Le théorème du viriel
en physique quantique
Daniel FARQUET
Section de Physique
EPFL
Résumé
Le théorème du viriel de la mécanique quantique relie l’énergie ciné-
tique moyenne ainsi que l’énergie potentielle moyenne prise sur un état
propre du Hamiltonien. Il simplifie donc les calculs lorsqu’il est applicable.
Dans ce document, on établira tout d’abord le théorème du viriel tel qu’il est
usuellement énoncé. On s’intéressera ensuite à sa validité sur des combi-
naisons linéaires d’états propres du Hamiltonien. Deux cas distincts seront
considérés. On s’intéressera tout d’abord aux énergies propres dégénérées,
puis on traitera la cas particulier de l’oscillateur harmonique. Ce dernier
cas mènera à des conditions strictes sous lesquelles le théorème du viriel
est valide. On conclura sur quelques exemples.
Remerciements à Noé Cuneo
1
1 Préliminaire et théorème du viriel
Soit ˆ
Hle Hamiltonien d’un système. On note ˆ
T=ˆ
p2
2ml’opérateur d’éner-
gie cinétique et V(ˆ
x) le potentiel en fonction de la position. On utilisera la
notation |φnpour désigner un état propre d’énergie Endu Hamiltonien, i.e
tel que H|φn=En|φn. Enonçons deux lemmes qui seront très utiles par la
suite.
Lemme 1. La moyenne du commutateur [ˆ
H,ˆ
pˆ
x]prise sur un état propre du
Hamiltonien est nulle.
Démonstration.
φn|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φn〉=〈φn|ˆ
Hˆ
pˆ
x|φn〉−〈φn|ˆ
pˆ
xˆ
H|φn=Enφn|ˆ
pˆ
x|φn〉−〈φn|ˆ
pˆ
x|φnEn.
car ˆ
Hest un opérateur hermitien et agit indifféremment à gauche ou à
droite. Donc on trouve bien que φn|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φn=0.
Lemme 2. Si la moyenne du commutateur [ˆ
H,ˆ
pˆ
x]sur l’état |φest nulle, et
si le potentiel est une fonction homogène de degré k, alors
kV=2T(1)
où les moyennes sont prises sur l’état |φ.
Démonstration. Calculons le commutateur [ ˆ
H,ˆ
pˆ
x].
[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]=ˆ
Hˆ
pˆ
xˆ
pˆ
xˆ
H=ˆ
Hˆ
pˆ
xˆ
pˆ
Hˆ
x+ˆ
pˆ
Hˆ
xˆ
pˆ
xˆ
H=[ˆ
H,ˆ
p]ˆ
x+ˆ
p[ˆ
H,ˆ
x]
L’Hamiltonien ˆ
Hs’écrit ˆ
H=ˆ
p2
2m+V(ˆ
x). Ainsi,
[ˆ
H,ˆ
p]φ(x)=[V(ˆ
x),ˆ
p]φ(x)=iħV(x)
xφ(x)+iħ
xV(x)φ(x)=iħV0(x)φ(x).
Donc, on a trouvé que [ ˆ
H,ˆ
p]=iħV0(ˆ
x). On peut faire de même avec l’autre
commutateur.
[ˆ
H,ˆ
x]=·ˆ
p2
2m,ˆ
x¸=iħ
mˆ
p.
On peut ainsi écrire que [ ˆ
H,ˆ
pˆ
x]=iħˆ
xV 0(ˆ
x)iħˆ
p2
m.
On en conclut que ˆ
xV 0(ˆ
x)=ˆ
p2
m=2Tsur l’état |φ. Mais nous avions
supposé que le potentiel est une fonction homogène de degré k, i.e. V(αx)=
αkV(x). Le théorème d’Euler donne que xV 0(x)=kV (x). Finalement, on a
que
kV=2T.
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2
Remarquons que dans ce dernier lemme il n’est pas requis de travailler
sur un état propre du Hamiltonien, mais juste un état qui annule [ ˆ
H,ˆ
pˆ
x] en
moyenne. Combinons ces deux lemmes pour obtenir le théorème du viriel
tel qu’il est usuellement énoncé.
Théorème 1. (Viriel) Si l’on calcule les moyennes sur un état propre du
Hamiltonien, et si le potentiel est une fonction homogène de degré k, alors
kV=2T.
Démonstration. La preuve est triviale en utilisant les lemmes 1 et 2.
Comme nous traiterons le cas de l’oscillateur harmonique par la suite,
on énonce ici un un corollaire du théorème du viriel concernant l’oscillateur
harmonique.
Corollaire 1. Les valeurs moyennes de l’énergie cinétique et de l’énergie
potentielle prises sur un état propre du Hamiltonien dans le cas d’un oscil-
lateur harmonique sont égales.
Démonstration. Le potentiel s’écrit V(ˆ
x)=1
2mω2ˆ
x2, c’est donc une fonction
homogène de degré k=2.
Dans la suite, nous nous intéresserons systématiquement aux combi-
naisons linéaires d’états propres du Hamiltonien. Nous analyserons spé-
cifiquement deux cas. Le premier cas traite d’un Hamiltonien quelconque,
mais nous nous restreindrons aux sous-espaces d’énergie propre dégénérée.
On analysera ensuite en détail le cas de l’oscillateur harmonique que l’on
illustrera par des exemples.
2 Dégénérescence
Le théorème suivant montre que si les moyennes se calculent sur des
combinaisons linéaires d’états propres de même énergie, alors le théorème
du viriel reste valable.
Théorème 2. Soit Jun ensemble dénombrable, et soit {|φn:nJ}une
famille d’états propres du Hamiltonien. De plus, on suppose que les états |φn
admettent la même énergie propre, i.e. ˆ
H|φn〉 = E|φnavec nJet ER.
