Institut de Formation en Soins Infirmiers De Savoie CHAPILLON Elodie Les limitations et arrêt des thérapeutiques en Service de Réanimation Adulte Mémoire de fin d’études présenté en vue de la validation de l’UI 5.6.S6 UE 5.6.S6 : Analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et professionnelles Guidant : Véronique Bernier Promotion 2014 16 mai 2014 Remerciements Dans un premier temps je tiens à remercier Véronique Bernier pour son aide, sa disponibilité et ses précieux conseils qui ont contribués à la réalisation de ce travail. Dans un second temps je remercie les infirmiers du service de Réanimation qui se sont portés volontaires et qui ont accepté de répondre à mes questions lors de mes entretiens ce qui m’a permis d’avancer dans mes recherches. Je remercie la cadre du Service qui a accepté que je vienne faire mes entretiens dans le service. Je remercie également toutes les personnes qui ont pris le temps de lire mon travail et qui m’ont apportées des remarques constructives ainsi que ceux qui ont échangé avec moi durant cette année et qui m’ont permis de faire évoluer ma pensée. J’adresse mes remerciements les plus sincères à mes parents qui m’ont soutenue durant ce travail et qui ont fait preuve de beaucoup de patience. Je n’oublie pas de citer ma grandmère qui a accepté avec bienveillance de réaliser la photographie pour la première de couverture de mon travail. Enfin je remercie mes proches et amis Thibault Drillaud, Elise Farges et Maxime Gouillon qui m’ont encouragée et accompagnée tout au long de notre formation et qui ont fait de cette formation un souvenir inoubliable. Je dédie ce travail de fin d’étude à mon meilleur ami qui nous a quitté cette année mais qui sera toujours dans nos cœurs, ainsi qu’à mes parents Gilles et Colette Chapillon et mon tendre ami Morgan Biran. « Respecter la vie, Accepter la mort » 1 1 Leonetti Jean, Vivre ou laisser mourir : Respecter la vie, Accepter la mort, Edition Michalon, 2005 Sommaire Remerciements Introduction p.1 Partie 1 : La Phase Théorique : p.3 1.1 La Réanimation en Service Hospitalier Général p.3 1.1.1 Une équipe pluridisciplinaire p.4 1.1.2 Rôle de l’infirmier en Réanimation p.4 1.2 La fin de vie p.5 1.2.1 En service Généraux p.5 1.2.2 En Réanimation p.6 1.3 La loi Leonetti p.6 1.3.1 Acharnement Thérapeutique ou obstination déraisonnable p.7 1.3.2 Limitation ou Arrêt des Thérapeutiques Actives p.7 1.3.2.1 Limitation des Thérapeutiques p.8 1.3.2.2 Arrêt des Thérapeutiques p.8 1.3.3 Réflexion éthique et fin de vie p.9 1.3.3.1 Principe de bienfaisance p.10 1.3.3.2 Principe de non malfaisance p.10 1.3.3.3 Principe d’autonomie p.11 1.3.3.4 Principe de justice p.11 1.3.3.5 Dilemme Ethique p.12 1.3.4 Collégialité p.12 1.3.5 Qualité de vie p.13 1.3.6 Le respect de la dignité p.14 1.3.7 Total pain et soins palliatifs p.15 1.3.8 Sédation et Double effet p.16 1.3.9 Les directives anticipées p.18 1.3.10 La décision éclairée p.19 1.3.11 La loi Leonetti et ses limites en France p.19 1.4 Identité professionnelle de l’infirmier en Réanimation p.20 1.4.1 L’Identité professionnelle p.20 1.4.2 Les Valeurs soignantes 1.5 Conclusion de la phase théorique p.21 p.21 1.6 A la rencontre du terrain p.22 1.6.1 Population ciblée p.22 1.6.2 Caractéristiques de cet échantillon p.22 1.6.3 Choix de l’outil d’enquête p.23 1.6.4 Guide utilisé pour la conduite des entretiens p.24 1.6.5 Analyse des entretiens p.24 1.6 Réflexion cheminement vers la question de recherche p.32 1.7 Formulation question de recherche p.33 1.8 Mise en évidence des concepts et formulation des hypothèses p.34 1.8.1 Les concepts p.34 1.8.2 Les hypothèses p.34 Partie 2 : La Phase Méthodologique : p.35 2.1 Population cible échantillonnage p.35 2.2 Outils d’investigation argumentés p.36 Conclusion p.38 Bibliographie p.40 Sitographie p.40 Annexes : 1/ Guide d’entretien 2/ Retranscription des entretiens 1 à 5 3/ Echelle BPS 4/ Score de Ramsey 5/ Formulaire de Directives Anticipées 6/ Formulaire d’Engagement thérapeutique et conditions d’applications. Abstract Introduction La Réanimation est un service dynamique et spécifique dans lequel l’équipe pluridisciplinaire, grâce à des techniques avancées, tente de pallier à des défaillances aigues d’une ou plusieurs fonctions vitales. Les patients sont parfois en situation critique et les limites de la médecine empêchent alors le retour à l’homéostasie. La mort en réanimation est omniprésente et c’est parfois dans des moments difficiles que les professionnels sont amenés à côtoyer les proches. Autrefois, la plupart des décès survenaient à domicile. Aujourd’hui, l’évolution de la société modifie les mœurs et de plus en plus de personnes viennent à décéder à l’hôpital. En effet selon un rapport de l’IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) 58% des français meurent à l’hôpital. Selon la SFAR (Société Française d’Anesthésie et de Réanimation) près de la moitié des décès hospitaliers surviennent en Réanimation ou en service de Soins Intensifs le plus souvent suite à une décision de Limitation ou Arrêt des Thérapeutiques Actives. Cette décision est prise sous couvert de la loi (notamment la Loi Leonetti qui sera abordée dans mon travail) suite à une réflexion, lorsqu’il n’y a pas d’espoir de récupération des fonctions vitales, que la qualité de vie du patient est altérée de façon définitive et dans le but de préserver la dignité du patient. Ce thème m’intéresse car il aborde toutes les dimensions de la profession infirmière. C’est un travail qui me questionne sur mes propres valeurs soignantes et mon identité professionnelle. Ce travail de recherche va donc me permettre de poursuivre la construction de ma propre identité professionnelle. Lors de ma seconde année d’étude j’ai effectué un stage de 5 semaines en Réanimation durant lequel j’ai assisté à une décision d’arrêt des thérapeutiques. Il s’agissait d’une patiente intubée dont on a arrêté le respirateur qui la maintenait en vie. J’ai trouvé que cette situation était émotionnellement difficile à vivre et à comprendre, tant pour la famille que pour les soignants. Dans ce stage où l’on s’imagine que l’on va sauver des vies, « réanimer », alors qu’en réalité le médecin, l’infirmier et toute l’équipe, accompagnent, soulagent, c’est alors que la réflexion éthique prend une place considérable. J’ai été interpellé par cette prise de décision, si grave soit-elle. Le décès rapide de la patiente suite au débranchement du respirateur m’a questionné. A-t-on le droit de vie ou de mort sur un patient ? Peut on décider du moment où la vie se termine ? Comment la décision de limitation ou arrêt des thérapeutiques est-elle prise ? Quel accompagnement pour la famille et quelles explications sont données ? Comment le regard de la famille peut-il se répercuter sur le soignant ? Quels sont les critères qui favorisent cet arrêt des thérapeutiques ? Le vécu influence t’il les réactions de chaque protagoniste ? Comment les soignants vivent-ils ces situations ? Est-ce en accord avec leurs valeurs soignantes ? Comment humaniser un soin quand la technicité et la performance sont les mots d’ordres ? Comment la douleur et la souffrance des patients en arrêt thérapeutique est-elle prise en considération? Quelles sont les différentes stratégies d’adaptations et les différentes représentations pour le patient ? Et enfin, comment les soignants se sont ils adaptés à ces décisions modernes d’accompagnement en fin vie dans un service où l’on veut sauver des vies ? Suite à cela j’ai désiré développer une réflexion autour de la limitation des thérapeutiques actives en Réanimation. Ma question de départ est : En quoi la réflexion, la décision et la mise en application d’une limitation ou arrêt des thérapeutiques peuvent elles avoir une incidence sur les valeurs et l’identité infirmière ? Mon travail de fin d’étude sera composé d’une phase théorique dans laquelle je détaillerai ce qu’est la fin de vie en réanimation, le cadre législatif, la sédation ainsi que la loi Leonetti et son application à l’heure actuelle. Dans cette même partie j’exposerai les différents concepts en lien avec mon sujet. Enfin j’effectuerai une analyse de l’étude de terrain auprès d’infirmiers en service de réanimation et je détaillerai ma question de recherche. La phase méthodologique de mon travail constituera la seconde partie. Partie 1 : La phase Théorique 1.1 La Réanimation en Service Hospitalier Général : Réanimer signifie redonner la vie grâce à la réanimation, en anglais « to resuscitate ». La traduction anglaise que l’on fait de ce mot met en évidence cette première représentation que l’on peut avoir en entrant dans un tel service selon laquelle la prise en charge en réanimation vise à « redonner la vie ». Le verbe réanimer bien que synonyme avec « ranimer », ne s’emploie qu’au sens médical et signifie rétablir les fonctions vitales et l’homéostasie. L’homéostasie étant la capacité de maintenir à des valeurs normales les constantes physiologiques du corps humain. La réanimation selon le Larousse Médical c’est l’« Ensemble des moyens mis en œuvre soit pour pallier la défaillance aiguë d'une ou de plusieurs fonctions vitales, dans l'attente de la guérison, soit pour surveiller des malades menacés de telles défaillances du fait d'une maladie, d'un traumatisme ou d'une intervention chirurgicale »2. Le service de réanimation est un lieu où la vie est mise en jeu car les patients sont admis en raison d’une maladie grave, d’un traumatisme ou d’une situation aiguë mettant le pronostic vital en péril. Un passage en service de Réanimation peut être vécu comme très agressif voir traumatisant. En effet, le patient, la famille, et nous soignants sommes confrontés à des situations difficiles, douloureuses et complexes. Le patient en situation aiguë n’est pas toujours en état de conscience mais peut néanmoins vivre de façon désagréable ce séjour en Réanimation. Le matériel de suppléance est très invasif (Sonde naso-gastrique, sonde d’intubation, sonde urinaire, multiples cathéters etc...) L’environnement n’est pas agréable et peut être vécu comme anxiogène pour le patient mais également pour les proches (lumière artificielle violente et nuisances sonores importantes avec les alarmes des scopes). Difficile également de parler d’intimité dans un 2 Selon Larousse lieu où toutes les portes doivent constamment rester ouvertes dans l’éventualité d’une urgence. Les proches sont soumis à de réelles angoisses quant à la possible disparition d’un être cher. Les fonctions vitales du patient sont substituées à de nombreuses machines qui déshumanisent le patient et cela peut parfois choquer la famille. La nécessité d’accompagner les proches et le patient en Réanimation est primordiale. 1.1.1 Une équipe pluridisciplinaire : L’équipe médicale et paramédicale, pluridisciplinaire, se compose de Médecins Spécialistes en Anesthésie Réanimation, de plusieurs Internes en Médecine, d’une garde 24h/24, de Cadre(s) de Santé, d’Infirmiers (la loi étant de 2 infirmiers pour 5 patients minimum), d’ Aides Soignantes (la loi étant de 1 aide soignante pour 4 patients minimum) d’une secrétaire, d’une Assistante Sociale, d’une Psychologue et d’un kinésithérapeute. 1.1.2 Rôle de l’infirmier en Réanimation : L’infirmier travaillant en Réanimation a un rôle essentiel dans la prise en charge d’un patient. Il accueille celui-ci lors de son arrivé dans le service, souvent dans l’urgence. Il assiste le médecin lors des actes techniques (intubation, pose d’une voie veineuse centrale et d’un cathéter artériel). Il pratique des soins techniques tels que la pose d’une sonde urinaire, nasogastrique ou encore les soins des trachéotomies. L’infirmier travaille toujours en binôme avec une aide soignante et est généralement responsable de 2 à 3 patients. Ce travail en binôme favorise la relation avec les patients et les proches, permettant, si l’un des soignants ne « se sent pas » dans une situation particulière, de passer le relais. Ils effectuent les soins de confort et de bien être en collaboration. Il a notamment un rôle privilégié de surveillance ; des constantes, de l’état cutané, de la douleur, de la sédation, des alarmes de scope, du matériel etc. L’accompagnement qu’il prodigue auprès des patients et surtout des familles est essentiel, il explique, rassure et se rend disponible au quotidien. Il participe aux réunions collégiales et à la démarche réflexive pour les patients dont il s’est occupé. La Réanimation est un service où la vie peut être sauvée, sauvegardée grâce à de nombreux professionnels et à des techniques médicales optimales. Mais la vie peut aussi malheureusement s’y terminer, malgré les efforts de tous les protagonistes, qui mettront néanmoins tout en œuvre pour préserver la dignité du patient en situation incurable. 1.2 La fin de vie : Effectuer une réflexion autour de la fin de vie c’est aussi réfléchir autour de sa propre mort et de celle de ses proches. Il nous est difficile d’accepter l’idée qu’un jour, nous allons tous mourir et, pourtant, la mort fait partie de la vie. Les débats relatifs à la fin de vie sont-ils propres à nos sociétés modernes ? Peut on décider du moment où l’on désire mourir ? Peut-on aider quelqu’un à mourir si tel est son choix ? Ces problématiques sont d’actualités avec le procès concernant Vincent Humbert (datant de 2003) ou plus récemment l’affaire à propos de Vincent Lambert (datant de février 2014) qui provoquent des polémiques autour de la fin de vie. En réalité ce débat remonte à la nuit des temps. Gilles Antonowicz relate certaines traditions occidentales à travers les époques dans son livre intitulé « Fin de vie : Vivre ou mourir tout savoir sur vos droits ». C’est ainsi que l’on apprend que sur l’île de Cea, les personnes âgées se donnaient volontairement la mort à la suite d’un grand banquet en se jetant dans la mer du haut d’un rocher surplombant la falaise. A l’inverse, au Moyen Age, la lenteur de l’agonie rassurait et était synonyme de rédemption, gage d’une belle mort qui ne devait surtout pas survenir inopinément. La France, majoritairement catholique, en a cultivé le mythe jusqu’à une époque pas si lointaine. 1.2.1 En service Généraux : Dans les services généraux, quand le patient est en situation incurable (aucun espoir de guérison) la stratégie thérapeutique change, l’objectif n’est plus le même et les soins curatifs deviennent des soins palliatifs. Les soins palliatifs « c’est tout ce qu’il reste à faire quand il n’y a plus rien à faire »3 Dans la prise en charge d’un patient en soins palliatifs on décide de ne plus continuer les soins à visés curatifs mais cela ne signifie en aucun cas l’arrêt des soins. En effet, les soignants se doivent de continuer les soins de confort et de bien être dans le but de préserver la dignité et la qualité de fin vie du patient 3 Dr Thérèse Vanier, 1976 jusqu’à son décès. La prise en charge de la douleur est une priorité dans l’accompagnement en fin de vie. Louis Pasteur disait : « Guérir parfois, soulager souvent, écouter toujours. » 1.2.2 En Réanimation : La fin de vie en Réanimation est bien spécifique, notamment car les patients sont en situation aiguë et « maintenus » par les machines (ventilation artificielle, dialyse) ou encore les traitements (catécholamines). La loi dite de référence lorsque l’on aborde la problématique de la fin de vie est la Loi Leonetti relative aux droits du malade et à la fin de vie du 22 Avril 2005. 1.3 La Loi Leonetti : Préambule de la loi Leonetti : Cette loi ne clôt en rien le débat autour de la fin de vie qui existait déjà avant 2005. Le 9 juin 1999, la loi affirme le droit à tout patient dont l’état le requiert d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. Le 6 juin 2002, le conseil d’administration de la SRLF (Société de Réanimation de Langue Française) adopte des recommandations validées par la Commission d’éthique sur les limitations et arrêt de thérapeutique(s) active(s) en Réanimation adulte. On voit déjà apparaître les prémices de la loi Leonetti notamment concernant l’acharnement thérapeutique, la prise en charge de la douleur, la qualité de vie du patient, les limitations et arrêt des thérapeutiques actives, la notion de collégialité, de consentement éclairé et de personne de confiance. La loi Leonetti a été écrite par Jean Leonetti et promulguée le 22 Avril 2005. Cette loi était très attendue par les français et apporte deux notions fondamentales. Tout d’abord elle interdit l’euthanasie (« Acte d'un médecin qui provoque la mort d'un malade incurable pour abréger ses souffrances ou son agonie, illégal dans la plupart des pays »4) qui est considéré comme un homicide. Dans un second temps la loi interdit l’obstination déraisonnable, et c’est cette notion que nous allons expliciter. 4 Définition du mot « euthanasie » selon le Larousse 1.3.1 Acharnement thérapeutique ou obstination déraisonnable : L’acharnement thérapeutique c’est une attitude qui consiste à poursuivre des thérapeutiques à visées curatives alors qu’il n’existe pas d’espoir de guérison. Ces thérapeutiques peuvent prolonger, maintenir la vie, mais en altère sa qualité. L’acharnement thérapeutique est contraire au code de déontologie médicale et au serment inspiré d’Hippocrate : « Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. »5 En France l’euthanasie est interdite mais l’obstination déraisonnable est également punie par la loi car elle porte atteinte à la dignité. C’est un principe majeur de la loi Leonetti et son interdiction est rédigée dans le premier article : « Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. »6 Malgré l’interdiction de l’acharnement thérapeutique, aujourd’hui encore, nous pouvons en tant que soignant rencontrer de telles situations, mais alors pourquoi ? Ce qu’il est important de garder à l’esprit afin d’éviter tout jugement, c’est que dans notre quotidien, nous travaillons avec des êtres humains qui ont des façons d’être, de penser et d’agir différentes de nous et qui leur appartiennent. L’appréciation de l’état d’un patient peut varier, elle se fait au cas par cas. C’est la notion d’invidualité dans les soins. La loi ne nous donne pas la réponse à toutes les situations, elle n’est que le support, le fil conducteur poussant à la réflexion. Elle nous préserve d’une décision figée. Mais alors à quel moment franchissons nous la limite ? Sommes nous dans la persévérance ou dans l’obstination ? N’y a-t-il pas toujours un contre exemple nous permettant de dire qu’il reste une chance? Cette appréciation de la situation d’un patient relève de la responsabilité médicale mais se fait autour d’une réflexion éthique. 1.3.2 Limitation et arrêt des thérapeutiques actives : En France, environ 45% des décès hospitalier surviennent suite à une décision de limitation ou arrêt des thérapeutiques actives. 5 Serment de l’Ordre des médecins de 1996 intitulé « Le Serment d’Hippocrate » Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, article 1 www.legifrance.gouv.fr 6 La mention « NTBR » figurant parfois dans le dossier de soins du patient signifiant « Not To Be Ressuscitated » est un « type de limitation qui précède 48% des décès de patients » 7 selon la Société Française de Médecine d’Urgence dans un rapport datant de 2011. La limitation ou arrêt des thérapeutiques actives, aussi appelée LATA, est une mesure alternative à l’obstination déraisonnable. Ces décisions sont encadrées par la loi Leonetti n° 2005-370 du 22 avril 2005. 