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Le plancher pelvien dans le post
-
partum. Etat
neuromusculaire et place de l’électrostimulation.
Intérêt d’une prise de conscience chez les sportives.
Dr Guy de Bisschop (Marseille), Dr Eric de Bisschop (Aix
-
en
-
Provence)
Groupement Latin et Méditerra
néen de Médecine du Sport (GLMMS)
Groupement Européen de Périnéologie (GEP)
Après avoir franchi le détroit supérieur, le mobile fœtal va franchir les faisceaux de
l’élévateur de l’anus pour s’affronter au périnée superficiel. Le noyau fibreux central
est
tendu, laminé voire déchiré. Les faisceaux de l’élévateur de l’anus, le transverse
profond et l’aponévrose moyenne du périnée sont distendus. Il en résulte des
possibilités lésionnelles intéressant les structures musculaires et nerveuses avec des
conséque
nces que caractérisent des incontinences urinaires et, d’une manière moins
importante, anales.
Les types de lésions
Durant l’accouchement, le plancher pelvien est à la fois exposé à la compression
directe de l’enfant et étiré par les efforts d’expulsion maternelle. Ces forces étirent et
compriment les muscles du plancher pelvien, les tissus conjonctifs et les nerfs
périphériques. De plus, l’apport sanguin tissulaire se tarit. Les troubles de l’appareil
bas urinaire et des fonctions anorectales et sexuelles sont courants après la
délivrance.
Lésions musculaires
Ce sont principalement les faisceaux pubo-rectaux de l’élévateur de l’anus qui sont
atteints. L’élongation, des microtraumatismes avec micro hématomes, engendrent
une diminution du pouvoir contractile et une déchirure si le seuil d’élasticité est
dépassé. Le tissu musculaire contractile est remplacé par de la fibrose, si on laisse
évoluer ce processus.
La traduction électromyographique que nous constatons est caractérisée par un
nombre abondant de potentiels polyphasiques désintégrés, une diminution
l’activité électrique volontaire et la possibilité de l’apparition de potentiels de
fibrillation dus à la fragmentation des fibres musculaires lésées. Ces signes ne
correspondent nullement à une lésion nerveuse axonale, mais évoquent des
atteintes directes des fibres musculaires, myogènes, myositiques.
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Dans le début du post-partum, le plancher pelvien est fragilisé, et doit être
préservé des efforts et stimulations intempestifs, ainsi que des poussées lors
de la constipation.
Lésions nerveuses
Le nerf pudendal et ses branches de division peuvent être élongés ou comprimés ou
même subir une sténose lors de la traversée de la pince sacro-
spino
-tubérale au
cours de la rétropulsion sacro
-
coccygienne.
Qu’il s’agisse d’un étirement ou d’une compression, le primum movens lésionnel est
avant tout
vasculaire
. La richesse du réseau microvasculaire du nerf est compromise,
et on assiste à un œdème intraneural qui s’associe à une ischémie plus ou moins
localisée du nerf. C’est celle-ci qui va avoir des conséquences néfastes sur les
éléments structuraux du nerf. De plus, si l’œdème intraneural dure longtemps, le
tissu nerveux peut être envahi par des fibroblastes et s’organiser en tissu cicatriciel
fibrosique.
Deux grands types lésionnels doivent être considérés : les
myélinopathies
et les
axonopathies
, suivant que le processus pathologique porte sur la gaine schwanno-
myélinique ou sur l’axone, ou bien sur les deux à la fois
Les processus de
démyélinisation
segmentaire ne sont pas homogènes,
mais il faut insister sur le fait que l’axone reste intact et ne présente pas de
dégénérescence.
L’atteinte de la gaine myélinique a pour conséquence principale de provoquer
un ralentissement des vitesses de conduction nerveuse, phénomène
qui a peu
d’importance fonctionnelle. Il s’agit en général de neurapraxies de type II, de
récupération rapide, dans les deux mois environ.
Il est important de noter qu’il n’existe pas de dénervation, de
dégénérescence du nerf, mais ce ralentissement affecte d’une manière
inégale les différentes fibres nerveuses, ce qui aboutit à la périphérie à une
arrivée désynchronisée des messages nerveux de chaque fibre élémentaire,
qui se traduit
cliniquement
par une diminution de la force musculaire sans
signes de dénervation. Ce fait est important à souligner, afin d’éviter une
fausse interprétation du déficit clinique de l’activité musculaire. Un
ralentissement homogène des vitesses de conduction nerveuse n’aurait
qu’une très faible importance du point de vue symptomatique, alors que c’est
l’inégalité, l’hétérogénéité, des vitesses de conduction des fibres nerveuses au
sein d’un même nerf qui est responsable du déficit clinique, de la faiblesse
musculaire observée lors des contractions musculaires soutenues ou des
act
ivités toniques..
