre la mesure des difficultés que rencontrent les professeurs
dans leur travail ; les inspections représentent aussi pour eux des moments de vérité.
Mais, est-il objecté, le problème est qu’il ne s’agit pas seulement pour l’inspecteur
de prendre connaissance de ce qui se fait, mais aussi d’évaluer les enseignants, et on
comprend d’autant plus les réticences de ceux-ci que les inspecteurs ont largement
contribué à les nourrir en donnant l’impression de privilégier un certain type
d’enseignement. Or, il y a de nombreuses manières de faire de la philosophie dans ces
classes et il faudrait que l’Inspection puisse l’admettre.
M. Perret considère qu’on est en train de dériver et rappelle que la question
essentielle est de savoir quelle position nous allons défendre en ce qui concerne les
intitulés des sujets. Il nous faut d’abord dire ce dont nous ne voulons pas : en
l’occurrence, ce qui pourrait être une « dissertation guidée ». Ensuite, on peut
envisager de donner des conseils de méthode pour la dissertation et d’inverser l’ordre
des questions pour l’explication de texte, notamment en ce qui concerne la première
et la troisième questions ; cela pourrait aider les candidats. Et enfin, il faut dire
clairement que nous tenons absolument aux dédoublements.
On convient qu’il faudra s’adresser au Doyen de notre Inspection générale pour
savoir ce qu’il en est des dédoublements et ce qu’il advient du groupe de travail. Plus
précisément, nous devrons insister sur ce point tout à fait capital que l’aménagement
des épreuves est lié aux dédoublements, que ceux-ci en sont la condition, qu’il n’y a
pas de sens à vouloir modifier les épreuves s’il n’est pas possible de travailler en
effectifs dédoublés. Il s’agira d’être très ferme là-dessus, car, comme il est quasiment
certain que le groupe de travail ne sera plus réuni, il est à craindre que le Doyen
décide de lui-même de proposer à la consultation la maquette qui a ses préférences.
Nous serions alors bel et bien piégés.
Des questions sont posées. Faut-il insister pour que le groupe de travail se
réunisse de nouveau, comme prévu ? Ne pourrait-on pas adresser une lettre à la
DGESCO pour bien faire savoir ce que nous voulons ? Ne serait-il pas préférable de
s’adresser d’abord au Doyen de notre Inspection générale ? On peut penser en effet
que c’est à cause des dissensions qui se sont manifestées au sein de l’Inspection que la
décision a été prise de ne plus réunir le groupe de travail.
Sur la question des dédoublements, B. Nouailles apporte une information. La
Régionale d’Auvergne a pris l’initiative d’écrire à tous les proviseurs de l’Académie
pour leur dire la nécessité des dédoublements en philosophie, en particulier dans les
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classes techniques, au moment où se décident les DGH et où ont lieu les négociations.
Mais leur IPR a estimé que cette démarche risquait d’être contre-productive. En
revanche, le Bureau salue cette heureuse initiative que plusieurs Régionales ont suivie.
III. LA CRÉATION D’ÉCOLES SUPÉRIEURES DU PROFESSORAT. LA PLACE DE LA
PHILOSOPHIE. LES CONCOURS
La situation dans les ex-IUFM
Où en sommes-nous en ce qui concerne les Écoles supérieures du professorat et
de l’éducation (ESPÉ) ? Il y a de quoi être embarrassé selon H. Dilberman qui
explique que le directeur de son IUFM, celui de Poitiers, ne sait pas lui-même
comment les choses se passeront l’année prochaine dans son établissement. Il a vu les
maquettes qui lui ont semblé fort abstraites. Il apparaît que le recrutement des
professeurs ne dépendra pas seulement du concours, mais sera aussi conditionné par
l’obtention du master. Il y a réellement de quoi s’inquiéter. Selon le ministre, les ESPÉ
seront les relais des rectorats – donc du Ministère ; mais qu’en sera-t-il alors de la
recherche ? Et s’il est envisagé d’y promouvoir une réflexion sur l’épistémologie, on
n’est toujours pas disposé à laisser un peu de place aux philosophes. Il n’est pas prévu
qu’il y ait de nouvelles nominations dans les ESPÉ. Bref, nous avons, estime
H. Dilberman, bien des raisons de désESPÉrer (sic).
P. Verdeau intervient pour compléter ce qui vient d’être dit. On se trouve en effet
actuellement dans une grande indétermination, en sorte que les maquettes des
masters devront être faites dans la précipitation. À Toulouse, on considère que les
ESPÉ seront à repenser en fonction des PRES (Pôles de recherche et d’enseignement
supérieur). Quels seront alors leurs rapports avec l’Université ? Intégration ou
autonomie ? La question n’est pas réglée.
