708 Revue Médicale Suisse
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28 mars 2012
actualité, info
Le réchauffement venu, nous
mourrons encore en hiver
«La mortalité hivernale va-t-elle diminuer
avec le changement climatique ?» C’est la cu-
rieuse interrogation d’un papier 1 non moins
curieux, publié dans le dernier numéro de
l’austère Bulletin épidémiologique hebdomadaire
(BEH) de l’Institut national (français) de
veil le sanitaire.
Tout commence ici avec deux constats. Le
premier : les taux de mortalité sont plus éle-
vés pendant l’hiver dans les régions tempé-
rées de l’hémisphère nord. Le second : des
températures extrêmes durant l’été peuvent
se traduire par des pics de mortalité. Ces deux
phénomènes conjoints se traduisent par une
relation en U entre mortalité journalière et
températures. Bien sûr, la forme et la position
du U varient selon les régions et les tempé-
ratures moyennes. C’est l’une des preu ves
qu’il n’y a pas, ici, de fatalité : les popula-
tions humaines savent s’adapter à leur climat
local. Ainsi dans les villes les plus froides,
l’augmentation de la mortalité aux tempéra-
tures basses est relativement modérée et
celle de la mortalité aux températures éle-
vées relativement accentuée. Et à l’inverse,
dans les villes les plus chaudes, la relation
froid-mortalité est plus importante que la
relation chaleur-mortalité.
Les auteurs poursuivent leur propos avec
une quasi-certitude : le réchauffement glo-
bal dû aux émissions de gaz à effet de serre
d’origine anthropique est pratiquement ac-
quis pour les prochaines décennies. Dès lors,
il n’est ni trop tard ni trop tôt pour se pen-
cher sur ses impacts sanitaires possibles. Par
exemple, s’interroger sur le fait de savoir si
la mortalité hivernale est susceptible de di-
minuer du fait du réchauffement climatique
(ce qui aurait immanquablement des consé-
quences importantes sur l’adaptation de la
réponse en matière de santé publique).
Ils achèvent leur travail ainsi : «De manière
surprenante, à partir d’une analyse de la lit-
térature, nous concluons qu’il semble peu
probable que la mortalité hivernale diminue
avec l’augmentation des températures.»
Par quel cheminement parviennent-ils à
cette conclusion quelque peu provocatrice ?
Les températures moyennes glo-
bales ont certes augmenté pen-
dant le siècle dernier, et il est
difficile de contester que la ten-
dance au réchauffement s’est
accélérée au cours des derniè res
décennies. «Les modèles climatiques pré-
disent de manière cohérente un réchauffe-
ment futur de l’ordre de 0,2°C par décennie.
Et en Europe, les projections indiquent que
les températures les plus basses devraient
augmenter plus rapidement en hiver que
les températures les plus élevées, condui-
sant à un rétrécissement de la distribution
des températures hivernales dans un climat
futur» rappellent les auteurs. On ne saurait
pour autant exclure la survenue d’épi sodes
de froid extrême.
«Malheureusement, alors qu’il existe une
littérature abondante sur les impacts sani-
taires de la chaleur dans un contexte de
changement climatique, un intérêt scienti-
fique moindre a été porté à la question plus
large, et d’une certaine manière plus impor-
tante, de la possibilité de modification des
impacts sanitaires hivernaux, regrettent les
auteurs. A ce jour, les rares études qui se sont
penchées sur les impacts potentiels futurs du
réchauffement des températures hivernales
sur la mortalité ont généralement conclu que
la mortalité hivernale était susceptible de
diminuer.» Pour sa part, le Groupe d’experts
intergouvernemental sur le climat (Giec) a
déclaré que le changement climatique pour-
rait «s’avérer bénéfique et entraîner une
baisse de la mortalité associée au froid». On
a même été jusqu’à estimer qu’en Europe les
réductions de la mortalité hivernale pour-
raient compenser les augmentations de la
mortalité estivale dues au réchauffement.
De telles prophéties sont pour partie fon-
dées sur l’hypothèse que la relation en U
température-mortalité observée historique-
ment dans une région donnée ne changera
pas et qu’elle peut donc être directement
utilisée pour estimer la mortalité future sous
des températures plus élevées dans cette
même région. Les auteurs ont, quant à eux,
passé en revue la littérature historique pour
mieux comprendre les mécanismes sous-
tendant la surmortalité hivernale, et pour
souligner l’importance des facteurs saison-
niers et de la température en soi, afin de vé-
rifier la validité potentielle de cette hypo-
thèse. Après filtrage, cinquante-trois publi-
cations ont été sélectionnées et analysées. Et
il apparaît que bien des lacunes demeurent.
