Extrait du manuscrit LE FÉMINISME ATTAQUE LE MAL À LA RACINE
Marseille, octobre 2015 – janvier 2017, [email protected]
Chapitre DOMINATION MASCULINE ET RÉSISTANCES FÉMININES
DANS LE CAPITALISME
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Quels apports du féminisme dans l'analyse et la solution du problème politique que nous pose
aujourd'hui le capitalisme ?
Le capitalisme n'est pas seulement facteur d'injustices, violences, destructions … , il met
l'humanité actuellement dans une situation de grand péril : risques géo-politiques donc militaires
extrêmes (armes atomiques …), dégradation rapide des éco-systèmes (voir Franz J. Broswimmer,
Une brève histoire de l'extinction en masse des espèces, éd. Agone, 2010), et enfin la catastrophe
climatique déjà engagée et qui comporte le risque d'un emballement détruisant entre autres l'espèce
humaine.
Pour agir de façon à écarter ces périls, il est décisif de comprendre les processus de décision :
pourquoi et comment les décideurs politiques et économiques persévèrent-ils dans des voies
destructrices, alors qu'ils disposent des informations qui devraient les amener à changer de
politique ? A cet égard les motivations d'ordre psychologiques doivent être relativisées : c'est la
logique de la compétition dans le cadre du système qui pousse à des décisions court-termistes,
destructives et irresponsables. Et les décideurs sont sélectionnés par leur réussite à court terme
(évincer des rivaux, gagner des élections, satisfaire des actionnaires), ce qui élimine les décisions
prudentes et soucieuses de l'intérêt général et du long terme, et sélectionne des décideurs veules ou
pervers.
Mais la révolte contre ce système est parfaitement possible, et les occasions ne manquent pas.
Alors pourquoi n'y a-t-il pas, ou très insuffisamment jusqu'à ce jour, une réaction résolue face aux
dangers et une insurrection individuelle et collective contre ce système ? Et il ne suffit pas de
répondre que les gens ont prisonniers du système, car en fait on n'est jamais complètement
prisonnier d'un système, on peut toujours au moins réagir, pourvu qu'on ait des possibilités de
réflexion, ce qui est le cas avec les acquis culturels des sociétés actuelles (en gros le savoir-lire et
l'accès à l'internet). A cet égard la question de ce qui se passe dans la tête des gens n'est pas
secondaire : adhésion ? Inconscience ? Mauvaise perception des dangers et des priorités ? Doutes
sur l'efficacité de telle ou telle action ? Peur ? Mensonge à soi-même ?... C'est pourquoi il est
impératif de comprendre quelles motivations poussent les gens à jouer le jeu des systèmes en place
ou à refuser de jouer le jeu et à chercher des alternatives. Il est impératif de comprendre quels
schèmes d'action sont enrôlés et développés par le capitalisme.
Or beaucoup de ces motivations et schèmes d'action sont très liés à la domination masculine.
Donc la compréhension du fonctionnement de la domination masculine, sans être la clé de tout, est
une composante décisive de la compréhension du fonctionnement du capitalisme, et des possibilités
1
de le contrer. La critique féministe de la domination n'est pas un ajout extérieur à l'analyse du
capitalisme.
L'éthologie animale et les diverses disciplines de la psychologie humaine nous amènent à
penser que le désir de pouvoir (exercer un pouvoir sur autrui et obtenir son allégeance) est un
moteur décisif de la domination, plus encore que l'égoïsme. Cela apparaît assez clairement dans le
fonctionnement du capitalisme : bien que les philosophies utilitaristes prétendent que l'économie
libérale met l'intérêt économique avant l'intérêt pour le pouvoir, il est clair que pour les détenteurs
de capitaux les innovations techniques et l'accumulation du capital sont plus un moyen de pouvoir
qu'un moyen de satisfaire leurs besoins, qui sont déjà plus que largement satisfaits1.
