En 636, le consul Q. Marcius Rex fonda la colonie de Narbo Marcius, qui donna
son nom à la Province romaine appelée Narbonnaise1.
Le mouvement qui avait longtemps poussé vers le midi les peuples du nord
s’était ralenti depuis plusieurs siècles ; mais, au septième siècle de la fondation
de Rome, il semble recommencer avec plus d’intensité. Les Cimbres et les
Teutons2, après avoir ravagé le Norique et l’Illyrie, et défait l’armée de Papirius
Carbon envoyée pour couvrir l’Italie (641), avaient traversé la Rhétie, et, par la
vallée du Rhin, pénétré chez les Helvètes. Ils entraînèrent avec eux une partie de
ce peuple, se répandirent dans la Gaule et y portèrent, durant plusieurs années,
la terreur et la désolation. Les Belges seuls leur résistèrent vigoureusement.
Rome, pour protéger sa Province, fit marcher, soit contre eux, soit contre les
peuplades helvètes, leurs alliées, cinq généraux qui furent successivement
vaincus : le consul M. Junius Silanus, en 645 ; M. Aurelius Scaurus, en 646 ; L.
Cassius Longinus, en 6473 ; enfin, clans l’année 646, le proconsul Q. Servilius
Cæpion4 et Cn. Manlius Maximus. Ces deux derniers perdirent chacun leur
armée5. L’existence de Rome était menacée. Marius, par les victoires remportées
à Aix sur les Teutons (652), et aux champs Raudiens, non loin de l’Adige, sur les
Cimbres (653), détruisit les barbares et sauva l’Italie.
Les anciens confondaient souvent les Gaulois avec les Cimbres et les Teutons ;
issus d’une même origine, ces peuples formaient comme l’arrière-garde de la
grande armée d’invasion qui, à une époque inconnue, avait amené des bords de
la mer Noire les Celtes dans les Gaules. Salluste6 attribue aux Gaulois les
défaites de Q. Cæpion et de Cn. Manlius, et Cicéron7 désigné sons le même nom
les barbares que détruisit Marius. C’est qu’en effet tous les peuples du Nord
étaient prêts sans cesse à se réunit dans le même effort, lorsqu’il s’agissait de se
précipiter vers le midi de l’Europe.
De 653 à 684, les Romains, occupés de guerres intestines, ne songèrent pas à
augmenter leur puissance au delà des Alpes, et lorsque la paix intérieure fut
rétablie, les généraux tels que Sylla, Metellus Creticus, Lucullus, Pompée,
préférèrent les conquêtes faciles et lucratives de l’Orient. Les peuples vaincus
étaient abandonnés par le sénat aux exactions des gouverneurs, ce qui explique
la facilité avec laquelle les députés des Allobroges entrèrent, en 691, dans la
Conjuration de Catilina ; la crainte les engagea à dénoncer le complot, mais on
ne leur sut aucun gré de leurs révélations8 ; les Allobroges s’insurgèrent,
s’emparèrent de la ville de Vienne9, dévouée aux Romains, et surprirent, en 693,
Manlius Lentinus, lieutenant de C. Pomptinus, gouverneur de la Narbonnaise.
Cependant, quelque temps après, celui-ci les battit et les soumit définitivement.
Jusqu’à l’époque de César, dit Cicéron10, nos généraux s’étaient contentés de
1 Cicéron, Discours pour Fonteius, IV. - Eutrope, IV, 23. - Velleius Paterculus, I, 15 ; II, 8.
2 Strabon, VII, p. 243.
3 Cette victoire fut remportée par les Tigurins, peuplade de l’Helvétie, sur le territoire des
Allobroges. D’après l’Epitomé de Tite-Live, LXV, la bataille aurait eu lieu chez les Nitiobriges, peuple
habitant au nord de la Garonne, ce qui est peu probable.
4 Servilius avait pillé le temple de Toulouse.
5 Tite-Live, Epitomé, LXVII. - Tacite, Germanie, 37.
6 Jugurtha, 64.
7 Discours sur les provinces consulaires, 13.
8 Ibid.
9 Les fugitifs viennois allèrent fonder la ville qui plus tard prit le nom de Lugdunum, en un lieu
appelé Condate, nom synonyme de confluent. – Dion Cassius, XLVI, 50.
10 Discours sur les provinces consulaires, 13.