La Lettre du Psychiatre • Vol. VII - n° 3 - mai-juin 2011 | 87
DOSSIER THÉMATIQUE
▶Dépression et MP seraient causées par la même
déplétion monoaminergique (conséquence d’un
processus neurodégénératif). Les expressions cliniques
seraient décalées dans le temps, mais relativement
rapprochées.
▶
La dépression créerait une vulnérabilité du
système nerveux central, favorable à l’expres-
sion secondaire de la MP. Dans ce cas, le décalage
temporel entre les deux troubles serait plus long.
D’autres facteurs favorisant la survenue pourraient
être nécessaires.
Bien sûr, outre les hypothèses neurobiologiques, la
composante psychologique liée à l’apparition d’une
maladie chronique invalidante doit être prise en
compte.
Toutefois, à l’heure actuelle, la MP doit être consi-
dérée comme une maladie à expression motrice
et non motrice secondaire à la déplétion dopa-
minergique centrale. La dépression est donc une
des dimensions symptomatiques pouvant être
observée.
Approche thérapeutique
En première intention, les antidépresseurs, IRS
et IRSNA, semblent être les molécules de réfé-
rence (13).
Toutefois, certains IRS pourraient entraîner une
altération de la transmission dopaminergique par
l’augmentation du tonus sérotoninergique au niveau
du raphé médian (14) et justifient une surveillance
particulière pour éviter l’aggravation de la sympto-
matologie parkinsonienne.
Récemment, le bupropion, molécule dont le profil
d’action est dopaminergique et noradrénergique,
a été proposé comme susceptible de présenter un
intérêt spécifique (15). Toutefois, en France, il n’est
pas remboursé dans l’indication de dépression et ne
reste indiqué que dans le sevrage tabagique.
Il faut souligner que, dans cette population, les
produits antidépresseurs sont souvent utilisés à
dose infrathérapeutiques (16). Une dose efficace
(en fonction de la tolérance) est nécessaire.
Les agonistes dopaminergiques ont une action anti-
dépressive qui doit être prise en compte lors de l’ins-
tauration du traitement de la maladie de Parkinson.
Dans les formes les plus sévères et lors de consé-
quences majeures, on peut envisager une prise en
charge par électroconvulsivothérapie (ECT).
En revanche, aucune donnée ne témoigne d’un
intérêt spécifique de la stimulation magnétique
transcrânienne dans cette population spécifique.
Stimulation cérébrale
profonde et dépression
La stimulation chronique du noyau sous-thalamique
est devenue une technique de référence dans la prise
en charge de la MP (17).
Elle permet :
▶
une amélioration symptomatique de plus de
60 % du syndrome parkinsonien ;
▶
une réduction d’au moins 50 % du traitement
antiparkinsonien antérieur ;
▶
une réduction très significative de la durée des
fluctuations motrices et des dyskinésies.
On observe toutefois, dans un certain nombre
de cas, des conséquences négatives sur les plans
comportemental et neuropsychique. En particu-
lier, les symptômes rencontrés sont l’apathie, la
dépression, l’hypomanie, l’anxiété et les difficultés
d’ajustement social et familial.
Ces troubles sont exceptionnellement d’apparition
aiguë, directement liés à un contact précis de stimu-
lation et reproductibles.
On peut donc observer, parfois, des épisodes
dépressifs postopératoires sévères, surtout en cas
d’antécédent de syndrome dépressif. La régression
spontanée des troubles est peu fréquente. Elle néces-
site fréquemment l’association d’un traitement anti-
dépresseur, voire d’une modification des paramètres
de stimulation (18).
Ces troubles pourraient être consécutifs à :
▶
des changements majeurs de conditions de vie
des patients après la mise en place d’une stimulation
cérébrale profonde ;
▶
la décompensation d’une addiction dopaminer-
gique, non identifiée, révélée lors de la baisse ou de
l’arrêt du traitement par L-dopa en postopératoire ;
▶
la stimulation des structures adjacentes du noyau
subthalamique comme la substance noire (projec-
tions frontales, striatales antérieures).
Conclusion
Si le décours temporel de la survenue de la dépres-
sion semble parfois précéder la MP, la dépression
peut aussi être secondaire à celle-ci, même chez les
patients traités chirurgicalement. Les symptômes de
la dépression dans le cadre de la MPI doivent être
mieux reconnus pour être plus souvent traités ; et
si antidépresseurs, IRS et IRSNA semblent être les
molécules de référence, de nouvelles voies, dont
celle du bupropion, semblent s’ouvrir pour apporter
aux patients une meilleure qualité de vie. ■
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des références
bibliographiques sur
le site : www.edimark.fr