Lille, le 4 juin 2008
« Recherches en Sciences Humaines et Sociales et cancer »
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LE DEPISTAGE DES CANCERS : ENJEUX ET PERSPECTIVES
Guy LAUNOY
ERI 3 INSERM – CHU de Caen
Le principe du dépistage est lié à l’observation des cancers et repose sur l’espoir qu’on peut éviter de mourir
d’un cancer si on le révèle avant que les symptômes ne se manifestent. Dès lors que le dépistage s’adresse
à une large population, par définition asymptomatique, ses enjeux dépassent largement les murs des
cabinets médicaux.
I. Les enjeux du dépistage
1. Le point de vue des médecins
Les médecins ont tous croisé un certain nombre de patients souffrant d’un cancer et ainsi été confrontés à
l’insuffisance des propositions thérapeutiques. De ce fait, le principe du dépistage leur paraît forcément
enthousiasmant. L’implication des médecins se nourrit de leur activité quotidienne.
Cependant, le principe du dépistage met à mal la relation classique médecin – patient, dans le cadre de
laquelle le patient est souffrant et demandeur vis-à-vis du médecin. Ce dernier doit en effet s’adresser à des
personnes asymptomatiques et devient le sollicitateur, ce qui s’avère extrêmement déstructurant du rôle du
médecin par rapport au malade. En outre, pour rendre service à quelques rares personnes, le médecin doit
s’adresser à de très nombreuses autres personnes, auxquelles il n’apporte aucun secours. Par son principe
d’action, le dépistage bouleverse le rapport habituel entre un médecin et son patient.
Le médecin s’adresse aux malades soit directement, au sein de son cabinet, soit indirectement, dès lors qu’il
participe à une action de santé publique.
2. Le point de vue de la santé publique
En 2005, le réseau français des registres des cancers recensait 320 000 cas. Les 4 cancers les plus
fréquents (prostate, sein, colon-rectum, poumon), pour lesquels il existe des techniques de dépistage,
représentent 60 % des nouveaux cancers, soit 200 000 cas. En outre, ces cancers, notamment ceux du sein
et de la prostate, participent pour beaucoup à l’augmentation du risque de cancer, sachant par ailleurs qu’à
peu près la moitié de l’augmentation du nombre de cancers en France est due à l’évolution démographique
de la population française.
II. Le relatif intérêt du dépistage
1. Evaluer le dépistage
L’intérêt du dépistage ne peut être prouvé scientifiquement que dès lors qu’on dispose d’essais randomisés.
Ceux-ci consistent à proposer à un échantillon de population A des dépistages fréquents et à ne rien
proposer à un échantillon de population B. Au terme d’un délai de dix à quinze ans, on compare la mortalité