1.3.2.1 Une limitation de thérapeutique consiste à ne pas introduire de nouveaux traitements ou de nouveaux dispositifs qui seraient considérés comme déraisonnable. La limitation peut concerner la posologie ; on décide de ne pas dépasser une certaine dose d’amines vasoactives par exemple.8 Les traitements de suppléance des fonctions vitales tel que la ventilation mécanique ou encore l’épuration extra rénale sont généralement des critères de limitation. 1.3.2.2 L’arrêt des thérapeutiques consiste à arrêter un traitement déjà mis en place si celui-ci n’a pas apporté de bénéfice au patient, s’il porte atteinte à la qualité de vie et à la dignité de ce dernier. Rappelons que chaque patient et chaque situation sont différents et nécessitent donc des mesures et des prises en charges personnalisées autour d’une réflexion. Les grandes problématiques de la réanimation concernent généralement le niveau d’engagement. Il est décidé lors de réunion collégiale, autour d’une réflexion éthique, avec la participation de tous les acteurs de limiter l’engagement quand la situation le requiert. Malheureusement, en Réanimation et dans les services d’urgence, l’équipe n’a pas toujours le temps de se concerter. C’est ces situations qui imposent aux médecins une décision rapide. Faut-il réanimer ? Sans avoir pris connaissance du dossier médical, la décision est prise hâtivement. Une fois la réanimation entreprise, difficile de revenir en arrière. La mise en place d’une Réanimation d’attente peut être proposée. Celle–ci consiste à faire gagner du temps dans le but d’établir un projet thérapeutique. Elle est envisagée lorsque, ne pas réanimer, constitue une perte de chance de survie pour le patient. La réanimation d’attente n’est en aucun cas une sous réanimation. La prise en charge est 7 8 « Limitations et arrêts des traitements ou réanimation d’attente ?» page 809 SFMU/SRLF cf. Annexes n°6 : Formulaire de l’engagement thérapeutique et conditions d’applications maximale mais d’une durée limitée à moins que certaines informations aient été apportées à la connaissance du médecin et que celui-ci décide, compte tenu des antécédents ou des volontés, de limiter certains traitements. Mais alors, est-il éthiquement correct de réanimer quelqu’un pour ensuite décider d’arrêter ? Comme nous venons de le voir, ne pas réanimer constitue une perte de chance de survie pour le patient. L’âge peut il influer sur la prise de décision ? Pour permettre de répondre à ces questions, il me semble nécessaire d’aborder le concept d’éthique. 1.3.3 Réflexion éthique et fin de vie : Difficile d’aborder le concept d’éthique sans parler de celui de la morale. L’éthique n’est pas une science figée mais bien un discours soumis à l’évolution de l’homme et de ses idées. La morale, quant à elle, formule des règles de conduite sans se soucier du contexte, de la situation, dans laquelle on l’applique. La morale représente un idéal, tout comme la loi, elle marginalise ceux qui ne s’y conforment pas. L’éthique permet de coller à la réalité. Elle prend en considération toutes les informations gravitant autour d’une problématique et c’est avec cette réflexion dite « éthique » que la réponse sera la plus adaptée. Elle varie donc d’un individu à l’autre puisque le contexte de chaque situation est différent. Danielle Blondeau (de la faculté des sciences infirmières) estime que le soucis éthique doit « Être au centre des préoccupations soignantes afin d’assurer la qualité des interventions et commander le respect inconditionnel des personnes »9. Dans les situations difficiles de fin de vie en réanimation, l’équipe pluridisciplinaire œuvre dans le but de trouver la solution « la moins mauvaise » à la problématique de chaque patient. Selon un rapport datant de 2011 les limitations et les arrêts thérapeutiques sont équivalents d’un point de vue éthique. 10 La réflexion éthique donne au soin une dimension particulière. Elle favorise la relation de confiance entre le patient et le soignant. Elle préserve la dignité et la qualité de vie en se préoccupant de la souffrance du patient, qu’elle soit physique ou psychologique. Elle favorise également la cohérence du projet de soin avec la recherche de consensus au sein de l’équipe médicale et paramédicale en prenant en considération les impératifs légaux et déontologiques dont la situation requiert, l’avis du patient s’il est conscient et/ou de ses proches. 9 Extrait de l’article « Une éthique infirmière » écrit en 2008 par Jacques Sauvignet. « Limitations et arrêts des traitements ou réanimation d’attente ? » page 809, SFMU/SRLF 10 La réflexion éthique nécessite de se poser continuellement la question de l’individu dans la relation de soin. La bioéthique s’impose aujourd’hui au sein des pratiques de soin notamment aux deux étapes extrême de la vie que sont la naissance et la fin de vie. C’est ainsi qu’en Réanimation elle prend une place considérable dans le processus de réflexion en tentant de respecter au mieux les grands principes qui la compose. Dans l’ouvrage intitulé Pinciples of biomedical ethics11, Childress et Beauchamp déterminent les quatre grands principes éthiques : le principe de bienfaisance, le principe non malfaisance, le respect de l’autonomie et la justice. 1.3.3.1 Principe de bienfaisance : C’est promouvoir ce qui semble être la meilleure solution pour le patient. Ce principe repose sur le jugement des professionnels qui doivent avoir une attitude attentionnée à l’égard du patient. Pour respecter ce principe il nous faut prendre en compte la douleur, souffrance physique et psychologique, la qualité de vie du patient, ainsi que le risque d’incapacité de celui-ci voir de décès. Parfois, la bienfaisance exige que l’on n’intervienne pas auprès du patient afin de ne pas se diriger vers de l’obstination déraisonnable qui serait contraire au principe. 1.3.3.2 Principe de non malfaisance : « Primum non nocere »12 (signifiant « d’abord ne pas nuire »), est une locution latine étant le premier des quatre principes fondamentaux d’Hippocrate. « Ne pas faire mal » est différent de « faire du bien ». Respecter ce principe c’est avant tout éviter de causer un préjudice au patient. C’est s’interroger sur le rapport bénéfice/risque d’une situation. Nous nous devons de réfléchir et de prendre la meilleure des solutions pour le patient en évaluant les bénéfices mais aussi les risques des thérapeutiques. L’utilisation fréquente de traitement suppléant les fonctions vitales en service de Réanimation met en jeu, voire en conflit ces deux grands principes éthiques. En effet, l’utilisation de ces thérapeutiques telles que la ventilation mécanique suite à une intubation ou encore une trachéotomie est très invasive. Ces techniques peuvent être considérée comme des moyens disproportionnés. 11 12 Pinciples of biomedical ethics écrit en 2001 par S Holm Traité des Épidémies (I, 5) d'Hippocrate, daté de 410 av. J.-C. 1.3.3.3 Principe d’autonomie : Afin que ce principe soit respecté, nous devons donner un poids aux opinions et aux choix du patient. Pour être autonome le patient doit évaluer ses options rationnellement, en fonction du contexte et connaître les conséquences de ses choix. Ce principe a évolué ces dernières années, laissant derrière lui le principe de paternalisme selon lequel « le médecin a toujours raison ». Le principe d’autonomie est renforcé par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé13 dite Loi Kouchner dont les grands principes sont la recherche de consentement du patient, la décision éclairée de celui-ci, la qualité des services de soin ainsi que l’accès libre au dossier médical. En effet, respecter l’autonomie d’autrui suppose que cette personne ait reçu toutes les informations nécessaires à la compréhension de sa situation, qu’elle les ait comprises et qu’elle soit dans la capacité de prendre une décision pour elle-même. 1.3.3.4 Principe de justice : La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé dite Loi Kouchner apporte deux grandes notions répondants au principe de justice. La première étant « Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en oeuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne. […] Les professionnels, les établissement et réseaux de santé […] contribuent […] à garantir l'égal accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de santé et assurer la continuité des soins et la meilleure sécurité sanitaire possible »14. La non discrimination fait également partie intégrante de cette loi : « Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins »15 Ce principe éthique doit être utilisé avec prudence car il repose sur un fondement de politique économique principalement établit sur la répartition des ressources et l’équité dans les soins. En réanimation, ce principe peut mettre en évidence des difficultés en lien avec la limitation des places dans le service (l’engagement est il décidé en tenant compte de l’âge d’une personne ?). Allons nous mettre des moyens en œuvre malgré la situation ? La question relève de principe éthique et met en difficulté toute une équipe qui doit prendre la décision la plus juste, la moins mauvaise. 13 Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé, chapitre 1er article3. 14 Article L.1110-1 du Code de la Santé Publique 15 Article L1110-3 du Code de la Santé Publique 1.3.3.5 Le dilemme Ethique : Aussi appelé « conflit de valeurs », les situations où valeurs et principes entrent en opposition rendent la prise de décision difficile. La réflexion collégiale permet de confronter nos valeurs (qu’elles soient personnelles ou professionnelles), nos croyances, et les principes qui nous érigent. En tant que soignant, nous nous devons d’arriver à un consensus pour prendre la meilleure décision pour le patient, prenant en compte les tenants et aboutissants de celle-ci. La loi, les décrets, les recommandations ne peuvent que donner un fil conducteur à la réflexion qu’impose chaque situation, si singulière soit-elle. Les convictions et les certitudes permettent la prise de position de chaque protagoniste, s’engageant ainsi personnellement au risque d’être confronté à un avis différent. Le devoir de chacun des acteurs de la réflexion est avant tout d’écouter ce que chacun a à apporter dans cette réflexion. L’attitude d’écoute est essentielle et chaque expression est à prendre en considération, sans précipitation pour arriver à un consensus permettant de prendre la meilleure décision. Réfléchir de façon éthique c’est aussi permettre au groupe de mieux comprendre tous les tenants et aboutissants de la situation, une bonne compréhension favorise le vécu du soignant. A l’inverse, garder pour soi une ambiguïté, une interrogation, ne pas comprendre toute la dimension d’une situation, peut être vécu comme désagréable voir comme un échec. Nous l’avons vu, il est donc nécessaire de mettre en place une réflexion collégiale. 1.3.4 La Collégialité : La loi du 22 avril 2005 donne un cadre légal aux limitations et arrêts des thérapeutiques en réanimation, notamment en ce qui concerne la prise de décision. La décision doit être prise de façon collégiale, c'est-à-dire que le médecin référent du patient dans le service doit prendre l’avis d’un médecin consultant et doit également consulter l’équipe soignante (infirmiers, aides soignants). Cette réflexion, faite en interdisciplinarité, permet une vision holistique du fait de la proximité des soignants auprès des patients au quotidien. La réflexion n’est alors plus seulement médicale. En effet, chaque soignant a le droit et même le devoir d’exprimer un avis sur le patient et sa situation, cela confronte des éléments de registre différents. Cette réflexion permet alors d’aboutir à un consensus avec l’accord de tous les acteurs. Rappelons néanmoins que la décision est médicale. La responsabilité, quant à elle, reste divisée car le soignant adhère à la décision et à son application. Avant de prendre la décision, comme l’explicite très clairement la loi et le code de déontologie médicale, le médecin doit avoir consulté le patient, s’il est inconscient la personne de confiance, à défaut les proches et avoir pris connaissance des directives anticipées si elles existent. La décision doit prendre en considération la qualité de vie, la dignité et la souffrance du patient. Mais comment peut-on, en tant que soignant avoir la capacité d’estimer la qualité de vie d’un patient ? 1.3.5 Qualité de vie : Le concept de qualité de vie concerne tout à chacun, il est très subjectif et dans un même temps il dépend d’un certain nombre de critère. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) donne une définition universelle de la qualité de vie : « C'est la perception qu'a un individu de sa place dans l'existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. C'est un concept très large influencé de manière complexe par la santé physique du sujet son état psychologique, son niveau d'indépendance, ses relations sociales ainsi que sa relation aux éléments essentiels de son environnement. »16 Dans les LATA (limitation et arrêt des thérapeutiques actives), lors des réunions collégiales, les protagonistes se doivent de prendre en considération la qualité de vie future du patient. Mais comment peut on juger, estimer la qualité de vie quelqu’un ? Ce qui satisferait une personne ne pourrait-il pas, à l’inverse, en mécontenter une autre ? C’est avant tout cette notion de subjectivité qu’il est complexe d’aborder en Réanimation, et partout ailleurs. Dans la plupart de mes lectures je retrouve en définition de qualité de vie : l’absence d’un handicap, l’absence de souffrance, l’absence de déficience ou de séquelles liées à la maladie et aux traitements. Mais est-ce vraiment la définition de la qualité de vie ? Peut on uniquement se contenter de l’absence de quelque chose pour dire que « la vie est belle » ? La qualité de vie ne serait elle pas plutôt liée au plaisir, à la vitalité, à l’énergie que nous allons mettre dans cette vie ? Le soignant ne peut il pas à travers de simples critères de santé se tromper sur l’estimation de la qualité de vie d’un patient ? A travers cette réflexion, il me semble essentiel de rappeler la place de la famille lorsque le patient est inconscient, de veiller à ce que ce soit au plus proche de ce qu’il aurait souhaité en préservant sa dignité humaine. 16 Définition de l’OMS, extraite des « Recommandations de bonnes pratiques professionnelles : La qualité de vie en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes». 1.3.6 Le respect de la dignité : C’est suite à la Seconde Guerre Mondiale que le principe de dignité est né. Elle est parfois associée au respect des personnes, néanmoins, au fil de mes recherches, je me suis aperçue que le respect n’est que la conséquence de la dignité. Si l’on se doit de respecter tous les êtres humains peu importe leurs valeurs, leurs convictions, leur histoire de vie c’est avant tout pour respecter cette dignité dont chaque personne bénéficie de part sa singularité. La dignité n’est ni une représentation, ni un idéal, ni un objectif à atteindre, c’est en réalité un principe qui vaut pour tout être humain. Le sens de sa propre dignité est le sentiment de ses propres valeurs. La dignité renvoie à la conviction selon laquelle on a le droit d’exister, de se différencier, de ressentir, de choisir, de s’exprimer, d’être. Lorsque l’on a le sentiment de perdre sa dignité, c’est en réalité corrélé à la perte de l’estime de soi. La dignité donne du sens à notre pratique infirmière, elle valorise le patient, le rend acteur de soin, lui donne la perception d’être un individu unique. La dignité engage la valeur que l’on a de soi mais également celle que l’on a envers autrui. (Selon Jean-Philippe Pierron17) Notre travail auprès de l’être humain implique une multitude de savoir être et de savoir faire. L’humain est un être unique et complexe dans sa façon de penser, dans sa philosophie et sa manière d’être. C’est ainsi que, dans notre pratique, nous ne pouvons dispenser de soin unique. Les protocoles ne sont que cadres de référence, fil conducteur d’une pratique qui n’est pas figée dans le temps mais qui évolue au regard de chaque situation et non une fin en soi. En 1999, le Conseil de l’Europe identifie le danger que représente l’obstination déraisonnable : « Le prolongement artificiel de l’existence des incurables et des mourants par l’utilisation de moyens médicaux hors de proportion avec l’état du malade fait aujourd’hui peser une menace sur les droits fondamentaux que confère à tout malade incurable et à tout mourant sa dignité d’être humain.»18 Attenter à la dignité d’une personne, c’est défier l’humanité toute entière. La loi du 4 mars 2002 énonce deux grands principes. Tout d’abord : « La personne malade a droit au respect de sa dignité »19. Enfin : 17 Jean-Philippe Pierron, revue de Médecine Palliative intitulée « La dignité peut-elle se perdre ? » septembre 07 vol 6 n°4 18 Assemblée parlementaire, Conseil de l’Europe, « Protection des droits de l’Homme et de la dignité des malades incurables et des mourants. Recommandations » 1418, 25 juin 1999. 19 Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 Article L1110-2 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé « Les professionnels de santé mettent en oeuvre tous les moyens à leur disposition pour assurer à chacun une vie digne jusqu'à la mort. » 20 A cette loi j’ajouterai que le soignant se doit de respecter la dignité de tout être humain même après sa mort. La valorisation du travail ne passe pas par « l’empêchement de la mort » mais par l’accompagnement et le soulagement du patient dans la dignité pour une mort plus humaine. 1.3.7 « Total pain » et soins palliatifs : La douleur, voila une notion dont on est sûr qu’elle a traversé les siècles et les époques. Autrefois la douleur n’était reconnue que lorsqu’elle était physique. Les remèdes utilisés pour soulager la souffrance d’une blessure ou guérir d’une maladie était souvent drastiques et extrêmement douloureux (exemple : cautérisation au fer rouge). La médecine ancienne était alors peu préoccupée de la douleur des patients, allant même jusqu'à la considérer comme étant une réaction saine de l’organisme : "quand la blessure cuit, elle guérit"21. Il faut attendre le XXème siècle pour que le concept de « total pain 22» (douleur globale) prenne un sens. En effet, c’est le médecin Cicely Saunders qui développe ce concept, prenant ainsi en considération non seulement la douleur physique mais également la souffrance psychologique. La loi du 4 mars 2002 représente une avancée majeure car elle reconnaît le soulagement de la douleur comme étant un droit du patient : « Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée. »23 En réanimation, les infirmières ne peuvent généralement pas évaluer la douleur avec une échelle numérique étant donné que la plupart des patients sont inconscient. L’échelle BPS (Behavioral Pain Scale) est utilisée pour évaluer la douleur d’un patient sédaté et ventilé.24 La douleur est elle aussi une notion très subjective et nous nous devons en tant que soignant de ne pas émettre de jugement personnelle face à la douleur de l’individu soigné. Reconnaître « l’autre » dans sa douleur, c’est respecter cette personne. 20 Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 Article L1110-5 Dicton populaire de l’époque, auteur inconnu. 