un mois pour sensibiliser et lutter contre le cancer du sein

Octobre rose : un mois pour sensibiliser et lutter
contre le cancer du sein
Publié le 29/09/2015 Paris Normandie
À la Clinique du cheveu, le choix de la perruque est un moment important pour la clientèle malade (photo S.
Péron)
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Le cancer et ses traitements ont la fâcheuse réputation de malmener l’estime de soi lorsque l’on
est malade. Depuis quelques années, la socio-esthétique s’est développée en parallèle des
thérapies conventionnelles. Mais si devant la maladie tout le monde est à égalité, tous les patients
ne peuvent accéder à ces soins esthétiques dits de confort.
À Rouen, Brigitte, atteinte d’un cancer du sein en 2012, a bénéficié des services proposés par la
Ligue contre le cancer. « J’ai fait de l’art thérapie, de la musicothérapie, j’ai participé à des
groupes de paroles pour oser être soi et penser à autre chose. C’est très important pour les
personnes atteintes de cette maladie. Je ne mets jamais de vernis aux ongles mais je l’ai fait pour
penser à autre chose. J’ai surtout mal vécu ma prise de poids, quinze kilos liés à des problèmes de
thyroïde, plus que la perte de mes cheveux », se souvient-elle.
TOUT N’EST PAS REMBOURSÉ
« J’ai porté une perruque achetée 500 euros pendant plus d’un an sauf le soir chez moi. Je
mettais un foulard sur la tête... Se maquiller, c’est aussi avoir un état d’esprit combatif. Mon
souci, aujourd’hui, ce sont mes sourcils qui ne repoussent pas... » Les effets secondaires des
traitements obligent souvent les patientes à consulter d’autres spécialistes (dermatologues,
dentistes...). Des consultations qui ne sont pas prises en charge dans le cadre de l’Allocation
longue durée. Il en est de même pour les produits de soins consécutifs aux traitements : une crème
hydratante pour la sécheresse cutanée ne sera pas remboursée à 100 % même si ces problèmes ont
été provoqués par les traitements. En cas de reconstruction mammaire, les prothèses font l’objet
d’un remboursement à 100 %. En revanche, les maillots de bain et les soutiens-gorge adaptés au
port de prothèse ne le sont pas.
Colette, du Havre, a mal vécu cette période. Elle dénonce le coût et le manque de prise en charge
: «Déjà, on t’oblige presque à acheter une perruque en faisant porter sur toi le spectre de la
calvitie. Tu as la Sécu mais à moins de 400 euros, les perruques sont moches et, de toute façon,
rares sont celles qui les portent finalement. Le moindre foulard coûte 75 euros non remboursés.
Le moindre soutien-gorge ou maillot de bain orthopédique un peu stylé coûte 100 euros, non
remboursés. On te vend les vernis au silicium 20 euros non remboursés, puis des produits pour ne
pas perdre les sourcils et cils, 40 euros non remboursés. Enfin les crèmes, les maquillages semi-
permanents hors de prix non remboursés... Un véritable business pour les pharmacies et
parapharmacies. Toutes les boutiques spécialisées te mettent bien la pression en te disant que tout
ça est indispensable. Et comme tu es fragile et malade, tu le fais. Et je ne parle pas des prothèses
pour aller se baigner : 60 euros non remboursés. J’estime à 1 500 euros les soins de ma poche
pendant le traitement. Qui peut se le permettre quand on est payé au Smic ou au chômage ? »
Pour les prothèses capillaires, l’assurance maladie propose un forfait de remboursement de 125
euros, quel que soit le montant de la perruque. À Rouen, la Clinique du cheveu-institut Mongour
est l’un des spécialistes du remplacement capillaire. « Les hommes, les femmes, les juniors... Nous
traitons les zones irradiées et nous faisons des prothèses sur mesure, pendant ou après les
traitements car parfois les cheveux ne repoussent plus », indique Maryvonne Gest, la responsable
depuis 2010. « Oui, nos clients sont en détresse. 75 % sont dépités. Les femmes souffrent
beaucoup, la perte de leur féminité lorsqu’il y a ablation d’un sein, plus la perte des cheveux...
