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L’ADAPTATION
L’EMPIRE DES LUMIÈRES suit la journée
heure par heure d’un agent du Nord, un es-
pion dormant, en Corée du Sud.
Un matin, il se lève comme tous les jours et
part travailler, mais à son bureau il reçoit un
message crypté qui lui intime l’ordre de ren-
trer à Pyongyang.
Pour le travail d’adaptation, nous avons
commencé par effectuer un relevé des évé-
nements, décors et personnages présents
dans chaque chapitre.
Il a assez vite fallu faire un tri : il y avait beau-
coup de personnages dont certains étaient
secondaires ou décrits au passé dans des
moments de flash-back ou de monologues
intérieurs. De même pour les décors : il fallait
trouver un principe qui permettait d’englo-
ber tous les lieux, suffisamment neutre et
ouvert pour qu’y tiennent place tous types
de scènes. Un café, une chambre d’hôtel,
une route, un wagon de métro etc.
Puisqu’il est question d’espionnage et
d’écoute, et que beaucoup de scènes du
livre évoquent des souvenirs qui remontent
dans le désordre à la mémoire des person-
nages, nous avons d’abord imaginé une
sorte de studio d’enregistrement avec une
table, des micros. Il n’y aura pas forcément
de micros sur scène, mais l’idée est qu’au
début ou à la fin d’une scène dialoguée, l’un
ou l’autre des personnages puisse raconter
sur un mode plus frontal l’un de ces souve-
nirs.
Kim Young-ha a eu la gentillesse de nous
laisser totalement libres, et nous n’avons
donc pas hésité à changer aussi l’ordre de
certaines séquences, ce qui bien entendu a
encore bougé à la mise en scène.
Nous avons également intégré des histoires
et souvenirs personnels des comédiens.
Notamment à partir de cette question :
« Comment ou à quel moment avez-vous pris
conscience de la présence de la Corée du
Nord ? ». Ces courts récits viennent ponc-
tuer le spectacle et développent, sur un ver-
sant intime et générationnel, le thème de la
division du pays.
Par exemple, l’un d’eux a raconté qu’il lui
arrivait de tomber sur des tracts de propa-
gande lancés depuis un avion au-dessus
des rues. Lorsque les enfants rapportaient
ces papiers au commissariat, on leur offrait
quelques bonbons ou des petits cadeaux.
Pour lui à l’époque, la Corée du Nord repré-
sentait donc cela : un moyen facile d’obtenir
des friandises et de se voir féliciter pour son
attitude patriote.
Un autre a parlé de Tori Jangun, un dessin
animé qui passait très souvent à la télévision.
C’était l’histoire d’un jeune garçon qui se
battait contre des soldats-loups dont le chef
était un cochon. Ces bêtes représentaient
les Coréens du Nord. Tori Jangun gagnait
toujours, à la fin de chaque épisode.
Valérie Mréjen et Arthur Nauzyciel,
février 2016