S ÉMINAIRE N. B OURBAKI J EAN -P IERRE S ERRE Revêtements ramifiés du plan projectif Séminaire N. Bourbaki, 1958-1960, exp. no 204, p. 483-489 <http://www.numdam.org/item?id=SB_1958-1960__5__483_0> © Association des collaborateurs de Nicolas Bourbaki, 1958-1960, tous droits réservés. L’accès aux archives du séminaire Bourbaki (http://www.bourbaki. ens.fr/) implique l’accord avec les conditions générales d’utilisation (http://www.numdam.org/legal.php). Toute utilisation commerciale ou impression systématique est constitutive d’une infraction pénale. Toute copie ou impression de ce fichier doit contenir la présente mention de copyright. Article numérisé dans le cadre du programme Numérisation de documents anciens mathématiques http://www.numdam.org/ Séminaire BOURBAKI 12e année, 1959/60, n° 204 Mai REVÊTEMENTS RAMIFIÉS 1960 DU PLAN PROJECTIF par Jean-Pierre SERRE (d’après 1. Résultats Commençons THÉORÈME nombres S. ABHYANKAR [2]) classiques. par rappeler l’énoncé 1. - Soit V une et soit complexes,J du "théorème d’existence" de variété algébrique, n : V’ -~ V un définie sur revêtement fini le corps C des au sens topologique) de V . Il existe alors sur V’ une structure algébrique et compatible avec la structure analytique de V’ , et qui soit un morphisme (algébrique). (De façon plus imagée : est algébrique). Noter que l’on particulièrement riété de ne tout revêtement suppose pas V où W - au cas V = Riemann-Enriques une seule telle que qui soit n soit topologique d’une variété algébrique projective ;3 au contraire, on s’intéresse F , W étant projective et F une sous-va- le théorème 1 montre alors que les soue-groupes d’indice fini de W ; n~(W - F) correspondent biunivoquement aux revêtements connexes W’ -~ W qui sont non ramifiés en dehors de F . Lorsque W est la droite projective (resp. le plan projectif), c’est bien là le théorème d’existence de Rienmnn (resp. d’Enriques~ Il n’est pas question d’exposer ici la démonstration du théorème 1. Indiquons seulement que, si V est normale, il se déduit de deux résultats de GRAUERTREMMERT ([3], théorème 1, et [4], théorème 32), et que le cas général se ramène au cas normal grâce à la théorie de la descente de GROTHENDIECK (cf. [5], p. 10 et 11). Le théorème 1 montre quel intérêt il algébrique) à déterminer le groupe dim(V) = 1 . Il n’en est plus de môme y a 71 (V) . celui où V =,J2 - C , permottant d’obtenir C étant une en (même d’un point de vue purement Cette détermination est facile dimension 2 . Le courbe du plan J~ . lorsque plus étudié est Une méthode générale cas le générateurs C) a été donnée par VAN KAMPEN (cf. ZARISKI, De nombreux cas chapitre VIII). particuliers ont été étudiés par ZARISKI, CHISINI, etc. Le résultat le plus frappant est sans doute le et relations pour 483 THÉORÈME à (~8~, dû à ZARISKI suivant, 163) : p. 2. - Si la courbe C n’a que des C) tangentes distinctes, le groupe (Noter ments donnent immédiatement homologiques courbes irréductibles de Zr tient de ZARISKI commence général (ce analogue démonstration sa C) par l’élément C qu’il n’y parvient que est quo- ). d) ... , est formé d’un certain et passe de là nom- au travail serait complète. [2] géométrie algébrique en des argu- est réunion de le groupe d , du mémoire d’ABHYANKAR théorème 2 d’ailleurs verra C pense 1 ), "dégénérescence" ; j’ignore quel de argument objectifs au engendré doubles points commutatif, n’est pas aussi facile que l’on un par ... , est structure : si vérifier cet énoncé lorsque par nécessaire pour rendre L’un des dl ’ par le sous-groupe bre de droites cas degrés sa des est commutatif . n1(P2 - C) fois que l’on sait que une que, points simples ou est de démontrer de un résultat caractéristique quelconque ; on partiellement. 