Or l'analyse évolutionniste du conflit entre les sexes nous a montré que le désir de pouvoir est plus
important dans les stratégies reproductives et sexuelles masculines que féminines. Pour résumer
grosso modo cette différence on peut dire que dans les stratégies féminines le pouvoir sur autrui doit
surtout servir à aménager les conditions inter-individuelles de la reproduction (par exemple avoir
un mari fiable qui protégera et nourrira les enfants), alors que dans les stratégies masculines il y a
une tendance à rechercher la maximisation du pouvoir, à la fois pour féconder un maximum de
femelles et pour écarter les rivaux ; dans les stratégies féminines il vaut mieux que l'individue (et les
autres) se contentent d'un pouvoir limité, alors que dans les stratégies masculines il vaut mieux
savoir saisir toutes sortes d'occasion d'illimitation de son pouvoir. Dans le même ordre d'idées on
remarque aussi dans les statistiques que les hommes sont plus enclins que les femmes à la prise de
risques.
Pour ces raisons le capitalisme, en tant que système économique qui met plus l'accent sur
l'accumulation de ce concentré de pouvoir qu'est le capital que sur l'entretien de la vie sociale, a
partie liée avec l'ethos de genre de la domination masculine. Le fait que la richesse sous la forme
monétaire n'ait pas de limites concrètes et que l'accumulation du capital soit la règle principale de la
vie économique encourage le désir fantasmatique plutôt masculin d'une illimitation du pouvoir. Et
de l'autre côté on laisse aux femmes le travail domestique et l'entretien de la vie sociale, le care au
sens large, qui se trouve par là rattaché à la définition du féminin (alors qu'en soi le care n'est pas
spécifiquement féminin). Ce travail n'est pas comptabilisé dans la production de richesse, il est mis
en position subordonnée et dévalorisée, et réduit au silence. Certes l'assignation des femmes au care
domestique, et la dévalorisation-et-occultation de leur travail ne sont pas propre au capitalisme,
mais le capitalisme maintient cette subordination et occultation.
A l'opposé, c'est à partir de la notion de care que l'on peut penser une économie non
prédatrice vis-à-vis de la nature, ce que j'appelle une « économie du ménagement ». Cette économie
à construire n'est pas spécifiquement féminine, mais face à la domination masculine et au
1 Ici il faudrait ajouter une note sur la notion de paradigme, notamment différente de la notion d'hypothèse, sur son
pouvoir cognitif et heuristique, sur ses limites, sur la nécessaire coexistence de plusieurs paradigmes dans la
connaissance de systèmes complexes tels qu'une société. On peut faire la comparaison avec la pluralité des paradigmes
en médecine. Par exemple, à propos d'un même patient, d'un même vécu, l'endocrinologie et l'ostéopathie (etc.!) n'ont
clairement pas le même paradigme, elles ne construisent pas le même objet théorique, même s'il y a des ponts entre les
deux approches. Et il n'y a pas de paradigme d'ensemble de la médecine, comme on a pu croire que fut la théorie des
humeurs selon Hippocrate. Le paradigme que nous présentons pour l'anthropologie et la sociologie est celui de la lutte
pour le pouvoir telle qu'elle résulte du conflit entre les sexes chez les animaux gonochoriques. Évidemment ce
paradigme n'explique pas tout. Par exemple pour expliquer la religion, ses institutions, ses pratiques, on a besoin de
comprendre la logique propre des systèmes fantasmatiques qui sous-tendent les croyances, et des fonctionnements
neurologiques qui sous-tendent ces systèmes fantasmatiques (avec en particulier la contrainte à la cohérence des
systèmes de croyance), et tout cela ne peut pas être déduit de façon univoque à partir de la psychologie évolutionniste
(bien qu'elle apporte toutefois quelques éclairages). Ce paradigme des systèmes de croyances, j'en ai très peu parlé. J'ai
un peu plus parlé du paradigme de l'économie, c'est-à-dire des effets de l'interaction entre les décisions des agents
positionnés dans des rapports sociaux de production, paradigme qui a une place considérable chez les humains et
notamment dans le capitalisme. J'en ai parlé parce que je veux montrer la complémentarité entre ce paradigme, qui en
gros est celui du féminisme « matérialiste », et celui du féminisme évolutionniste. Mais, je le répète, d'autres
paradigmes sont possibles et intéressants.