22 Total pain signifie douleur globale, concept développé dans les années soixante par le Dr Cicely Saunders 21 23 Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 Article L1110-5, cf. sitographie 24 Cf. Annexe n° 3 : Echelle BPS 1.3.8 Sédation et Double effet : La sédation : « La sédation en phase terminale pour détresse est la recherche, par des moyens médicamenteux, d’une diminution de la vigilance pouvant aller jusqu’à la perte de conscience, dans le but de diminuer ou de faire disparaître la perception d'une situation vécue comme insupportable par le patient, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à cette situation ont pu lui être proposés et / ou mis en œuvre sans permettre d’obtenir le soulagement escompté par le patient. »25 Les objectifs de la sédation sont avant tout de provoquer une somnolence chez le patient ou une perte de conscience qui peut s’avérer intermittente lors d’une sédation transitoire, ou prolongée. La sédation est souvent utilisée lorsque le patient présente des douleurs réfractaires. « Est défini réfractaire tout symptôme dont la perception est insupportable et qui ne peut être soulagé en dépit des efforts obstinés pour trouver un protocole thérapeutique adapté sans compromettre la conscience du patient »26. C’est un droit du patient que de pouvoir en bénéficier et c’est aussi le devoir du médecin de prendre en charge la douleur physique et psychique : «En toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances du malade par des moyens appropriés à son état et l'assister moralement. »27 L’infirmière, quant à elle, doit prévenir, évaluer, prendre en compte, transmettre l’information au médecin et administrer les thérapeutiques prescrites visant à soulager la douleur. Elle doit ensuite réévaluer celle-ci afin de surveiller l’efficacité et les effets indésirables des médicaments. Un ajustement de la posologie peut alors se faire grâce aux transmissions de l’infirmière au médecin. Un certain nombre d’échelle permette l’évaluation de l’état de conscience d’un patient sédaté à ne pas confondre avec l’évaluation de la douleur. La plus utilisée étant le score de RAMSEY28 il décrit la façon dont un patient est réveillable. 25 Groupe de travail « Sédation et Fin de vie » extrait des recommandations de la Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs 26 « Recommandations de bonne pratique : Sédation pour détresse en phase terminale et dans des situations spécifiques et complexes » écrit en 2009 par la SFAP, page 8 (sur 25 pages) 27 Article R.4127-37, 1er alinéa, du code de la santé publique 28 Cf. Annexe n° 4 intitulée : Score de Ramsey La sédation terminale est indiquée en phase terminale d’une maladie lorsque le patient présente des symptômes réfractaires ou lorsque la situation du patient peut se compliquer d’un risque vital immédiat (exemple : risque d’hémorragie cataclysmique de la sphère ORL, détresse respiratoire asphyxiques… etc.). Elle ne peut pas être administrée avec l’intention de précipiter le décès du patient, l’objectif étant de soulager le patient en l’endormant afin qu’il ne vive pas l’effroi d’une situation qui lui serait insupportable. Il est notable que cette pratique de soin est recommandée par la SFAP (Société Française d’Accompagnement en Soins Palliatifs). Cette dernière insiste sur les conditions de mise en œuvre, notamment en ce qui concerne la recherche de consentement et l’information du patient. Le patient doit être au cœur de la réflexion et des décisions qui le concernent. Si le patient est dans l’incapacité d’exprimer son consentement alors, le médecin devra respecter la même procédure que dans le cadre d’une limitation. Il prendra connaissances des directives anticipées si elles existent, consultera la personne de confiance ou à défaut les proches et il mettra en place une réflexion respectant la procédure collégiale. Le patient et sa famille doivent, entre autre, être informés du risque de double effet afin d’éviter les non dits et les situations conflictuelles. Le double effet : On parle de double effet lorsqu’une action entraîne deux conséquences. La première est voulue et bonne, la seconde est connue, mauvaise, mais n’est pas souhaitée. Dans une situation de fin de vie où le médecin prescrit un sédatif, le bon effet est celui de soulager la douleur vécue comme insupportable. Elle peut être physique ou psychique. C’est l’effet recherché par le médecin. En revanche le médecin est conscient du mauvais effet que la sédation peut induire, celui d’abréger la vie. L’auteur Olivier Nkulu Kabamba dit « Il n’est pas tenu moralement responsable de la conséquence mauvaise qu’il n’a pas voulu même si celle-ci était dès le départ prévisible voire même connue d’avance. »29 Toujours selon lui, il y a quatre conditions d’application : 1/ « l’action elle-même doit être bonne ou moralement neutre », soulager la douleur dans le but de maintenir la dignité humaine et d’améliorer la qualité d’une fin de vie est un action moralement bonne. 2/ « le bon effet doit résulter de l’acte et non du mauvais effet », le soulagement de la douleur du patient résulte de la sédation et non du décès de celui-ci. 29 « L’assistance médicalisée pour mourir, les soignants face à l’humanisation de la mort » page 84 (livre de 278pages), 3/ « le mauvais effet prévu ou connu ne doit pas être directement voulu, il doit être tout au plus toléré » Le médecin ne cherche pas à abréger la vie du patient mais bien à le soulager d’une douleur intense en revanche il connaît le risque de la sédation. 4/ « le bon effet doit être plus fort que le mauvais effet, ou bien les deux effets doivent être égaux » C’est bien la douleur qui est soulagée en premier donc le bon effet est plus important. La notion de double effet est explicitée et encadrée dans l’article 2 de la loi Leonetti : « Si le médecin constate qu'il ne peut soulager la souffrance d'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qu'en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d'abréger sa vie, il doit en informer le malade, sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 1111-2, la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un des proches. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical. »30 La sédation et le double effet pourraient entraîner à tort des représentations liées à l’euthanasie. Il me semblait important dans ce travail de fin d’étude d’éclaircir la notion de double effet, évitant ainsi une fausse représentation ou interprétation de la part de mes lecteurs. Pour résumer cette notion, la sédation pouvant induire le double effet est une pratique légale et déontologiquement correcte lorsque son indication est clarifiée. Informer le patient et sa famille permet d’éviter toute ambiguïté. Il est du rôle de l’infirmière d’expliquer à nouveau si l’information n’a pas été comprise et ce, autant de fois que nécessaire, permettant au patient et à ses proches de mieux vivre une situation déjà complexe et douloureuse. 1.3.9 Directives Anticipées Les directives anticipées sont des volontés que le patient majeur doit écrire et qui sont règlementées par la loi Leonetti. Elles permettent au médecin d’apprécier les souhaits du patient relatifs à sa fin de vie et à la limitation de thérapeutiques actives lorsqu’il est en état d’inconscience et/ou qu’il ne peut s’exprimer. Il est obligatoire de les consulter si elles existent, elles doivent être accessibles. Néanmoins, bien que la loi encadre ces directives, nous comprenons la difficulté à écrire ses propres directives anticipées car, comme le dit Sigmund Freud : « Au fond, personne ne 30 LOI n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dernier alinéa de l’article L.1110-5 du code de la santé publique croit à sa propre mort, et dans son inconscient, chacun est persuadé de son immortalité »31. Mettre par écrit ce que l’on désire pour sa fin de vie lorsque l’on est en bonne santé n’est pas évident. On ne peut pas s’imaginer dans une telle situation, il serait intéressant de savoir si les soignants de réanimation les ont rédigées. Et vous, après avoir lu ce travail de fin d’étude, allez vous les rédiger ? Pour vous laisser cette opportunité, je laisse à votre disposition un formulaire de directives anticipées en Annexe32 respectant les conditions d’écriture. Je vous rappelle également que ces directives ne sont valables que pendant 3 ans mais que toute modification ou renouvellement prolonge la période de validité de 3ans. 1.3.10 Décision Eclairée : Prendre une décision éclairée c’est connaître tous les tenants et aboutissants de son choix. Le médecin doit informer le patient des conséquences de sa décision sans ambiguïté. 1.3.11 La loi Leonetti et ses limites en France : Le rapport du professeur Didier Sicard avait pour objectif de recueillir l’avis des citoyens sur cette question. Or il s’est aperçu que la population n’a retenue qu’une chose sur la loi Leonetti : l’interdiction à l’euthanasie. La majeure partie de la population est dans l’attente d’un nouveau texte de loi, pour répondre à cela Mr Sicard « indique par ailleurs avec force qu’avant d’élaborer des lois nouvelles, il vaudrait mieux appliquer les lois en vigueur de 1999, 2002 et 2005. Il constate en effet que celles-ci sont inappliquées et mal connues du public et du corps médical. Le rapport de l’INED montre que la loi est appliquée une fois sur deux dans le contexte de la fin vie. De plus le grand public en méconnaît l’existence notamment concernant les directives anticipées (dont ils ne connaissent la signification). Toujours selon l’INED seulement 2% des personnes en fin de vie ont utilisé cette méthode. Aucun texte de caractère législatif ou réglementaire n’a prévu la création d’un fichier national centralisant les directives anticipées. Face à ce vide juridique, l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD) a conçue son propre formulaire disponible sur leur site Internet pour tout ceux qui le désire. Elaboré selon les conditions décrites dans la loi Leonetti, ce 31 Extrait de l’article intitulé « Sigmund Freud (1856 - 1939) » Auteur : Damon Julien, Cf. Annexe n°5 intitulé : Formulaire de Directives Anticipées 33 Extrait du « rapport fait au nom de la des affaires sociales sur la proposition de loi visant à renforcer les droits des patients en fin de vie » Avril 2013, par Jean Leonetti. 32 fichier est le seul qui existe en France. Selon une source proche de l’Association, « plus de 7 000 directives anticipées ont été reçues et scannées. » Le Dr Xavier Mirabel aborde certains points litigieux de la loi notamment concernant l’alimentation et l’hydratation des patients en fin de vie. La loi ne précise rien à ce propos et c’est au médecin de décider s’il s’agit d’un traitement ou non. 1.4 Identité professionnelle de l’infirmier en Réanimation : Dans toute profession, la définition du rôle est essentielle. Le titre d’une équipe « soignante » en dit long sur notre rôle auprès des patients. Mais pour autant que signifie être soignant ? Répondre à cette question semble être une difficulté insurmontable. Pour autant, si vous posez cette question à un boulanger ou à un plombier, il vous répondra sans hésitation. Face à cette affirmation, tout soignant rétorquerait que le travail avec l’humain est bien plus complexe et nuancé que celui du pain. Néanmoins, posez la question à un professeur des écoles, vous obtiendrez certainement une réponse satisfaisante. Nous allons tenter d’éclaircir quelques notions qui tendent à définir notre rôle. 1.4.1 L’identité professionnelle : Construite depuis le tout premier jour de notre formation, notre identité professionnelle ne cessera d’évoluer dans notre carrière. Nos valeurs personnelles et professionnelles sont sans cesse mises à l’épreuve lors de situations douloureuses. Sommes nous suffisamment préparer à vivre ces situations ? Le serons nous un jour ? Aujourd’hui il est indispensable de distinguer le soin dit curatif « to curing » du prendre soin « to caring ». Le prendre soin est l’essence même du métier d’infirmier, Walter Hesbeen considère le concept de prendre soin « comme une valeur non comme une vérité » Etre soignant, ce n'est pas soigner, mais prendre soin d'une personne, qui nous l'avons vu est unique. Le mot soignant, rattaché au verbe « soigner » a une signification controversée. En effet le soignant n’a pas la capacité de guérir et ne peut qu’aider le patient à se soigner lui-même. C’est une notion importante dont nous devons en tant que soignant nous souvenir, elle doit nous inciter à plus de modestie dans l’exercice de notre métier. Cette humilité est sans doute l’unique façon de permettre au patient de garder son pouvoir, indispensable à l'énergie de sa guérison. 1.4.2 Les valeurs soignantes Le terme valeur est connue de tous et pourtant quand il s’agit de le définir une difficulté se faire sentir, le sens commun des « valeurs » n’existe pas car il est en réalité différents pour chacun de nous. Définir un certain nombre de valeurs revient à faire un « jugement de valeur » ce qui n’est pas l’objectif de ce travail de fin d’étude. Les valeurs conditionnent nos pensées et nos actes au quotidien. Certains auteurs différencient les valeurs personnelles de valeur professionnelles mais cela ne signifie en rien que le soignant qui enfile sa tenue « enfile » également ses valeurs avant de prendre son poste. Ces valeurs nous ont bien entendu été détaillées dans nos cours mais elles font également parties de nous. Le soignant partage au sein de son équipe un certains nombres de valeurs qu’il peut également véhiculer dans les soins qu’il réalise auprès des patients dont il s’occupe. Il donne de la « valeur » à ce qu’il fait, donnant au soin réalisé une importance. Au fil de mes lectures j’ai pu entrevoir un certain nombre de définition toutes différentes car subjective comme nous l’avons vu. Je me suis permise d’en choisir une, me correspondant peut être plus qu’une autre, mais qui, peut être pour vous, lecteur, est moins probante. Les valeurs sont « l’ensemble des règles de conduites des lois jugées conforme à un idéal (ou norme) par une personne ou par une collectivité »34 Les valeurs, étroitement liées aux attitudes personnelles et s’affinant au contact des réalités engendrent chez le soignant le principe de sollicitude à l’égard du patient. 1.5 Conclusion phase théorique : Dans les recherches littéraires que j’ai pu effectuer, je retrouve beaucoup de théories sur la loi Leonetti. Mes lectures restaient très « terre à terre » n’abordant que très rarement une réflexion et se raccrochant très souvent aux articles de loi. C’est avec une certaine difficulté que j’ai donc axé mon mémoire sur l’éthique et les valeurs soignantes que l’infirmier se doit de véhiculer. La loi Leonetti étant récente (22 avril 2005), je pense que nous manquons légèrement de recul pour en faire une critique objective. Neuf années après sa création, nous pouvons néanmoins voir apparaître les limites qu’elle impose. Je décide donc, après la réalisation de cette phase théorique d’aller à la rencontre du terrain afin de mieux comprendre comment, en service, cette loi est appliquée. L’objectif de mon 34 Larousse, Pluri dictionnaire 1989 guide d’entretien sera également de comprendre comment sont vécues ces situations par le soignant, est-ce un échec ou au contraire, se sent-il valorisé de l’accompagnement qu’il prodigue ? Peut être vais-je découvrir un malaise chez les professionnels ou au contraire le vécu des soignants sera très positif. 1.6 A la rencontre du terrain : 1.6.1 Population ciblée : C’est avec une certaine évidence que je me suis dirigée vers un service de Réanimation dans un centre hospitalier Général avec l’intention de solliciter des infirmiers du service afin de réaliser la partie exploratoire de mon travail de fin d’étude. J’ai du prendre en considération des contraintes temporelles et organisationnelles, notamment liées au fait qu’en Réanimation, une situation d’urgence peut survenir à tout moment et les soignants seraient alors indisponibles pour participer aux entretiens. Les entretiens se sont tous déroulés dans le même service de soins. Au total, 5 infirmiers ont accepté de participer aux entretiens. 1.6.2 Caractéristiques de cet échantillon : Du fait d’une surcharge de travail en Réanimation le jour de mes entretiens, je n’ai pu en réaliser que deux. Je suis donc revenue solliciter les infirmiers du service pour me permettre de terminer mes entretiens exploratoires et ce jour là j’ai pu interroger 3 autres infirmiers. Le 1er jour de l’enquête, nous étions installée au calme dans un bureau. Les deux entretiens se sont déroulés sans craintes et dans une ambiance décontractée. La 1ère infirmière est diplômée depuis 12 ans, et exerce en Réanimation depuis 10 ans. Elle souhaitait travailler dans ce service afin de maîtriser les soins d’urgence travaillant en binôme. Le confort de travail et de matériel est également différents des services classiques. La 2ème infirmière est diplômée depuis 24 ans, elle exerce en Réanimation depuis 18 ans. Elle est également infirmière référente du service, ce poste lui permet d’effectuer des journées. Elle est responsable du matériel, des commandes et du rangement de celui-ci. Elle peut être sollicitée par l’équipe lorsque cette dernière en éprouve le besoin. Elle souhaitait travailler dans ce service pour la connaissance globale du patient. De plus déclare « tu as le temps de vraiment connaître la pathologie, de prendre connaissance des résultats d’examens alors que dans les services ce n’est pas possible et tu peux prendre le temps d’accueillir les familles. » Le 2nd jour de l’enquête, j’ai réalisé mes 3 entretiens au bureau de surveillance pour que les infirmiers ne s’éloignent pas de leurs patients. C’est un lieu très bruyant de part la présence des scopes et de leurs alarmes, mais nous avons dû nous adapter et tout s’est bien déroulé. Le 3ème infirmier est diplômé depuis 8 ans et travaille en Réanimation depuis 4ans « Pour le côté urgence, technique, mais aussi relationnel, pour moi il y a au moins 50% de chaque. La qualité des soins et la prise en charge sont quand même bonnes en réa. » La 4ème infirmière est diplômée depuis 11ans et exerce en Réanimation depuis 7ans. Elle a de suite apprécié les conditions de travail qui sont relativement bonne. « Prendre en charge de façon globale 3 patients est, à mon sens plus valorisant qu’en prendre 12 dans un service sans vraiment les connaître. J’aime la technicité des soins, le travail en binôme est intéressant. » Le 5ème infirmier est diplômé depuis 6 ans et exerce en Réanimation depuis 5ans et demi. Il souhaitait travailler en réanimation pour la globalité des soins; « Ton patient tu le prends en charge de A à Z et parce que j’avais bien aimé mon stage en réa étant étudiant ». Le travail en binôme, la technicité et les pathologies variées sont également des éléments de motivation. 1.6.3 Choix de l’outil d’enquête : L’entretien, lorsqu’il est mené, a pour avantage de rendre certaines nuances, certains malaises ou impressions lors d’une question posée qui ne sont pas restranscriptibles par écrit. C’est tout naturellement que je me suis dirigée vers le choix d’un questionnaire de nature qualitatif et semi directif afin de ne pas induire de réponse. J’ai également demandé à chaque interlocuteur la possibilité d’enregistrer afin de ne pas avoir à prendre des notes durant l’entretien ce qui peut, à mon sens, perturber son dialogue. La durée proposée était de 35 minutes. 1.6.4 Guide utilisé pour la conduite des entretiens : Les premières interrogations étaient axées sur le contexte socioprofessionnel, le sexe, la date d’obtention de diplôme, l’expérience en Réanimation et les motivations à travailler dans un tel service. 1ère question : Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? 2ème question : Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de la loi Leonetti et votre pratique professionnelle en réanimation ? 3ème question : Quelle est la place de l’infirmière dans les limitations et arrêt des thérapeutiques actives ? 