Le dynamisme industriel du Québec exige le contraire des

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Le dynamisme industriel du Québec exige le
contraire des mesures sur l’énergie de la Loi 28
En matière d’énergie, le gouvernement est difficile à suivre. Il
emprunte aujourd’hui une voie qu’il faut absolument éviter.
Difficile à suivre…
Malgré les coûts de gestion déjà faramineux des surplus d’électricité d’HydroQuébec, le gouvernement a relancé en début de mandat les projets de petites
centrales hydrauliques, abandonnés pour toutes les bonnes raisons par le
gouvernement précédent.
Le 24 septembre dernier, le gouvernement adopte un « Décret de préoccupations »
(841‑2014) où il invite la Régie de l’énergie à tenir notamment compte dans la
fixation de ses tarifs de l’« effritement de la compétitivité des tarifs d’électricité
et de « la capacité de payer des ménages à faible revenu ».
Il contribue pourtant à cette augmentation tarifaire – pour 2015 et les années
à venir – en maintenant son appel d’offre de 450 MW d’électricité éolienne,
entièrement excédentaire, et en refusant aux citoyens et aux industriels actifs au
Québec l’utilisation prioritaire de l’énergie patrimoniale.
Après s’être opposé en juin 2013, en Commission des finances publiques, à la
Loi 25 du gouvernement précédent visant essentiellement les mêmes objectifs à
l’égard de l’électricité, le gouvernement libéral reprend ces mauvaises décisions à
son compte et va encore plus loin dans la Loi 28.
… le gouvernement s’engage maintenant
dans une voie qu’il faut éviter à tout prix
La Loi 28 sur la mise en œuvre de certaines dispositions du discours compte plus
de 300 pages et couvre un grand nombre de sujets. Sur celui de l’énergie, les
amendements proposés sont dévastateurs pour l’ensemble des Québécois et
surtout pour les industries grandes consommatrices d’électricité qui constituent
Le dynamisme industriel du Québec exige
le contraire des mesures sur l’énergie de la Loi 28
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le moteur économique de régions entières et qui contribuent de façon stratégique au développement
du Québec.
Les amendements proposés viennent en effet :
• Entériner l’impuissance de la Régie de l’énergie à tenir compte des besoins réels en approvisionnement
d’électricité au Québec;
• Renier le droit des Québécois et des industriels à l’énergie patrimoniale à faible coût;
•Saisir les trop-perçus d’Hydro-Québec dans ses activités réglementées plutôt que de les partager
avec ses clients;
• Escamoter les surplus d’énergie, en obligeant les Québécois à payer le fort prix de l’électricité postpatrimoniale et en gardant pour lui, derrière les barrages d’Hydro-Québec Production, l’énergie
patrimoniale à des fins d’exportation.
Un risque sérieux pour la structure industrielle du Québec
L’industrialisation du Québec et la construction des grands barrages sont allées de pair. Les industries
disposaient d’électricité à bon prix, et le Québec y trouvait des débouchés qui contribuaient à
l’amortissement du réseau de barrages dont la production constitue l’énergie patrimoniale.
L’évolution de la mondialisation de l’économie et, surtout, la diminution de la compétitivité des tarifs
industriels d’électricité québécois ont fait diminuer la part de l’électricité utilisée par les industries
grandes consommatrices d’électricité. En fait, leur part de l’électricité distribuée au Québec a chuté
de près du quart entre 2006 et 2014, passant de 41,8 % à 32,2 %. Et le déclin se poursuit.
Évolution de la proportion de l’électricité utilisée par les grands industriels
(en mégawatts)
02
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Tarif L
45 301
43 609
40 613
35 926
39 223
39 227
37 659
38 184
30 160
29 957
Tarifs spéciaux
25 807
27 672
27 460
26 137
27 444
26 646
26 943
26 251
25 089
25 404
Total Tarifs L et spéciaux
71 108
71 281
68 073
62 063
62 063
65 873
64 602
64 435
55 249
55 361
Énergie totale
distribuée
170 232 172 120 170 610 165 619 170 637 170 793 170 906 171 463 171 409 172 341
%Tarifs L et spéciaux
41,77% 41,41% 39,90% 37,47% 36,37% 38,57% 37,80% 37,58% 32,23% 32,12%
Le dynamisme industriel du Québec exige
le contraire des mesures sur l’énergie de la Loi 28
Une reprise… ailleurs qu’au Québec
Le secteur manufacturier reprend son effervescence aux États-Unis mais poursuit sa chute au Québec
(2002 = 18 % de l’emploi, 2014 = 12 %). Aucun ajout important de capacité et aucune nouvelle
implantation industrielle d’envergure ne se sont faits au Québec depuis plus de 10 ans.