Posons |ψ〉 = PnJλn|φnλnC,nJ. Supposons finalement que le
potentiel est une fonction homogène de degré k. Alors, si les moyennes sont
prises sur l’état |ψ, on a
kV=2T.
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3
Démonstration. En utilisant le lemme 2, il suffit de voir que la moyenne
du commutateur [ ˆ
H,ˆ
pˆ
x] est nulle sur l’état |ψ. L’état |ψétant une combi-
naison linéaire d’états propres d’énergie E, c’est donc aussi un état propre
d’énergie E. Le lemme 1 permet de conclure.
On vient de prouver que lorsqu’un état propre du Hamiltonien est dégé-
néré et que l’on considère une base orthonormale du sous-espace dégénéré,
alors on peut appliquer le théorème du viriel à n’importe quel état exprimé
à l’aide d’une combinaison linéaire de cette base.
3 Oscillateur harmonique
Intéressons nous plus particulièrement au cas de l’oscillateur harmo-
nique. On a vu que le viriel était appliquable à un état propre du Hamilto-
nien et qu’il menait à V〉=〈T. On aimerait savoir comment se comporte
le théorème si l’on prend une combinaison linéaire des états propres de ˆ
H.
Il se trouve que deux cas distincts apparaissent. C’est le sujet du prochain
théorème.
Théorème 3. Soit un oscillateur harmonique de pulsation ω, i.e. ˆ
H=ˆ
p2
2m+
1
2mω2ˆ
x2. Soit Jun ensemble d’entiers naturels, et soit {|φn:nJ}une fa-
mille orthonormale d’états propres du Hamiltonien. Posons |ψ=PnJλn|φn
λnCnJ. Alors, si les moyennes sont prises sur l’état |ψ, on trouve
deux cas :
1. S’il n’existe aucun couple d’entiers (m,n)avec m,nJtel que m=n+2,
alors
V〉=〈T
2. S’il existe un couple d’entiers (m,n)avec m,nJtel que m=n+2,
alors on note A={lJ:l+2J}, et on a que
V〉=〈Tsi et seulement si X
lAp(l+2)(l+1)(λlλl+2+λlλl+2)=0.
Démonstration. En utilisant le lemme 2, il suffit de voir que la moyenne du
commutateur [ ˆ
H,ˆ
pˆ
x] est nulle dans l’état |ψ, car le potentiel est harmo-
nique de degré k=2. Dans ce cas, on aurait V〉=〈T. Montrons le pour une
combinaison linéaire de deux états.
Soit |φnet |φmavec m,nJ. On pose |φ=α|φn+β|φm, avec α,βC.
On a que
φ|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φ= ¯
αβφn|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φm+α¯
βφm|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φn,(2)
car il ne reste que les termes croisés les autres s’annulant comme tout à
l’heure. Analysons le deuxième terme de cette somme. On trouve que
α¯
βφm|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φn=α¯
β¡Emφm|ˆ
pˆ
x|φnEnφm|ˆ
pˆ
x|φn¢.
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4
De même, on développe le premier terme,
¯
αβφn|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φm= ¯
αβ(EnEm)φn|ˆ
pˆ
x|φm= ¯
αβ(EnEm)φm|ˆ
xˆ
p|φn.
Le commutateur s’écrit donc
φ|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φ=(EmEn)(α¯
βφm|ˆ
pˆ
x|φn¯
αβφm|ˆ
xˆ
p|φn).
Comme nous savons que En=ħω¡n+1
2¢, cette dernière relation devient
φ|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φ〉=ħω(mn)(α¯
βφm|ˆ
pˆ
x|φn¯
αβφm|ˆ
xˆ
p|φn).
On utilise maintenant le fait que ˆ
xˆ
p=ˆ
pˆ
x+iħet que les états sont orthonor-
maux pour arriver à
φ|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φ〉=ħω(mn)(α¯
βφm|ˆ
pˆ
x|φn¯
αβφm|ˆ
pˆ
x|φn).
Etant dans le cas d’un oscillateur harmonique, on peut expliciter l’opérateur
ˆ
pˆ
x, il s’écrit
ˆ
pˆ
x=iħ
2(ˆ
aˆ
a)( ˆ
a+ˆ
a)=iħ
2(( ˆ
a)2ˆ
a21).
On en tire les relations suivantes
φm|(ˆ
a)2|φn〉 = pn+1φm|ˆ
a|φn+1〉 = p(n+2)(n+1)φm|φn+2
φm|ˆ
a2|φn〉 = pnφm|ˆ
a|φn1〉 = pn(n1)φm|φn2.
En utilisant ces relations, on trouve que
φm|ˆ
pˆ
x|φn= iħ
2³p(n+2)(n+1)φm|φn+2+pn(n1)φm|φn2´.
A partir de cette relation, on peut réécrire le commutateur de départ
φ|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φ=
iħ2ω
2(mn)( ¯
αβ +α¯
β)¡p(n+2)(n+1)φm|φn+2+pn(n1)φm|φn2¢.
(3)
Si l’on se place dans le cas 1. du théorème, on voit clairement que la moyenne
de ce commutateur est nulle vu qu’il n’existe aucun couple (l,p) avec l,np
Jtel que l=p+2. Plaçons nous maintenant dans la deuxième partie et di-
sons, par exemple, que m=n+2 (le cas m=n2 mène au même résultat).
On a donc que φm|φn+2=1, φm|φn2=0 et mn=2, ce qui mène à
φ|[ˆ
H,ˆ
pˆ
x]|φ= iħ2ωp(n+2)(n+1)(α¯
β+¯
αβ).
Le commutateur s’annule, et donc V〉=〈T, si et seulement si
α¯
β+¯
αβ =0.
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