4ème question : Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? 5ème question : La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Ce questionnaire était étoffé de sous questions de relance afin de réorienter le professionnel vers le sujet. Ces questions n’étaient posées qu’en cas de besoin.35 1.6.6 Analyse des entretiens : La retranscription est une étape ardue, en effet, dans une conversation une partie non négligeable des informations se transmettent par le langage non verbal. Une retranscription de qualité nécessite que l’on ne retrouve pas de jugement ou d’idées de ma part. C’est avec objectivité et honnêteté que j’ai donc retranscrit et analysé les entretiens qui, selon moi, sont représentatifs de chaque intervenant. Afin de ne pas rendre indigeste le contenu de mon analyse je choisis l’abréviation inf 1 pour parler de l’infirmière qui a répondu au premier entretien, inf 2 pour la deuxième etc. mais n’y voyez aucune dévalorisation ou jugement de ma part. Je vous propose à l’issue de votre lecture de découvrir la retranscription complète des entretiens que j’ai pu réaliser en Annexes de ce mémoire36. 35 36 Cf. : Annexe n°1 intitulée Guide d’entretien Cf. : Annexe n° 2 intitulée Retranscription des entretiens 1 à 5 Question 1 : Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? Les 5 infirmiers conçoivent l’identité professionnelle comme étant l’ensemble des compétences, des connaissances, des savoirs faire, des savoirs être et des valeurs professionnelles de l’infirmier. Les 5 infirmiers estiment qu’il faut avoir certaines aptitudes spécifiques, l’inf 1 précise notamment des « capacités techniques et relationnelles très poussées ». Toujours selon l’inf 1 il faut travailler en collaboration avec l’équipe pluridisciplinaire pour guider le patient et sa famille dans les meilleures conditions « soit vers le bien être, le mieux être, soit vers la fin de vie. ». Les 5 infirmiers ont parlé d’équipe pluridisciplinaire, de collaboration et de binôme. Les valeurs sont, selon 4 des infirmiers interrogés, « les mêmes qu’ailleurs »et l’inf 1 ajoute « l’éthique en principe elle est la même de partout ». L’inf 2 définit ses valeurs comme étant « la technicité et la discrétion ». Selon l’inf 3 pour être infirmier en réa il faut « savoir prendre beaucoup de recul, des fois on fait une sortie et une entrée juste derrière sans avoir forcément un temps pour débriefer.» L’inf 4 est du même avis et pense que la prise de recul est essentielle pour ne pas « ramener les soucis à la maison ». L’inf 4 évoque également le principe d’humanité. L’inf 5, quant à lui rappel l’importance du rôle propre pour l’identité professionnelle de l’infirmer et dit «le rôle propre il est important, et faut pas l’oublier. Travailler en réanimation c’est pas seulement passer des antibiotiques c’est aussi décoller le scotch du nez pour regarder qu’il n’y ait pas un escarre dessous. » Pour les infirmiers, répondre à cette question a été difficile, certains n’ont axé leur réponse que sur les aptitudes, compétences et connaissances nécessaires à l’exercice de l’infirmier en réanimation. Cependant, certaines valeurs et attitudes ressortent au vu des entretiens comme essentielles, notamment concernant le respect de la dignité humaine, le principe de l’éthique, la confidentialité et la discrétion et enfin l’empathie. Question 2 : Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de la loi Leonetti et votre pratique professionnelle en réanimation ? Les 5 infirmiers interrogés connaissent la loi Leonetti notamment concernant l’interdiction de l’obstination déraisonnable et la notion de réflexion collégiale. Ils ont tous détaillé la notion de collégialité en explicitant le « staff » qui a lieu dans leur service le jeudi et où les médecins amènent la discussion concernant le niveau d’engagement de chaque patient. Les 5 infirmiers ont tous le sentiment d’être écouté lors de ces réflexions, leur ressenti est d’ailleurs recherché par les médecins. Cependant, l’inf 5 est le seul infirmier a dire : « on donne notre ressenti mais je sais pas si ça penche tellement dans la balance. » Toujours selon lui, la réflexion ne servirait pas à chercher un consensus de toute l’équipe mais plus à poser des questions et mieux comprendre la décision du médecin : « Leur réponse m’apporte des éléments de précisions, ça me permet de comprendre après j’adhère pas toujours. »En effet 2 infirmiers sur 5 expriment n’avoir pas toujours toutes les informations nécessaires à la compréhension d’une décision de limitation. Chaque infirmier me rappelle que la décision est médicale mais certains ont plus l’impression que leur avis est pris en compte que d’autres. Dans ces réunions collégiales les 5 infirmiers sont d’accord pour dire que tout le monde peut prendre la parole, y compris les aides soignants. Selon l’inf 1 la réflexion est collégiale car « c’est logique quand on travaille tous ensemble de réfléchir tous ensemble. Ca permet encore une fois que si quelqu’un est choqué par cette décision par rapport à ses convictions qu’il puisse s’exprimer et on aura la possibilité de discuter de ces arguments et de les prendre en compte ».L’inf 3 estime que donner son avis concernant un patient dont on a la charge est important « pour bien le vivre après, vraiment si on est pas d’accord, se positionner ça permet de faire mûrir les choses, de pas rester sur une idée fausse » Les infirmiers pensent tous globalement que si la réflexion est collégiale c’est avant tout une question de logique comme l’exprime l’inf 4 : « étant donné que l’équipe soignante est auprès du patient 24h/24, elle participe à la réflexion. » L’inf 2 apporte aussi la notion de « responsabilité morale » trop lourde à porter pour une seule personne. L’inf 4 et l’inf 2 expriment toutes les deux la nécessité que « ça ne soit pas l’affaire d’une seule personne » et l’inf 5 précise « on ne peut pas laisser les affects d’une personne décider de ce qu’on va faire d’un patient, personne ne détient la science infuse. ». L’inf 4 ajoute également que cette réunion permet de confronter « les vécu de chacun ». Lors de l’analyse de mes entretiens je m’aperçois qu’aucun des 5 infirmiers ne peut définir le « double effet » cependant, après leur avoir apporté la définition, 2 infirmiers on précisé. L’inf 1 dit « à un moment si on sait qu’on va vers la fin de vie on peut pas envisager qu’un patient souffre, qu’il ait mal pour que ça s’arrête quand ça devait s’arrêter. ». Elle se dit ensuite favorable à cette pratique « quitte à ce que ça se finisse un peu plus tôt en terme d’heures, que le patient ne souffre pas parce que c’est plus acceptable pour les familles, pour le patient lui-même et pour nous soignant sinon c’est difficile à vivre aussi » C’est le principe de dignité et de bienfaisance que l’inf 1 met en avant dans ses explications. D’ailleurs, elle explique que dans de très nombreuses situations les familles cherchent à savoir et pose la question de façon très directe « est ce qu’il a souffert ? », ce qui n’est pas concevable pour cette infirmière. L’inf 5, quant à lui, pense que l’équipe est au courant du risque d’abréger la vie mais que la sédation n’est pas indiquée pour cela. Globalement les 5 infirmiers trouvent que la loi est connue et appliquée dans le service. Cependant l’inf 5 nuance ses propos en rapportant quelques situations où, selon lui, il y a eu de l’acharnement thérapeutique. Il précise également « Le problème c’est que il y a toujours des situations genre 2% des cas où ça va marcher, t’as toujours le cas qui fait que t’as envi d’aller plus loin. Les médecins je les comprends aussi. Une fois il y avait un patient tout le monde pensait que c’était fini pour lui et les médecins on voulu le faire dialyser. Le patient il est sorti de réanimation. C’est l’exemple qui te fait penser qu’il faut continuer. » Dans cette situation, l’infirmier rapporte une exception qui peut faire douter le médecin dans sa décision, le contre exemple rappel toujours que chaque situation est différente et que le patient ne réagira pas de la même façon qu’un autre à un traitement d’où la nécessité d’adapter sa réflexion à chaque situation. Concernant l’acharnement thérapeutique, 2 infirmiers sur 5 ont apporté l’idée que quand le médecin est plus jeune dans son exercice il a d’autant plus de mal à prendre la décision de limiter, il veut « guérir à tout prix ». L’inf 1 travaillait avant l’existence de la loi Leonetti et pense qu’ « il y a une réelle différence entre l’avant et l’après, il y a maintenant un document écrit, c’est clair net, sur l’engagement et c’est documenté c’est expliqué. Il y a une vraie protection sur ce qu’on fait, toujours avec une réflexion. » Pour cette infirmière, la loi lui renvoie une protection juridique, une sécurité qui la conforte dans ses valeurs. De plus, elle évoque lors de l’entretien la notion de projet de soin et vie ainsi que la continuité des soins : « si un autre médecin prend la suite il y a une continuité, une base sur laquelle bien travailler » ce qui représente un cadre rassurant pour le soignant. Concernant les directives anticipées, 2 infirmiers en parlent spontanément et l’inf 2 sera relancé à leur sujet. L’inf 2 ne connaît pas leur signification et dit ne jamais en avoir rencontré dans le service, une fois les explications données elle en détermine déjà les limites. En effet elle dit « J’imagine que c’est difficile quand on est en bonne santé, se projeter […]. Moi en bonne santé je peux dire je préfère mourir plutôt que d’être handicapé et si un jour je suis handicapée je serais peut être bien contente que quelqu’un s’occupe de moi et que je puisse voir mes petits enfants, on peut changer entre temps ». L’inf 3 exprime lui aussi qu’«il y a des gens qui peuvent en parler oralement de là à les mettre par écrit je pense que c’est une autre étape j’ai un exemple très précis d’une personne très au clair à l’oral et quand le médecin lui a demandé de le mettre par écrit il a été très réticent et il ne l’a pas fait. C’est tellement figé un écrit même modifiable. » Pour conclure sur ces nombreuses réponses, je dirais que la loi est majoritairement connue par les soignants, ceux-ci se sentant à l’aise dans son application. Ils reconnaissent, pour la plupart, leur implication dans la réflexion collégiale. Réflexion qui préserve le patient d’un engagement excessif ou au contraire limité et qui, généralement, se fait après l’obtention du consensus de l’équipe. A travers la réponse de chaque infirmier est mis en évidence l’importance de la compréhension de chaque situation. De façon plus ou moins explicite, chaque soignant pense que mieux comprendre la décision avec ses tenants et aboutissants permet de mieux vivre, pour tous les protagonistes (patient, famille, soignants) une situation de fin de vie. Question 3 : Quelle est la place de l’infirmière dans les limitations et arrêt des thérapeutiques actives ? Les 5 infirmiers estiment globalement avoir leur place quasiment à tous les niveaux de prise en charge des limitations et arrêt des thérapeutiques actives. Les différentes étapes étant, selon moi, l’émergence de la réflexion concernant l’engagement, la réflexion collégiale, la prise de décision, l’annonce au patient et à ses proches, la traçabilité, la mise en application et enfin l’accompagnement du patient et de ses proches vers le décès. En ce qui concerne l’émergence de la réflexion sur l’engagement, les infirmiers ne se sentaient pas réellement acteurs. En effet l’inf 5 dit que c’est le médecin qui propose les limitations. La réflexion collégiale, en revanche, met tout le monde d’accord, l’infirmier se doit d’y participer, il pose des questions et donne son ressenti. La majorité des infirmiers fait référence, à ce moment là, au principe éthique et à la prise en compte de la qualité de vie future du patient. En revanche, chaque infirmier me rappelle que la décision est médicale. L’annonce au patient et à la famille est toujours effectuée par le médecin. Les 5 infirmiers disent participer à cette annonce puis avoir un rôle d’accompagnement. L’inf 1 précise ce que dit généralement le médecin : « On a fait tel et tel examen, la situation est grave, on pense qu’il ne va pas récupérer, il ne sera pas comme avant. On pense que c’est mieux pour lui, qu’on aille pas s’acharner et le laisser partir en douceur » Les infirmiers annoncent à ce moment là l’ouverture des visites en nombre de personnes et en horaires (jour et nuit). L’inf 2 parle de personnalisation de la prise en charge selon si la famille habite loin ou non. L’inf 3 dit « La famille est toujours intégrée même si ce n’est pas eux qui prennent la décision. » et sur ce point l’inf 1 précise « On ne leur demande pas de faire un choix car c’est trop difficile et très culpabilisant pour eux par la suite ». Lors de la mise en application, l’inf 4 explicite quelle posture soignante adopter : « Respect de la dignité du patient jusqu’à sa mort et même après. Empathie avec la famille, écoute. Il faut avoir une posture réflexive afin de prendre du recul, il est important de bien penser le soin, de ne pas se cacher derrière trop de mécanisme, banaliser l’arrêt d’un respirateur ou d’un pousse seringue peut, selon moi, à long terme revenir au soignant en pleine figure. » L’inf 5, quant à lui, insiste sur les actes relevant du rôle propre de l’infirmier : « veiller à l’installation de la personne. Tu fais les soins de confort, soins de bouche, massage. Appliquer les prescriptions. Tu limites les soins invasifs, après s’il y a trop de sécrétion tu peux toujours l’aspirer mais pas toutes les 2 heures parce que c’est très inconfortable. » Selon l’inf 3, l’infirmier a le devoir de se rendre disponible pour le patient et sa famille, même en fin de vie : « rôle de présence auprès de la personne, aider la famille à ce qu’elle puisse s’autoriser à lui prendre la main, à pas uniquement rester fixée sur le scope jusqu’à ce que ça se termine, continuer à lui parler, s’ils souhaitent qu’on soit présent dans la chambre ou pas, c’est pas parce qu’on arrête les thérapeutiques qu’on arrête les soins. On dit que le toucher c’est le dernier sens à disparaître et je pense que à ce niveau on a un grand rôle pour vraiment que la personne nous sente et se sente accompagnée jusqu’au bout. » De plus, chaque infirmier interrogé a mis l’accent sur l’accompagnement du patient et de sa famille avec beaucoup de sollicitude et d’empathie, l’inf 2 « favorise leur intimité en fermant la porte et en diminuant les alarmes ». Selon moi c’est à travers de petites attentions telles que cela que la famille et le patient se sentent considérés. L’inf 1, quant à elle, me rappelle l’importance du travail en collaboration notamment dans ces situations difficiles : « On n’est pas tout seul, on est en binôme et on accompagne ensemble et c’est une vraie force d’être ensemble pour pouvoir passer le relais à ta collègue et c’est comme ça que c’est le mieux vécu. » L’inf 3 donne des explications aux familles et au patient s’il est conscient car très souvent, ils ont rencontré le médecin mais « les questions arrivent après coup, des fois ils n’ont pas tout entendu ou ils n’ont pas voulu entendre au moment de l’entretien et nous en tant qu’infirmier on est là pour ça et puis aussi les rassurer sur la prise en charge de la douleur. » Ainsi, on se rend compte que les soignants de réanimation, axent leur prise en charge sur l’accompagnement du patient et de sa famille en mettant en avant des valeurs à la fois très humaines et respectueuses de la dignité du patient. Question 4 : Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? L’intérêt de cette question était d’analyser le vécu d’une situation. Je ne vais pas restituer toutes les situations qui ont marquées les soignants interrogés, néanmoins je vais analyser le vécu que chaque situation a pu susciter. L’inf 1 n’a pas souhaité répondre à ma question car elle n’a pas de situation qui l’a « particulièrement marquée » cependant elle met en évidence certaines conditions favorisant un meilleur vécu : « A partir du moment ou c’est assez clair dans notre esprit, que la famille est bien au clair avec ça, ça se passe bien parce que c’est bien réfléchi à l’avance. Si c’est fait n’importe comment, c’est là que c’est mal vécu.» De façon contradictoire à ses dires, une fois l’enregistrement terminé, elle me dit de manière très honnête : « Etonnement mon plus beau souvenir en tant que soignant, c’est un décès. » L’inf 2 quant à elle raconte la situation d’une patiente de 83ans, dont la décision d’arrêt des thérapeutiques a été prise. Cette situation semble bien vécue puisqu’elle a pu mettre en place une prise en charge personnalisée : « On a élargi les visites, ils étaient jusqu’à 8 dans la chambre. On a arrêté tous les traitements on la mise sous morphine la famille était inquiète qu’elle souffre... Vers 19h la famille trouvait que c’était un peu long ils auraient aimé accélérer un petit peu les choses donc ils ont revu le médecin et il a été décidé de débrancher le respirateur. Elle respirait tout seule sur le nez artificiel. Il y a eu une fille qui est arrivée de Paris qui a eu le temps de venir et elle est décédée à 19h30 entourée de sa famille. » De plus, la famille a été entendue par le médecin et l’équipe soignante. L’inf 2 rajoute à l’arrêt de l’enregistrement : « Pour moi les situations qui sont émotionnellement les plus difficiles sont celles où la famille n’est pas présente, que le patient est seul et que les familles appellent tous les jours pour savoir si c’est fini. » Dans cet aspect le poids de la famille est pesant, il est difficile pour elle de rentrer en relation par téléphone pour annoncer la fin inéluctable d’une existence. Selon elle, l’alliance thérapeutique est primordiale pour une prise en charge de qualité. L’inf 3 relate la situation d’un patient âgé d’une quarantaine d’années avec une histoire de vie similaire (le même nombre d’enfants) qui avait tenté de se suicider. N’ayant pas récupéré ses fonctions vitales un arrêt des thérapeutiques avait été décidé. Le soignant, dans cette situation, avait été touché émotionnellement, se voyant à travers la situation du patient. Le transfert avait été vécu consciemment par le soignant qui, dans le but de se préserver en prenant du recul, avait préférer passer le relais à un collègue qui ne vivait pas la situation de la même façon. On s’aperçoit, dans ce récit, de l’importance de l’équipe. Chaque soignant perçoit ces moments à sa manière, avec son propre vécu, et son identité, qu’elle soit personnelle ou professionnelle. L’équipe, construite et enrichie par de nombreux professionnels, possède une force que l’infirmier seul ne peut pas égaler, qu’est sa pluralité de part sa diversité et son nombre d’individus. Globalement la plupart des situations relatées confortent le soignant dans ses propres valeurs. En effet, des soins et une prise en charge personnalisée gratifient et donnent du sens à la pratique soignante. C’est avec beaucoup de pudeur et de retenu que les situations ont été relatées. J’ai ressenti des difficultés pour que les soignants se livrent sur leurs émotions, ne voulant pas être trop intrusive j’ai respecté certains silences. J’ai pu néanmoins ressentir certaines émotions exprimées à demi mots. Question 5 : La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Les infirmiers ont tous répondu à cette question de façon positive. L’inf 4 estime que ses valeurs sont respectées et elle en exprime très clairement la raison car, selon elle, la limitation « répond au problème de l’obstination déraisonnable. Je suis généralement assez satisfaite de ces prises en charge en fin de vie et je me sens valorisée dans mon travail quand la personne part sans souffrance avec dignité et accompagnée de tous. » L’inf 1 rappelle l’importance d’une réflexion éthique, évitant ainsi toute situation ou prise de décision allant à l’encontre des règles déontologiques, de la loi ou de ses valeurs. L’inf 2 voit dans les limitations de thérapeutique une réponse alternative à l’obstination déraisonnable préférant ainsi que « ça s’arrête » dans le but de respecter le principe de bienfaisance. L’inf 5 estime qu’ « il y a des cas où c’est évident que continuer les thérapeutiques ça lui apportera aucun bénéfice.» respectant également le principe de bienfaisance. 