Magnus Félix Ennodius est né entre 473 et 4741. Il paraît être Gaulois ou
appartenir à une famille gauloise. Issu d’une race illustre, la gens Anicia, il perdit
de bonne heure ses parents et passa son enfance dans le nord de l’Italie. A la
suite d’une grave maladie, il entra dans les ordres en 494 comme clerc de l’église
de Pavie ; consacré par l’évêque Épiphane, il le suivit à Milan en 495 et y resta ;
Laurentius lui continua la protection dont l’avait honoré Epiphane. Diacre en 502,
il semble avoir rempli des fonctions de justice ecclésiastique.2 Ce qu’il y a de
certain, c’est qu’il entretint de nombreuses relations avec des juges.
Par ces différentes dates, on voit donc qu’il fut témoin des dernières années
d’Odoacre et de la conquête de l’Italie par Théodoric.
Professeur d’éloquence, il ouvrit ensuite à Milan une école, auditorium ; de là les
nombreux exercices scolaires, les thèmes à développement, les dictiones si
fréquentes dans ses œuvres.
Une lutte à propos d’élection pontificale, presque un schisme va le mettre plus en
lumière : il se dépensa beaucoup à cette époque et écrivit sur l’ordre de
Laurentius, qui passe pour avoir dirigé les débats des conciles et dont il était le
secrétaire, deux de ses principaux opuscules, la Dictio quando de Roma rediit et
le Libellus pro Synodo.
Il devint évêque de Pavie en 510. Ses fonctions religieuses ne le confinèrent pas
dans le monde de l’Eglise. Parent ou ami des plus hauts dignitaires du royaume
ostrogoth, allié à toutes les anciennes familles italiennes, panégyriste de
Théodoric en 506 ou 507, biographe de saint Epiphane et de Laurentius, bien en
cour auprès de Théodoric, légat du pape Hormisdas à Constantinople, il eut accès
dans tous les milieux et se trouva dans les meilleures conditions qu’on puisse
désirer pour voir et pour se renseigner. Il mourut en 521.
Son œuvre présente la même variété que sa vie, dont elle est un écho. Sermons,
apologies, leçons, lettres, vers, tout s’y rencontre, et, au point de vue historique,
elle serait plus importante et plus intéressante encore si nous la possédions tout
entière. Ses lettres d’affaires, négligées par ses premiers éditeurs, n’ont sans
doute pas toutes été conservées ; ses lettres purement administratives ont dû
être dédaignées ; on n’a recherché que celles où le brillant du style s’alliait avec
cette pompe oratoire qui passait alors pour la plus haute expression de l’art.
Traité par la postérité immédiate plus en homme de lettres qu’en historien, on a
laissé se perdre tout ce qui ne pouvait fortifier et justifier sa réputation
d’écrivain.
Quoi qu’il en soit, cette œuvre, telle qu’elle nous est parvenue, n’en est pas
moins une source précieuse pour l’histoire d’une époque sur laquelle les
documents sont rares. Sans lui, nous serions réduits aux rescrits royaux, aux
formules transmises par Cassiodore, aux jugements d’historiens postérieurs ou
aux récits d’annalistes trop brefs. Mais Ennodius fut un lettré, et un lettré de la
1 Ce point est très discuté. Trois villes prétendent lui avoir donné naissance : Arles, Milan et Pavie.
Les historiens italiens penchent généralement pour Milan ; Vogel, Fertig, Sirmond adoptent Arles.
En aucun cas il n’y a de preuves certaines.
2 L’hypothèse n’a rien d’invraisemblable, il aurait été à Pavie defensor ecclesiae. Le concile
d’Éphèse et celui de Chalcédoine (can. XXIII) parlent de cette charge, qui existait au temps de
Théodoric (Cass., Var., II, 30) et qui aurait consisté en la défense des causes ecclésiastiques ou de
celles intéressant l’Église et les pauvres, devant les juridictions compétentes. On ne pourrait
s’expliquer autrement les nombreuses lettres écrites par lui où il fait allusion à ses fonctions
judiciaires (129, 29 ; 258, 12 ; 128, 16, 48, 20, 24, 25) et celles qu’il envoie au sujet de procès ou
de réclamations qui ne le touchent en rien (CCLXXX, CCLXXXI, CCCVI, XXXIII, XC, CXLV).