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Signalons, pour la petite histoire,
que le baron de Coubertin avait
manifesté quelques réticences à in-
tégrer dans «ses» Jeux olympiques
un marathon, jugeant inhumaine la
distance historique de 40 km à par-
courir au pas de course (aucun ma-
rathonien ne le contredira …). Mais
puisque Philippidès l’avait fait avec
ses armes (mais sans bagages), cela
devait pouvoir être envisageable à
l’aube du XXe siècle, à l’heure des
«baskets».
42 km 195: pour un caprice
de reine
La discipline du marathon, sur
40 km, fut reprise lors des Jeux
olympiques de Paris (1900), puis de
Saint-Louis (1904) aux USA.
Par contre, lors des Jeux olympiques
de Londres (en 1908), la distance
du marathon fut portée à 42 km et
195 m. Ce prolongement de la dis-
tance a d’ailleurs été fatal à son
«vainqueur». En effet le maratho-
nien italien Pietri, alors en tête,
s’est effondré juste avant la ligne
d’arrivée (décidément les mythes
ont l’histoire tenace!).
Tout ça par la faute de la reine d’An-
gleterre de l’époque, qui fit un petit
caprice royal, lequel a dû être exaucé.
En effet, sa Majesté avait désiré que
le départ du marathon soit donné
dans la cour même du Château de
Windsor, afin que sa royale descen-
dance puisse voir le départ sans
avoir à se déplacer. Or, même par
le chemin le plus court, la distance
entre le château de Windsor et le
stade olympique de White City était
supérieure à 40 km. Très exactement
42 km et 195 m.
Depuis, c’est cette dernière distance
qui est, pour on ne sait quelle rai-
son, devenue la distance officielle
du marathon.
Les 22 marathons olympiques qui
ont suivi n’ont d’ailleurs jamais dé-
rogé à cette règle.
Pas plus que les centaines de ma-
rathons organisés chaque année en
tous les points du globe.
Départ à … Marathon!
Fidèle à la tradition, le marathon
moderne d’Athènes part de… Mara-
thon. A proximité d’ailleurs de l’im-
posant tumulus (de 9 m de haut)
dont on dit qu’il recouvre les corps
des soldats morts lors de la bataille
de 490 avant J.-C. C’est d’ailleurs
une attraction touristique (d’un in-
térêt visuel très discutable).
Le départ donné, les coureurs
s’élancent sur une route assez plate,
sur une bonne moitié du parcours,
qui longe la côte toute proche de
la mer Egée, puis traverse la cam-
pagne où, entre des cultures va-
riées, les oliviers succèdent aux
chênes sur fond de paysage légère-
ment montagneux.
C’est d’ailleurs dans ce cadre que,
subitement, le parcours bifurque,
sans motif apparent, sur une route
de traverse, obligeant les maratho-
niens à faire un aller-retour sur 2
km. L’explication? C’est à cet en-
droit que les organisateurs du par-
cours ont tout simplement songé
à rajouter aux 40 km qui séparent
Marathon d’Athènes les 2 km man-
quants pour respecter la distance
officielle du marathon.
Après ce parcours bucolique et une
longue côte de près de 12 km, les
marathoniens atteignent les pre-
miers faubourgs d’Athènes, qui est,
ce n’est un secret pour personne,
une ville particulièrement tentacu-
laire.
Le sommet de la côte enfin dépassé,
le marathon plonge en pente douce
sur 12 km, jusqu’au cœur de la cité
antique d’Athènes.
Le Stade olympique d’Athènes
L’arrivée du marathon se situe au
Stade olympique, théâtre des pre-
miers Jeux olympiques de 1896,
lequel est noir d’un monde qui ne
ménage pas ses applaudissements,
du premier au dernier marathonien.
C’est l’exubérance toute méditerra-
néenne!
Le Stade olympique est magnifique.
Il est constitué d’un ensemble de
gradins de marbre blanc, qui s’al-
longe entre deux collines boisées.
Son site n’est pas dû au hasard.
C’est en effet à cet endroit précis
qu’avait été construit au 4e siècle
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avant J.-C. un premier stade antique
bâti sous Lycurgue.
Depuis 1896, ce stade n’a d’ailleurs
pris aucune «ride».