Il faudrait aussi savoir ce que souhaitent les étudiants pour leur préparation à
l’épreuve de didactique : est-ce un stage en responsabilité d’un mois ou un stage sous
la forme d’un tiers-temps en deuxième année de master ? P. Verdeau a en outre
l’impression qu’on est en train de revoir les compétences des professeurs, surtout la
première : « Agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable ». Il
devrait y avoir du changement de ce côté-là.
Ch. Coutel évoque la situation de l’IUFM Artois-Nord-Pas de Calais, qu’il connaît
bien puisqu’il est membre de son Conseil scientifique. Selon lui, on se trouve dans la
pire confusion, personne ne sachant au juste où l’on va. On ne sait trop ce qu’il
adviendra des formateurs permanents ; de là la « lèche pédagogiste » qu’évoque
Catherine Kintzler. Quant au statut de la recherche, il est en effet très flou, et on ne
saurait attendre grand-chose d’un PRES, qui n’est rien d’autre, en fait, qu’une tête de
réseau et qui n’a pas vocation à délivrer des grades. En conclusion, Ch. Coutel propose
que l’on demande un moratoire pour que cesse cette fuite en avant à laquelle on assiste.
F. Dupin indique que la Conférence des Directeurs d’IUFM s’est réunie à l’IUFM
de Paris et qu’il se confirme que nous sommes dans un grand n’importe quoi. À
l’évidence nous avons affaire à une des réformes les moins préparées qu’on ait jamais
vues. Il estime cependant que le moratoire n’est pas envisageable à cause du
calendrier des examens. L’exigence légitime des étudiants nous oblige à mettre en
place les formations. Même indétermination quant aux statuts : on ne sait pas ce qu’il
en sera des enseignants de l’IUFM, s’ils continueront d’assurer la formation des
enseignants. Cette réforme doit se faire dans le cadre des universités, lesquelles
prendront pleinement en charge la formation des enseignants. Ce sont des
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universitaires qui vont donc préparer aux concours et assurer la formation
professionnelle, de même qu’ils s’annexeront la recherche en didactique des
disciplines, car le projet de faire des ESPÉ des lieux de recherche en sociologie de
l’éducation est quasiment abandonné. Il ne va donc rester aux IUFM que
l’organisation et l’accompagnement des stages et les enseignants qui, par leur statut,
relèvent du second degré n’y auront plus leur place. F. Dupin explique qu’il a essayé
de faire valoir cette idée que la philosophie devra défendre sa position avec la
sociologie et les sciences de l’éducation.
H. Dilberman constate que la situation de Paris est très différente de celle de
Poitiers où les enseignants de philosophie de l’IUFM n’avaient guère affaire aux
étudiants qui préparaient les concours en philosophie 3 ou aux professeurs stagiaires
qui étaient pris en charge par le département de philosophie de l’Université et où ce
sont des universitaires qui se chargent de la sociologie de l’éducation. En revanche à
l’IUFM de Toulouse, l’avenir de la recherche en didactique est moins compromis.
Celle-ci s’y trouve en effet, comme l’explique P. Verdeau, fortement enracinée et il
sera moins aisé de la déboulonner.
Discussion sur les conséquences de la réforme en cours
Ch. Coutel ne comprend pas pourquoi F. Dupin refuse que nous proposions un
moratoire pour cette réforme qui est inapplicable en l’état. Pour lui, l’argument de
l’angoisse des étudiants ne tient pas, car c’est précisément sur cette angoisse des
étudiants que tablent ceux qui imposent les réformes pour mieux parvenir à leurs
fins, à savoir dégrader encore plus les conditions de travail et soumettre au
pédagogisme ces étudiants qu’ils utilisent un peu comme des boucliers humains.