1.6 Réflexion et cheminement vers la question de recherche : Ma question de départ était : En quoi la réflexion, la décision et la mise en application d’une limitation ou arrêt des thérapeutiques peuvent elles avoir une incidence sur les valeurs et l’identité infirmière ? Nous avons pu voir au fil de mes recherches les grands concepts qu’implique la réflexion collégiale que sont l’éthique et ses principes ainsi que le respect de la dignité et de la qualité de vie du patient. Les 3 étapes des LATA (limitation ou arrêt des thérapeutiques actives) que sont la réflexion, la prise de décision et la mise en application sont encadrées par la loi Leonetti du 22 avril 2005, alternative incontournable à l’obstination déraisonnable, largement explicitée dans ce travail. A travers ces concepts nous avons pu déterminer le rôle essentiel de l’équipe paramédicale exprimé par la plupart des infirmiers questionnés. De manière consensuelle, chaque infirmier se donne la possibilité de s’exprimer lors des réunions collégiales. Lors de mes recherches théoriques il me semble comprendre que l’équipe, de part la réflexion qu’elle apporte au médecin lors de ces réunions, a la capacité d’influencer le choix du médecin. Or, dans la pratique, les infirmiers insistent sur leur rôle consultatif qui, selon l’infirmier 5 « ne fait pas réellement pencher la balance ». Alors quel est le poids décisionnel de l’infirmier dans la notion de collégialité ? L’infirmier aimerait-il avoir plus de responsabilité ? La profession infirmière serait-elle favorable à une implication plus importante dans la prise de décision ? Dans quelle mesure sera la future place du corps paramédical dans une décision tripartite (médecin référant, médecin extérieur, infirmier référent) ? Suite à une situation vécue en stage, je m’étais interrogée sur mes valeurs et mon identité professionnelle, persuadée qu’un arrêt des thérapeutiques pouvait avoir une incidence sur le vécu du soignant. De part mes propres représentations du soignant infirmier en Réanimation, « qui soigne, qui guérit, qui sauve », j’avais vécu ce décès comme un échec. Je pensais que le soignant vivait dans la majorité des situations le décès comme un échec. Cependant, au fil de mes recherches théoriques, je me suis aperçue qu’il n’existait que très peu de témoignages de soignant en difficultés face à ces situations d’arrêt des thérapeutiques. Au contraire, les situations vécues comme difficiles étaient celles où il existe de l’acharnement thérapeutique. Mes recherches théoriques, une fois confrontées à la pratique mettent en exergue plusieurs éléments. En effet, les valeurs du soignant sont respectées dans les situations de limitation et arrêt des thérapeutique. La réflexion éthique, dont les critères sont le respect de la dignité et de la qualité de vie du patient (principe de bienfaisance et de non malfaisance), le respect de l’autonomie du patient ou encore le principe de justice et d’égalité, permet au soignant de préserver ses valeurs. Il a le sentiment d’un travail gratifiant, notamment dans son rôle propre où il est amené à effectuer des soins de confort et de bien être en collaboration avec l’aide soignant, accompagnant le patient et sa famille vers la fin de vie. L’équipe soignante est une ressource dont il bénéficie et sur laquelle il peut « s’appuyer » en cas de besoin. La loi Leonetti représente un cadre législatif rassurant pour le soignant, bien qu’il estime que des progrès restent à faire dans sa mise en application. Pour conclure, je dirais que, de part mes recherches théoriques et pratiques, il me semble que les infirmiers sont en adhésion lors des limitations et arrêts des thérapeutiques avec leurs représentations, leurs valeurs, les lois, à partir du moment où ils sont experts dans leur domaine. Mon postulat de départ n’est pas pour autant illégitime car ne pas comprendre une situation, ne pas être intégrée à une équipe (car je n’ai que le statut d’étudiant), ne pas participer à la réflexion éthique voir même avoir un manque de connaissance théorique ne m’ont pas préservés émotionnellement d’une situation qui ne peut être que complexe. 1.7 Formulation de la question de recherche : Dans quelle mesure l’infirmier pourrait-il, dans un futur proche, être en capacité de 1.8 Miseà la endécision évidence des d’une concepts formulation des hypothèses : participer tripartite LATAetdans le but d’une meilleure prise en charge ? 1.8 Mise en évidence des concepts et formulation des hypothèses : 1.8.1 Les Concepts : Les différents concepts nécessaires à l’étude de ma problématique sont, selon moi, au nombre de cinq. Référentiel de compétence et aptitudes de l’infirmier Prise de décision en collégialité Responsabilité infirmière Hiérarchie soignante Protocole de coopération de l’ARS 1.8.2 : Les hypothèses : Les infirmiers seraient favorables à une augmentation de leur responsabilité quant à la prise de décision d’une LATA. Les médecins accepteraient de réfléchir et de prendre la décision de façon collégiale avec l’infirmier prenant en charge le patient concerné. L’infirmier pourrait, dans un futur proche, participer à la prise de décision d’une limitation ou arrêt des thérapeutiques actives (LATA) en collégialité avec le médecin référent du patient et le médecin extérieur. Une décision prise suite à un consensus de 3 personnes (médecin référent, médecin extérieur et infirmier) divise les responsabilités et pourrait être meilleure qu’une décision prise par deux médecins uniquement. Les usagers pourraient être rassurés de savoir que la décision serait prise en collaboration avec un infirmier. Partie 2 : La Phase Méthodologique : 2.1 Population cible échantillonnage Afin de répondre à cette problématique, il me semble évident de cibler la population infirmière pour un premier échantillon. En effet, elle est au centre d’une telle réflexion puisque cela concerne son domaine de compétence. L’infirmier étudié devra forcément travailler en Réanimation puisque les décisions de limitation ou arrêt des thérapeutiques actives sont prises dans la majeure partie des cas en service de Réanimation. De plus, un infirmier est considéré comme expert dans son domaine après avoir travailler 10 ans dans le même service. Cependant, j’imagine qu’il est plutôt difficile de rencontrer uniquement des infirmiers ayant travaillé 10 ans consécutifs dans le même service c’est pourquoi je ciblerai les infirmiers ayant plus de 5 ans d’expérience ayant eu ou non une formation continue (douleur, accompagnement fin de vie…) dont il faudra tenir compte lors de l’analyse. Enfin je ne me limiterai pas à l’étude d’un seul service de Réanimation mais bien de plusieurs, notamment dans un Centre Hospitalier Universitaire afin d’établir une comparaison avec un Centre Hospitalier Général. Dans un second temps, j’irais à la rencontre des médecins Anesthésistes et Réanimateurs afin de connaître leur opinion sur la participation de l’infirmier à la prise de décision. Seraient-ils favorables à une augmentation des responsabilités des infirmiers ? Le poids décisionnel de l’infirmier serait-il comparable, au même niveau, que celui de chaque médecin ? D’autre part, je différencierai deux catégories de médecin, les médecins référents d’un patient et les médecins extérieurs (neutres à la situation et sans lien hiérarchique) Enfin il me semble judicieux d’analyser les besoins des usagers, concernant leur propre fin de vie, étant au centre de la réflexion. L’étude sera qualitative, elle ne sera pas limitée en nombre de personnes interrogées. En effet, l’étude sera terminée lorsque nous aurons atteint un point de saturation, n’amenant plus aucune information nouvelle. 2.2 Outils d’investigation argumentés Afin de répondre à la problématique il me semble judicieux de mettre en place trois types d’entretiens différents. Les questions seront ainsi adaptées à chaque population ciblée. Par ailleurs, elles permettront d’explorer le plus largement possible tous les aspects de l’étude. Les questions seront semi directives dans le but de ne pas induire une réponse particulière. Les différents entretiens auront pour but de mettre en exergue certains points. Tout d’abord, les infirmiers se sentent-ils dévalorisés aujourd’hui de n’avoir qu’un avis consultatif ? Seraient-ils d’accord pour avoir une augmentation de leur responsabilité ? Quelle en serait selon eux la contrepartie ? Se sentent ils capable d’assumer ce nouveau rôle ? Quels seraient leurs besoins pour le faire ? (formation, accompagnement hiérarchique etc.) Dans un second temps, les médecins accepteraient ils de ne plus être seuls pour prendre une décision ? La prise de décision serait elle vecteur de conflit au sein de l’équipe ? Le poids décisionnel de l’infirmier pourrait-il être aussi important que celui de chaque médecin ? Enfin, les usagers accepteraient-ils que l’infirmier décide au même titre que le médecin mais de façon collégiale de leur propre fin de vie ? L’avis d’une tierce personne rassurerait-elle le patient et ses proches pour une « meilleure décision » ? Le rôle de l’infirmier dans la prise de décision ne limiterait-il pas l’acharnement thérapeutique en France ? Un outil supplémentaire à mon travail de recherche serait le protocole de coopération de l’ARS. Il est encadré par l’article 51 de la loi HPST du 21 juillet 2009. Selon la Haute Autorité de Santé, il « permet la mise en place, à titre dérogatoire et à l’initiative des professionnels sur le terrain, de transferts d’actes ou d’activités de soins et de réorganisations des modes d’intervention auprès des patients. Ces initiatives locales prennent la forme d’un protocole de coopération qui est transmis à l’ARS. Celle-ci vérifie la cohérence du projet avec le besoin de santé régional, avant de le soumettre à la validation de la HAS. »37 Cet outil ne sera utilisé que lorsque les besoins soignants, médicaux et des usagers auront été réellement exprimés et explicités. 37 Haute Autorité de Santé, « Protocole de Coopération entre professionnels de Santé », avril 2012. Conclusion : Les limitations et arrêt des thérapeutiques en service de Réanimation représentent à l’heure actuelle une alternative à l’acharnement thérapeutique aussi appelé obstination déraisonnable. Cette décision médicale est encadrée par la loi Leonetti du 22 Avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie. Dans ce travail de fin d’étude, nous avons pu mettre en exergue les grandes conditions d’application de cette loi ainsi que le rôle essentiel de l’infirmier à travers cette pratique. Les entretiens exploratoires ont permis de comprendre comment l’infirmier peut vivre ces situations complexes au quotidien. Encadrée par la loi, la réflexion collégiale respecte les principes éthiques, fondements de notre profession. Les infirmiers ont mis en avant, lors des entretiens, leur rôle quant à l’accompagnement du patient et de sa famille vers la fin de vie. La notion de collégialité et la présence de l’équipe sont considérés comme des éléments de ressource permettant au soignant une attitude réflexive, une analyse de leur pratique ou, s’ils en éprouvent le besoin, une simple épaule sur laquelle s’appuyer. Les infirmiers sont en adhésion lors des limitations et arrêts des thérapeutiques avec leurs représentations, leurs valeurs et la loi, à partir du moment où ils sont experts dans leur domaine. Ainsi, donner la capacité à l’infirmier de participer de façon active à la prise de décision, tout en respectant la notion de collégialité avec les médecins, ne favoriserait-il pas une meilleure prise en charge du patient ? Cette problématique aura l’occasion d’être étudiée lors d’un prochain travail de recherche. Au fil de cette formation, j’ai pu entrevoir les prémices d’un métier qui me passionne. Ce travail de recherche m’a permis de faire évoluer ma pensée, plus que cela, il a développé mes capacités d’analyse, m’apprenant à désormais déterminer les tenants et aboutissants d’une situation avant de pouvoir m’approprier une réflexion et ne pas se limiter à de simples représentations. Au travers de ce travail de fin d’étude je réalise que mon identité professionnelle, loin d’être aboutie a néanmoins débuté sa construction. Pour conclure ce mémoire, je rappelle l’importance d’une attitude réflexive au quotidien, permettant au soignant une évolution perpétuelle de ses pratiques et de sa philosophie. « Etonnement mon plus beau souvenir en tant que soignant, c’est un décès. »38 38 Cf. Annexe n°1 intitulé Retranscription entretien n°1. Bibliographie: Auteur : Maurice Abiven, « Pour une mort plus humaine », écrit à Paris, Editions : Elsevier Masson, 1998, livre de 240 pages. Consulté le 10 octobre 2013 Auteur : Gilles Antonowicz, Livre intitulé « Fin de vie : Vivre ou mourir tout savoir sur vos droits » Edition Bernard Pascuito et l’Archipel, écrit le 7 mars 2007, 288 pages Disponible en ligne sur : http://books.google.fr/books?id=4RglAAAAQBAJ&pg=PP11&lpg=PP11&dq=Fran%C3 %A7ois+Lemaire+commission+d%27%C3%A9thique&source=bl&ots=qZlufgRNx&sig=LEsxty4mTxA8qMU1mWQrsT1y8dQ&hl=fr&sa=X&ei=EbxcU5fhD8Km0QWt 3IHoAw&ved=0CEcQ6AEwBA#v=onepage&q=Fran%C3%A7ois%20Lemaire%20comm ission%20d'%C3%A9thique&f=false Consulté le 12 mars 2014 Auteur : Annie LE BEC, « Vécu des familles dans les décisions de limitations et arrêt des traitements, Le regard des soignants. » écrit en juin 2010, 139 pages. En ligne disponible sur :https://www.chu-brest.fr/c/document_library/get_file?uuid=02526b38-80ea-4304b3d1-628e40b794be&groupId=10156 Consulté le 30 janvier 2014 Auteur : El Puybasset, extrait de « Enjeux éthiques en Réanimation », Edition Springer Verlag France, écrit à Paris en 2010 chapitre 25 page 227 et 228. Titre du chapitre : « Impact sur les soignants paramédicaux de la prise de décision des limitations thérapeutiques en Réanimation adulte. » En ligne, disponible sur : http://link.springer.com/chapter/10.1007/978-2-287-99072-4_25#page-1 Consulté le12 février 2014 Auteur : Jean-Philippe Pierron, ouvrage intitulé « La dignité peut-elle se perdre ? » extrait de la revue vol 6 n°4 Médecine Palliative, écrite en septembre 07 Sitographie : Auteur inconnu, « limitation ou arrêt d’un traitement pour un patient : en pratique, que dit la loi du 22 avril 2005 » (en ligne) rédigé le 22 mars 2011, disponible sur : http://www.sante.gouv.fr/limitation-ou-arret-de-traitements-pour-un-patient-en-pratiqueque-dit-la-loi-du-22-avril-2005.html Consulté le 16 octobre 2013. Auteur inconnu, « Quand faut-il arrêter la réanimation ? » article rédigé le 7 juin 2002 et publié dans le Le Figaro Disponible en ligne sur: http://www.sosfindevie.org/achar/comment.htm#2 Consulté le 16 octobre 2013. Etude réalisée par Edouard Ferrand, François Lemaire (Hôpital Henri-Mondor, Créteil), René Robert et Pierre Ingrand (hôpital Jean-Bernard, Poitiers), « l’acharnement thérapeutique recule en France » étude rédigé le 17 mai 2001 est publié dans « La Croix ». Disponible sur :http://www.sosfindevie.org/achar/comment.htm#2 Consulté le 23 octobre 2013. Auteur inconnu, « Interview du Dr Elisabeth Kubler Ross » publié dans « Accueillir la mort » Pocket. Pas de date de rédaction connue. Disponible sur : http://www.sosfindevie.org/achar/comment.htm#2 Consulté le 23 octobre 2013. Elaboré en partenariat par l’équipe rédactionnelle de priorité Santé Mutualiste et l’équipe du Centre Nationale de Ressources Soin Palliatif, « Le droit des malades en fin de vie : l’acharnement thérapeutique et l’arrêt des traitements », publié le 25 avril 2012, disponible sur :http://www.soin-palliatif.org/actualites/droit-malades-fin-vie Consulté le 13 novembre 2013. Brochure réalisée par l’hebdomadaire « La Vie », avec le soutien de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (privés non lucratifs), l’Espace éthique de l’Assistance publique -Hôpitaux de Paris, la Fédération hospitalière de France et avec la collaboration du Dr Bernard Devalois, chef de l’unité de soins palliatifs de l’hôpital de Puteaux, « Droits des malades et fin de vie » revue de 5 pages. Pas de date de publication connue, disponible sur : http://www.lavie.fr/www/files/pdf/droits-des-malades-et-fin-de-vie.pdf Consulté le 30 novembre 2013. « Recommandations de bonnes pratiques cliniques concernant l’application de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie ». Texte validé par le Conseil d’administration de la SFAR (Société Française d’Anesthésie et de Réanimation) du 30 juin 2006. Article publié dans les pages formations/informations du numéro d’Août des « Annales Françaises d’Anesthésie de Réanimation », écrit par A. Lienhart, L. Puybasset, S. Beloucif, G. Boulard, pour le groupe de réflexion éthique de la SFAR. (En ligne) disponible sur : http://www.sfar.org/_docs/articles/122-recosfdv0606.pdf Consulté le 7 décembre 2013 Auteur : Klimek Guillaume, écrit en 2013, « La LATA en Réa, le soins d’une éthique », (en ligne) disponible sur : http://www.infirmiers.com/pdf/tfe-guillaume-klimek.pdf Consulté le 29 décembre 2013 Auteur : Eric Favereau, interview de Jean Leonetti « Laisser mourir ce n’est pas laisser crever » publié le 6 septembre 2008 dans Le Libération, (en ligne) disponible sur : http://www.liberation.fr/week-end/2008/09/06/laisser-mourir-ce-n-est-pas-laissercrever_79584 Consulté le 10 janvier 2014 Dossier écrit par la SRLF (Société de Réanimation de Langue Française), écrit le 4 juin 2004, 17 pages, « Les limitations et arrêt de thérapeutique(s) active(s) en Réanimation Adulte » (en ligne) disponible sur : http://www.gfrup.com/fin_vie/gfrup_arret_rea_SRLF03.PDF Consulté le 17 janvier 2014 Auteurs : C. Baccou, M. Delfino, N. Michel, S. Pellegrino, S. Ribes : « La Fin de vie en réanimation », Groupe de réflexion éthique de la SFAR, publié dans Les essentiels 2005 Editions Elsevier SAS. (En ligne) Disponible sur : http://www.reanord.org/jmaru/docs/2006/f2006_6.pdf Consulté le 28 janvier 2014 Auteurs : Lyse Langlois , Manon Truchon , Hubert Marcoux et Lise Fillion, Réjeanne Dupuis : « Les dilemmes éthiques vécus par les infirmières aux soins intensifs » extrait de la revue : « Le travail en crise » 2009, vol. 11, n°2. (En ligne) Disponible sur : http://ethiquepublique.revues.org/90 Consulté le 28 janvier 2014 Auteur : Lucile Maucourant : « Souffrance des Soignants » écrit en 2011 lors d’un DU de soins palliatifs, 40pages. En ligne, disponible sur : http://hematolim.fr/Portals/0/Enseignement/DUISP/2eme_annee/Souffrance%20des%20so ignants%20L.Maucourant.pdf Consulté le 9 février 2014 Auteur : Véronique DI MERCURIO, intitulé «Approche ethnopsychiatrique du malade réanimé : Réhabiliter l’esprit dans les pratiques de soins» écrit en 2007 à l’Université Paris 8 http://www.memoireonline.com/11/11/4941/m_Approche-ethnopsychiatrique-du-maladereanime-Rehabiliter-l-esprit-dans-les-pratiques-de-soins13.html Consulté le 15 février 2014 Auteur : Anne Revillard, intitulé « Aide mémoire : préparer et réaliser un entretien » écrit en 2006-2007, Disponible