CHAPITRE X MESENTERES, COELOME ET SEREUSES 10.1 Les mésentères 10.1.1. La formation des mésentères Le cœlome embryonnaire est une cavité initialement unique, divisée ultérieurement en trois cavités tapissées d'un endothélium : les cavités pleurale, péricardique et péritonéale ou séreuses vraies de l'organisme(1). Au sein de ces cavités se positionnent les organes internes (digestifs, respiratoires, urinaires, génitaux,...) qui restent toujours rattachés aux parois de leur cavité respective par des lames conjonctives, les mésentères (ou mésos). Cette disposition permet de distinguer le feuillet pariétal de l'endothélium d'une séreuse vraie de son feuillet viscéral. Le feuillet pariétal tapisse les parois latérales de la séreuse (péritoine pariétal, plèvre pariétale et péricarde pariétal) tandis que le feuillet viscéral entoure les organes qui s'y trouvent (péritoine, plèvre et péricarde viscéraux). Le feuillet viscéral est en continuité avec le feuillet pariétal au niveau des mésentères. Les premiers mésentères à se mettre en place sont les mésentères dorsal et ventral qui suspendent l'archentéron au milieu du cœlome embryonnaire. Le mésentère dorsal s'étend de l'œsophage au rectum. Le mésentère ventral va de l'oesophage à l'estomac. A partir du duodénum, le tractus digestif n'est plus rattaché qu'au plafond du cœlome. Suivant leur localisation, ces mésentères portent des noms différents : a) le méso-œsophage (figure 10.1) Il suspend l'œsophage, entre le pharynx et l'estomac. Ses parties dorsale et ventrale fusionnent avec les aponévroses des muscles du cou et participent à la formation des médiastins au niveau du thorax. Il est interrompu par le diaphragme, auquel il fusionne. (1) par opposition à d'autres cavités qualifiées de fausse séreuses car non tapissées d'un endothélium, comme synoviales. Les propriétés d'absorption de cet endothélium sont remarquables et font de la voie intraséreuse (intrapéritonéale ou intrapleurale) la seconde voie d'injection par sa rapidité d'absorption après l'intraveineuse (l'injection intrapéricardique n'est pas utilisée). Cet endothélium permet également de se servir de la cavité péritonéale comme un système de dialyse. b) les mésogastres (figure 10.2) Ce sont les deux lames qui relient ventralement et dorsalement le primordium de l'estomac aux parois du cœlome embryonnaire. Au cours de la première rotation de l'estomac, le mésogastre ventral n'évolue pas beaucoup. Il est colonisé par le diverticule hépatique qui vient du futur duodénum et rejoint le septum transversum. Il unit ainsi le foie à la petite courbure de l'estomac et, chez l'adulte, porte le nom de petit épiploon. Le mésogastre ventral se réfléchit derrière le foie pour l'unir au diaphragme par les ligaments coronaires et à la paroi ventrale de l'abdomen par le ligament falciforme. Il ne se prolonge pas au-delà de l'estomac. Le mésogastre dorsal évolue différemment. Il suit la grande courbure au cours de la première rotation à gauche et s'allonge considérablement en un large repli appelé le grand épiploon (la crépinette du boucher). Ce repli limite une cavité, la bourse épiploïque ou omentale qui reste en communication avec la cavité péritonéale par le trou épiploïque. Le bourgeon pancréatique dorsal et la rate se développent dans son épaisseur. c) Le grand et le petit mésentères (figure 10.3) Le grand mésentère continue caudalement le mésogastre dorsal et suspend le duodénum (mésoduodénum), les anses jéjunales (mésojéjunum) et iléales (mésoiléon), le caecum (pli iléocaecal) et le colon ascendant (mésocolon). Son développement est considérable chez toutes les espèces car il supporte les deux rotations de l'anse intestinale primitive et le développement parfois très important du caecum et du côlon ascendant (cheval, ruminants, porc). Il est colonisé par l'artère mésentérique crâniale et le bourgeon ventral du pancréas. Lors de la rotation de l'anse primitive et de la mise en place des anses intestinales, ces différents mésos se retrouvent accolés en un point commun autour de l'origine de l'artère mésentérique crâniale. Ils fusionnent en ce point pour former la racine du grand mésentère. Le petit mésentère poursuit le grand mésentère caudalement et suspend le côlon descendant et la partie crâniale du rectum. 