Partie II - La perception de la maladie par les malades
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MÉTHODOLOGIE
Deux questions filtres
L’introduction précise qu’en aucun cas l’enquête ne devait révéler la nature exacte de leur maladie à ceux
qui l’ignoraient ou qui refusaient de la dénommer comme étant un cancer. Il était cependant indispensable
de s’assurer que l’enquêté parlait bien de son cancer et non d’une autre maladie, qu’il pouvait avoir. L’âge
médian des personnes atteintes d’un cancer étant 65 ans, les enquêtés pouvaient également être pris en
charge à 100% pour d’autres affections de longue durée qu’un cancer. Le questionnaire comportait deux
questions filtres qui permettaient au répondant de nommer sa maladie et à l’enquêteur de l’interroger sur
son cancer.
Une première question ouverte (B1) permettait de recenser toutes les maladies pour lesquelles l’enquêté
est pris en charge à 100% par la Sécurité sociale. Si la personne citait spontanément son cancer, éven-
tuellement parmi d’autres maladies,en employant le terme «cancer» ou un terme spécifique synonyme tel
que «leucémie», «mélanome», «lymphome», etc., un système automatique choisissait le cancer et l’en-
quêteur indiquait à la personne que, pour le reste de l’entretien, les questions porteraient sur cette patho-
logie; il répétait en fait les termes exacts prononcés spontanément par la personne interrogée.
À partir de la question ouverte B1 («Pour quelles maladies bénéficiez-vous d’une prise en charge à 100%
de la Sécurité sociale»?), trois registres de verbalisation ont été mis en évidence:
• l’emploi spontané des termes «cancer» ou «tumeur»;
• l’emploi spontané d’un terme spécifique, synonyme du cancer (tel que «leucémie», «mélanome»,«lym-
phome», «sarcome», etc.1);
• l’utilisation d’un euphémisme du type «maladie du rein», «problème au côlon», «opération de la pros-
tate», «kyste», etc.pour parler du cancer.
Si l’enquêté entrait dans le troisième groupe et ne citait pas explicitement un cancer, mais recourait à un
euphémisme (par exemple «opération de la prostate», «ablation du rein»,etc.), une seconde question (B2),
fermée cette fois-ci, lui était proposée: «Dans la liste suivante, pourriez-vous m’indiquer le nom de la ou
des maladies qui correspond(ent) le mieux à celle(s) pour la(les)quelle(s) vous bénéficiez d’une prise en
charge à 100% de la Sécurité sociale?». Parmi les maladies citées dans la liste proposée, figuraient les
termes: «tumeur bénigne», «maladie du sang non cancéreuse» et «cancer». Les personnes étaient alors
interrogées plus précisément sur leurs conditions de vie en rapport avec la pathologie cancéreuse.
Les réponses à cette seconde question filtre ont été classées en deux catégories:
• le choix final du terme «cancer» dans la liste proposée, après utilisation spontanée d’un euphémisme;
• le maintien du choix d’un euphémisme, une autre réponse («tumeur bénigne», «maladie du sang non
cancéreuse», etc.) étant sélectionnée dans la liste.
Toutefois, malgré ce dispositif de filtrage,dans 190 cas, la réponse obtenue correspondait,après une ana-
lyse ultérieure, à d’autres pathologies que le cancer ou à des cancers antérieurs à celui diagnostiqué en
2002; les questionnaires correspondants n’ont pas été exploités.
Une sous-représentation probable du «taire»
Au total, 4270 questionnaires ont été exploités. La population étudiée surreprésente très probablement
ceux qui nomment leur cancer, puisque ceux qui évoquent avec peine leur maladie ou, plus encore, ceux
qui la nient ont eu l’occasion d’échapper à l’enquête en ne donnant pas leur accord de participation. Plus
précisément, 1543 personnes n’ont pas répondu au courrier sollicitant leur accord, 1380 ont refusé par
écrit et 1117 au moment du contact téléphonique. Les raisons de ces différentes formes de refus restent
encore,pour partie, mal connues,mais il est vraisemblable qu’une des motivations possibles a été de pro-
téger le «taire».
1. Voir le questionnaire en annexe pour la liste exhaustive des termes concernés.