2
capitalisme, la construction d'une telle économie suppose un parti pris en faveur des intérêts
spécifiques aux femmes et de leur citoyenneté.
Enfin, comme la prévalence du pouvoir sur le ménagement génère une économie de la
déprédation, l'affirmation d'une économie écologiquement soutenable ne passe pas tant par
l'établissement, certes indispensable, de pouvoirs écologiquement vertueux, que par la remise en
cause du pouvoir pour le pouvoir c'est-à-dire par une démocratisation radicale de toute la vie sociale
et le réenchâssement de l'économique dans le social démocratisé.
Nous présentons dans ce chapitre sous forme d'un tableau une vue d'ensemble résumée de
cette compréhension éco-féministe du capitalisme et des luttes sociales qui peuvent engager la
transition à une économie solidaire. Nous essaierons par ce tableau de rassembler sur une même
page les traits typiques et importants de la domination masculine qui sont présents et remplissent
des fonctions décisives dans le fonctionnement du capitalisme – ainsi que du système des États à
l'époque capitaliste.
Le féminisme n'est pas un « supplément d'âme », ni un chapitre annexe dans les programmes.
Il porte en lui-même une critique des ressorts fondamentaux du système actuel des dominations, et
apporte une alternative de civilisation2.
Remarque sur « l'intersectionnalité »
Souvent on pense que les rapports sociaux entre classes et les rapports sociaux entre sexes
obéissent à des logiques distinctes, et qu'il faut d'une part comprendre chacune de ces logiques, et
d'autre part comprendre comment dans le concret les deux logiques se combinent (on appelle cela
l'intersection entre les questions de genre et les questions de classe). Certes. Mais la thèse que je
défends ici est qu'il y a plus qu'une combinaison entre deux logiques distinctes, et que ces deux
logiques ont pour ainsi dire des racines communes, qui expliquent non seulement des analogies
mais des boucles de renforcement entre les désirs et comportements de la domination masculine et
ceux inhérents au fonctionnement du capitalisme. Et par conséquent au niveau de l'action politique
il ne s'agit pas seulement de tenir ensemble ou de combiner anticapitalisme et féminisme : on a
besoin du féminisme pour la compréhension et la critique du capitalisme en lui-même, et pour la
définition d'alternatives au capitalisme. La sortie du capitalisme, la construction d'alternatives
macro-économiques, et dans l'immédiat la construction de réponses sociales, politiques,
économiques, aux crises provoquées par le capitalisme doit (et peut) mobiliser des désirs et
comportements opposés à ceux de la domination masculine.
Voici donc les idées-forces qui seront mentionnées dans le tableau synoptique qui suivra.
Parmi les motivations de ses décideurs, le capitalisme mobilise la course au pouvoir,
l'illimitation des désirs dans la course au pouvoir, le déni des limites.
Or nous avons vu que ces motivations, sans êtres absentes chez les femmes, sont plus
présentes chez les hommes et sont partie prenante de l'ethos de la domination masculine.
Ce point de la critique féministe du capitalisme vaut aussi contre le militarisme. La course
aux armements est la pire illustration du déni des limites dans la course au pouvoir. Il est évident
2 Ce chapitre doit beaucoup à un exposé de Christa WICHTERICH, « Stratégies de passage à une économie de post-
croissance : vision féministe », à l'Université d'été des ATTAC d'Europe à Fribourg (Freiburg-in-Breisgau), août 2011.
Malgré la grande clarté de l'exposé je n'ai pas tout compris car c'était en allemand ; j'ai donc dû reconstruire ou imaginer
certains éléments du raisonnement. Par ailleurs l'éclairage apporté par la conférencière me faisait rebondir vers d'autres
explications. Ce que je présente ici est donc une interprétation personnelle qui comporte peut-être certains décalages.
Relire et recycler les fichiers perspective feministe altermondialiste.doc et féminisme écologie anticapitalisme.doc
3
que le bellicisme n'est pas neutre quant au genre. On ne peut pas concevoir la lutte pour la paix
sans le féminisme, et réciproquement.
