INDICES Un film documentaire de Vincent Glenn Durée :81minutes Des indicateurs de richesse en général et du Produit intérieur brut en particulier… Lorsqu’on entend parler de « croissance » ou de « récession » dans les médias, chacun est supposé savoir déchiffrer : il s’agit de la croissance du Produit intérieur brut (PIB), et « récession » veut dire que ce même PIB évolue négativement. Pour beaucoup ces rappels seront inutiles, tant cet acronyme célèbre semble entré dans le langage courant, relevant de « l’évidence ». Tellement évident d’ailleurs que dans l’espace public, son usage est désormais presque toujours implicite, il ne semble plus nécessaire de dire expressément « croissance du PIB », on dit croissance tout court, à chacun de saisir de quelle « croissance » on parle. Ce film-enquête a commencé avec la perception qu’il y a quelque chose de fort énigmatique dans cet escamotage d’un terme devenu si « évident » qu’on n’a même plus besoin de le nommer, ni donc de se pencher sur son contenu, son histoire, et ce qu’il raconte des priorités et des mentalités du monde contemporain. Progressivement, depuis l’entre-deux-guerres, le Produit intérieur brut est devenu le principal instrument d’évaluation de l’enrichissement d’un pays. Et l’accroissement du PIB continue, de nos jours encore, à figurer parmi les toutes premières priorités de nos élus. Politiques publiques et fiscales sont toujours conçues en fonction de cet indicateur. Le film interroge ces « évidences ». Lorsqu’on sait par exemple que le calcul de ce fameux PIB comptabilise en positif les réparations des catastrophes ou des accidents de la route ou encore la déforestation à grande échelle, on peut mieux comprendre pourquoi il y a de plus en plus de contestations de l’usage de cette drôle de « boussole » par les sociétés humaines. Beaucoup songent depuis longtemps à lui trouver des successeurs pour « compter autrement » d’une part (autre système comptable), et s’accorder autrement sur ce qui compte d’autre part (autres priorités humaines). De là l’idée de nouveaux « indicateurs de richesse » : d’autres exigences, d’autres critères, pour mettre en mouvement d’autres politiques à partir d’un minimum de vision commune sur ce qu’il convient de nommer « enrichissement » et « appauvrissement ». Collectif né, en France, du rassemblement d’une diversité de chercheurs et d’associations, le FAIR (Forum pour d’autres indicateurs de richesse) participe à un mouvement international qui a émergé depuis une trentaine d’année, remettant en cause la place centrale occupée par le PIB dans la définition du « progrès économique et social ». Dès 1968, le sénateur américain Robert Kennedy déclarait dans l’un de ses discours : « le PIB mesure à peu près tout sauf ce qui rend la vie digne d’être vécue. » Ce qui est en jeu, derrière la remise en cause du PIB comme outil hégémonique de mesure de la richesse, c’est ni plus ni moins le dépassement des modèles capitaliste et productiviste, tant sur le plan de la création des richesses que de leur répartition. Il s’agit d’un mouvement portant un large ensemble de critiques et de propositions, qui évite la connotation « décliniste » de la notion de décroissance sans nécessairement y perdre en radicalité (du latin radicalis, - prendre le problème à la – racine). En mars 2008, le président Sarkozy lui-même semble avoir emboité le pas à ces précurseurs, confiant au Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz la mise en place d’une « Commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social », souvent évoquée dans les médias sous le nom de « Commission Stiglitz ». Ce film rassemble une partie des débats qui ont eu lieu avant, pendant, et après les travaux de cette prestigieuse Commission, en donnant la parole à la fois à quelques-uns de ses membres, et surtout à des non-membres, impliqués à des degrés divers dans la définition d’indicateurs susceptibles de nous faire évoluer au delà du PIB1. Avec les interventions de : Bernard Cressens, Jean Fabre, Jean Gadrey, Enrico Giovannini, Patricia Gualinga, Florence Jany-Catrice, Vivian Labrie, Bernard Lietaer, Dominique Méda, Ricardo Petrella, Joseph Stiglitz, Aminata Traoré, Patrick Viveret… Avec de brèves apparitions de la Chorale TransHarmonique des 50 000 Révoltés. 1 Titre d’un livre de Dominique Méda (éditions Flammarion, coll. Champs actuel) A lire également, « Les nouveaux indicateurs de richesse » de Jean Gadrey et Florence Jany-Catrice. (édition la Découverte)