proche à l’échelle astronomique, et qui fait d’Orion une cible idéale pour l’étude détaillée des questions de
formation stellaire.
1.2 Radiotélescopes en onde millimétrique et les interféromètres IRAM et ALMA
Comme les télescopes optiques, les radiotélescopes captent le rayonnement radio émis par les objets célestes. La
détection est de type hétérodyne et consiste à transposer le rayonnement incident sur une bande de fréquence
basse qui est amplifiée et détectée1. La détection se fait sur une bande relativement large (typiquement 8-10%,
ou moins, de la fréquence centrale captée) et l’on parle alors de mode ‘continuum’ ou, simultanément, sur des
bandes de fréquence étroites de façon à analyser la signature spectrale du signal capté, et l’on parle alors de
mode spectral ou ‘raie’. Depuis les années 1970 la radioastronomie s’est extraordinairement développée dans le
domaine des ondes millimétriques en raison : a) d’avancées technologiques majeures (cryogénie, jonctions
détectrices, panneaux réflecteurs, etc.), et b) des développements considérables de la spectroscopie atomique et
moléculaire. Ces avancées ont conduit les astronomes et les physico-chimistes à rechercher des signatures
atomiques et moléculaires toujours plus complexes dans des environnements astrophysiques variés allant du
milieu raréfié et froid interstellaire aux milieux circumstellaires ou extra-galactiques. Les résultats d’observation
sont d’une très grande richesse et démontrent en particulier que les ondes mm permettent le sondage des régions
les plus froides et sombres de l’Univers, celles où se forment les nouvelles générations d’étoiles indétectables
dans le domaine optique. L’infrarouge permet aussi de sonder ces régions ‘obscurcies’, mais ce rayonnement est
souvent absorbé par un milieu interstellaire complexe.
Deux grands types d’instrument radio sont utilisés : les radiotélescopes fonctionnant en antenne unique, et les
réseaux d’antennes fonctionnant en interférométrie. Dans le premier cas, le rayonnement est capté dans le ‘lobe’
radio (équivalent de la tâche de diffraction d’une ouverture optique) alors que dans le deuxième cas les signaux
qui interférent offrent un contraste (visibilité des franges) élevé pour des objets suffisamment petits
angulairement et dont la taille est proche de λ/Dmax où λ est la longueur d’onde d’observation et Dmax
l’écartement maximum entre les antennes du réseau.
En mm et submm les systèmes les plus sensibles à ce jour sont les interféromètres de l’Institut de
Radioastronomie Millimétrique (IRAM) installé à 2550 m d’altitude sur le Plateau de Bure dans les Alpes
françaises2 et le réseau d’antennes mm/submm ALMA (Atacama Large mm/submm Array) installé à 5050 m sur
un plateau du désert de l’Atacama au nord du Chili3. On atteint aujourd’hui avec ces instruments des résolutions
spatiales inférieures à la seconde de degré angulaire, et la densité de flux (brillance de la source à une fréquence
donnée multipliée par son étendue angulaire) minimum détectable est une petite fraction de Jansky (1 Jansky =
10-26 Wm-2Hz-1). Pour ALMA, suivant la fréquence observée, la sensibilité en densité de flux atteint la dizaine ou
quelques dizaines de milli-Jansky en mode spectral où la bande de réception est typiquement 10-6 fois la
fréquence du récepteur au foyer de l’antenne ; en mode continuum la sensibilité atteint des fractions de milli-
Jansky. Ces interféromètres, et particulièrement ALMA qui échantillonne un grand nombre de fréquences
spatiales simultanément (par corrélation des signaux de nombreuses paires indépendantes d’antennes), sont des
imageurs restituant avec une grande fidélité la brillance des objets observés (après toutefois diverses
manipulation des observables et transformation de Fourier pour passer des fréquences spatiales à la distribution
de brillance). ALMA offre aussi une grande couverture spectrale avec des récepteurs centrés dans des ‘fenêtres’
de bonne transparence atmosphérique (en raison du peu de vapeur d’eau résiduelle au-dessus du site élevé
d’observation) et réparties entre 35 GHz et 1 THz.
2. Sites de formation stellaire dans la nébuleuse d’Orion et de BN/KL
2.1 Observation en antenne unique, grands relevés moléculaires et en continuum
Le rayonnement de la molécule CO à 115 GHz (transition rotationnelle J =1 à J =0) se révélant universellement
présent dans l’espace c’est bien sûr à cette fréquence qu’Orion a d’abord été observé extensivement. Les
premiers relevés de l’émission à 115 GHz ont été réalisés à faible résolution spatiale (plusieurs minutes d’arc) de
façon à couvrir de grandes surfaces de la constellation d’Orion. Les observations révèlent de grandes structures
moléculaires (ou Nuages Moléculaires Géants) dont la masse totale gazeuse atteint quelques 105 fois la masse du
soleil (voir par exemple [2]). (Dans le milieu interstellaire froid l’hydrogène moléculaire domine, et la molécule
CO, excitée par collisions avec H2, n’est que le traceur indirect du gaz H2.) Les Nuages Moléculaires Géants
identifiés en CO ont été plus tard observés avec une meilleure résolution spatiale et à la fréquence de l’isotope
13C du monoxyde de carbone où l’opacité est inférieure à celle de CO et peut dévoiler de nouveaux détails. Ces
1 Des éléments de radioastronomie, antenne unique et interférométrie, sont donnés par exemple dans Kraus, J.D., Radio
Astronomy, 2ème édition (Cygnus-Quasar, Powell, Ohio), ou dans Rohlfs, K. et Wilson, T.L., Tools of Radio Astronomy, 2ème
édition, Springer
2 L’interféromètre de l’IRAM augmente sa capacité actuelle en doublant sa surface collectrice (projet NOEMA incorporant
un total de 12 antennes de 15 m, voir http://www.iram-institute.org/medias/uploads/NoemaBrochureFreFinal.pdf)
3 ALMA est le résultat d’une coopération mondiale pour l’astronomie en onde mm/submm. Des informations générales sont
obtenues à http://www.almaobservatory.org/