2. Revêtements décemment ramifiés. A de partir maintenant, clos algébriquement sant caractéristique Soit V V’ -~ x :: V , R(V) et k de de ’k V où est comme on de le voit R(V) ;3 (c’est-à-dire en le prenant pour V rt: V’/G. degré revêtement de V , Dans V’ K le V un corps p l’expo- tout morphisme morphisme 7t finies). Si V et V’ , R(V’) appelé le degré du propre, et à fibres [R(V’) : R(V)] toute extension finie le groupe de s’identifie à appellerons de même dimension que normale, R(V) ;$ Inversement, Un revêtement ne en sont les corps de fonctions rationnelles de est extension finie de revêtement. nous de GROTHENDIECK au sens R(V’) plaçons nous variété normale ;$ une étant "fini" géométrie algébrique sur caractéristique quelconque ; on désigne par (au sens de BOURBAKI). nous de est R(V) la normalisée de V est de la forme dans R(V’) , K. R(V’) est extension galoisienGalois G de R(V’)/R(V) opère alors sur V’ , et V toute la suite, nous ne considérerons que des revêteest dit galoisien si ments galoisiens. Soit donc x~’ est non ramifié L’ensemble des Lorsque V V’ -~ V en un points est non un point tel revêtement, P V E V’ son est une degré. n On dit que points V’ distincts. sous-variété 0394 de V, distancée de V. composantes irréductibles pureté", voir plus loin, n° toutes les de codimension 1 : c’est le "théorème de n est formé de si de ramification de singulière, et soit de ~ 4.1. sont Soit C une sous-variété irréductible decodimension 1 une composante irréductible C’ sont des yf (C) ; de anneaux locaux [7], chapitre V, par exemple) s’applique. particulier, du de Galois G ; c’est groupe sous-groupe d’inertie IC, En s(Q) = Q tels que pour tout est décemment ramifié de la C une A et C’ et soit A’ C de on et (cf. peut définir le l’ensemble des G s E C’ . Nous dirons que le revêtement considéré C en C’ du choix de le groupe ramifi.cation, Soit E ( "tamely ramified") (condition indépendante p Q V ~ et la théorie de la ramification discrète, de valuation anneaux les de si IC’ au-dessus de est alors sous-variété irréductible de est d’ordre premier C ). D’après à la théorie cyclique. V . Un revétemeht V’ -~ V o sera dit décemment ramifié sur (V, C) si V’ est non ramifié en dehors de C , et est décemment ramifié pour toute sous-variété irréductible de codimension 1 de V (il suffit d’ailleurs de le vérifier pour celles qui sont contenues dans C ) ~;~..Soit fi algébriquement extension une V , sur (V , C) et tels que le revêtement forment une R(V) ; close de les sous-corps K de 0, finis correspondant soit décemment ramifié sur croissante ; leur réunion est une extension famille filtrante galoisienne (infinie en général) de R(V) , dont le groupe de Galois sera noté C) . Lorsque C ,Ô , on retrouve le groupe fondamental de V ~ au sens GROTHENDIECK ;3 lorsque le corps est le corps C des complexes, le théorème 1 = montre que le groupe 03C0d1(V , C) usuel C) , nl(V - pour la de. n’est autre que le topologie complété du groupe fondamental des sous-groupes d’indice fini. 3. Revêtements décemment ramifiés de certaines surfaces. Nous allons maintenant faire une série d’hypothèses restrictives le sur couple (V , C) . (i) (Le et V est une surface singulière. non général peut souvent se ramener à celui-là en coupant par appliquant le théorème de Bertini. Cette hypothèse n’est donc qu’elle le parait). cas en tive La sous-variété points simples, ou C est bien des posantes irréductibles de une V’ -~ V un points sont hyperplans pas si restric- ou bien des points doubles ordinaires . De plus, toutes les C sont [Cette hypothèse est plus forte irréductible, elle signifie que S oit n : courbe dont tous les des non que celle du théorème 2. Par C est non C , et soient exemple, si C est singulière]. revêtement décemment ramifié composantes irréductibles de com- singulières, C~ ( V , C) . Soient images réciproques sur leurs C les Une étude locale des revêtements décemment ramifiés (cf. n° 4.2) montre que les sont des courbes non singulières, éventuellement réductibles. C~ (iii) La variété V est projective, et, pour toute composante irréductible Ca de C , la dimension de la série linéaire complète ( est 2 . Le fait que 1 soit de dimension > 2 et contienne un diviseur irréductible entraine qu’elle n’a pas de