L'éthologie animale et la psychologie humaine nous amènent à penser que le désir de pouvoir
(exercer un pouvoir sur autrui et obtenir son allégeance) est un moteur décisif de la domination,
plus encore que l'égoïsme. Cela apparaît assez clairement dans le fonctionnement du capitalisme :
bien que les philosophies utilitaristes prétendent que l'économie libérale met l'intérêt économique
avant l'intérêt pour le pouvoir, il est clair que pour les détenteurs de capitaux les innovations
techniques et l'accumulation du capital sont plus un moyen de pouvoir qu'un moyen de satisfaire
leurs besoins, qui sont déjà plus que largement satisfaits. Le fait que la richesse sous la forme
monétaire n'ait pas de limites concrètes et que l'accumulation du capital soit la règle principale de la
vie économique excite le désir fantasmatique, plutôt masculin, d'une illimitation du pouvoir.
Un trait saillant du capitalisme est le rôle central qu'y joue l'accumulation de ce concentré de
pouvoir social qu'est le capital, accumulation rendue possible par la marchandisation toujours plus
large de tous les facteurs de la production. Avec du capital rien n'est définitivement interdit, tout
s'achète. En achetant le travail d'autrui on développe la production de marchandises. Avec ces
marchandises on séduit des acheteurs, on gagne des marchés, on augmente son capital. Et ainsi de
suite. Le pouvoir du capital est capable de briser, mieux que le pouvoir des armes et souvent en
combinaison avec lui, les diverses limites à la domination qui peuvent exister dans les systèmes
sociaux. Et cela conforte chez les détenteurs de capital l'illusion d'un accomplissement illimité des
désirs. Certes on peut être un capitaliste et profiter de ce système sans se laisser prendre au jeu ; on
peut avoir d'autres intérêts dans la vie. Mais l'accumulation du capital reste la suprême règle du jeu.
Dans la compétition marchande tout ralentissement dans l'accumulation du capital induit le risque
de perdre des positions sur le marché, et notamment d'être lâché par les actionnaires. Par là le
système sélectionne des dirigeants qui se vouent à l'accumulation indéfinie de pouvoir monétaire.
Dans tout système de domination, le but suprême de la classe dominante n'est pas tant l'amélioration
de sa qualité de vie que l'aménagement et la pérennisation de sa domination, mais dans le
capitalisme l'impératif suprême de la classe dominante n'est pas tant l'aménagement de sa
domination que l'illimitation de sa puissance. C'est sous cet impératif que les décideurs capitalistes
(et étatiques) mobilisent les ressources techniques et économiques de la société. L'illimitation de la
puissance du capital remodèle en permanence la vie quotidienne : travail, consommation, cadre
urbain ... Marx a montré comment le capital, qui dans le fond est l'organisation d'un rapport de
pouvoir entre les classes, apparaît comme une puissance surnaturelle : il parle de « fétichisme » de
la marchandise, de la monnaie, du capital. Or ce fétiche est une machine à illimiter la puissance.
Cela ne veut pas dire que les capitalistes font ce qu'ils veulent, au contraire les règles du jeu leur
sont imposées par la concurrence. Mais sur ce champ de bataille les investisseurs qui sont aux
commandes (et au service) de ces machines sont habitués à utiliser pour toutes les décisions
importantes une puissance de domination qui n'est arrêtée par aucune limite. Cette puissance les
fascine, et fascine les dominés. Et par les techniques et les forces sociales qu'elle met en œuvre,
cette puissance sans limites assignables remodèle matériellement notre monde de façon constante.
Elle marque la culture capitaliste3.
