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WEF HEC 2007.doc
05/11/2007 5:03
Edouard Mathieu
Chercheur associé à HEC Executive Education, Conseiller économique à l’AFII
Bertrand Moingeon
Professeur et Directeur Général adjoint du Groupe HEC
(Executive Education et Développement Académique)
La compétitivité de la France selon le Forum Economique Mondial :
L’état des lieux avant les réformes
Le Forum économique mondial (WEF, pour World Economic Forum), institution indépendante
basée à Genève, établit chaque année un classement de la compétitivité mondiale des économies.
Ce classement des nations se fonde sur les théories des professeurs Michael Porter (Harvard) et
Xavier Sala-i-Martin (Columbia). Les données utilisées proviennent pour l’essentiel d’une
enquête de perception réalisée dans chaque pays par un institut partenaire, dont HEC pour la
France.
L’économie française est classée globalement 18ème (15ème en 2006 à méthodologie comparable).
Mais au-delà de ce rang, déterminé par des écarts d’indices trop faibles pour être significatifs, le
rapport du WEF propose surtout une mise en perspective internationale. Il apparaît que
l’économie française, dans les 12 composantes analysées, diffère très peu de la moyenne des
pays développés. On ne peut trouver une « exception française » que dans les infrastructures,
jugées excellentes, et dans le marché du travail, jugé très inefficient. Mais la comparaison avec le
pays leader dans chaque domaine montre que des marges d’amélioration et de réformes existent
dans tous les secteurs de la vie économique, et pas seulement dans le marché du travail. Dans
l’enseignement supérieur, la France est classée première pour la qualité de ses écoles de
commerce (« business schools »), comme les années précédentes. Cette perception est justifiée
par de nombreux autres classements mondiaux et européens qui placent régulièrement les écoles
françaises, et HEC en particulier, au tout premier rang.
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La Compétitivité globale des pays
selon le Forum Economique Mondial (WEF)
2007-2008
2
3
2006-2007
Score de 1 à 7
4
5
6
5.67
5.80
1. Etats-Unis
5.62
5.54
Rang 2007-2008
2. Suisse
3. Danemark
5.55
5.55
4. Suède
5.54
5.44
5. Allemagne
5.51
5.48
9. Royaume-Uni
5.41
5.56
5.18
5.21
18. France
4.66
4.70
29. Espagne
4.57
4.55
34. Chine
46. Italie
4.36
4.37
48. Inde
4.33
4.47
4.28
4.39
51. Pologne
131. Tchad
2.78
2.81
Source : The Glob al Competitiveness Report 2007-2008,
Les Etats-Unis demeurent en tête du classement du WEF, mais avec des performances en baisse.
L’écart entre les pays du « top 10 » devient très réduit, ce qui laisse présager que les EtatsUnis pourraient prochainement perdre leur leadership au profit des pays européens, notamment
en conséquence de la crise des crédits hypothécaires à risque (« subprime »). Dans le rapport de
l’an passé, les Etats-Unis étaient déjà relégués à la 6ème place. Un ajustement méthodologique a
mis cette année plus en valeur la dimension du marché américain et la flexibilité de son marché
du travail.
La France bénéficie aussi, mais dans une moindre mesure de la nouvelle méthode de calcul, car
son marché intérieur est l’un des plus vastes en Europe : elle est reclassée 15ème
rétrospectivement en 2006. Mais au total, la France occupe la 18ème place cette année. Il est
difficile d’expliquer ce recul de 3 places. Compte tenu des modifications de méthode, et en
particulier d’un lissage des données sur deux ans (voir encadré), il pourrait porter encore la trace
de la crise des banlieues de fin 2005 et du pessimisme ambiant de 2006.
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Les performances de la France
relativement à la moyenne des économies développées* (échelle de 1 à 7)
Economies développées*
France
1.Institutions
7
12.Innovation
11.Sophistication des
entreprises
6
5
2.Infrastructures
3.Stabilité macroéconomique
4
3
2
1
10.Taille des marchés
4.Santé et éducation primaire
5.Education supérieure
9.Agilité technologique
8.Sophistication des marchés
financiers
6.Efficience des marchés de
biens
7.Efficience du marché du travail
Source : WEF,
The Glob al Competitiveness Report 2007-2008
* "Economies tirées par l'innovation" (def. WEF)
Au-delà du simple rang, information spectaculaire mais pauvre en enseignement, le WEF
apporte des données qui permettent de dresser un état des lieux de l’économie française.
Le graphique ci-contre montre que les performances de notre économie sont en fait
étonnamment proches de la moyenne des pays développés (définis comme les 31 pays les
plus riches et dont le dynamisme est basé sur l’innovation). Les seules « exceptions françaises »
portent sur les infrastructures, au top mondial (derrière, mais pratiquement à égalité avec
l’Allemagne) et sur l’inefficience du marché du travail (au 98ème rang mondial). Le WEF
reconnaît également comme un atout pour les entreprises la taille du marché intérieur français et
l’importance des positions conquises à l’exportation.
Dans les 9 autres domaines examinés, l’économie française côtoie la moyenne, même en ce qui
concerne la stabilité macroéconomique, point relativement faible, ou la santé et l’éducation
primaire, point relativement fort.