Le tarif industriel (L) est si peu compétitif que le gouvernement doit annoncer en grandes pompes un
tarif de développement industriel, de 20 % inférieur au tarif L, pour attirer les ajouts de capacité ou
les nouvelles implantations.
Mais il suffit de franchir la frontière des États-Unis pour avoir accès à des tarifs aussi avantageux, et
parfois encore plus, sans conditions et sans limite de temps. Le tarif de développement industriel, c’est
trop peu, trop tard.
La preuve en est patente dans le secteur de l’aluminium :
Perte de compétitivité du tarif L : Exemple du secteur de l’aluminium
Le tarif L situe le Québec dans le 4e quartile de l’industrie mondiale de l’aluminium
(excluant la Chine)
Coût d’électricité par aluminerie (USD ¢/kWh1)
(2013 monde excluant la Chine2 )
9
8
Tarif L (2013) après
crédits haute-tension et
transformation
(4,25 ¢/KWh)
7
6
Tarif L après la
hausse de 3,5%
pour 2014
(4,40¢/KWh)
5
4
3
2
1
0
Q1
Q2
Q3
Q4
1. Basé sur un taux de change CAD:USD de 1,00 pour 2012
2. En raison de son économie planifiée, les prix de l’énergie que pratique la Chine ne répondent pas aux
mêmes impératifs. Leur inclusion fausse donc la réalité du marché mondial.
Source : CRU 2013, R-3854-2013
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Et elle l’est aussi dans de nombreux autres secteurs industriels, comme l’indique cet autre exemple des
prix payés par un industriel possédant des installations au Québec et ailleurs en Amérique du Nord :
Coûts d’électricité - Juillet 2013
$/MW
50 $
45 $
40 $
35 $
30 $
25 $
20 $
15 $
10 $
5$
0$
2010
2011
Québec - tarif L
NY Hydro
2012
Louisiana IOU Industrial
2013
(juillet)
2014
Prévision
Gulf Coast Cogen
Le tarif L est si peu favorable dans l’économie mondialisée actuelle que son application aurait
provoqué la fermeture en 2015 des activités de l’un des plus grands fabricants d’aluminium au Québec,
entraînant la perte de milliers d’emplois et la mise sur respirateur économique de régions entières.
Malgré cela, le gouvernement n’hésite pas à augmenter le tarif L, en ajoutant aux coûts de l’électricité
post-patrimoniale par un appel d’offre d’énergie éolienne déraisonnable, en reniant toute autorité de
la Régie de l’énergie en matière d’approvisionnements et en se réservant non seulement l’électricité
patrimoniale, mais aussi les trop-perçus d’Hydro-Québec dans ses activités réglementées.
Ces mesures contenues dans la Loi 28 entraîneront immanquablement
des délocalisations et des fermetures de moteurs économiques et,
malheureusement, plus tôt qu’on ne le croit.
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Le dynamisme industriel du Québec exige
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De porteur d’eau à porteur d’hydroélectricité ?
Pourquoi ne pas se servir en premier de l’électricité patrimoniale pour dynamiser notre structure
industrielle, plutôt que de l’exporter pour favoriser nos concurrents ?
C’est se priver de beaucoup plus que de tarifs d’électricité. Les industries grandes consommatrices
d’électricité injectent ici plus de 16 cents par kWh utilisé, en achat d’électricité, en masse salariale et
en dépenses en matières premières, en biens et en services.
Entrées de fonds pour le Québec
L’utilisation de l’électricité, plus rentable que l’exportation
18
16
8,7
14
Cents/kWh
12
10
8
Les industries grandes consommatrices d’électricité investissent
en moyenne au Québec 16,4 cents par kWh consommé, en masse
salariale, en achat d’électricité, en matières premières ainsi qu’en
biens et services liés à l’exploitation courante. Cette estimation
n’inclut pas les impôts d’entreprise ni les effets indirects résultant
de l’exploitation des usines. Elle n’inclut pas non plus les dépenses
réalisées au Québec dans le cadre des investissements pour le
maintien des installations, qui se chiffraient à 2,7 G$ en 2011.