composante fixe, et qu’elle n’est pas "composée pinceau" (autrement dit, elle définit une application rationnelle de V dans un espace projectif dont l’image est de dimension 2). Il en est donc de même de la série formée des n-1(D) ,9 D E En appliquant à cette série linéaire le théorème de Bertini et le théorème de connexion, on voit que tous les rt - (D) sont avec un . connexes. s’applique voit que on be Ceci y D = est connexe, Comme Cd singulière, non notamment à on en conclut que c’est et C03B1 , une n-1(C) comme sait d’autre on CI a et C~ revêtement Cp le sous-groupe de et invariant, de sur en un point (cf. 4.2) G engendré par n° en ce I ramifié rencontrent se du groupe (V , c) , point au G . Soit une cour- (C a( 3 c’est la un le ( et mon- étude locale du une et I sous-groupe cycli- un moins ; montre alors que les que c’est part support pour irréductible. Soit courbe dans le groupe de Galois G ;3 c’est groupe d’inertie de que invariant de G . Si a:l f3, les hypothèses faites sur trent que a commutent. Soit I commutatif, sous-groupe V’/I ;3 c’est un revêtement décemment Valois G/I ; de plus, la construction même V" = de groupe de montre que les groupes d’inertie des C dans V" sont nuls, c’est-à-dire que aucun des C a n’est contenu dans le lieu de ramification A de V~~ -~ V 0 V" D’après le théorème de pureté, fié. En passant à la limite THÉORÈME 3. le quotient de au groupe ne sur couple a~~~, V’ , (V , C) on autrement dit est l’énonce vérifie essentiellement rami- les hypothèses (i) , (ii) , (iii), l est isomorphe celui que démontre ABHYANKAR dans ~2~, bien pas). est simplement degré > 1 ), connexe le (c’est-à- groupe est commutatif . effet, l’hypothèse ~) non j~) . CORQLLAIRE. - Si l’on suppose en outre que V ne possède aucun revêtement non ramifié de En est obtient le résultat suivant : dive C) V" e V par le sous-groupe commutatif invariant n~(V 3 (Ce théorème qu’il Si le on Il V simplement connexe" signifie que le groupe est trivial. Le corollaire ci-dessus s’applique notamment au couple (PZ , C) , où P2 le désigne tout espace effet, égale projectif da(da 3)/2 à + (ii). courbe vérifiant la condition une est degré de C de composante une C et plan projectif, simplement connexe (voir 4.3), n° et si la dimension de la série linéaire d , En Ca ( est est est bien ) 2 . qui REMARQUES. C) commutatif, il n’est pas difficomplètement, Lorsque on trouve, comne on pouvait s’y attendre, le complété du groupe analogue ~ pour la topologie des sous-groupes d’indice fini et premier à p . 1. - Une fois que l’on sait que cile de le déterminer V =P~ C sur 2. - Le corollaire soient Ca donc,pas non au moyen de la théorie de Kummer. [2] théorème 3 est démontré dans au singulières, que l’on est puisse sans supposer que les mais la démonstration est incorrecte. Il obtenir une véritable généralisation ne semble du théorème 2 par méthodes d’ABHYANKAR ;3 c’est bien dommage. [On peut toutefois traiter le cas où les Ca n’ont "pas trop" de points multiples, grâce à des éclatements convenables. Cf. une série de mémoires d’ABHYANKAR en cours de publication]. les 4. Indications sur 4.1. Théorème de une (et les démonstrations. pureté. - Il a été énoncé tout d’abord par ABHYANKAR avec Une démonstration simple démonstration incorrecte, attribuée à ZARISKI correcte) a été publiée ensuite par ZARISKI [9]. Le théorème ... schémas quelconques. Sous cette forme, il vient d’être démontré par NAGATA [6], s’appuyant lui-même sur un résultat de garde un sens pour des CHOW. 4.2. Étude locale des revêtements décemment ramifiés. - On LEMME D’ABHYANKAR. - Soient W V’ et s’appuie sur le : doux revêtements décemment ramifiés de (V , C) ; pour toute composante irréductible C de codimension 1 de C, soit ia (resp. ja) l’ordre du groupe d’inertie d’une composante irréductible C~ (rosp. Da) W a. que b. que j Si alors posé est on des corps Soit G de l’ image réciproque non est note de C3 su osons : singulière, multiple W’ de i pour tout le revêtement R(V’) et R(W) , le