en ligne sur : http://www.melissa.ens-cachan.fr/IMG/pdf/aide_memoire_entretien.pdf Consulté le 15 février 2014 Auteur : Marine Lamoureux, « L’enquête de l’Ined sur la fin de vie est publiée » extrait du premier numéro de la revue trimestrielle Population datée de mars 2014, disponible en ligne sur : http://www.la-croix.com/Ethique/Actualite/L-enquete-de-l-Ined-sur-la-fin-de-vie-estpubliee-2014-03-04-1115062 Consulté le 6 mars 2014 Rapport de la ministre de l’emploi et de la solidarité « Décret n°2002-466 du 5 avril 2002 Article 1 » version consolidée le 22 janvier 2006 Disponible en ligne sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=468DCC6AFFAC1128E0 F105975E70EAEB.tpdjo10v_3?idArticle=JORFARTI000001231685&cidTexte=JORFTE XT000000585557&dateTexte=29990101&categorieLien=id Consulté le 3 mars 2014 Auteur : inconnu, Définition du mot « euthanasie » Edition Larousse Disponible en ligne sur : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/euthanasie/31769 Consulté le 10 mars 2014 Auteur : Agence Française de sécurité sanitaire des produits de santé, « Recommandations de bonne pratiques, Douleurs rebelle en situation palliative avancée chez l’adulte » Disponible en ligne sur : http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/0f8ed3dd2a116934a6fe38cf 56367eb8.pdf Consulté le 11 mars 2014 Auteur : Dr Michel Legmann, président du conseil national de l’Ordre des médecins. Extrait de la revue Médecin, numéro spécial mai-juin 2013 intitulé Bulletin d’information de l’Ordre National des Médecins : Accompagner un patient en fin de vie. Disponible en ligne sur : http://www.conseilnational.medecin.fr/sites/default/files/cn_bulletin/MEDECINS_Special_fin_de_vie_2013.p df Consulté le 11 mars 2014 Auteur : Ordre français des médecins, intitulé « Le Serment d’Hippocrate » écrit en 1996, disponible en ligne sur : http://www.conseil-national.medecin.fr/le-serment-d-hippocrate-1311 Consulté le 11 mars 2014 Auteur : SFAP (Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs) intitulé « Fin de vie Réflexion éthique », écrit le 1er mars 2007, 15 pages, disponible en ligne sur : http://www.sfap.org/pdf/VII-A16-pdf.pdf Consulté le 12 mars 2014 Auteur : le Gouvernement. Intitulé : « Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé » Titre II Démocratie Sanitaire, Chapitre Ier : Droits de la personne. Disponible en ligne sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000227015 Consulté le 14 mars 2014 Auteur : J. Reignier, A. Cottereau, I. Vinatier, Session SFMU/SRLF, intitulé « Limitations et arrêts des traitements ou réanimation d’attente ? » écrit en 2011, chapitre 72, pages 807 à 817, disponible en ligne sur : http://www.sfmu.org/urgences2011/donnees/articles_titre/fs_conf24_art03.htm Consulté le 14 mars 2014 Auteur : Société française d’accompagnement et de soins palliatifs, écrit en 2009, intitulé « Recommandations de bonne pratique : Sédation pour détresse en phase terminale et dans des situations spécifiques et complexes » 21pages, disponible en ligne sur : http://www.sfap.org/pdf/Sedation-pour-detresse-2009.pdf Consulté le 17 mars 2014 Auteur : Jean Leonetti, député, enregistré à la présidence de l’Assemblée Nationale le 17 avril 2013, intitulé « rapport fait au nom de la des affaires sociales sur la proposition de loi visant à renforcer les droits des patients en fin de vie » disponible en ligne sur : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r0970.asp Consulté le 25 mars 2014 Auteur : Jacques Sauvignet, citant Danièle Blondeau. Article intitulé : « Une éthique infirmière » écrit le 30 janvier 2008, disponible en ligne sur : http://www.cadredesante.com/spip/profession/profession-cadre/Une-ethiqueinfirmiere.html Consulté le 1er avril 2014 Auteur : S Holm, intitulé « Pinciples of biomedical ethics » écrit en 2001et rapportant les propos datant de 1979 de Childress et Beauchamp dans la revue Journal of medical ethics Disponible en ligne sur : http://jme.bmj.com/content/28/5/332.2.full Consulté le 11er avril 2014 Auteur : Anesm, dossier intitulé : « Recommandations de bonnes pratiques professionnelles : La qualité de vie en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes » écrit en mars 2010, citant la définition de l’OMS, disponible en ligne sur : http://www.anesm.sante.gouv.fr/IMG/pdf/lettre_de_cadrage_qualite_de_vie_ehpad_anesm .pdf Consulté le 16 avril 2014 Auteur : Assemblée parlementaire, Conseil de l’Europe, intitulé « Protection des droits de l’Homme et de la dignité des malades incurables et des mourants. » Recommandation 1418, Texte adopté par l’assemblée le 25 juin 1999. Disponible en ligne sur : http://assembly.coe.int/Mainf.asp?link=/Documents/AdoptedText/ta99/FREC1418.htm Consulté le 20 avril 2014 Auteur : Damon Julien, article intitulé « Sigmund Freud (1856 - 1939) », extrait de la revue : Informations sociales 3/ 2006 (n° 131), p. 36-37. Disponible en ligne sur : http://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2006-3-page-37.htm Consulté le 1er mai 2014 Auteur : Haute Autorité de Santé, intitulé « Protocole de Coopération entre professionnels de Santé », validé en avril 2012, disponible en ligne sur : http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1240280/fr/protocole-de-cooperation-entreprofessionnels-de-sante Consulté le 13 mai 2014 Sitographie et provenance des Annexes : Echelle BPS, Payen, Crit care Med, créée en 2001, disponible en ligne sur : http://www.chu-toulouse.fr/IMG/pdf/bps.pdf Consulté le 15 avril 2014 Score de Ramsey, créé par Antalvite, disponible en ligne sur : http://www.antalvite.fr/pdf/Score%20de%20Ramsey.pdf Consulté le 15 avril 2014 Formulaire des Directives Anticipées, créé par la Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs, disponible en ligne sur : http://www.sfap.org/pdf/formulaire_directives_anticipees.pdf Consulté le 15 avril 2014 Formulaire de l’engagement thérapeutique et conditions d’applications, auteur inconnu, distribué par une infirmière de Réanimation lors de mes entretiens. Annexe n°1 : Guide d’entretien : Introduction : Cet entretien a pour but de réaliser la partie exploratoire de mon travail de fin d’étude et je vous remercie par avance de votre collaboration et de vous porter volontaire. L’objectif de cet entretien sera d’affirmer ou d’infirmer mes hypothèses. Ces entretiens ont un objectif qualitatif et non quantitatif. Afin de ne pas induire une réponse l’entretien sera semi directif. Le thème de mon travail de fin d’étude concerne donc la limitation des thérapeutiques en réanimation. Je ne souhaite pas vous communiquer ma question de départ en début d’entretien mais si vous le désirez je pourrai vous l’explicitez à la fin. Estce que cela vous dérange si que j’enregistre ? C’est facilitant pour moi, me permettant d’éviter de prendre des notes afin de pouvoir échanger avec vous. Le cadre : Cet entretien est individuel et strictement anonyme. Même enregistré, ces entretiens ne seront pas utilisés dans un autre cadre que celui de mon mémoire. Sa durée peut varier mais devrait être en moyenne de 35 minutes. 1/ Le contexte socio professionnel : - Combien d’années de diplômes avez-vous ? - Depuis combien de temps exercez vous en service de Réanimation ? - Pourquoi avez-vous souhaité travailler en Réanimation ? 2/ Les représentations : • Service et profession : - Pouvez vous me donner 6 mots clefs qui définiraient votre activité ? - C’est quoi être infirmier en service de Réanimation ? - Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? (Spécificité de l’exercice professionnel en Réanimation) - Que connaissez-vous de la loi Leonetti ? - Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de cette loi et de votre pratique professionnelle en réanimation ? - Comment jugez vous la prise en charge de la douleur en fin de vie dans le service de Réa ? - Selon vous que signifie la notion de « double effet » ? 3/ Le vécu : • La fin de vie : - La loi Leonetti : pouvez vous m’en dire quelques mots ? - Quelles sont les grandes lignes de cette loi, les grandes idées ? - Pour vous dans le service est-elle bien appliquée ? - Selon vous est-elle suffisante ou incomplète ? • Les limitations de thérapeutiques : - Avez-vous déjà vécu une situation de limitation des thérapeutiques actives en réanimation ? -Comment la décision est-elle prise? Collégiale ou non ? D’après vous pourquoi est-elle prise de cette façon là ? - Avez-vous déjà participé à une réunion collégiale où a été prise la décision de LATA ? Si oui quel est votre rôle dans la prise de décision? -Comment la décision est-elle annoncée aux proches et/ou au patient ? Qui l’annonce ? -Généralement, après la prise de décision, combien de temps se passe t-il avant la mise en application ? - Avez-vous déjà participé à l’application d’une LATA ? - Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? - Quel est le rôle de l’infirmière lors de l’application de la décision ? - Posture soignante ? - Actes ? - Accompagnement ? - La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? - Pour vous quelles différences y a t-il entre un patient en soins palliatifs et un patient en situation de limitation thérapeutique ? - Quelles seraient selon vous les circonstances d’une fin de vie « idéale » ? Merci de votre participation à cet entretien. Annexe n°2 : Retranscription des entretiens 1 à 5 : Retranscription Entretien n°1 Durée de l’entretien : 36 minutes 1/ Le contexte socio professionnel : - Combien d’années de diplômes avez-vous ? 12 ans - Depuis combien de temps exercez vous en service de Réanimation ? 10ans - Pourquoi avez-vous souhaité travailler en Réanimation ? Intéressant, soins d’urgence bonne maîtrise, complet, travail en binôme intéressant, confort de travail et de matériel 2/ Les représentations : • Service et profession : - Pouvez vous me donner 6 mots clefs qui définiraient votre activité ?technique, binôme, communication non verbale (patient qui peuvent pas parler mais s’exprime quand même, encadrement, entourage, engagement thérapeutique (parfois on va très loin et parfois on s’arrête) - C’est quoi être infirmier en service de Réanimation ? Avoir des capacités techniques et relationnelles très poussées car il faut s’adapter au besoins du patient qui peuvent être très diverses, se baser sur une équipe pluridisciplinaire pour aller vers le meilleur pour guider le patient et la famille dans les meilleurs conditions soit vers le bien être, le mieux être, soit vers la fin de vie. - Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? (Spécificité de l’exercice professionnel en Réanimation) les mêmes valeurs qu’ailleurs, respect de la confidentialité, respect de l’éthique de vie et de penser, rester doux malgré toutes les machines, bien prévenir pendant les soins. L’éthique en principe elle est la même de partout. Abord très technique qui peut rebuter certaines personnes, abord émotionnel : on contoit beaucoup la fin de vie, les décès, énormément, décès difficiles (personnes accidentées de la route, mort brutale, prélèvement d’organes) ça peut être émotionnellement plus difficile qu’ailleurs. Abord avec le patient sédaté et curarisé différents car il est inconscient donc moins d’attachement avec le patient. Plus de communication avec les familles qu’avec les patients. - Que connaissez-vous de la loi Leonetti ? Pleins de choses, appliquée dans le service avec le staff toutes les semaines, où tout le monde à la possibilité de s’exprimer, sur chaque patient petit récapitulatif sur l’état de santé, antécédents, évolution dans le service. Le médecin donne son avis concernant l’engagement thérapeutique (au maximum ou limitation ou arrêt) documenté et tracé. Si la décision nous choque on a le droit de le dire et on en discute. Tous les soignants sont conviés, les familles sont informées de la décision. On ne leur demande pas de faire un choix car c’est trop difficile et très culpabilisant pour eux par la suite. On commence à y réfléchir ensemble, quand on prend l’avis, on oriente aussi. Si un médecin demande à une famille si elle veut que ça s’arrête ou pas selon la façon de demander il va obtenir un non ou un oui pour la même personne. Il y a des fois où c’est une évidence qu’il faut que ça s’arrête pour ce malade parce que ça va trop loin et que ça sert à rien c’est que prolonger l’inévitable dans des circonstances qui seraient pas sympathiques et agréable pour le patient et sa famille. - Comment jugez vous la prise en charge de la douleur en fin de vie dans le service de Réa ? On y fait très attention, on a la chance d’avoir pas mal de traitements dans le service, assez variés, au niveau paramédical dès qu’on repère une douleur on en parle au médecin pour qu’il adapte le traitement ou on en parle au kiné, on les masse quand il y a besoin pour les soins de confort. Pour la souffrance morale on a une psychologue qui est géniale dans l’équipe. - Selon vous que signifie la notion de « double effet » ? Alors double effet ça je sais plus ce que c’est. Explications données à l’infirmière. Si les choses sont réfléchies, en général on sait ou on va avec tel médicament, à un moment si on sait qu’on va vers la fin de vie on peut pas envisager qu’un patient souffre, qu’il ait mal pour que ça s’arrête quand ça devait s’arrêter. Donc moi je suis favorable quitte à ce que ça se finisse un peu plus tôt en terme d’heures, que le patient ne souffre pas parce que c’est plus acceptable pour les familles, pour le patient lui-même et pour nous soignant sinon c’est difficile à vivre aussi. Moi ce n’est pas quelque chose qui me choque, tout le monde te dira « moi je veux pas mourir en ayant mal ». Même dans les décès un peu plus brutaux qu’on peut amener à soigner en réanimation en général les familles ce qu’elles veulent savoir c’est « est-ce qu’il a souffert ? », c’est une question qu’on nous pose régulièrement et là dans la mesure ou c’est programmé, se dire qu’il est mort en souffrance c’est pas trop admissible à mon sens. 3/ Le vécu : • La fin de vie : - La loi Leonetti : pouvez vous m’en dire quelques mots ? - Selon vous est-elle suffisante ou incomplète ? Pour moi elle suffit après je ne suis qu’un petit infirmière, elle répond à mes besoins de soignantes. Ca nous a permis de… J’ai travaillé avant qu’elle existe en fait, il y a une réelle différence entre l’avant et l’après, y a maintenant un document écrit, c’est clair net, sur l’engagement et c’est documenté c’est expliqué. Il y a une vraie protection sur ce qu’on fait, toujours avec une réflexion. Se dire si un autre médecin prend la suite il y a une continuité, une base sur laquelle bien travailler. Le médecin peut toujours revenir en arrière mais ça n’arrive quasi jamais. La décision peut être prise en urgence mais jamais tout seul, même avant que le patient arrive, est ce qu’on réanime ? • Les limitations de thérapeutiques : - Avez-vous déjà vécu une situation de limitation des thérapeutiques actives en réanimation ? Oui Limitation : patient dépendant cf. feuille annexe, on se prononce on peut juste limiter les dialyses, l’intubation, on peut se limiter à un certain dosage de catécholamine Arrêt : on continue les soins confort, nursing, bien être, traitement antalgique, explications aux familles ++, ils savent à quoi s’en tenir. On peut mettre en application la décision dans 2 jours pour attendre la famille. On continu l’alimentation et l’hydratation, on va pas laisser quelqu’un mourir de faim. On arrête le respirateur, ça peut arriver. -Comment la décision est-elle prise? Collégiale ou non ? D’après vous pourquoi est-elle prise de cette façon là ? C’est logique quand on travaille tous ensemble de réfléchir tous ensemble. Ca permet encore une fois que si quelqu’un est choqué par cette décision par rapport à ses convictions qu’il puisse s’exprimer et on aura la possibilité de discuter de ces arguments et de les prendre en compte L’acharnement thérapeutique existe toujours surtout quand les médecins sont un peu plus jeunes dans l’exercice, c’est encore moins évident car ils ont envi de sauver tout le monde. On ne fait pas tous ces métiers pour les mêmes raisons. On a pas tous le même point de vue, jusqu’où s’arrêter et à quel age ? Quand on a aucun antécédent à 90ans à quel moment on s’arrête ? Pour l’instant dans le service les patients même à 90ans ils sont intubés, ils ont un massage cardiaque etc. et je sais que dans le service ça choque des soignants. -Comment la décision est-elle annoncée aux proches et/ou au patient ? Qui l’annonce ?c’est le médecin qui l’annonce, en ce qui concerne les familles on l’annonce en dehors de la chambre à un endroit où ils peuvent s’asseoir, où ils peuvent craquer. On se pose on prend le temps qu’il faut, en général médecin et infirmier. Le médecin explique la situation pourquoi on en est arrivé là. Les nouvelles sont généralement assez pessimistes les jours précédents « On a fait tel et tel examen, la situation est grave, on pense qu’il va pas récupérer, il sera pas comme avant », on explique ce qui risque d’arriver, pourquoi on en est là, « on pense que c’est mieux pour lui, qu’on aille pas s’acharner et le laisser partir en douceur ». On n’annonce à ce moment là l’ouverture des visites en nombre de personne et en horaire (jour et nuit). - Avez-vous déjà participé à l’application d’une LATA ? Oui arrêt de catécholamines, du respirateur etc. - Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? A partir du moment ou c’est assez clair dans notre esprit, que la famille est bien au clair avec ça, ça se passe bien parce que c’est bien réfléchie à l’avance. Si c’est fait n’importe comment c’est la que c’est mal vécu. L’extubation n’est pas faite en présente de la famille parce que il ne faut pas qu’il leur reste des images un peu pénible en tête. Si tout est clair y a pas à avoir de secret, s’ils sont choqués on prend plus de temps on ré explique. - Quel est le rôle de l’infirmière lors de l’application de la décision ? - Posture soignante ? Participer à la décision, mise en oeuvre - Actes ? - Accompagnement ? ++ Des familles, du patient C’est pas parce que tu arrête le respirateur que le patient décède de suite ça peut prendre plusieurs jours. On est pas tout seul, on est en binôme et on accompagne ensemble et c’est une vraie force d’être ensemble pour pouvoir passer le relais à ta collègue et c’est comme ça que c’est le mieux vécu. - La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Oui à partir du moment ou c’est bien réfléchi, bien expliqué. - Quelles seraient selon vous les circonstances d’une fin de vie « idéale » ? Une personne âgée, qui a bien vécu sa vie et qui décède entouré des siens sans douleur et dans l’apaisement le plus complet. Merci de votre participation à cet entretien. Petit phrase ajoutée à la fin de l’entretien une fois l’enregistrement arrêté: Etonnement mon plus beau souvenir en tant que soignant, c’est un décès. Retranscription Entretien n°2 Durée 23 minutes 1/ Le contexte socio professionnel : - Combien d’années de diplômes avez-vous ? 24ans - Depuis combien de temps exercez vous en service de Réanimation ? 18ans - Pourquoi avez-vous souhaité travailler en Réanimation ? C’est pour la connaissance globale du patient, on a le temps de vraiment connaître la pathologie, les résultats d’examens, alors que dans les services ce n’est pas possible et le temps d’accueillir les familles. 