3,1
6
4
Le prix moyen offert actuellement sur
les marchés d’exportation est égal ou
inférieur au tarif grande puissance (L)
4,6
2
4,6
0
Dépenses d’exploitation
au Québec des industries
grandes consommatrices
d’électricité par kWh (2011)
Énergie
Masse salariale
Exportation
d’électricité
Prix moyen 2011
Dépenses en matières premières, biens et services au Québec
Note : Résultat obtenu à l’aide d’un sondage auprès de 30 usines grandes consommatrices d’électricité (GCE)
représentant 52 % de la consommation totale des GCE
L’équation est encore plus négative lorsque le manque de compétitivité des tarifs industriels force
une entreprise à délocaliser ou à cesser ses activités. En plus des retombées économiques et des tarifs
d’électricité perdus, il faut ajouter les programmes sociaux et les investissements dans la réorientation
économique de localités ou de régions entières. Le Québec y perd sur tous les plans.
Et l’exportation n’est pas une planche de salut. Les interconnexions actuelles sont utilisées à capacité.
Pour exporter plus, il faudra en construire de nouvelles ce qui n’est ni automatique – de l’opposition
se manifeste sur les projets actuels; ni rapide – une fois approuvé un projet peut prendre des années
à se réaliser; ni gratuit – la construction de telles infrastructures se chiffre en milliards $, ce qui en
réduit grandement la rentabilité.
Le dynamisme industriel du Québec exige
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En manque de débouchés, tenter de faire disparaître les excédents d’électricité derrière les barrages
hydroélectriques, en privant les Québécois de leur énergie patrimoniale, est une idée vouée à l’échec.
S’il est un moment où le Québec a besoin de jouer ses atouts
pour relancer sa propre activité économique et industrielle,
c’est bien aujourd’hui !
Gonfler à court terme les profits d’Hydro-Québec – et de son
actionnaire unique – en fragilisant la structure industrielle du Québec
n’avance en rien le Québec dans son autonomie économique et dans
sa création de richesse.
Compétitivité
Le gouvernement reconnaît la perte de compétitivité du tarif industriel dans son « Décret de
préoccupations », même s’il n’en tire pas les conclusions qui s’imposent.
La Commission sur les enjeux énergétiques du Québec, bien que ses prémisses n’aient pas été
favorables à l’industrie, n’a pu faire autrement que de conclure aussi que les tarifs d’électricité
québécois n’avaient plus le même attrait.
Afin d’éviter de surcharger la facture tarifaire, le rapport de la Commission recommandait d’agir
« immédiatement pour cesser tout ajout de capacité de production d’électricité »1, soulignant de
plus, à l’égard de l’énergie éolienne que « le rôle premier du gouvernement n’est pas de créer des
industries mais bien de mettre en place des orientations structurées et une réglementation facilitant
un développement économique durable et profitable pour toutes les régions. »2
Malgré cette évidence, et celle encore plus frappante des surplus d’approvisionnement, la Régie
de l’énergie avouait dans sa décision 3866-2013 son incapacité à tenir compte de la réalité. Le
gouvernement dans la Loi 28, tient à exacerber cette incapacité.
De plus, il opère lui-même un déni de la réalité en tentant d’escamoter les surplus d’approvisionnement,
une illusion qui ne trompe personne.
1.Recommandation 41, page 231, Maîtriser notre avenir énergétique pour le bénéfice économique, environnemental et
social de tous, Commission sur les enjeux énergétiques du Québec, Roger Lanoue, Normand Mousseau, Coprésidents,
Gouvernement du Québec, Février 2014, 308 pages
2.Op. cit. p.55
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Le dynamisme industriel du Québec exige
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Stabilité, prévisibilité
Pour attirer les investissements industriels, les tarifs d’électricité doivent aussi être stables et prévisibles.
La décision de la Régie de ne pas tenir compte du contexte excédentaire de l’approvisionnement
confirme que les hausses se poursuivront sans aucun lien avec les marchés internationaux.
