signalétiQue
Chers amis, seules sont annotées par le sigle défini ci-contre
les pièces auxquelles nous avons assisté. Mais pour que votre panorama du mois soit plus
complet, nous ajoutons aussi des chroniques, portraits, entretiens, articles sur des mani-
festations que nous n’avons pas encore vues mais qui nous paraissent intéressantes.
critiQue
© J.-L. Fernandez
peau pointu, des chaussures à paillettes, et
des photos. Et puis, il faut aussi quelqu’un
dont je n’ai pas encore parlé, mais qui est
très important : c’est Rudolf Noureev. Parce
que c’est quand même celui qui saute le plus
haut, celui qui est le plus près des anges. J’ai
eu, quand j’étais adolescente, une grande
histoire d’amour fantasmée avec lui ! Je ne
Comment est né ce monologue de Marie
Desplechin qui raconte certains épisodes de
votre vie ?
Ariane Ascaride : Tout est parti d’une demande
de la SACD* qui souhaitait que je participe
aux
Sujets à vif
du Festival d’Avignon, en 2010.
Le principe était de faire quelque chose que
je ne faisais pas habituellement. Je leur ai
donc dit que je voulais voler, la phrase exacte
étant :
« Je suis la fille de Peter Pan, donc je
veux voler ! »
. Tout cela est en fait lié à mon
désirdejouerlerôledePuckdans
Le Songe
d’une nuit d’été
. Et comme je connais très bien
Marie Desplechin – avec qui Robert Gédiguian
et moi-même avons coécrit le scénario du film
Le Voyage en Arménie
– j’ai immédiatement
pensé à elle pour le texte de ce projet. Ensuite,
la SACD m’a proposé de travailler l’idée du vol
à travers la danse, en collaboration avec le
chorégraphe Thierry Thieû Niang. Lorsque
nous nous sommes retrouvés tous les trois
Ariane Ascaride dans Touchée par les Fées.
“le théâtre est entré
dans ma vie dès
ma petite enfance.”
arIane ascarIde
entretien ariane ascaride
THéâTRE DE L’AQUARIUM
DE marie desplechin / MES thierry thieû niang
touchée par les fées
Sujets à vif
Touchée par les fées
pour notre première séance de travail, j’ai
expliqué pourquoi je me sens la mieux placée
pourjouerlerôledePuck.Cequim’aamenéà
raconter des choses sur moi, sur mon enfance,
sur ma famille, sur ma vie…
Car Touchée par les fées est un solo autobio-
graphique…
A. A. : Oui, un solo à travers lequel je parle
de ce qui me compose : les contes qui m’ont
bercés, la fantaisie de mon père qui était
comme un personnage de roman, le rapport
très fort qui me lie, depuis mon enfance, au
théâtre, comme à toutes les choses ayant
trait à l’irréalité.
vais pas dévoiler la forme que cela prendra,
mais il sera lui aussi, à un certain moment,
présent sur scène…
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
* Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques
Théâtre de l’Aquarium, Cartoucherie de
Vincennes, route du Champ-de-Manœuvre,
75012 Paris. Du 7 au 17 mai 2015. Du jeudi au
samedi à 20h30, le dimanche à 16h. Durée : 1h15.
Tél. 01 43 74 99 61. www.theatredelaquarium.com
Également du 28 au 30 mai 2015, au Théâtre du
Gymnase à Marseille.
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© Richard Haugton
créé en 2011. Fondatrice avec Jean-Bap-
tiste Thiérrée du
Cirque Bonjour
en 1971, qui
s’épanouit dans l’élan ébouriffant les arts de
la piste à l’époque, la fille de Charlot cultive
avec haute fantaisie un secret jardin où vaga-
bondent en liberté d’étonnantes créatures
prises dans une féerie de métamorphoses et
autant d’aventures espiègles filant au-delà
des apparences.
un monde malicieux et oniriQue
Après l’immense succès de
L’Oratorio d’Auré-
lia
(2003), Victoria Thierrée-Chaplin compose
un nouvel opus pour sa fille Aurélia et deux
comparses. Elle se glisse pour cela derrière
les façades d’immeubles abandonnés, plan-
tés en pleine solitude urbaine, et dénoue le
silence qui ferrait les éclats de vie dans le
béton. Suivant les traces d’une femme per-
due dans une Venise désertée, elle invente
un joyeux cauchemar : sommée de déguer-
pir illico de son abri précaire, la jeune dame
entasse ses babioles et ses rêves au fond
de ses cartons et part en quête de l’âme des
bâtisses délaissées. Là voilà qui s’en va pour
un fabuleux voyage en trompe-l’œil où elle
croise des bestioles fantastiques et de bien
curieux objets. Artiste aux multiples talents,
Aurélia Thierrée apporte sa présence mali-
cieuse dans cet univers loufoque et imprévi-
sible, où le songe défait toute raison.
Gwénola David
Théâtre du Rond-Point, 2 bis av. Franklin-D.-
Roosevelt, 75008 Paris. Du 4 au 23 mai 2015,
à 21h, le dimanche 17 mai à 15h, relâche les 5,
vendredi 8, 9, 10, 14 et 18 mai. Tél. 01 44 95 98 21.
