C`est aux humbles que le Seigneur révèle ses secrets

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Seigneur révèle ses secrets
C’est aux humbles que le Seigneur révèle ses
secrets
Homélie du 22e dimanche ordinaire de l’année C (29 août 2010)
dimanche 29 août 2010, par Père Alain Dumont
• Livre de l’Ecclésiastique 3,19-21.30-31
« C’est aux humbles que le Seigneur
révèle ses secrets »
• Psaume 68(67),4-5.6-7.10-11
« Quand il défaillait, toi, tu le soutenais.
Dieu qui es bon pour le pauvre »
• Lettre aux Hébreux 12,18-19.22-24
« Vous êtes venus vers Jésus
et vers son sang répandu sur les hommes,
son sang qui parle plus fort que celui d’Abel »
• Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 14,1.7-14
« Qui s’élève sera abaissé ;
qui s’abaisse sera élevé »
lire l’intégralité des textes de ce jour
C’est aux humbles
que le Seigneur révèle ses secrets
Voilà certainement LE lieu où le judéo-christianisme, mais en particulier le christianisme, est unique : la
vertu d’humilité.
Un vieux dominicain, le père Louis, décédé il y a quelques années, aimait dire que l’humilité est comme
une quatrième vertu théologale ; il rejoignait de ce point de vue un jésuite célèbre, le père François
Varillon, qui a écrit un petit traité admirable intitulé : L’humilité de DIEU. Pourquoi une quatrième vertu
théologale ? Simplement parce qu’une vertu théologale se reconnaît dans la vie d’un homme au fait que
plus il en vit intérieurement, plus il a l’impression de ne pas en vivre assez...
Par exemple, plus on a la foi, plus on a l’impression qu’on est timoré... Plus on espère, plus on a
l’impression de ne pas suffisamment mettre son espérance en DIEU ; plus on aime, et plus on a conscience
qu’il faudrait aimer davantage... Eh bien, il en va de même pour l’humilité : plus on est humble, et plus on
a conscience qu’on est encore trop présomptueux.
Qu’est-ce que l’humilité ? La petite Thérèse de l’Enfant Jésus disait à sa sœur Geneviève, retirée au
même couvent de carmélites de Lisieux :
« Il faudrait surtout être humble de cœur et vous ne l’êtes point tant que vous ne voulez pas que tout le
monde vous commande. Vous êtes de bonne humeur tant que les choses vous réussissent, mais aussitôt
qu’elles ne vont plus à votre idée, votre figure se rembrunit. En cela n’est pas la vertu. La vertu, c’est se
soumettre humblement sous la main de tous, c’est de vous réjouir de ce qu’on vous blâme.
Au commencement de vos efforts, la même contrariété paraîtra à l’extérieur et les créatures vous
jugeront aussi imparfaites, mais c’est là le plus beau de l’affaire, car vous pratiquerez l’humilité qui
consiste non pas à penser et à dire que vous êtes remplie de défauts, mais à être heureuse que les
autres le pensent et même le disent.
Nous devrions être contentes que le prochain nous dénigre quelquefois, car si personne ne faisait ce
métier-là, que deviendrions-nous ? C’est notre petit profit... »(1)
Dans le monde païen, depuis l’Antiquité, l’humilité n’est pas une vertu, une force, mais une faiblesse, la
marque des esclaves. Le signe que les dieux sont avec nous est précisément qu’ils nous donnent la place
des vainqueurs. Les dieux païens sont belliqueux, jaloux, revanchards... à l’image des hommes dont le
cœur n’a pas été travaillé de l’intérieur, de sorte que DIEU ne peut pas leur révéler ses secrets. Car pour
DIEU, rien n’est dissociable de l’humilité.
Un dernier point, et non des moindres : l’humilité n’est pas synonyme de prostration ou de modestie.
L’humilité est au contraire ce qui nous dilate le cœur, qui nous ouvre un jardin sans portes, où tout le
monde peut entrer... dès lors qu’il a trouvé la clef des secrets de DIEU.
**
Quand il défaillait, toi, tu le soutenais.
Dieu qui es bon pour le pauvre
Qu’est-ce qui nous fait défaillir ? Voilà une bonne question à se poser quand on veut grandir dans la vie
spirituelle. Regarder en face ce qui nous affaiblit, pour venir le déposer devant DIEU.
Seulement on n’aime pas cela. Parce que nous conservons ce côté païen présomptueux qui veut que
l’image que nous voulons donner doit être sans faille. Et à force de ne vivre qu’à l’extérieur de nousmême, nous avons confondu le bonheur avec le confort et la richesse.
Or il y a une vertu associée à l’humilité : c’est la pauvreté. La pauvreté qui n’est pas la misère, mais qui
est un choix de vie simple et sans superflu. Ce qu’ont compris les chrétiens très tôt lorsque finirent les
persécutions. Désormais, si l’on n’était plus martyr (c’est-à-dire témoin) par le sang, on serait désormais
martyr par la pauvreté ; une pauvreté choisie, assumée comme le moyen de venir vers Jésus, de le suivre
au plus près pour laisser DIEU déposer en nous ses secrets afin d’en rayonner dans le monde.