Ce déni des limites apparaît dans le déploiement même des puissances de la technique. Le
projet même d'augmenter la puissance des hommes par la technique, le projet prométhéen, est sans
doute une conséquence de la tendance humaine à l'illimitation des désirs, plus que du désir
d'augmenter le bien-être. Cela dit l'intelligence technique et ses progrès augmentent aussi notre
capacité à mesurer les risques et pourrait nous inciter à la prudence (prudence au sens fort, qui
conduit par exemple à ce qu'on appelle le principe de précaution). Mais les décisions de mettre en
œuvre telle ou telle technique, même d'engager telle ou telle recherche scientifique, et même
3 Sur le déni des limites dans la civilisation actuelle, voir Geneviève Azam, Osons rester humains, ref.
4
l'intérêt pour les inventions techniques et les connaissances scientifiques, sont presque toujours la
conséquence d'enjeux de pouvoir politiques, militaires, économiques, ce qui conduit au
déchaînement sans prudence des pouvoirs de la technique. Dans le pouvoir étatique et plus encore
dans le capitalisme il y a une boucle de renforcement entre la course illimitée au pouvoir
économique et politique et la course à l'efficacité technique.
Cela dit, l'illimitation des désirs et le déni des limites ne sont pas uniquement liés à la course
au pouvoir. La psychanalyse a montré que les désirs humains se construisent de façon déréaliste
dans l'espace des fantasmes inconscients. Plus largement les processus mentaux ont leur autonomie
et la créativité imaginaire du cerveau humain génère chez chaque individu et dans chaque culture
une propension au délire, à l'hubris. Homo sapiens, homo demens, formule que l'on trouve chez
Edgar Morin. Cette propension à l'hubris est en grande partie endiguée par des inhibitions innées et
culturelles ; les désirs inconscients se transforment selon des processus que Freud a désignés par la
notion de principe de réalité. La propension à l'hubris n'est pas uniquement masculine, mais elle est
amplifiée chez les hommes par l'illimitation des désirs dans la course au pouvoir, et elle est plus
inhibée chez les femmes, comme on l'a vu dans les autres chapitres, du fait des contraintes de
prudence que leur imposent leur rôle dans le système mammifère de reproduction, et leur
assignation aux tâches parentales et domestiques dans l'histoire.
Toutefois l'existence de motivations « démentes », le déni des limites, avec des différences
entre hommes et femmes produites dans l'évolution par la domination masculine, ne suffit pas à
expliquer le fonctionnement du système capitaliste, puisque des motivations contraires existent
aussi dans le psychisme des humains. Et il faut souligner l'enchaînement causal en sens inverse : la
course au pouvoir dictée par le fonctionnement du système stimule et valorise l'illimitation des
désirs : dans la compétition perpétuelle entre les capitaux, entre les États, et entre les individus pour
la conquête de postes de pouvoir au sein de ces organisations, les vainqueurs sont ceux qui sont le
plus portés à maximiser leur pouvoir, les autres sont éliminés.
En somme, d'un côté le capitalisme hérite des dispositions psychiques, surtout masculines, à
l'illimitation des désirs dans la course au pouvoir ; ces dispositions, la course au pouvoir capitaliste
ne les a pas inventées ; mais d'un autre côté elle les mobilise, les amplifie, et les sélectionne, prenant
en cela le relais des systèmes de pouvoir précédents, avec ce facteur particulier d'illimitation qu'est
le pouvoir de l'argent accumulé en capital.
Entre domination de la nature et domination des femmes, il y a homologie et
renforcement mutuel. C'est une grande idée de l'écoféminisme.
L'ECOFEMINISME (voir le livre du même nom de Vandana Shiva et Maria Mies) a souligné la
profonde affinité entre le projet de domination de la nature par la civilisation et la domination des
femmes par les hommes. (Voir aussi le film de Coline Serreau, Solutions locales pour désordre
global, 2010, sur l'épuisement des sols par l'industrialisation capitaliste de l'agriculture et sur
l'imaginaire phallocratique du productivisme agricole.) On pourrait multiplier les exemples.
Mais d'où vient cette affinité ?
Dans le rapport humains–nature, il y a d'un côté la puissance productive de la nature et de l'autre
côté l'intelligence technique des humains par laquelle ils peuvent capter diverses forces de la nature,
les « domestiquer », et donc développer un désir de maîtrise de la nature. Dans le rapport hommes-
femmes il y a une relation un peu semblable, non pas au niveau des capacités intellectuelles, qui
sont naturellement égales, mais au niveau du rapport entre productivité naturelle et domination :
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