Et la ferveur populaire à l’arrivée des
marathoniens est la même, certai-
nement, qu’à l’époque de la Grèce
antique (dont les jeux, à Olympie,
ne connaissaient toutefois pas,
faut-il le préciser, la discipline du
marathon!).
L’arrivée dans le Stade olympique
est d’autant plus chargée d’émotion
que l’on a en outre une vue «plon-
geante» sur le phare d’Athènes,
l’Acropole.
L’Acropole
L’Acropole réunit sur son esplanade
et ses flancs tout ce qui se faisait
de mieux en termes d’architecture
antique, notamment, et surtout, à
l’âge d’or d’Athènes, soit au temps
de Périclès (Ve siècle avant J.-C.).
Il suffit de monter les marches
qui mènent à l’Acropole pour, en
quelques minutes, changer fonda-
mentalement de monde. Tous les
grands chefs-d’œuvres de l’archi-
tecture de la Grèce antique sont
réunis en ces lieux.
C’est d’abord l’impressionnant
Parthénon, temple dorique périp-
tère, qui repose sur un stylobate de
marbre et comprend un péristyle de
46 colonnes cannelées hautes de
plus de 10 mètres. L’œil est imman-
quablement, entre autres, attiré par
la frise ionique, la frise des «Pana-
thénées», qui faisait à l’origine 160
mètres de longueur, soit le tour de
tout l’édifice.
C’est ensuite le temple de
l’Erechthéion, tout en finesse, qui
comprend sur le plan architectural
une combinaison d’ordre dorique
et ionique. Son baldaquin aux six
caryatides est d’une élégance peu
commune.
C’est également le gracieux temple
d’Athéna Niké, d’ordre ionique,
duquel se jeta Egée lorsqu’il cru, à
tort, que son fils Thésée était mort
dans son combat en Crète contre le
Minotaure.
C’est encore le Théâtre de Dionysos,
en contrebas du Parthénon, qui ne
semble pas avoir vieilli depuis sa
construction par Lycurgue au IVe
siècle avant J.-C. (magistrat auquel
on doit déjà la construction du pre-
mier stade antique, à l’emplace-
ment de l’actuel Stade olympique).
C’est enfin l’Odéon d’Hérode At-
ticus, romain de son état (celui-là
même qui avait reconstruit en 144
après J.-C. le stade antique initiale-
ment construit par Lycurgue), dont
la façade d’origine est très bien
conservée.
Le nouveau Musée de
l’Acropole
Par ailleurs il est impensable d’aller
à Athènes sans y visiter le nouveau
musée moderne de l’Acropole, qui
a ouvert ses portes cette année, et
dont on doit la conception à l’archi-
tecte suisse Bernard Tschumi.
Ce musée se situe en contrebas de
l’Acropole. Un sol vitré permet de
voir, au sous-sol, les vestiges d’un
quartier antique d’Athènes.
D’un volume impressionnant sur
plusieurs niveaux, ce musée permet
de mettre en valeur différentes col-
lections de sculptures témoins de
l’art grec des époques archaïque et
classique.
C’est à son dernier étage que l’on
peut admirer une petite partie des
frises originales des Panathénées
qui ornaient le Parthénon, la plus
grande partie encore conservée se
trouvant au British Museum, suite à
un «accident» de l’histoire.
La magnifique baie vitrée, qui
donne sur l’Acropole, est d’ailleurs
suffisamment vaste pour pouvoir
accueillir l’intégralité des frises ori-
ginales exposées depuis bientôt
deux siècles au British Museum.
Deux siècles d’usurpation britan-
nique d’un côté et un musée mo-
derne de l’autre devraient incontes-
tablement faire pencher aujourd’hui
la balance en faveur du rapatrie-
ment des frises des Panathénées de
Londres à Athènes.
Ce serait un juste retour de l’his-
toire.
Mais ce marathon là risque d’être
encore long … trop long! n
Patrick Blaser
Marathons de l’Architecture
déjà parus:
Zanzibar: la perle verte de l’océan Indien,
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Zermatt, Davos, Jungfrau:
l’appel des montagnes,
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Boston, le charme britannique
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Barcelone, au milieu
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Chicago, la ville de tous les contrastes
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New York, une ville et un marathon
mythiques,
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Le nouveau Musée de l’Acropole.