2/ Les représentations : • Service et profession : - Pouvez vous me donner 6 mots clefs qui définiraient votre activité ? En tant que référente : matériel, formation, soins adaptés, personnalisés, globalité, soins technique, respect de la personne - C’est quoi être infirmier en service de Réanimation ? Pas que de la technique, il faut pas avoir les deux pieds dans le même sabot bien sûr, rigueur, être réactif à l’urgence, compétence humaine de communication, par le toucher, être observatrice et à l’écoute du patient. - Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? (Spécificité de l’exercice professionnel en Réanimation) les valeurs de l’infirmière sont la discrétion, la technicité. - Que connaissez-vous de la loi Leonetti ? Je crois que c’est de ne pas prodiguer de soins déraisonnables quand il n’y a pas d’espoir de guérison, c’est différent de l’euthanasie, c’est la possibilité de faire une limitation ou arrêt thérapeutique. - Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de cette loi et de votre pratique professionnelle en réanimation ? Déjà il y a la mise en place du staff le jeudi, on parle de tous les patients les médecins parlent du devenir, c’est souvent une décision collégiale, tout le monde peut donner son avis si on est d’accord ou pas d’accord. - Comment jugez vous la prise en charge de la douleur en fin de vie dans le service de Réa ? En fin de vie elle est assez bien gérée. Les médecins prescrivent plus facilement de la morphine que pour un autre patient. Quand on passe en arrêt thérapeutique les antalgiques sont quasiment mis en systématique. On s’inquiète de savoir si ils vont souffrir ou pas. - Selon vous que signifie la notion de « double effet » ? Double effet ? Explications données. 3/ Le vécu : La fin de vie : - Quelles sont les grandes lignes de cette loi, les grandes idées ? non sauf concernant l’obstination déraisonnable. Relance de ma part sur les directives anticipées : l’infirmière ne sait pas vraiment ce que c’est. Elle ajoute : c’est souvent les familles qui disent que la personne n’aurait pas voulu qu’on s’acharne. En réalité les directives anticipées sont jamais faites, je n’en n’ai jamais vu c’est uniquement dit à l’oral et la famille transmet au médecin. J’imagine que c’est difficile quand on est en bonne santé, se projeter, c’est ce qui s’est passé avec l’histoire de Vincent lambert. Moi en bonne santé je peux dire je préfère mourir plutôt que d’être handicapé et si un jour je suis handicapée je serais peut être bien contente que quelqu’un s’occupe de moi et que je puisse voir mes petits enfants, on peut changer entre temps - Selon vous est-elle suffisante ou incomplète ? En réanimation, à peu près, des fois il y a des désirs des familles qui trouvent que la fin est un peu longue, ils aimeraient que ce soit un peu plus rapide. Je pense qu’en réa on a pas trop ce problème là parce que c’est des maladies aigues. Une fin de vie en réa c’est quand même assez rapide, même si parfois ça dure quelques jours, ils sont toujours dépendants de quelque chose. Ce doit être plus difficile en soins palliatifs et en EHPAD. • Les limitations de thérapeutiques : - Avez-vous déjà vécu une situation de limitation des thérapeutiques actives en réanimation ?oui -Comment la décision est-elle prise? Collégiale ou non ? D’après vous pourquoi est-elle prise de cette façon là ?généralement c’est pas la décision du médecin seul, c’est décidé soit en staff, soit entre médecin. Souvent avec la famille aussi, des fois avec le patient, c’est arrivé plusieurs fois ces temps que les patients aient demandé de tout arrêter. Elle est prise de façon collégiale pour avoir des avis différents, pour être sur de pas se tromper et puis c’est une décision importante à prendre, responsabilité morale... C’est important que ce ne soit pas l’affaire d’une seule personne. - Avez-vous déjà participé à une réunion collégiale où a été prise la décision de LATA ? Si oui quel est votre rôle dans la prise de décision? Bah, parfois, dans certains cas on peut dire qu’on est pas d’accord, en générale je suis toujours à peu prêt d’accord parce que c’est logique. Tout le monde peut prendre la parole, les aides soignantes aussi. -Comment la décision est-elle annoncée aux proches et/ou au patient ? Qui l’annonce ? Bah c’est le médecin, souvent en présence de l’infirmière et de l’aide soignante, souvent dans le petit salon, pas dans la chambre, pas par téléphone non plus. On va pas dire du jour au lendemain « votre papa on va faire un arrêt thérapeutique ». Les médecins sont assez proches des familles, ils font ça progressivement. On leur demande ce qu’ils en pensent, ce que le patient aurait souhaité. On personnalise aussi la prise en charge selon si les familles habitent loin on attend un peu. - Avez-vous déjà participé à l’application d’une LATA ? Oui - Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ?hier, je m’occupais d’une personne qui est rentrée jeudi pour une embolie pulmonaire 83ans. Apparemment c’était pas très important et elle s’est dégradée dans le week-end. Je m’en suis occupée lundi et on a décidé en accord avec la famille qui a été vue tous les jours que au vu de ses antécédents, continuer les soins étaient déraisonnables, on a proposé un arrêt thérapeutique avec l’accord de la famille. On a élargi les visites, ils étaient jusqu’à 8 dans la chambre. On a arrêté tous les traitements on la mise sous morphine la famille était inquiète qu’elle souffre... Vers 19h la famille trouvait que c’était un peu long ils auraient aimé accélérer un petit peu les choses donc ils ont revu le médecin et il a été décidé de débrancher le respirateur. Elle respirait tout seule sur le nez artificiel. Il y a eu une fille qui est arrivée de paris qui a eu le temps de venir et elle est décédée à 19h30 entourée de sa famille. - Quel est le rôle de l’infirmière lors de l’application de la décision d’arrêt ? - Posture soignante ? - Actes ? Arrêt des médicaments, maintien de l’hydratation, soins de confort, de nursing, soins de bouche, bonne installation. - Accompagnement ? Avec les familles, savoir s’ils ont besoin de quelque chose, de présence, on favorise leur intimité en fermant la porte et en diminuant les alarmes. - La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Oui quand c’est déraisonnable je préfère qu’on limite voir qu’on arrête. - Pour vous quelles différences y a t-il entre un patient en soins palliatifs et un patient en situation de limitation thérapeutique ? Différence sur la durée, on accompagne la famille et le patient sur un cours moment lors d’arrêt de thérapeutiques. Je ne connais pas vraiment les soins palliatifs mais je pense que c’est plus dans la durée, il y a un projet de fin de vie - Quelles seraient selon vous les circonstances d’une fin de vie « idéale » ? Dans son lit chez soi, sans souffrance vieux, mais pas trop. Un accident à 80ans. IL y a un monsieur belge y a trois semaines 78 ans qui a eu un accident de ski il s’est dénuqué donc voila il a eu une belle vie d’après la famille, la vieillesse c’était pas pour lui. Il y a eu un prélèvement d’organes. Merci de votre participation à cet entretien. A la fin de l’entretien, l’infirmière, une fois le micro désactivée rajoute : Pour moi les situations qui sont émotionnellement les plus difficiles sont celles où la famille n’est pas présente, que le patient est seul et que les familles appellent tous les jours pour savoir si c’est fini. Retranscription entretien n° 3 Durée de l’entretien : 23 minutes. Il y a eu une interruption de 5 minutes de la part du soignant pour aller s’occuper d’un patient qui ne se sentait pas bien à ce moment là. 1/ Le contexte socio professionnel : - Combien d’années de diplômes avez-vous ? 8ans Homme - Depuis combien de temps exercez vous en service de Réanimation ? Bientôt 4ans - Pourquoi avez-vous souhaité travailler en Réanimation ? Pour le coté urgence, technique, mais aussi relationnel pour moi il y a au moins 50% de chaque. La qualité des soins et la prise en charge sont quand même bonnes en réa. 2/ Les représentations : • Service et profession : - Pouvez vous me donner 6 mots clefs qui définiraient votre activité ?soins d’urgence, réactivité, soins relationnels, accompagnement de fin de vie, soins de confort, travail en binôme. - C’est quoi être infirmier en service de Réanimation ? Savoir gérer l’urgence et les fin de vies, accompagnement de fin de vie, des familles. Etre très réactif, savoir prendre beaucoup de recul des fois on fait une sortie et une entrée juste derrière sans avoir forcément un temps pour débriefer, avoir le sens du travail en équipe c’est important, comme partout. - Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? (Spécificité de l’exercice professionnel en Réanimation) identité professionnelle ? Relance sur les valeurs de l’infirmier. Je sais pas si ça diffère d’un autre service, c’est les mêmes valeur qu’ailleurs - Que connaissez-vous de la loi Leonetti ? Loi qui parle de l’accompagnement de fin de vie, des soins palliatifs, des limitations de thérapeutique euh… Voila - Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de cette loi et de votre pratique professionnelle en réanimation ? Moi je trouve que c’est une grande mise en application, beaucoup de réflexion notamment en staff chaque semaine où on parle de chaque patient. Les décisions médicales sont prises en concertation avec les autres médecins, l’équipe, la famille, c’est une belle mise en pratique. - Comment jugez vous la prise en charge de la douleur en fin de vie dans le service de Réa ?je pense qu’on est assez efficace. Dans ma pratique j’ai jamais rencontré de soucis, quand il y a un patient en fin de vie on en parle au médecin et les traitements sont vites mis en place, sédation et antalgique. Il y a toujours un médecin sur place ce qui permet une bonne prise en charge de la douleur. - Selon vous que signifie la notion de « double effet » ? Aucune idée. Explications données à l’infirmier. Rien à ajouter 3/ Le vécu : • La fin de vie : - La loi Leonetti : quelles sont les grandes lignes de cette loi, les grandes idées ? Non j’ai pas plus d’idées - Pour vous dans le service est-elle bien appliquée ?oui - Selon vous est-elle suffisante ou incomplète ? Il y avait la question des directives anticipées qui moi me posent toujours question dans le sens où je pense qu’on peut avoir une idée sur la question quand on va bien mais on peut changer d’avis à ce moment là ;, c’est aussi le rôle de la personne de confiance à condition d’avoir un avis qui peut évoluer. Je suis sûre qu’il y a des personnes qui peuvent être pour une LATA quand tout va bien et au moment ou leur situation change ne plus être d’accord. Je n’ai jamais rencontré ce genre de situations mais ça me pose question dans la difficulté de les réaliser. Et puis c’est pareil il y a des gens qui peuvent en parler oralement de là à les mettre par écrit je pense que c’est une autre étape j’ai un exemple très précis d’une personne très au clair à l’oral et quand le médecin lui a demandé de le mettre par écrit il a été très réticent et il ne l’a pas fait. C’est tellement figé un écrit même modifiable. • Les limitations de thérapeutiques : - Avez-vous déjà vécu une situation de limitation des thérapeutiques actives en réanimation ? Oui -Comment la décision est-elle prise? Collégiale ou non ? D’après vous pourquoi est-elle prise de cette façon là ? Avez-vous déjà participé à une réunion collégiale où a été prise la décision de LATA ? Si oui quel est votre rôle dans la prise de décision? Collégiale en sachant que c’est le médecin qui va quand même prendre la décision, pour pas que la famille ait le poids de la décision. Ils ont le droit d’être d’accord, de pas l’être, d’être partagés, ce qui compte c’est qu’il y est un professionnel médical responsable. Disons que la personne de confiance donne son avis mais elle prend pas la décision, son avis influence néanmoins. Elle transmet surtout au médecin la position qu’avait le patient avant d’être inconscient. Après on réfléchit en équipe mais ça reste le médecin qui prend la décision. Si quelqu’un n’est pas d’accord peut être qu’il peut revenir sur sa décision mais moi en tout cas je ne l’ai jamais vu. J’ai déjà été consulté pour donner mon avis concernant des arrêts thérapeutiques et je l’ai toujours donné. C’est important de donner son avis pour bien le vivre après, vraiment si on est pas d’accord, se positionner ça permet de faire mûrir les choses, de pas rester sur une idée fausse déjà parce que ça arrive qu’on ai pas toutes les informations en tête parfois, on comprend pas pourquoi on ne limite pas et en fait on se rend compte en discutant avec le médecin qu’il nous manque une information importante. -Généralement, après la prise de décision, combien de temps se passe t-il avant la mise en application ? Quand le médecin a pris la décision avec l’équipe, cependant la décision n’est pas appliquée tant qu’on n’a pas vu la famille. La famille est toujours intégrée même si ce n’est pas eux qui prennent la décision. c’est assez rapide car déjà entre le moment ou on commence à avoir l’idée et le moment ou on en parle aux familles il se passe déjà pas mal de temps donc après quand la famille est au courant ça va assez vite. - Avez-vous déjà participé à l’application d’une LATA ?oui - Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? oui, pour une personne d’une quarantaine d’années, c’est souvent des situations qui nous renvoient beaucoup de chose avec une histoire de vie un peu similaire, j’ai à peu près le même âge que lui et il avait 3 enfants j’en ai 3 aussi. C’était une personne qui avait tenté de se suicider et puis arrive un moment où on s’est rendu compte qu’on pouvait plus rien faire pour lui. Donc après avoir vu son épouse, il a été décidé d’arrêter les thérapeutiques, et en plus de ça l’équipe de dons d’organes a pris contact, dans un second temps bien évidemment, avec l’épouse du patient pour demander si son mari avait un avis là-dessus et si elle s’opposait ou pas au prélèvement d’organes. Donc c’est une situation où pour le coup malgré le pronostic du patient on a finalement pas mis en place l’arrêt des thérapeutiques afin de procéder au prélèvement d’organes. - Quel est le rôle de l’infirmière lors de l’application de la décision ? - Posture soignante ? - Actes ? Mettre en place les sédations, les antalgiques, rôle de présence auprès de la personne, aider la famille à ce qu’elle puisse s’autoriser à lui prendre la main, à pas uniquement rester fixée sur le scope jusqu’à ce que ça se termine, continuer à lui parler, s’ils souhaitent qu’on soit présent dans la chambre ou pas, c’est pas parce qu’on arrête les thérapeutiques qu’on arrête les soins. On dit que le toucher c’est le dernier sens à disparaître et je pense que à ce niveau on a un grand rôle pour vraiment que la personne nous sente et se sente accompagnée jusqu’au bout. - Accompagnement ? Très important vis-à-vis de la famille, bien expliquer les choses car quand le médecin leur explique c’est un peu un choc, les questions arrivent après coup, des fois ils ont pas tout entendu ou ils ont pas voulu entendre au moment de l’entretien et nous en tant qu’infirmier on est là pour ça et puis aussi les rassurer sur la prise en charge de la douleur. - La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Oui a condition que la décision corresponde avec ce que je pense. C’est un peu difficile à mettre en mot mais… disons quand on sait qu’il ny a pas d’issue favorable et qu’elle va rester en coma végétatif on peut philosophiquement se poser la question du sens de la vie à ce moment là. Qu’est ce que ça représente la vie pour moi, comment on imagine la vie, c’est pour ça que moi je suis pour la limitation de thérapeutique. - Pour vous quelles différences y a t-il entre un patient en soins palliatifs et un patient en situation de limitation thérapeutique ? - Quelles seraient selon vous les circonstances d’une fin de vie « idéale » ? Une fin de vie idéale, à mon sens, c’est vraiment, la réanimation c’est vraiment un service pour ça justement. Comme on a peu de patient en charge on peut se permettre de prendre le temps pour faire l’accompagnement dans de bonne condition, parce qu’on est nombreux au niveau humain, l’idéal c’est avec le soignant qui continu jusqu’au bout à accompagner son patient et avec les proches qui seraient à côté entourant le patient. Merci de votre participation à cet entretien. Retranscription Entretien n°4 Durée 26minutes 1/ Le contexte socio professionnel : - Combien d’années de diplômes avez-vous ? 11 ans - Depuis combien de temps exercez vous en service de Réanimation ? 7 ans - Pourquoi avez-vous souhaité travailler en Réanimation ? J’ai tout de suite apprécié les conditions de travail qui sont relativement bonne. Prendre en charge de façon globale 3 patients est, à mon sens plus valorisant qu’en prendre 12 dans un service sans vraiment les connaître. J’aime la technicité des soins, le travail en binôme est intéressant. 2/ Les représentations : • Service et profession : - Pouvez vous me donner 6 mots clefs qui définiraient votre activité ? Technicité, accompagnement, urgence, fin de vie, binôme et soins relationnels. - C’est quoi être infirmier en service de Réanimation ? il faut être dynamique et rigoureux pour réagir en situation d’urgence, il faut savoir accompagner les gens dans les moments difficiles, être à l’écoute énormément. Il faut savoir prendre du recul afin de ne pas ramener les soucis à la maison ce qui n’est pas toujours évident. Il m’est arrivée d’avoir envi d’appeler mes collègues la nuit pour savoir comment va Mr in tel suite à la journée que j’ai passé au travail, je ne l’ai cependant jamais fait. - Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? (Spécificité de l’exercice professionnel en Réanimation) Vous voulez parlez des valeurs de l’infirmière ? Pour moi les valeurs sont les même qu’ailleurs car dans la profession nous devons, je pense, partager les mêmes valeurs professionnelles. Dans notre profession en réa peut être quand même plus qu’ailleurs il faut savoir être humble, faire preuve de modestie, nous ne sommes pas des héros. Parfois aussi il faut prendre du recul ne pas culpabiliser, le décès d’une personne ne doit pas être vécu comme un échec pour l’équipe soignante. Il faut aussi respecter les grands principes, déontologiques, légaux, éthique. Toujours penser pour le bien du patient. Tu sais quand en réa les patients sont intubés, avec une trachéo et pleins d’autres dispositifs c’est très déshumanisant pour les familles, c’est notre rôle de restituer cette humanité. - Que connaissez-vous de la loi Leonetti ? C’est une loi concernant l’acharnement thérapeutique qu’elle interdit. Elle parle des limitations et arrêt des thérapeutique, qui la solution alternative. - Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de cette loi et de votre pratique professionnelle en réanimation ? En réanimation on limite ou on arrête les thérapeutiques un certain nombre de fois. - Comment jugez vous la prise en charge de la douleur en fin de vie dans le service de Réa ? Je la trouve plutôt correcte surtout quand la décision d’arrêt des thérapeutiques est prise, on se préoccupe de la souffrance du patient, d’ailleurs - Selon vous que signifie la notion de « double effet » ? Je ne sais pas. Explications données. Rien à ajouter. 