Nous sommes là pour les réconforter et trouver des solutions pour qu’elles retrouvent leur image.
C’est un beau métier que nous faisons. Nous leur conseillons de se rapprocher le plus de leur
image pour que l’entourage familial ou le travail ne s’en aperçoive pas. Beaucoup de personnes
ne veulent pas répondre aux questions, elles veulent être tranquilles. » Maryvonne Gest conseille
l’achat de perruque en cheveux synthétiques « car le plus souvent c’est pour une période
provisoire. Autant être raisonnable. » Le prix peut monter jusqu’à 700 euros pour du haut de
gamme. De 1 000 à 2 000 euros pour des cheveux naturels !
A. L.
a.lemarchand@presse-normande.com
n 1er : le cancer du sein est le premier cancer et la première cause de décès par cancer chez la
femme. n90 % : détecté à un stade précoce, le cancer du sein peut être guéri dans plus de 90 %
des cas. n 30 % : les mastectomies représentent aujourd’hui 30 % des chirurgies du sein : deux
femmes sur trois peuvent conserver leur sein.
n 1,5 % : la mortalité par cancer du sein en France a diminué de 1,5 % par an entre 2005 et 2012.
n 86 % : le taux de survie nette à 5 ans d’un cancer du sein est de 86 % pour les personnes
diagnostiquées entre 1989 et 2004. À titre de comparaison, le taux de survie nette à 5 ans après un
diagnostic de cancer du poumon n’est que de 14 %.
n 2004 : année de généralisation du dépistage du cancer du sein pour l’ensemble des départements
français. n 53 % : plus d’une femme sur deux a participé au dépistage organisé en 2012, soit près
de 2 400 000 femmes de 50 à 74 ans.
n 150 000 : de l’ordre de 150 000 cancers du sein ont été détectés par le programme de dépistage
depuis plus de 10 ans. 7 % : en moyenne, 7 cas de cancer sont observés pour 100 femmes
dépistées.
La socio-esthétique comme support
Emmanuelle Bon-Giraud est socio-esthéticienne pour l’association Soins esthétiques et
mieux-être à l’hôpital (Semeh) créée il y a 9 ans. Elle prodigue des soins pour les malades
hospitalisés au centre Becquerel de Rouen.
Qu’est-ce qu’une socio-esthéticienne ?
n « Au centre de lutte contre le cancer Henri-Becquerel, nous sommes deux. Nous avons été
formées à Tours dans la seule école reconnue en France. Nous pouvons intervenir en milieu
carcéral, en cancérologie. Il s’agit de soins esthétiques mais aussi d’intervention auprès de
personnes en souffrance. »
En quoi consistent les soins ?
n « Il y a ceux liés aux effets secondaires de la chimiothérapie et radiothérapie, la perte des
cheveux, des ongles, les brûlures... Nous faisons aussi beaucoup de massage pour le côté bien
être. Les deux axes peuvent se croiser. »
La demande est-elle essentiellement féminine ?
n « Cela concerne bien évidemment les femmes mais nous avons aussi des hommes pour le côté
détente. Je précise que nous travaillons pour une association, que nous avons une permanence
quotidienne et que tout est gratuit ! Nous ne cherchons pas la rentabilité car sinon les soins
esthétiques ne sont pas abordables pour tous. La demande est d’ailleurs forte et nous ne pouvons
pas répondre à tout. Nous suivons plus de mille malades par an. »
Il faut beaucoup d’empathie mais aussi du recul...
n « Oui. Chez ces malades il s’agit de faire émerger la personne avant tout. Nous en tenons
compte. Les gens sont en souffrance physique et psychologique. Il faut en effet beaucoup
d’empathie et nous faisons beaucoup de cocooning. Nous restons professionnelles et nous avons
été formées pour cela à Tours mais nous suivons les malades sur plusieurs mois, voire des années
si le traitement se poursuit. Des liens se créent bien sûr. »
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