5 minutes pour les affaires Surplus budgétaire : Est-ce vraiment le Saint-Graal ? Le 22 septembre 2015 Jamais aura-t-on vu un sujet aussi aride que celui des finances publiques dominer autant une campagne électorale fédérale. Bien avant l’annonce par le gouvernement d’un excédent budgétaire de 1,9 milliard de dollars pour l’exercice 2014-2015, tous les partis en lice faisait de cet enjeu un puissant symbole. Le Nouveau Parti démocratique a fait valoir que son engagement à atteindre l’équilibre budgétaire témoignait de la responsabilité et du sérieux de sa plateforme (au point d’augmenter les impôts au besoin pour y arriver). Les libéraux, quant à eux, mettent en doute l’existence même d’un tel excédent, affirmant qu’il est surtout attribuable au recours à divers subterfuges comme la vente des participations du gouvernement dans General Motors, et ils promettent plutôt trois années de déficit budgétaire afin de montrer qu’ils sont davantage soucieux de relancer l’économie. Mais, pour les conservateurs, l’excédent budgétaire est une panacée, la clé de leur stratégie de réélection. On peut difficilement prétendre avoir été un gestionnaire économique hors pair pendant que le pays est en récession, mais un excédent budgétaire démontre à tout le moins que l’on n’avait pas tout faux. Le gouvernement fédéral a certes consenti des efforts colossaux afin d’atteindre l’équilibre budgétaire. La réduction de 2 % de la TPS en 2006 a créé un trou béant de 14 milliards de dollars dans le budget, que le gouvernement a mis plusieurs années à colmater au moyen de coupes draconiennes dans les dépenses gouvernementales avant de retrouver un équilibre budgétaire précaire. Puis survint, en 2009, la pire récession que l’économie mondiale ait connue depuis 1930, amenant les dirigeants du G7 à convenir de la nécessité de prendre des mesures afin de relancer l’économie. Le gouvernement conservateur s’est alors vu entraîner, bien malgré lui, à consacrer des sommes considérables, à hauteur de 35 milliards de dollars, afin de stimuler l’économie. Il est depuis lors en mode contrôle des dépenses, procédant notamment au gel de la dotation dans la fonction publique et au resserrement des budgets des ministères et organismes fédéraux. Réaliser un excédent budgétaire dans ces circonstances constitue certes tout un exploit, mais cela pourrait ne pas être le remède indiqué dans la présente conjoncture. S’il faut en croire la Banque du Canada, selon laquelle la performance économique du Canada est si « atroce » qu’il faille la stimuler en procédant à deux baisses de taux d’intérêt successives, il paraît d’autant plus étrange que le gouvernement tarisse l’apport de fonds dans l’économie en cherchant à réaliser des excédents budgétaires. Il en résulte que la politique fiscale et la politique monétaire s’orientent dorénavant dans des directions opposées. Quel que soit le gouvernement qui sera au pouvoir au lendemain de l’élection, il aura de la difficulté à équilibrer le prochain budget. En juillet, le directeur parlementaire du budget a révisé les perspectives budgétaires du gouvernement et affirmé que l’excédent de 1,9 milliard de dollars se transformerait plutôt en un déficit de 1,5 milliard de dollars, et cela avant même que le Canada soit officiellement en récession. Si l’on tient pour acquis que chaque recul de 1 % du PIB réel se traduit par un manque à gagner de 4,1 milliards de dollars en recettes gouvernementales (hypothèses budgétaires posées par le gouvernement lui-même), et que nous appliquons un taux de croissance annuel plus réaliste du PIB de 0,7 %, le Canada devrait en principe afficher un déficit de l’ordre de 3 milliards de dollars pour l’exercice 20152016. Mais alors, cela ne correspondrait qu’à une erreur d’arrondissement négligeable sur le budget de quelque 290 milliards de dollars, ce qui ne représente que 0,15 % du PIB, soit bien moins que pour l’Europe (2,9 %) ou les États-Unis (2,8 %). Pourvu que la croissance nominale du PIB du Canada se maintienne entre les 3 et 4 %, et que le déficit demeure à un niveau confortablement sous ce seuil, le rapport dette-PIB se rétrécira au fil du temps. Rappelons qu’à l’heure actuelle le gouvernement peut emprunter des fonds sur un horizon de dix ans au taux exceptionnellement bas de 1,44 %. La Chambre de commerce du Canada a toujours préconisé l’équilibre budgétaire, car nous nous inquiétons du fait que les déficits augmentent et gonflent dès que le gouvernement ne se préoccupe plus de leur ampleur. Ceci étant, les entreprises canadiennes ont également besoin d’infrastructures permettant d’acheminer leurs produits sur les marchés mondiaux. Elles ont besoin de haute technologie et de travailleurs qualifiés parmi les plus compétents du monde. Elles doivent avoir accès à des capitaux, en particulier les entreprises en démarrage à croissance rapide. Bref, l’atteinte d’un excédent ne doit pas être vue comme étant un Saint-Graal à atteindre à tout prix, à condition que les budgets soient équilibrés à moyen terme. Nous devons également investir judicieusement ces fonds, car les entreprises en plein essor et leurs employés paient beaucoup d’impôt. Pour de plus amples renseignements, communiquez avec : Hendrik Brakel Directeur principal, Politiques économiques, financières et fiscales 613 238.4000 (284)| [email protected] 5 minutes pour les affaires | La Chambre de commerce du Canada 2