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La compression d’un nerf détermine, par voie vasculaire et mécanique, une atteinte des
cellules de Schwann et une perte segmentaire de la discontinuité de la gaine de myéline. Il en
résulte un ralentissement des vitesses de l’influx nerveux, sans dénervation. Mais ce
ralentissement est souvent inégal pour les fibres nerveuses constitutives du nerf, ce qui se
traduit cliniquement par une réduction de la force musculaire, pouvant faire croire faussement
à une dénervation.
La récupération de ces atteintes myéliniques segmentaires est rapide, sans séquelles, car
l’axone est intact.
Ce stade lésionnel est parfaitement extériorisé par l’exploration électrologique
qui montre une réduction de l’activité électrique volontaire, mais sans sig
nes
de dénervation, et un ralentissement des conductions nerveuses avec un
potentiel stimulé polyphasique.
Nous pensons qu’il faut interpréter d’une manière critique les mesures des
conductions nerveuses terminales du nerf pudendal, et ne pas leur faire di
re
ce qu’elles n’extériorisent pas. En effet, d’une part la technique de mesure est
empirique, délicate,,avec des résultats fluctuants, d’autre part l’étiologie peut
être multifactorielle. On constate simplement un ralentissement de la
conduction nerveuse terminale, sans en préjuger de l’origine, sans mettre en
évidence une dégénérescence éventuelle du nerf. Le ralentissement de la
conduction terminale ne doit pas être interprété comme une dégénérescence.
Cet examen est peu fiable dans le cadre qui nous int
éresse.
L’électromyographie cinésiologique par électrodes de surface extériorise bien
ce stade de faiblesse musculaire, surtout si elle est couplée à des mesures
manométriques. C’est elle qui sera à la base des techniques thérapeutiques
par EMG
-
biofeedback
.
Les atteintes
axonales
correspondent aux dénervations. Nous insistons sur le
fait que celles-ci sont rares et la plupart du temps très partielles en ce qui
concerne le nerf pudendal et ses branches, en dehors des étiologies
traumatiques ou tumorales.
Du
point de vue
électrologique,
on constate au repos la pulsion de potentiels
provenant des fibres musculaires dénervées (fibrillation) au niveau des
muscles du territoire nerveux intéressé. Ces signes sont nécessaires pour
conclure à une dénervation périphérique, les constatations cliniques n’étant
pas suffisantes. Mais on constate principalement de nombreux signes de
restructuration des potentiels d’unité motrice extériorisant une réinnervation
concomitante. Les quelques fibres nerveuses qui peuvent entrer en
dégénérescence restent noyées au sein de structures dépourvues d’atteintes
axonales et récupéreront rapidement si le tissu neuromusculaire environnant
et sa vascularisation présentent un état fonctionnel valable.
Ce stade neurogène éventuel du post-partum, associé aux lésions myogènes
du plancher pelvien, justifie une grande prudence dans les techniques de
réhabilitation.
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Nos constatations électrophysiologiques sont pleinement en accord avec les
résultats électriques, histologiques et structuraux réalisés par D. Prat-Pradal et al.
qui sont en faveur d’une atteinte de l’effecteur plutôt que l’atteinte de la commande
motrice. Sans nier les conséquences neurogènes de l’étirement ou de la
compression, celles-ci sont transitoires dans le post-partum et récup
èrent
secondairement pour aboutir à la ménopause à des modifications structurales du
muscle élévateur de l’anus avec intégrité des voies nerveuses.
Impacts lésionnels
Si les atteintes peuvent être mixtes, il faut considérer des prédominances
anatomiques.
Les sphincters urètral et anal sont innervés par le nerf pudendal. qui peut subir des
compressions au niveau de la pince sacro-
spino
-tubérale lors des rétropulsions
sacrococcygiennes au cours de l’accouchement et du canal pudendal par le mobile
fœtal, Les sphincters sont comprimés et étirés lors de la dilatation. Les signes
pathologiques dominent sur le sphincter de l’urètre par rapport au sphincter anal qui
est en général peu atteint..
Le muscle élévateur de l’anus est directement innervé par le contingent sacré (S2).
Ses attentes sont en général principalement musculaires.
