
La Lettre du Cancérologue • Vol. XXIII - n° 6 - juin 2014 | 209
Points forts
»La couverture du territoire français est réalisée par la combinaison du dépistage organisé et du dépis-
tage individuel du cancer du sein.
»La mammographie numérisée plein champ est la nouvelle technique de référence.
»Le bénéfice en survie spécifique est évalué à 20%.
»Les limites du dépistage organisé sont le surdiagnostic et ses conséquences, et les cancers induits.
Mots-clés
Dépistage organisé
Mammographie
Survie
Surdiagnostic
Morbidité
Highlights
»
Combined organized and
individual breast cancer
screening should ensure a good
coverage.
»
DR digitalized mammogram
is the new gold standard tech-
nique.
»
The benefit in specific
survival is about 20%.
»
Overdiagnosis and secondary
breast cancers may limit adhe-
sion and effi cacy of organized
screening.
Keywords
Organized screening
Mammogram
Survival
Overdiagnosis
Morbidity
La participation moyenne des femmes françaises est
de 52 %, avec de fortes disparités selon les régions et
les tranches d’âge. L’impact en termes de diagnostic
individuel est résumé dans le tableau I, qui montre
que des taux de cancers plus élevés sont observés
parmi les dépistages initiaux (qui détectent des cas
“prévalents”) comparés aux dépistages sub séquents
(qui ne détectent a priori que des cancers apparus
depuis le dépistage précédent). Au-delà de cette
démonstration de l’importance d’une participa-
tion de masse, l’impact réel de la “prévention”
du cancer du sein est estimé par l’évaluation du
stade diagnostique des cancers dépistés. En 2010,
on enregistre 15 % de cancers canalaires in situ,
et, parmi les cancers invasifs, 36 % sont classés
T1ab (taille ≤ 10 mm) et 74,3 % ne présentent pas
d’envahissement ganglionnaire axillaire (quand le
statut ganglionnaire est connu). Ces résultats sont
conformes aux références européennes. De plus,
l’évaluation de 2 010 femmes a souligné la dimi-
nution notable du nombre de cancers avec des
caractéristiques inconnues (4,8 contre 7,5 % l’année
précédente, à recul équivalent), témoignant d’une
meilleure exhaustivité du recueil de cette infor-
mation par les structures de gestion. Une grande
hétérogénéité est cependant observée, et l’exclu-
sion d’un nombre important de départements reste
nécessaire pour certaines analyses. L’apport de la
mammographie numérisée (plein champ [DR] ou
plaque fl uorescente [CR]) a également été analysé
lors du rapport 2010 de l’InVS (tableau II). La tech-
nique numérisée plein champ semble la plus promet-
teuse, en permettant globalement un diagnostic plus
précoce que les 2 autres : pourcentage de cancers
in situ plus élevé, pourcentages de cancers invasifs
sans envahissement ganglionnaire, de cancers de
moins de 10 mm et de cancers de moins de 10 mm
sans envahissement ganglionnaire également plus
élevés. Il convient néanmoins de tenir compte des
expériences individuelles des radiologues, qui n’ont
pas pu être évaluées dans ce rapport. Les conclu-
sions du rapport de l’InVS restent globalement
favorables, en tenant compte du dépistage indi-
viduel pour évaluer la couverture de la population
cible. Le rapport INCa 2013 (2) vient très utilement
compléter ces données en se focalisant sur les points
les plus controversés des programmes de dépistage
organisé : quel est le bénéfi ce en survie ? Quelle est
l’ampleur du surdiagnostic ? Quel est le risque de
cancer radio-induit ?
Tableau II. Apport de la mammographie numérisée (plein champ [DR] ou plaque fl uorescente [CR]) [d’après le rapport
InVS 2010].
Toutes
techniques
Analogique Numérique
DR
Numérique
CR
Cancers (nombre et pourcentage)
Taux de cancers (pour 1 000 femmes dépistées) 6,4 6,4 6,9 6,3
Pourcentage de cancers détectés parunedeuxième lecture
(pour 100cancers diagnostiqués à la suite dudépistage)
6,6 7,5 4,0 6,9
Cancers invasifs, n (%) 9 686 (80,2) 2 415 (81) 1 714 (77,3) 5 466 (81,0)
Canalaires in situ, n (%) 1 790 (15,2) 420 (14,6) 403 (18,3) 947 (14,4)
Caractéristiques non renseignées, n (%) 549 (4,5) 132 (4,5) 102 (4,5) 305 (4,6)
Total, n 12 025 2 967 2 219 6 718
Taille et envahissement ganglionnaire des cancers invasifs
Cancers invasifs N0, n (%) 6 273 (76,0) 1 585 (75,0) 1 065 (77,9) 3 563 (75,8)
Cancers ≤ 10 mm, n (%) 3 325 (38,2) 816 (36,7) 620 (41,6) 1 850 (37,6)
Cancers ≤ 10 mm et N0, n (%) 2 716 (33,6) 669 (32,2) 489 (36,6) 1 527 (33,2)
Cancers > 20 mm, n (%) 1 644 (19,3) 430 (20,1) 269 (18,2) 933 (19,5)