F. Dupin lui répond qu’en fait il y aura beaucoup de gens pour soutenir cette
réforme, qu’elle bénéficiera du soutien des universités et aussi des rectorats qui feront
appel à elles pour la formation continue des enseignants. Il ne voit pas comment un
moratoire pourrait être imposé, parce qu’il ne voit pas qui dans cette affaire aurait
vraiment quelque chose à perdre. Il propose qu’en revanche nous nous attachions à
cette question : que pouvons-nous dire, en tant qu’association de professeurs de
philosophie sur la formation des enseignants ?
S. Perrier répond que nous allons avoir à y répondre clairement dans l’immédiat.
À la lecture de la maquette des concours, nous constatons que la formation
disciplinaire n’ira pas au-delà de la licence. F. Dupin ajoute que cela va entraîner une
rupture très préjudiciable à notre discipline entre les enseignants du secondaire et les
enseignants du supérieur.
Que va-t-il rester pour les ESPÉ ? Se fondant sur la situation de Strasbourg,
S. Clerjaud pense qu’il leur est possible de récupérer la didactique. Dans l’Académie
de Strasbourg, elle est assurée depuis de longues années par des collègues enseignant
en lycée. Ce système lui paraît nettement préférable. Il juge en revanche qu’il serait
très inquiétant que ce soient les logiques de l’ex-IUFM qui s’imposent. Il relève en
outre que, d’après la maquette qui vient d’être rendue publique, le concours ne
viendra plus parachever en quelque sorte la formation universitaire, mais interviendra
en cours de formation. Il s’agit de savoir qui va assurer la suite de cette formation. Si
ce sont les ESPÉ, nous aurons en fait un retour aux IUFM et il y a de quoi s’inquiéter.
Mais F. Dupin n’est pas d’accord avec cette idée d’un retour des IUFM, car ceux-ci ont
été purgés avec la liquidation des stages. Pour lui, ce sont bien plutôt les universitaires qui
3. En revanche, ils avaient affaire à la plupart des candidats dans les autres disciplines.
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vont se charger de la suite de la formation. S. Clerjaud persiste à penser qu’à Strasbourg
tout au moins ce risque n’existe pas. H. Dilberman estime que cette réforme aura au moins
pour avantage d’uniformiser les situations au niveau national.
La question des concours
N. Franck observe que, du fait de l’importance accordée aux épreuves orales,
lesquelles compteront pour les deux tiers dans le résultat final, il y a un risque sérieux
que ce soit l’idéologie professionnelle bien davantage que la maîtrise disciplinaire qui
détermine la réussite au concours. P. Verdeau apporte une note rassurante : on peut
penser ou espérer que, dans notre discipline au moins, les jurys vont réagir et faire en
sorte que la philosophie puisse retrouver ses droits, comme ils l’ont fait avec l’épreuve
sur la compétence « Agir en fonctionnaire de l’État » qu’ils ont transformée en
épreuve de réflexion philosophique.
Qu’en sera-t-il de l’agrégation ? demande M. Perret. N’est-elle pas appelée à
devenir un concours de promotion interne ? Cela est évidemment à craindre.
G. Schmitt rappelle la position de Claude Allègre, que beaucoup partageaient au
ministère et dans un certain syndicat, à savoir que pour le même travail on ne peut
pas avoir deux catégories de personnel avec des obligations de service et des salaires
différents. S. Perrier soulève la question du contenu des épreuves. Qui va en décider ?
Qu’en sera-t-il du référentiel de compétences ?
A. Simha fait remarquer que le mot de métier revient en force. On entend
appliquer à chaque discipline la même conception du métier. « Métier » est bien ici un
terme polémique. Au lieu de partir des exigences d’enseignement dans les diverses
disciplines, on impose une certaine conception de l’enseignement. Pour F. Dupin, c’est
cette même logique qui est à l’œuvre au sujet des rythmes scolaires. Il considère que
la rhétorique de la professionnalisation est notre pire ennemi, et non, comme le
disent certains, le pédagogisme.
S. Perrier relève en effet qu’une des épreuves orales concerne les « gestes
professionnels ». On a là un des aspects de la professionnalisation telle qu’elle est
envisagée. S’agit-il d’imposer des gestes qui soient communs à tous les
enseignements ? Il annonce qu’il consacrera à cette question un éditorial de la revue.
