Introduction
JOUVE Lionel_2011 5
Introduction
Depuis quelques années, la prise de conscience des enjeux liés aux dérèglements
climatiques ne cesse d’augmenter. Qu’il s’agisse d’enjeux humains (santé, déplacements de
populations), économiques (coût du changement climatique, notamment mis en évidence
par le rapport Stern en 2006) ou écologiques (perte de biodiversité, etc.), le nombre
de rapports traitant du sujet connaît un développement exponentiel. Parmi les sous-
thématiques de recherche liées au changement climatique qui revêtent actuellement une
importance primordiale, figure celle de l’articulation entre le local et le global. Le climat, bien
commun par excellence, a en effet cette particularité d’être influencé de toutes parts par
les émissions de gaz à effet de serre (GES) émises par la plupart des habitants du globe.
Cette caractéristique nécessite ainsi de mettre en place des politiques globales à l’échelle
mondiale, mais aussi et surtout de permettre leur application à l’échelle locale, sans quoi des
résultats satisfaisants seraient difficilement atteignables. Pierre Radanne, ancien directeur
de l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME), cité par Sandra
Moatti dans Alternatives Economiques (2006) résume ainsi la situation : « le changement
climatique est un problème global qui trouve essentiellement sa réponse dans une série
d’actions au plan local ; mais l’articulation du global au local reste à définir ». Pour beaucoup
d’experts cependant, la ville, entendue comme unité urbaine, que l’INSEE définit comme
« une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (…) 1
[comptant] au moins 2 000 habitants », a un rôle de toute première importance à jouer dans
cette articulation entre l’échelle globale et locale. Tout d’abord parce que les villes du monde
concentrent à l’heure actuelle la majorité de la population mondiale et devraient, d’après les
projections, abriter les deux tiers de l’humanité dès 2030 (Moatti, 2006). Déjà aujourd’hui, 8
européens sur 10 sont considérés comme « urbains ». Et en 2050 ce ne sont pas moins de 8
milliards d’hommes et de femmes qui devraient ainsi être « citadins » 2 . En regroupant une
grande part de la population mondiale, les villes concentrent également une grande partie
des problématiques liées au changement climatique : urbanisme, logement, transports,
énergie, alimentation et modes de consommation, etc. Ceci d’autant plus que les villes
sont un élément essentiel du processus de mondialisation. Innovantes, elles participent à la
croissance économique, créent la vie culturelle, transforment les matières premières dont
nos sociétés ont besoin. De part leurs activités, elles créent donc forcément des nuisances,
pollutions et autres risques qui impactent le cadre de vie de « l’homo urbanus » et du monde
en général (Bochet et Da Cunha, 2003). Différentes études ont du reste été menées sur
l’impact des villes sur le climat. Elles montrent qu’en fonction de la prise en compte des
effets indirects de l’urbanisation, les villes peuvent être considérées comme responsables
de 45 à 80% des émissions de GES à travers le monde (Theys et Wachter, 2008). L’action
des villes en la matière n’est donc pas anodine. Par ailleurs, l’entrée en vigueur tardive
du protocole de Kyoto, les différentes positions politiques arrêtées sur le sujet de la part
1 « sans coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions ».
2 A noter toutefois que la définition de population urbaine n’est absolument pas uniforme d’un pays à l’autre : alors que certains
Etats considèrent une population comme urbaine à partir d’un bassin de population de 1000 habitants, d’autres ne le font pas en
dessous de 10 000 habitants (United Nations Statistics Division, 2005). Les Nations Unies se contentent pour l’instant de reprendre
ces données nationales.