10.2 Les séreuses (figures 10.4 et 10.5) 10.2.1. Séparation des cavités pleuropéritonéale et péricardique Le cœur se développe très tôt et fait rapidement saillie dans la portion crâniale du cœlome embryonnaire. Ce massif cardiaque élabore une lame mésodermique qui le contourne caudalement : le septum transversum. Par ailleurs, deux replis se forment au niveau des parois latérales de la partie crâniale du cœlome embryonnaire : les plis pleuro-péricardiques. Ils se rejoignent au-dessus du cœur pour fusionner ensemble et avec l'extrémité supérieure du septum transversum. Le cœur se retrouve isolé dans une cavité dérivée du cœlome embryonnaire : la cavité péricardique. Il est recouvert par le péricarde viscéral qui se réfléchit sur les vaisseaux qui sortent ou entrent dans le cœur pour se continuer par le péricarde pariétal qui tapisse les parois de la cavité. Cette cavité péricardique est normalement virtuelle. Le reste du cœlome constitue la cavité pleuro-péritonéale. 10.2.2. Séparation des cavités pleurale et péritonéale La cavité pleuro-péritonéale est constituée d'une partie assez large située derrière le septum transversum et d'une partie plus réduite située crânialement, au-dessus du cœur. Deux replis se forment au niveau des parois latérales, à hauteur du septum transversum : les plis pleuro-péritonéaux. Ces plis se rejoignent pour fusionner ensemble et avec le septum transversum au-dessus du foie en formation. Cette fusion isole deux nouvelles cavités : la cavité pleurale et la cavité péritonéale. La cavité péritonéale est simple puisque le mésentère ventral ne se poursuit pas au-delà de l'estomac. Par contre, la cavité pleurale est double car la persistance des deux mésentères entraîne la mise en place des médiastins (ou mésos pulmonaires) dorsal et ventral qui divisent cette séreuse en cavités pleurales gauche et droite (1) . (1) Les cavités pleurales sont virtuelles, mais jouent un rôle prépondérant dans la respiration. Elles assurent la mobilité des poumons contre les parois du thorax et transmettent à ceux-ci la dépression engendrée par la contraction du diaphragme. Cette dépression crée l'appel d'air permettant l'inspiration. Il est donc indispensable que ces cavités restent virtuelles. En effet, si ces cavités se remplissent d'air, la plèvre thoracique n'attirera plus la plèvre viscérale lors de la contraction du diaphragme. La dépression créée entraînera le remplissage des cavités pleurales plutôt que la dilatation des poumons. Si elles se remplissent d'air à la suite d'une perforation thoracique ou d'un emphysème, on observe un pneumothorax. S'il s'agit d'un liquide, on parlera d'hémothorax (sang), chylothorax (lymphe), pyothorax (pus) ou hydrothorax (transsudat ou exsudat sanguin). Ces médiastins sont normalement continus, ce qui permet de survivre à un pneumothorax unilatéral (être humain, bovins, porc, lapin). Chez d'autres espèces (cheval, carnivores), les médiastins sont persillés (c. à d. perforés de fins trous), ce qui peut avoir des conséquences dramatiques en cas de pneumothorax unilatéral. 10.3 Les anomalies de la compartimentalisation 10.3.1. L'hernie pleuropéritonéale C'est la plus fréquente des trois sortes de hernies diaphragmatiques. Elle résulte d'une communication entre les cavités péritonéale et pleurale par la fusion incomplète des replis pleuropéritonéaux. Elle se situe dans la partie dorsale du diaphragme. Il y a passage de viscères abdominaux dans la cavité pleurale. Le pronostic est réservé à mauvais suivant la sévérité de l'hypoplasie pulmonaire. 10.3.2. L'hernie péritonéo-péricardique Deuxième sorte de hernie diaphragmatique. C'est une communication entre les cavités péricardique et péritonéale. Elle se situe dans la partie ventrale du diaphragme et est la conséquence d'une malformation du septum transversum. Ce type de hernie est rare et son pronostic réservé à mauvais. 10.3.3. L'hernie hiatale Troisième sorte de hernie diaphragmatique. Elle consiste en une fermeture insuffisante autour de l'œsophage par les plis pleuro-péritonéaux. L'œsophage et une partie de l'estomac, voire des anses jéjunales peuvent se retrouver dans le thorax. Le pronostic est réservé à mauvais. Remarque : les hernies décrites ci-dessus sont congénitales et assez rares. La majorité des hernies diaphragmatiques rencontrées en pratique sont traumatiques et consistent le plus souvent en une déchirure d’une partie musculaire du diaphragme. Le pronostic dépend de la gravité des symptômes respiratoires. Le traitement est chirurgical sous respiration assistée.