Pire encore, les mesures prévues dans la Loi 28 viennent dessaisir entièrement la Régie de toute
influence sur la gestion des approvisionnements. Les audiences qu’elle tient aux deux ans sur le plan
d’approvisionnement d’Hydro-Québec Distribution (le Distributeur) deviennent caduques ou, encore
pire, de la mascarade.
En tentant de faire disparaître les surplus, en enlevant à la Régie de l’énergie toute pertinence
en matière d’approvisionnements, la Loi 28 vient entériner d’avance l’adoption d’augmentations
tarifaires sur la base de préoccupations internes au Québec qui peuvent mal s’accorder à la compétition
internationale.
De plus, en saisissant les trop-perçus, plutôt qu’en les répartissant selon la méthode que vient
d’élaborer la Régie, le gouvernement envoie le signal qu’il peut jouer à sa guise dans la fixation
des tarifs. Même si cette saisie des trop-perçus ne durait pas longtemps – ce dont l’état des finances
québécoises fait douter – le message demeure limpide.
En l’absence de « surplus » chez le Distributeur, l’actionnaire d’Hydro-Québec pourrait même décider
d’utiliser finalement la capacité de production de la centrale thermique de TransCanada Énergie, afin
de valoriser au maximum l’électricité patrimoniale à son propre bénéfice.
Devant un tel laxisme réglementaire, qui laisse toute discrétion au gouvernement d’agir directement
sur les tarifs, il devient difficile, voire impossible, pour un groupe industriel de considérer un
investissement.
Une entreprise pour laquelle l’électricité représente de 25 % à 75 % de ses intrants, comme c’est le cas
des industries grandes consommatrices d’électricité, ne peut tout simplement pas investir lorsque les
tarifs d’électricité ne sont ni compétitifs, ni stables, ni prévisibles. D’autant plus que les perspectives
d’investissements, dans des juridictions souvent plus accueillantes, ne manquent pas sur la planète.
La compétition des filiales nationales pour les investissements au sein des grands groupes est féroce.
Les entreprises ont le choix, se voient offrir de nombreux incitatifs. Et une installation industrielle
d’envergure où l’on n’investit pas est vouée à la délocalisation ou à la fermeture.
Les amendements proposés en matière d’énergie dans la Loi 28 vont
EXACTEMENT dans la direction opposée aux conditions qui favorisent
l’investissement et attirent les nouvelles implantations.
Le gouvernement ne peut traiter la question énergétique comme si
le Québec vivait en vase clos. Surtout lorsqu’il s’agit de l’un de nos
principaux moteurs de développement industriel et de création de
richesse, dont le Québec a si grandement besoin.
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le contraire des mesures sur l’énergie de la Loi 28
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Conclusion :
Un amendement à la Loi sur la Régie de l’énergie est essentiel,
mais pas celui-là !
Les intérêts à court terme du gouvernement à l’égard de l’équilibre budgétaire ne doivent pas nuire
aux intérêts à long terme des Québécois, au développement industriel et à la croissance économique
que peuvent assurer des tarifs compétitifs, stables et prévisibles.
Surplus d’approvisionnement
La reconnaissance des surplus est nécessaire pour rationaliser les approvisionnements. Il est essentiel
de respecter la réalité des faits pour éviter la mise en service d’énergie additionnelle à fort coût, ce qui
ne peut que faire escalader les tarifs. Or, les tarifs industriels sont déjà improductifs pour maintenir et
stimuler l’activité industrielle au Québec. Les faire augmenter relève de l’irresponsabilité.
Approvisionnements
C’est pourquoi l’amendement législatif nécessaire doit exiger de la Régie qu’elle tienne compte des
besoins d’approvisionnement réels dans l’autorisation de tout appel d’offre.
Énergie patrimoniale
Plutôt que d’obliger les clients d’Hydro-Québec à assumer tous les coûts de l’énergie post-patrimoniale,
ils devraient avoir un accès prioritaire à l’énergie patrimoniale. Telle était l’intention à l’origine de la
création du concept d’énergie patrimoniale et de la Régie de l’énergie.
La compétitivité, la stabilité et la prévisibilité des tarifs industriels
d’électricité ne sont pas des choix. Ce sont des conditions.
Si l’on ne réussit pas à les réunir de nouveau, la structure industrielle
du Québec ne peut qu’en souffrir.
Et, avec elle, la solidité de l’économie québécoise et la capacité
d’offrir les services qui font la fierté des Québécois.
08
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