D’une manière générale, la mortalité est
en moyenne plus élevée en hiver qu’en été
dans les villes des Etats-Unis et d’Europe.
On peut raisonnablement penser que cette
surmortalité hivernale est due à la fois à des
facteurs saisonniers et à l’exposition au froid.
Comment distinguer l’importance relative
de ces deux composantes ? De l’examen des
données disponibles, il apparaît que l’am-
point de vue
Information professionnelle abrégée de Ciclopoli® :
C : Vernis à ongles avec 80 mg/g de ciclopirox. I : Infections fongiques des ongles, légères à modé-
rément importantes, provoquées par des dermatophytes et/ou d’autres champignons sensibles au
ciclopirox, dans lesquelles la matrice unguéale n’est pas touchée. Pos : Pour application topique
sur les ongles des doigts, les ongles des pieds et les zones de peau voisines (périonyx, hypony-
chium). Appliquer une fois par jour en une couche mince. CI : Hypersensibilité au ciclopirox ou à
un des autres composants du médicament. Enfants de moins de 6 ans. Préc : En cas de survenue
d’une réaction d’hypersensibilité le médicament doit être arrêté. L’alcool cétylstéarylique peut
provoquer des réactions cutanées locales telles que par exemple une dermite de contact irritative.
EI : Très rarement : rougeur, desquamation, brûlures et démangeaisons de la zone traitée. Prés :
3,3 ml et 6,6 ml. Catégorie de remise B, admis aux caisses-maladie. Pour de plus amples informa-
tions, veuillez consulter le Compendium Suisse des Médicaments.
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… la mortalité hivernale pourrait augmenter
au fur et à mesure que les régions s’adaptent
à des températures plus élevées …
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pleur de la surmortalité hivernale est plus
importante dans les régions connaissant des
hivers plus modérés. Et dans leur ensemble,
les études montrent que les régions où l’on a
su s’adapter à des climats chauds étaient
susceptibles d’afficher des hausses de mor-
talité hivernale deux à trois fois plus impor-
tantes que les régions où l’on s’était adapté
à des températures basses.
Pour les auteurs de ce travail, ceci laisse
entendre que, dans des conditions de ré-
chauffement climatique, la mortalité hiver-
nale pourrait augmenter au fur et à mesure
que les régions s’adaptent à des tempéra-
tures plus élevées. Des observateurs ont noté
que la mortalité augmentait de 4% pour
cha que baisse de 1°C des tem-
pératures de la saison froide
à Bangkok (Thaï lande) alors
même qu’elle n’augmentait
que de 0,4% pour chaque
baisse de 1°C des tempéra-
tures à Ljubljana (Slovénie).
A partir de leur revue de la
littérature, les auteurs con-
cluent qu’il est peu probable
que les hivers plus chauds,
dus au changement climati-
que, entraînent une baisse si-
gnificative de la mortalité sai-
sonnière hivernale aux Etats-
Unis et en Europe. «De plus,
nous con sidérons possible
que des vagues de froid sur-
viennent, avec des effets sa-
nitaires associés potentiellement importants,
con cluent-ils. L’interaction entre les trois
fac teurs de risques principaux "saison-
froid-maladies in fectieuses" ne permet pas
d’attribuer clairement ces impacts au froid
seul. Comme cela a été fait pour les vagues
de chaleur, des études épidémiologiques
sur les vagues de froid sont nécessaires, afin
de mieux quantifier les risques sanitaires,
d’identifier les populations vulnérables et
de définir les mesures de prévention appro-
priées. Il est également impératif de mieux
comprendre les caractéristiques de l’exposi-
tion au froid, et de bien différencier statisti-
quement la température, la saison et les
autres facteurs de confusion.» Quels météo-
rologues des vies humaines se passionne-
ront pour cette question ?
Jean-Yves Nau
jeanyves.nau@gmail.com
1 Ce travail est signé de Patrick Kinney (Columbia Univer-
sity, Mailman School of Public Health, New York), Ro-
bert Vautard (Laboratoire des Sciences du climat et de
l’environnement, Paris), Mathilde Pascal et Karine Laaidi
(Institut de veille sanitaire, Saint-Maurice, France).
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