IV. L’ENSEIGNEMENT D’UNE MORALE LAÏQUE
L’Association contactée par des journalistes d’Europe 1
S. Perrier rapporte que N. Franck et lui-même ont été contactés par des
journalistes d’Europe 1 qui voulaient avoir leur avis sur l’enseignement de morale
laïque annoncé par le ministre Vincent Peillon. On pourra pour de plus amples
informations se reporter au site de la station de radio où ce nouvel enseignement,
qualifié de « matière inflammable », est présenté comme « un mélange de quatre
matières, le français, la philo, l’histoire-géo et les sciences naturelles, avec un mot-clé,
l’impartialité, dont le professeur devra être le garant » et où N. Franck, qui est cité à
plusieurs reprises, se trouve très bizarrement dénommé Simon Ruben, mais reste
néanmoins correctement qualifié de vice-président de l’Association des professeurs de
philosophie de l’enseignement public 4. On pourra y lire qu’il s’est interrogé sur le
4. Cf. « La morale laïque, une matière inflammable », par Fabien Cazeaux et Gaëtan Supertino, 23 janvier
2013 : http://www.europe1.fr/Politique/La-morale-laique-une-matiere-inflammable-1389583/
Voir aussi : « L’École de demain débattue à l’Assemblée », par Sophie Amsili, 11 mars 2013 : http://
www.europe1.fr/France/L-ecole-de-demain-debattue-a-l-Assemblee-1443467/?google_editors_picks=true
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contenu d’un tel enseignement – « Comment un cours de morale laïque pourrait-il ne
pas se transformer en une sorte de prêche, ne pas devenir dogmatique ? » – et qu’il a
rappelé quel était le rôle d’un professeur de philosophie : « mon rôle n’est pas de
distinguer le bien et le mal ; le rôle d’un professeur, c’est de donner à un élève l’accès
au savoir ».
Dans le même esprit, S. Perrier a repris ce qu’il avait exposé dans l’éditorial du
numéro de septembre-novembre 2012 de L’Enseignement philosophique – « Enseigner
une morale laïque ? » –, à savoir qu’il ne s’agit pas « d’enseigner pour elles-mêmes des
« valeurs » comme si elles étaient indépendantes du reste de notre identité, comme
une part de soi en charge d’en réguler une autre qui lui serait étrangère », qu’« un
enseignement séparé de morale, à part des disciplines, consacrerait une conception
de la morale et de l’école qui conduirait fatalement à son échec » 5, que la laïcité est
ainsi indissociable de la démarche même d’enseignement et que c’est donc à partir de
tous les cours qui sont dispensés et par lesquels sont enseignés des savoirs qu’elle se
comprend. À propos de la commission nommée par le ministre pour réfléchir sur
l’enseignement de la morale laïque, il s’est montré prudent et a dit qu’il ne savait
évidemment pas ce qu’elle voudrait faire. Il indique qu’il a adressé son éditorial à
cette commission.
Discussion sur l’intérêt d’un tel enseignement de « morale laïque »
Une discussion s’engage dont nous ne retenons ici que les très grandes lignes,
sans pouvoir faire état de la finesse des analyses ou de la subtilité des arguments.
H. Dilberman ne voit pas en quoi il y aurait là un enseignement de morale et se
demande si on n’a pas affaire à une nouvelle version de l’enseignement du fait
religieux. F. Dupin trouve que Vincent Peillon avait été plus clair dans son ouvrage
sur Ferdinand Buisson 6 et il évoque le désaccord entre Vincent Peillon et Jean
Baubérot. Pour M. Perret, l’idée même de morale laïque n’a pas de sens : il n’y a pas
plus de morale laïque que de doctrine laïque. Elle considère qu’on ne saurait donner à
une telle morale un contenu spécifique, mais que ce n’est sans doute pas l’avis du
ministre pour qui il y a une foi laïque. Cependant, H. Dilberman se dit plutôt d’accord
avec Vincent Peillon : si la laïcité n’est pas en elle-même une valeur, elle n’est tout de
même pas neutre, car elle est orientée vers le rationalisme.