Réagissez sur www.journal-laterrasse.fr
Vous entendez ? Approchez-vous de la cloi-
son, accrochez-y votre oreille, écoutez… et
imaginez.Bientôtvouspercevrezlediscret
chuchotement des murs indiscrets où veillent
tant d’histoires vécues au revers des portes
closes. C’est à voyager dans cet extraordinaire
imaginaire que nous invite Victoria Thierrée-
Chaplin dans
Murmures des murs
, spectacle
Aurélia Thierrée aux prises avec une créature
fantastique.
gros plan
THéâTRE DU ROND-POINT
CONCEPTION ET MES victoria thierrée-chaplin
murmures des murs
© Pascal Victor
Julien Bouanich (Liliom)
et Clara Mayer (Julie) :
l’impossible retour.
critiQue
reprise / ODéON – LES ATELIERS BERTHIER
DE ferenc molnar / MES jean bellorini
liliom
« Sale gosse… Sale gosse dur et méchant,
cher et tendre… Dors mon Liliom… »
mur-
mureJulie,sijeune,bientôtmèreetdéjà
veuve. Liliom, son bonimenteur de foire, s’en
est allé dans l’au-delà, coupant d’un coup de
rieuse… Ce bonimenteur en mal de mots
a pourtant de la dignité. C’est ce qui en fait
toute la complexe humanité. Quand Ferenc
Molnar signe cette pièce, en 1909, le monde
a basculé dans l’ère industrielle. Le « petit
peuple » convoite la promotion sociale et se
divertit comme il peut. La fête foraine noie le
quotidien grisâtre dans la clameur des sensa-
tions fortes et l’ivresse des joies désinhibées.
Liliom est un de ces malheureux, mités par
la pauvreté, la frustration, les malentendus
face aux autres et à soi-même. Sauf qu’il fan-
faronne toujours et revendique ses fautes en
toute fierté. Le metteur en scène Jean Bellorini
est à son aise dans cette ambiance foraine
Après une deuxième version créée en 2013
au Théâtre des Métallos, vous présentez
aujourd’hui une troisième forme de ce spec-
tacle au Théâtre de l’Aquarium. Quelles sont
les différences entre ces trois variantes ?
A. A. : Le principe est toujours le même,
mais de nouvelles histoires s’ajoutent à
chaque version. A Avignon, par exemple, je
ne parlais pas de la mort de ma mère, qui
est intervenue quelques jours avant la pre-
mière création du spectacle. Elle a fini sa vie
dans une maison de retraite, perdant très
vite la tête et étant persuadée de vivre dans
un théâtre ! Elle me disait que telle infir-
mière était une costumière, que le jardin
allait être parfait, l’été suivant, pour le fes-
tivaldethéâtre…C’étaitdrôleetémouvantà
la fois. Pourtant, elle n’était jamais montée
sur les planches. C’était mon père, avec qui
elle ne s’entendait d’ailleurs pas très bien,
qui était comédien amateur. A travers lui, le
théâtre est entré dans ma vie dès ma petite
enfance. C’est tout cela, et encore des tas
de choses, que je raconte dans
Touchée par
les fées
…
Quelle forme scénographique Thierry Thieû
Niang a-t-il inventée pour ce spectacle ?
A. A. : Une forme très simple. Je peux jouer
ce spectacle sur n’importe quel plateau. Il me
faut simplement trois cubes, un petit cha-
couteau dans le cœur le fil d’un destin plombé
d’avance par tant et tant d’actes ratés et man-
que de chance. Hâbleur, bagarreur et char-
meur, il avait quitté le manège et sa tenan-
cière, Madame Muscat, avait renoncé à la vie
facile, payé à tripoter les boniches pour faire
tourner les têtes et les affaires. Il était parti
donc, pour Julie peut-être, du moins pour la
force et la pureté de son amour inconditionnel
et l’horizon nouveau qu’il ouvrait. Cela n’aura
pas suffi à le garder de lui-même. Désormais
chômeur,ilsquatteavecellelacaravaned’une
vieille tante photographe, traîne à longueur de
journée et frappe à tout va quand les senti-
ments ou la rage le submergent. Même Julie
prend des beignes.
la parole empêchée
Drôledebougre,vaurienéprisdeliberté,
rebelle à la moralité amidonnée des normes
bourgeoises, comme à sa condition de tra-
vailleur qui le condamne à la misère labo-
surannée : son esthétique a toujours un peu
l’air de piocher dans les malles du théâtre
d’antan, avec ici un beau décor d’autos-tam-
ponneuses. Le nouveau directeur du Théâtre
Gérard Philipe excelle aussi dans la romance
tragique, balançant habilement le spectateur
entre scènes poignantes et gags décomplexés.
On s’y laisse prendre d’ailleurs, embarqués
par des comédiens qui ne manquent pas de
générosité. Pas sûr que l’œuvre de l’auteur
hongrois y trouve toutes ses résonances, tant
dans la critique sociale que dans la parodie
de la morale chrétienne. Mais rien que pour le
final, bouleversant, on applaudit.
Gwénola David
Odéon - Les Ateliers Berthier, 1 rue André-
Suarès, 75017 Paris. Du 28 mai au 28 juin à 20h,
dimanche à 15h, relâche le lundi.
Tél. 01 44 85 40 40. Durée : 2h.
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