Lésions secondaires
Elles revêtent un caractère divers dans le temps : prolapsus, rectocèles, troubles de
la statique, lombalgies, douleurs référées périnéales, problèmes sexuels
Pou
r faire le bilan de l’ensemble de ce tableau lésionnel et déclencher les
techniques physiothérapeutiques, il faut que l’état d’équilibre du périnée,
neuro
-somatique, musculaire, neuro-autonome, hormonal, ait été atteint, c’est
à dire un cap de 6 à 8 semain
es après l’accouchement.
En résumé, les structures nerveuses et musculaires du périnée au cours du post-
partum peuvent présenter un état lésionnel caractérisé principalement par des
atteintes directes des fibres musculaires et des neuropathies myéliniques non
dénervantes. Ces dernières engendrent des blocs de conduction réversibles et des
ralentissements des conductions nerveuses qui intéressent les fibres nerveuses
d’une manière inégale, hétérogène, aboutissant à une désynchronisation de l’impact
global d
e la commande nerveuse musculaire. On assiste alors à une diminution de la
réponse musculaire et de sa gradation qui peut faire faussement croire à une
dénervation. Il faut insister sur le fait que la commande volontaire nécessaire à la
rééducation fonctionnelle ou aux techniques de biofeedback reste aussi limitée par
ce processus. Mais ces dysfonctionnements sont transitoires et récupèrent vite, dans
des conditions physiologiques normales..
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Participation extrapérinéale
Des travaux électrophysiologiques sur plus de 500 sujets effectués par l’un de nous
(E. de Bisschop) ont montré des liaisons radiculaires et vertébrales avec le périnée,
dont les atteintes peuvent conduire à des dysfonctionnements nerveux et
musculaires, et à des ptoses (syndrome spondylo
-pér
inéal).
De plus, il faut citer le cas de l’hyperlordose lombaire et de l’antéversion du bassin
qui dirigent les lignes de force intra-abdominales vers le plancher pelvien au lieu de
la région ano
-
coccygienne.
Les incontinences du post
-
partum.
Les atteintes éventuelles nerveuses et principalement musculaires que nous venons
d’envisager provoquent une hypotonie et une diminution réflexe des muscles du
plancher pelvien, avec pour conséquence la possibilité d’une incontinence. Celle-
ci
est urinaire, en général d’effort, dont le bilan repose sur l’EMG de l’élévateur de
l’anus et du sphincter, la conduction nerveuse terminale, le réflexe sacré et les
explorations urodynamiques. Mais une incontinence anale peut aussi être très
rarement présente. Son bilan repose sur les explorations fonctionnelles ano-
rectales
manométriques, l’EMG et l’échoendoscopie.
Les incontinences urinaires du post-partum sont relativement fréquentes puisqu’elles
intéressent 30% des femmes environ, chez qui l’électrostimulation s’avère bénéfiqu
e
sur la majorité d’entre elles.(A. Pigne)
Quand débuter l’électrostimulation
?
La restabilisation fonctionnelle des structures du périnée à la suite de l’orage neuro-
musculo
-vasculaire consécutif à la descente fœtale et à l’accouchement couvre un
laps de
temps de 6 à 8 semaines. C’est à cette date que l’électrostimulation peut être
instituée chez les patientes présentant une incontinence urinaire, ayant à l’esprit le
vieil adage des électrologistes « un jour de perdu, une semaine de perdue ; une
semaine de perdue, un mois de perdu ». Le fait de s’abstenir d’électrostimulation
prive la patiente d’un moyen qui s’avère efficace en pratique et qui peut éviter la
formation de zones de fibrose musculaire qui fragiliseront le muscle dans l’avenir.
Entreprendre l’électrostimulation plus tardivement, six mois après l’accouchement
par exemple, est une absurdité qui peut être aussi bien remplacée par l’abstention.
L’accouchement est l’une des principales causes d’incontinence. Le rôle de
l’électrostimulation s’avère im
portant pour la combattre, pour permettre une meilleure
efficacité des techniques de biofeedback, pour prévenir des séquelles tardives, pour
réduire le nombre d’incontinences se manifestant lors de la ménopause ou du 3e
âge. Mais l’électrothérapie doit être instituée précocement, dès que l’état tissulaire le
permet, c’est à dire la 6e ou 8e semaine après l’accouchement. Rappelons qu’une
gymnastique abdominale s’avère néfaste si elle est pratiquée sur un plancher pelvien
dysfonctionnel.
Quelle électrostimula
tion
?
Celle
-ci dépend de la nature de l’incontinence qui est précisée par les
explorations
neuro
-
urologiques
. Effectuées dès le retour de couche, soit six ou sept semaines
après l’accouchement, elles mettront en évidence le type d’incontinence (d’effort,
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