Il s’agit bien, explique P. Verdeau, de faire valoir un point de vue laïque y
compris sur ce qui relève des religions, et ainsi, quand on cite le Coran, par exemple,
de passer d’une laïcité de signes à une laïcité de textes. On doit pouvoir lire un extrait
du Coran sans être pour autant accusé de profanation.
F. Dupin revient sur l’expression de morale laïque : ce qui frappe de nullité une
telle expression, c’est qu’elle relève de la politique. Vincent Peillon entend
promouvoir une religion civile ; il considère qu’une morale doit être enseignée à
l’école qui n’est pas telle ou telle morale mais la « morale commune ». Mais il n’est
pas sûr aujourd’hui, quand on voit ce qui se passe, qu’on puisse s’entendre à son sujet.
N’y a-t-il pas, ajoute M. Perret, un risque de relativisation ? On mettrait sur un même
plan diverses morales, chrétienne, musulmane, etc. ; on s’interrogerait sur la morale à
partir de diverses morales ; mais, du coup, la morale laïque pourrait apparaître
comme une morale parmi d’autres. Quelle sera au juste cette morale ? demande
E. Aujaleu. Un kantisme mou ? un relativisme ?
5. L’Enseignement philosophique, 63e année, numéro 1, septembre-novembre 2012, p. 2.
6. Vincent Peillon, Une religion pour la République : la foi laïque de Ferdinand Buisson, collection « La Librairie
du XXIe siècle », Éditions du Seuil, 2010.
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Le problème, souligne H. Dilberman, c’est que la morale laïque, c’est d’abord la
morale ; mais comme ce ne peut être une morale religieuse, on dit que ce sera la
morale laïque. En fait, explique A. Simha, dès qu’on essaie de donner un contenu à
cette idée, on s’aperçoit qu’on est dans la confusion. On a affaire à un bricolage
idéologique qui vient de ce qu’un certain nombre de références ont été oubliées : c’est
le cas quand on considère que la laïcité, c’est le vivre-ensemble, comme cela s’écrit
malheureusement souvent, alors qu’il s’agit d’un principe d’action qui fait de la raison
la seule autorité. Il n’y a pas de réminiscence de ce qu’est la République…
V. QUESTIONS DIVERSES
L’aménagement du site de l’Association
Le peu de temps qui reste avant qu’il nous faille libérer la salle mise à notre
disposition par le Lycée Henri IV nous oblige à remettre à plus tard la plupart des
questions diverses qui avaient été prévues dans l’ordre du jour particulièrement
chargé de notre réunion. On décide d’évoquer rapidement les travaux qui doivent
encore être effectués sur le site Internet de l’Association.
Pour que ce site soit achevé, il convient en effet de le doter d’une charte
graphique et d’un logo. M. Perret dispose d’un devis qui s’élève à 1 100 euros.
S. Clerjaud se propose de demander de son côté un autre devis.
En raison du nombre relativement important d’absents, S. Perrier annonce qu’il
enverra par courrier électronique à tous les membres du Bureau les propositions qui
ont été faites de façon à ce que chacun puisse donner son avis.
La mise en ligne de numéros plus anciens de la Revue
En ce qui concerne les articles de la revue à mettre en ligne, G. Schmitt annonce
qu’il va placer très prochainement sur un site dont il dispose un dossier contenant les
numéros allant de 60/2 (novembre-décembre 2009) à 58/6 (juillet-août 2008) 7. Pour
les numéros antérieurs, comme il n’a pas en sa possession tous les fichiers établis
après délivrance du bon à tirer, il fera appel à la société ETS qui assure la
photocomposition de la revue et qui a gracieusement proposé de les lui fournir.
Reprise de la discussion sur la proposition d’une liste de discussion
On revient très rapidement, mais avec un effectif plus clairsemé, à la discussion
qui avait dû être interrompue au sujet de la création d’une liste associant aux
membres du Bureau national les responsables des Régionales. M. Perret s’explique sur
ce qu’elle en attend. Il s’agit essentiellement de créer un espace de discussion
permettant une meilleure participation des Régionales – ce qui était d’ailleurs l’objet
d’« appepliste » à l’origine – et correspondant statutairement au Comité national. Il ne
semble donc pas qu’il y ait d’obstacles à la création d’une telle liste.
La séance est levée un peu après 17 heures.
7. C’est chose faite.
L’enseignement philosophique – 63 année – Numéro 3
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