3/ Le vécu : • La fin de vie : - La loi Leonetti : pouvez vous m’en dire quelques mots ? - Quelles sont les grandes lignes de cette loi, les grandes idées ? - Pour vous dans le service est-elle bien appliquée ? Oui assez bien, parfois on rencontre encore des situations où l’on trouve que c’est un peu de l’acharnement mais personnellement j’ose en parler au médecin quand une situation m’interpelle. - Selon vous est-elle suffisante ou incomplète ? elle est suffisante car de toute façon aucune loi ne sera parfaite, ce qui compte c’est qu’elle soit une référence pour nous soignant, après si elle était appliquée partout et pas seulement en réa ce serait déjà bien. • Les limitations de thérapeutiques : - Avez-vous déjà vécu une situation de limitation des thérapeutiques actives en réanimation ? Oui -Comment la décision est-elle prise? Collégiale ou non ? D’après vous pourquoi est-elle prise de cette façon là ? Elle est prise de façon collégiale pour toutes les situations. Je pense qu’elle est prise de cette façon là pour que ce ne soit pas « l’affaire » d’une seule personne. Et puis il me semble normale que, étant donné que l’équipe soignante est auprès du patient 24h/24, elle participe à la réflexion. Nous rencontrons les familles, on en parle avec eux, enfin surtout les médecins. - Avez-vous déjà participé à une réunion collégiale où a été prise la décision de LATA ? Si oui quel est votre rôle dans la prise de décision? Oui bien sûr, les réunions collégiales se passent tous les jeudi, ont peut quand même être amené à discuter avec le médecin en dehors de celle-ci, afin de lui transmettre notre ressenti. On a tous un vécu différent, une formation différente aussi car dans une même promotion on n’apprend pas tous les mêmes chose. A un moment donné tel personne aura axé ses révisions sur tel cours alors qu’un autre pas du tout. Et puis, notre histoire de vie est différente, je me sentirais plus en difficulté en face d’une patiente qui a mon âge et qui est en fin de vie que mon collègue, c’est ces différences qui font la force d’une équipe. C’est important de se serrer les coudes dans les moments difficiles, on ne s’interdit pas de pleurer. On échange beaucoup entre nous, -Comment la décision est-elle annoncée aux proches et/ou au patient ? Qui l’annonce ? C’est toujours le médecin qui l’annonce, avec nous souvent. De façon progressive bien sûr, tu peux pas dire aux familles « on arrête les traitements il va partir progressivement », ils risqueraient de l’interpréter comme l’abandon des soins. Non on dit les choses quand même mais on utilise des termes adaptés. S’ils n’ont pas compris, c’est notre rôle de reformuler et de prendre un temps avec eux, jusqu’à ce qu’ils comprennent. Après il faut aussi savoir que parfois les gens sont pas prêt à attendre, tu leur dis mais ils ont l’esprit fermé, c’est normal c’est un mécanisme de défense, c’est tellement dur… -Généralement, après la prise de décision, combien de temps se passe t-il avant la mise en application ? Ca dépend, on n’est pas là pour brusquer les choses, on peut attendre quelques jours si la famille vient de loin, sinon il n’y a pas non plus de raison d’attendre plus longtemps. Des fois, plus c’est long pour les familles plus c’est douloureux. C’est valable aussi pour nous. Relance de ma part, pourquoi ? On reporte une fin inévitable et on prolonge une attente sans évolution favorable de l’état du patient. Il faut se mettre à la place des familles, tu sais que ton proche va mourir et en même temps tu attends que ce soit fait pour que le processus de deuil commence. Certains disent même que la vie est déjà finie, qu’on attend plus que le cœur s’arrête. Tout dépend notre représentation de ce que peut être la vie. - Avez-vous déjà participé à l’application d’une LATA ? Oui comme je le disais, ça arrive assez souvent, mais ce n’est jamais anodin pour autant. - Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? Oui, c’était un patient âgé de 76ans, c’était il y a 3 jours. Il était arrivé pour AVC hémorragique. Son pronostic vital n’était pas bon. Il n’a pas récupéré, on a décidé après avoir fait une réunion collégiale, après avoir consulté ses enfants et sa femme, d’arrêter les thérapeutiques. Il est décédé quelques heures après. Cette situation m’a touchée même si le patient était âgé. La famille était très soudée ils ont toujours voulu le bien être du patient, très soucieux de son confort. Ils étaient impressionnés par les machines et osaient à peine lui prendre la main. Mon rôle était de les rassurer, de leur dire que leur papa, mari, n’allait pas souffrir. C’est entouré de ses proches que le patient est décédé. - Quel est le rôle de l’infirmière lors de l’application de la décision ? - Posture soignante ? Respect de la dignité du patient jusqu’à sa mort et même après. Empathie avec la famille, écoute. Il faut avoir une posture réflexive afin de prendre du recul, il est important de bien penser le soin, de ne pas se cacher derrière trop de mécanisme, banaliser l’arrêt d’un respirateur ou d’un pousse seringue peut, selon moi, à long terme revenir au soignant en pleine figure. - Actes ? Soins de confort et de bien être - Accompagnement ? On accompagne beaucoup les patients et leurs proches. - La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Oui c’est en accord avec mes valeurs et mon identité soignante car à mon sens, elle répond au problème de l’obstination déraisonnable. Je suis généralement assez satisfaite de ces prises en charge en fin de vie et je me sens valorisée dans mon travail quand la personne part sans souffrance avec dignité et accompagnée de tous. - Pour vous quelles différences y a t-il entre un patient en soins palliatifs et un patient en situation de limitation thérapeutique ? Selon moi, les soins palliatifs sont plus dans la durée que l’arrêt des thérapeutiques. Ici le patient est forcément dépendant des machines, sinon il ne serait pas en réa, donc forcément quand on arrête ces machines, ils partent beaucoup plus vite. L’accompagnement est le même mais bien entendu il est plus bref. Après, en soins palliatifs quand la personne est là depuis 2 mois, le soignant peut avoir développé une relation soignant-soigné très forte, basée sur la confiance, mêlant beaucoup d’émotions. En réanimation les patients sont souvent inconscients, on a certainement moins cet attachement au patient que dans les services. - Quelles seraient selon vous les circonstances d’une fin de vie « idéale » ? Ce serait tout d’abord une personne âgée, entourée des siens et qui parte rapidement sans souffrance. Merci de votre participation à cet entretien. Retranscription Entretien n°5 Durée 40 minutes 1/ Le contexte socio professionnel : - Combien d’années de diplômes avez-vous ?6ans - Depuis combien de temps exercez vous en service de Réanimation ? 5 ans et demi - Pourquoi avez-vous souhaité travailler en Réanimation ? Parce que c’était pour la globalité des soins, ton patient tu le prends en charge de A à Z. Parce que j’avais bien aimé mon stage en réa étant étudiant, on travaille en binôme, beaucoup de techniques et des pathologies variées. Quand t’es en réa au niveau technique tu vois tout 2/ Les représentations : • Service et profession : - Pouvez vous me donner 6 mots clefs qui définiraient votre activité ? Technicité des soins, travail en binôme, je vais dire soins relationnels, équipe pluridisciplinaire, t’en veux vraiment 6 ? - C’est quoi être infirmier en service de Réanimation ? - Pouvez vous me décrire ce qu’est pour vous l’identité professionnelle infirmière en service de Réa ? (Spécificité de l’exercice professionnel en Réanimation) il faut qu’il soit exigent dans son travail parce qu’on s’occupe de gens par exemple qui sont totalement dépendant, faut vraiment tout faire, ici quand même les médecins ils nous mâchent tout le travail (ex les calculs de dose) on a tendance à s’abrutir mais il faut penser aux choses qui sont pas forcément prescrites et tout. On oubli des fois un peu… au niveau de l’installation, le rôle propre il est important et faut pas l’oublier. Travailler en réanimation c’est pas seulement passer des antibiotiques c’est aussi décoller le scotch du nez pour regarder qu’il n’y ait pas un escarre dessous. - Que connaissez-vous de la loi Leonetti ? Ouais je connais un peu - Quels liens faites vous entre ce que vous connaissez de cette loi et de votre pratique professionnelle en réanimation ? La pratique professionnelle ? Disons que nous c’est souvent, comment dire, en tant que soignant, quand il y a le staff, il y a des décisions qui sont durs à comprendre. On n’a pas toujours toutes les informations parce que les médecins ils ont les dossiers bien plus complets. Des fois on se dit que le patient est presque foutu et le médecin il continu, on se dit à quoi ça sert ? Ce n’est pas de l’acharnement mais on n’en est pas loin. Des fois tu vois on branche une dialyse le patient il a 3 de tensions on lui met de la noradrénaline et de la dobutamine en grosse dose, alors après on se dit si c’est pour le maintenir 2heures de plus en vie ça sert à quoi ? - Comment jugez vous la prise en charge de la douleur en fin de vie dans le service de Réa ? Nous la prise en charge de la douleur, bizarrement par rapport à tous les produits qu’on a, la douleur elle n’est pas soulagée. Quand ils sont en fin de vie c’est différent parce qu’ils sont dans un état comateux. Mais il y a des patients qui continuent à mourir dans la douleur. Déjà à la base au niveau médical, les réanimateurs sont plus dans l’état d’esprit de sauver plus que d’accompagner. Nous aussi, je pense que on est tellement dans les soins techniques, sauver les gens, il y a pleins de traitements antalgiques qu’on utilise jamais. La sédation ça fait dormir mais ça n’enlève pas la douleur. Au niveau paramédical on fait plus attention à la douleur, on est plus sensibilisé, on les voit plus souvent. On sollicite beaucoup les médecins pour demander des antalgiques après ils prescrivent sans soucis. Il y a des médecins plus sensibilisés à ça que d’autres. Les jeunes médecins ils veulent réanimer coûte que coûte. - Selon vous que signifie la notion de « double effet » ? Double effet ? Faut endormir un peu mais pas trop ? Explications. Oui ici on sait bien que sédaté ça peut avoir pour effet indésirable la précipitation du décès. Après c’est utilisé dans l’intention de soulager la douleur du patient. 3/ Le vécu : • La fin de vie : - La loi Leonetti : pouvez vous m’en dire quelques mots ? - Quelles sont les grandes lignes de cette loi, les grandes idées ? En fait tu peux aider les gens à mourir. Dans la décision de limitation des thérapeutiques ne t’es pas dans l’euthanasie. Tu as le droit de diminuer les thérapeutiques qui n’apportent pas de bénéfice à la personne ou tu peux mettre des produits pour soulager la douleur mais t’as pas le droit d’injecter des barbituriques. - Pour vous dans le service est-elle bien appliquée ? Dans le service des fois il y a de l’acharnement, maintenant je le ressens moins qu’avant. J’ai déjà vécu des situations où ça me choquait trop. Je sais pas pourquoi maintenant je le ressens moins. Les situations c’est pas que ça me choque moins, c’est que tu t’y fais un peu. Avant j’osais pas trop demander aux médecin pourquoi on fait ça et maitenant je le fais plus avec l’expérience pour comprendre le pourquoi du comment. Avec les explications ça te permet de mieux le comprendre et de mieux le vivre. Mais après pour moi en Réa il y a de l’acharnement thérapeutique. Le problème c’est que il y a toujours des situations genre 2% des cas où ça va marcher, t’as toujours le cas qui fait que t’as envi d’aller plus loin. Les médecins je les comprends aussi. Une fois il y avait un patient tout le monde pensait que c’était fini pour lui et les médecins on voulu le faire dialyser. Le patient il est sorti de réanimation. C’est l’exemple qui te fait penser qu’il faut continuer. On aide quand même les gens à partir dignement, après moi je pense que de l’acharnement il y en a. Après l’acharnement c’est une notion tellement subjective. Après ici il faut comprendre que ce n’est pas un service de soins palliatifs. Une fois aussi on avait un patient atteint d’un Guillain barré, et il était ventilé et il nous disait aux soignants et à sa famille qu’il voulait mourir et là c’était dur aussi parce que pour nous il était pas encore temps d’arrêter les traitements on avait envi d’en faire plus il restait des choses à faire mais il en avait décidé autrement. Et finalement on l’a dé ventilé, sédaté et il est mort. C’est le choix de la personne qui prime. C’est pour ça qu’il faut faire des directives anticipées. Dans un premier temps quand le patient rentre tu connais pas le dossier tu réanimes sauf que des fois il y a eu des directives anticipées écrites ou des précédentes limitations et après le médecin il regrette d’être allé aussi loin. Il faut être à l’écoute des familles, mais il faut faire attention parce que des fois il y a des situations de famille compliquées. - Selon vous est-elle suffisante ou incomplète ? Tout ce qui touche la fin de vie c’est compliqué, elle est pas vraiment complète. C’est difficile de soigner les êtres humains, t’as des lois qui sont faites mais la réalité elle est toujours autre. On voit souvent des gens qui auraient sûrement aimé moins d’acharnement thérapeutique. Si tu penses que des fois la personne elle pourra vivre après bah tu as envi de tout faire. Cette loi c’est déjà un premier pas, mais il n’y aura jamais une loi parfaite, parce que tous les cas sont différents. • Les limitations de thérapeutiques : - Avez-vous déjà vécu une situation de limitation des thérapeutiques actives en réanimation ?oui -Comment la décision est-elle prise? Collégiale ou non ?oui c’est collégiale parce que les médecins proposent la limitation et après on réfléchit, c’est la décision d’un groupe de personne. D’après vous pourquoi est-elle prise de cette façon là ? Pour pas laisser les affects d’une personne décider de ce qu’on va faire d’un patient, personne ne détient la science infuse. - Avez-vous déjà participé à une réunion collégiale où a été prise la décision de LATA ? Si oui quel est votre rôle dans la prise de décision? Oui. Nous souvent dans la prise de décision, on pose des questions, on demande pourquoi, on donne notre ressenti mais je sais pas si ça penche tellement dans la balance. C’est quand même eux qui prennent la décision. Leur réponse m’apporte des éléments de précisions, ça me permet de comprendre après j’adhère pas toujours. -Comment la décision est-elle annoncée aux proches et/ou au patient ? Qui l’annonce ? C’est le médecin qui l’annonce. Quand on voit que ça va évoluer vers une fin de vie on commence à aborder le sujet avec la famille pour l’idée fasse son chemin. - Avez-vous déjà participé à l’application d’une LATA ? Oui - Pouvez vous me raconter une situation qui vous ait marquée ? Le monsieur il a une fibrose pulmonaire, le poumon est irrécupérable, c’était un monsieur âgé, et du coup on a arrêté les thérapeutiques suite à une réunion collégiale. Il a été extubé et sédaté, et puis il est décédé entouré de sa famille. - Quel est le rôle de l’infirmière lors de l’application de la décision ? Un rôle important car les familles ne comprennent pas toujours, - Posture soignante ? Accompagnement dans la dignité - Actes ? Rôle propre : dignité, veiller à l’installation de la personne. Tu fais les soins de confort, soins de bouche, massage. Appliquer les prescriptions. Tu limites les soins invasifs, après s’il y a trop de sécrétion tu peux toujours l’aspirer mais pas toutes les 2 heures parce que c’est très inconfortable. - Accompagnement ? C’est pas parce que le patient est en fin de vie que tu dois le soigner moins bien que celui d’à côté. - La limitation de thérapeutique est t-elle en accord avec vos valeurs et votre identité soignante ? Pouvez vous m’expliquer pourquoi ? Oui ça fait partie de mes valeurs mais pas dans toutes les situations, je comprend pas toujours pourquoi pour certaines personnes on va tout de suite limiter et d’autres pas du tout. Y a des cas où c’est évident que continuer les thérapeutiques ça lui apportera aucun bénéfice. - Pour vous quelles différences y a t-il entre un patient en soins palliatifs et un patient en situation de limitation thérapeutique ? Moi je pense que quand tu es en soins palliatifs il y a forcément des limitations comme de ne pas réanimer par exemple, après c’est pas parce que à l’inverse tu as des limitations que tu es en soins palliatifs. Il peut arriver par exemple pour certain patients qu’on se limite juste sur une certaine posologie à ne pas dépasser en amine c’est pas pour autant que tu vas pas lui passer ses antibiotiques et qu’il ne va pas s’en sortir. - Quelles seraient selon vous les circonstances d’une fin de vie « idéale » ? Mourir en bonne santé, vieux, d’une crise cardiaque et surtout ne pas avoir mal. Merci de votre participation à cet entretien. Elodie Chapillon, G6 Abstract du mémoire de fin d’études : La réanimation est un service où l’on cherche à sauver des vies, à réanimer. Malheureusement, malgré le savoir faire de l’équipe médicale et soignante, malgré l’avancé des techniques et des dispositifs, nous, soignants, sommes confrontés à des patients en situation incurable et de fin vie. En quoi la décision et la mise en application d’une limitation ou arrêt des thérapeutiques en Réanimation peuvent elles avoir un impact sur le vécu et l’identité professionnelle de l’infirmière ? De nombreux décrets, lois, articles et recommandations autour de cette réflexion sont apparues depuis une quinzaine d’années et servent aujourd’hui de support aux soignants mais il semble que dans la pratique, la mise en application ne soit pas si évidente. En effet, le travail avec l’être humain amène à bien des difficultés que la loi ne peut pas toujours résoudre. C’est ainsi que la prise en charge personnalisée et individuelle « dite au cas par cas » autour d’une réflexion collégiale devient essentielle. La question de recherche est la suivante : Dans quelle mesure l’infirmier pourrait-il, dans un futur proche, être en capacité de participer à la décision de limitation des thérapeutiques en collaboration avec le médecin dans le but d’une meilleure prise en charge ? L’hypothèse est la suivante : Les infirmiers pourraient avoir leur place dans la prise de décision en collégialité avec les médecins dans le but d’une meilleure prise en charge. Pour répondre à la question posée, des entretiens seront menés auprès d’infirmières, de médecin et de citoyens. Mots clés : Réanimation, arrêt thérapeutique, identité professionnelle, fin de vie, réflexion éthique, réflexion collégiale, équipe. Reanimation is a ward where we try to saving lives to resuscitate. Unfortunately, despite the know-how of the medical and nursing team, despite the advanced techniques and devices, nurses, are confronted with patients incurable situation and end life. How the decision and the implementation of a limitation or termination of therapy in Reanimation may have an impact on the experience and the professional identity of the nurse? Many decrees, legislation, articles and recommendations around this thinking have appeared for fifteen years and serve today as support for caregivers but it seems that in practice, the implementation is not so evident. Indeed, working with humans leads to many difficulties that the law can’t always solve. It is thus that the personalized care and individual "said case by case" around a collegial reflection becomes essential. The research question is: To what extent, could nurse, in the near future, be able to participate to the decision of limitation of therapy in collaboration with the doctor with the aim of better covering of medical costs? The hypothesis is as follows: nurses may have their place in decision collegiality with doctors with the aim of better care. To respond to the question posed, interviews will be undertaken to nurses of reanimation ward, to doctors and citizen. Key words: Réanimation, therapeutic arrest, professional identity, end of life, ethical reflection, collegial reflection, team. U.E : 6.2.S6 : Anglais