C’est pourquoi nous avons aujourd’hui encore besoin de ces hommes et de ces femmes qui font vœu de
pauvreté, et qu’on appelle les religieux, c’est-à-dire ceux qui se sont soumis à la règle de la pauvreté, de
l’obéissance et de la chasteté. Une société qui ne désire plus découvrir les secrets de DIEU n’engendre
plus de religieux. Et quand un de ses enfants menace de prendre ce chemin, on lui dit : « Passe ton bac
d’abord ! Fais des études sérieuses ! »... Comme si la pauvreté n’était pas sérieuse... Comme si notre
monde n’avait besoin que d’informaticiens et de commerciaux pour vivre. Oh, bien sûr, si l’objectif de vie
n’est que le confort... Mais si l’objectif visé est le bonheur, c’est autre chose. Et là, nous avons plus que
besoin de religieux comme la petite Thérèse, par exemple, car le bonheur ne se livre qu’aux pauvres.
**
Vous êtes venus vers Jésus
et vers son sang répandu sur les hommes,
son sang qui parle plus fort que celui d’Abel
Mais quoi qu’il en soit, celui qui est l’Humble par excellence, c’est Jésus. Il est celui vers qui nous porte la
vertu d’humilité dont Il nous a donné l’image la plus belle et la plus grandiose.
L’humilité, bien sûr, c’est « être soumis sous la main de tous », sous l’aspect laborieux des relations
humaines. Mais c’est d’abord être soumis au Père, se recevoir de DIEU comme de sa Source première et
mettre notre foi dans sa volonté paternelle. Car la volonté du Père, c’est de faire en sorte que par
l’humilité, nous soyons forts à l’intérieur, nous soyons droits, debout, vivants pour rayonner le Christ qui
est le chemin et la vie.
Cette soumission seule nous rend adultes. Car la confiance seule nous rend responsables de nous-mêmes
et des autres. Le regard bienveillant du Père, que Jésus me transmet, me permet de sortir de ma honte. La
honte... la maladie d’un siècle qui a oublié DIEU, qui a oublié la foi, qui a oublié la bienveillance. De sorte
que pour se protéger, on a honte de tout, on n’est coupable de rien... La honte nous fait rester
maladivement dans l’ombre de nos actes les plus méprisables, et nous donne l’apparence de “gens biens”
lorsque nous osons sortir à la lumière. Mais l’intérieur est sombre, et nous restons tristes.
Et bien pour moi, c’est l’inverse : oui je suis pécheur, et même plus pécheur que vous tous réunis. Oui je
commets des actes dont je suis coupable, mais je n’en ai pas honte parce que je les plonge dans la
miséricorde du Père. Que voulez-vous que le Seigneur fasse avec la honte ? Personne ne peut rien pour
nous. En revanche, si je reconnais que je suis coupable, le pardon peut féconder à nouveau ce que j’ai
rendu stérile. Je vis dans la lumière ! Et c’est là que je trouve la vraie force de la conversion : en puisant à
la Source du Père, par le Christ. Et par moi, par ma conversion, le monde, enfin, change, progresse,
grandit et se libère. Moi qui ne suis rien, un avorton comme disait saint Paul, je fais grandir le monde par
ma conversion. Ceux qui croiront ici à de la prétention seront les plus malheureux. Le paradoxe es bien là
: moi qui suis pécheur, je trouve ma joie dans le Seigneur !
Car dès lors, nous ne craignons plus ceux qui nous assaillent par leurs armes consuméristes et leurs
paillettes auréolées, leurs campagnes électorales ou leurs actions d’éclat qui font refouler les plus petits
par-delà les frontières ! Tout cela ne sont que les confettis masquant difficilement la putréfaction d’une
société en décomposition, et que le Père nous demande pourtant de ré-ensemencer : remettre de la vie là
où il n’y a plus que mort ; de la joie là où il n’y a plus que dérision et tristesse ; de la foi là où il n’est plus
question que d’argent et de consommation...
Mais voilà : le premier moment de la vraie vie, qui nous fait prendre les véritables décisions qui font
avancer le monde, n’advient que devant le Christ, et le Christ en Croix. Le Christ en Croix vers lequel est
tourné constamment le regard de la Vierge de l’espérance. Le Christ humble et sans paillette que le
monde païen tourne en dérision, mais qui est la porte des secrets de DIEU...
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Qui s’élève sera abaissé ;
qui s’abaisse sera élevé
Que dire de plus ici ? Sinon rappeler que cette phrase essentielle doit se lire d’un seul tenant : qui s’élève
par lui-même, DIEU, pour le sauver, l’abaissera. Et quand il aura humblement accepter sa pauvreté, DIEU
pourra lui ouvrir le cœur à la dimension des ses secrets éternels.
Tout est là : le plus grand se révèle dans le plus humble. Le paradoxe divin, que nous avons tant de mal à
saisir, c’est que seul le plus petit nous révèle le plus grand. C’est le mystère d’un nourrisson qui nous
révèle la grandeur humaine plus que tout adulte... C’est le mystère de l’Eucharistie où l’immensité infinie
de DIEU se livre à travers un petit morceau de pain et quelques gouttes de vin dans une coupe.
L’Eucharistie nous ouvre à l’immensité de la joie éternelle.
Que ceux qui désirent ce bonheur-là, qui n’est pas nécessairement confortable, mais qui est le plus joyeux,
s’approchent pour venir communier.
Et que cette semaine, nous essayons de mettre en action le conseil de la petite Thérèse... Vous verrez,
c’est très stimulant ! Et très joyeux !
Avec mon affection fraternelle,
+ Père Alain.
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(1) Thérèse de Lisieux, Conseils et souvenirs, Foi Vivante (1988), p.18. Le passage en italiques est tiré de
L’imitation de Jésus Christ, Livre II, ch.49,7.
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