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Les performances de la France
relativement au pays leader dans chaque domaine (échelle de 1 à 7)
France
Pays leader*
1.Institutions (Finlande)
7
12.Innovation (Etats-Unis)
11.Sophistication des
entreprises (Allemagne)
10.Taille des marchés
(Etats-Unis)
9.Agilité technologique (Suède)
8.Sophistication des marchés
financiers (Hong Kong)
6
5
4
3
2
1
2.Infrastructures (Allemagne)
3.Stabilité macroéconomique
(Norvège)
4.Santé et éducation primaire
(Finlande)
5.Education supérieure
(Finlande)
6.Efficience des marchés de
biens (Hong Kong)
7.Efficience du marché du travail
(Etats-Unis)
Source : WEF,
* Parmi les économies tirées par l'innovation
The Glob al Competitiveness Report 2007-2008
La comparaison avec le pays leader dans chaque domaine montre que des progrès sont possibles
dans chacun des 12 domaines.
Les débats en cours montrent que des progrès peuvent être envisagés et sont même
indispensables dans nos 3 « points forts » : la taille des marchés (consommation,
investissements, exportations), infrastructures, santé et éducation primaire.
Comparés aux meilleurs, la nécessité d’une amélioration des variables macro-économiques,
notamment budgétaires, revient en pleine lumière. Le leader norvégien peut exploiter sa rente
dans les hydrocarbures, mais ce n’est pas le cas de nombreux autres pays « vertueux » (la France
est 59ème en la matière).
En matière d’agilité technologique et d’innovation, la Suède et les Etats-Unis mènent la dance.
Pour l’efficience des marchés de biens et la sophistication financière, Hong Kong est classé en
tête. Des pays européens, et notamment la Finlande, peuvent fournir des pistes – toujours à en
croire le WEF - en ce qui concerne le bon fonctionnement des institutions.
En matière d’éducation supérieure, les résultats sont contrastés. Parmi les points forts, la France
est classée première pour la qualité de ses écoles de commerce (« business schools »),
comme les années précédentes. Cette perception est justifiée par de nombreux autres
classements mondiaux et européens qui placent régulièrement les écoles françaises, et HEC en
particulier, au tout premier rang.
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L’examen plus approfondi du pilier « efficience du marché du travail » (pour lequel les EtatsUnis occupent la première place) montre bien que 113 critères, c’est peut-être suffisant pour
repérer les atouts et faiblesses, mais non pour orienter précisément les réformes.
En France, l’inefficience de ce marché est indéniable, comme le montre en particulier la
résistance du chômage. Cependant, le score exceptionnel américain doit être nuancé. En effet, le
WEF prend appui, outre l’enquête de perceptions, sur le rapport Doing Business de la banque
mondiale qui se focalise sur les réglementations fédérales (alors que les pratiques, par exemple
en matière de congés payés sont définies par des contrats privés entre employeurs et salariés)
Méthodologie du classement
Pour le Forum Economique Mondial, la compétitivité est l’ensemble des institutions, des politiques et des
facteurs qui déterminent à terme le niveau de productivité, et donc le niveau de vie, d’un pays.
De cette définition découle l’examen d’un grand nombre de critères corrélés avec le niveau de vie : au
total, 113 critères, dont 34 statistiques ou indicateurs internationalement reconnus (« hard data ») et 79
réponses à une enquête de perception. Début 2007, le WEF a interrogé 11.400 cadres et dirigeants
d’entreprises dans 131 pays, ce qui représente un effort considérable, soutenu par des institutionspartenaires comme HEC en France. Toutefois, cet échantillon ne représente, en moyenne, que 87
personnes interrogées par pays.
Les 113 critères sont organisés en « 12 piliers de la compétitivité », eux-mêmes regroupés en 3 « sousindices ». Les institutions, les infrastructures, la stabilité macroéconomique, la santé et l’éducation
primaires (« conditions de base ») ne sont considérés prioritaires qu’aux premiers stades du
développement et ne pèsent que 20% dans le classement des pays développés comme la France.
L’éducation supérieure, l’efficience des marchés de biens et du marché du travail, la sophistication des
marchés financiers, l’agilité technologique et la taille des marchés (« facteurs dynamiseurs ») sont
considérés comme le plus important pour un pays développé, et sont affectés d’un poids de 50%. Enfin, la
sophistication des entreprises et l’innovation reçoivent un poids nettement plus grand dans le classement
des économies développées (30%) que pour les économies en développement (5%). Les premières sont
dites « tirées par l’innovation » tandis que les secondes doivent avant tout, selon le WEF, s’efforcer
d’implanter les innovations étrangères.
Le modèle est très riche, mais pourrait être instable, du fait d’erreurs statistiques ou d’évolutions
soudaines dans les perceptions qui ne pourraient refléter correctement une réalité forcément moins
malléable. Pour mieux stabiliser le modèle, le Forum a introduit depuis cette année un lissage des données
d’enquêtes sur deux ans. En conséquence, les résultats du rapport 2007-2008 portent en fait plutôt sur
2006, et les évolutions sur une comparaison 2005/2006.
D’autre part, le WEF a cette année donné le statut de « pilier », et donc une pondération plus grande, à la
taille de l’économie et à chacun des trois marchés : de biens, du travail, des flux financiers. Les EtatsUnis bénéficient à plein de cette nouveauté. La nouvelle méthode de calcul bénéficie aussi à la France,
3ème économie en Europe, mais dans une moindre mesure du fait de l’inefficience relative de son marché
du travail. En conséquence de tous ces ajustements méthodologiques, les résultats ne sont pas
comparables à ceux de l’an dernier. Le Forum a rétropolé les résultats 2006 et devraient bientôt recalculer
les résultats 2005.
Le rapport du Forum Economic Mondial présente un deuxième indice composite, appelé « Indice de la
compétitivité des entreprises », plus centré sur les variables microéconomiques. Contrairement aux
années précédentes, cet indice donne des résultats très proches de l’Indicateur de compétitivité globale en
ce qui concerne la France.
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