groupe de Galois de a . commun W’ V’ -~ est V , un de V’ et revêtement soit H W correspondant non celui de au com- ramifié de W. W ~ V ~ et ~oit S celui de W’ -~ V9 le groupe S contient deux sous-groupes invariants T’ S/T G , S/T’ H , et l’on a T n T’ = le l Soit I le groupe d’inertie d’une composante irréductible Ea de l’image réciproque de et T tels que dans W’ ; = = . le groupe Ia se dans le plonge Ca des groupes produit correspondants dans V’ et W, groupes qui sont cycliques d’ordre ia et ja respectivement. Il en résulte que est d’ordre premier à p , donc cyclique, et comme il se Ia projette sur le groupe d’inertie de W -~ V , la condition (b) montre qu’il est n T’ isomorphe à ce dernier. On a donc {e3 , ce qui montre qu’aucun des n’est contenu dans l’ensemble de ramification de W’ -~ W ;’ en appliquant le Da = théorème de pureté, conclut bien que on en W’ -~ W est Revenons maintenant à la situation du numéro 3 ;3 d’un sinage point point simple étant analogue). d’un cas est défini C que P E C . Traitons le régulier de P en paramètres. prendra équations x’n = x On définie par les miers à W pour variété une (V , C) , singulière, non V’ -~ V double de point n , Z/nZ d’Abhyankar à V’ EV, P’ et W , Z/mZ x = H . On n pourvu que un V x système k2 V, encore trouve on respectivement peut donc appliquer soient choisis m n sur m ,9 et le et le lemme assez On grands. tire : Si P complété Comme e V’ , de l’anneau Q W, E local ~ Q’ E W’ sont des ces de t~Q quotient s’identifie à celui de l’anneau local anneaux = sont intégralement clos, k~~x’ , y’]] par un on voit que Op, opérant par x’ -~ 4.3. ce nl(Pn) -~0 , cas, si étant X -~ P1 Le théorème de Bertini est un s’identifie au (ce On obtient ainsi -~ une X t~Q,, . sous-groupe fini du groupe ex’ , y’ ~y’ , où en - ~’m - 1 ). de vue description complète (du point "formel") du revêtement description qui permet de vérifier sans difficultés les assertions dernier Dans le points correspondants, on a : et que tous de (le revêtement décemment ramifié un et voi- étant deux entiers pre- à restreindre quitte formant m au C peut supposer forment y la sous-variété de W y, x, on les ordres des groupes d’inertie étant groupe de Galois étant en y’~ = , un où 0 , xy = alors pour p . On constate facilement que, étudier on va est ramifié. question étant locale, La l’équation par P où cas non revêtement permet non de ramifié, g ; la formule de Hurwitz montre que V’ -~ V , du numéro 3. se ramener au cas de degré d ~ n = le genre 1 . qui entraîne nécessairement d [Variante : montrer qu’un revêtement non ramifié de de kn+l ramifié seulement à l’origine, et appliquer d’où d , g = 1 - = ce 1 . Pn définit un le théorème de revêtement pureté]. BIBLIOGRAPHIE [1] ABHYANKAR Math., (S.). t. On the ramification of p. 575-592. algebraic functions, Amer. J. of 77, 1955, [2] ABHYANKAR (S.). - Tame coverings and fundamental groups of algebraic varieties, Part I : Branch loci with normal crossings, Applications : theorems of Zariski and Picard, Amer. J. of Math., t. 81, 1959, p. 46-94. [3] GRAUERT (H.) et REMMERT (R.). - Espaces Sc. Paris, t. 245, 1957, p. 882-885. [4] GRAUERT (H.) und REMMERT p. 245-318. [5] GROTHENDIECK métrie [6] [7] [8] [9] analytiquement complets, (R.). - Komplexe Räume, Math. Annalen, C. R. Acad. t. 136, 1958, (A.). - Technique de descente et théorèmes d’existence en géoalgébrique, I : Généralités, Descente par morphismes fidèlement plats, Séminaire Bourbaki, t. 12, 1959/60, n° 190, 29 p. NAGATA (M.). - On the purity of branch loci in regular local rings, Illinois J. of Math., t. 3, 1959, p. 328-333. SAMUEL (P.) und ZARISKI (0.). - Commutative algebra, Vol. 1. - Princeton, Van Nostrand, 1958 (The University Series in higher Mathematics). ZARISKI (0.). - Algebraic surfaces. - New York, Chelsea publishing Company, 1948 (Ergebnisse der Mathematik, Band 3, 5). ZARISKI (0.). - On the purity of the branch locus of algebraic functions, Proc. nat. Acad. Sc. U. S. A., t. 44, 1958, p. 791-796. 489