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Introduction
Le KL-Natzweiler (appelé aussi « le Struthof ») est un camp de concentration qui appartient à la
nébuleuse concentrationnaire nazie. Ses spécificités et son histoire en font un camp à part.
Contexte historique :
Le KL-Natzweiler est un des instruments du système totalitaire nazi. Primo Levi, dans son livre les
Naufragés et les Rescapés, donne une définition claire de l’idéologie totalitaire :
« La pression qu’un État totalitaire peut exercer sur un individu est effrayante. Ses armes principales
sont au nombre de trois : la propagande, directe ou camouflée par l’éducation, par l’enseignement, par
la culture populaire ; le barrage opposé au pluralisme des informations ; la terreur. »
L’histoire de l’Allemagne, de 1933 jusqu’à 1945 montre comment le pouvoir nazi met en œuvre ces
trois armes. Chez les nazis, la terreur est théorisée et exécutée d’une manière implacable. Elle possède
ses lieux – les camps de concentration – et ses victimes.
L’histoire du système concentrationnaire nazi distingue deux périodes. Dans un premier temps, les
camps constituent des instruments de répression – instruments aux mains du seul RSHA
(Reichssicherheitshauptamt : Office central de la sécurité du Reich qui regroupe toutes les polices du
Reich et qui est contrôlé par la Schutzstaffel, « échelons de protection » : la SS). Dès les années 1937-
1938, et surtout en 1942, à la fonction répressive des camps s’ajoute une fonction économique, au
service non seulement de la SS, mais de l’ensemble de l’économie allemande. Le SS-WVHA
(Wirtschaftsverwaltungshauptamt : Office central de l’administration économique de la SS) l’emporte sur
le RSHA. Le SS-WVH est créé début 1942 pour regrouper la branche administrativo-économique
de la SS : les branches chargées des questions de construction et d’approvisionnement, les entreprises
économiques de la SS, et l’inspection des camps de concentration, l’IKL. Cet organisme est dirigé par,
Oswald Pohl, l’éminence grise économique d’Himmler (chef des SS, nommé Reichsführer-SS, « chef
suprême », le 6 janvier 1929 par A. Hitler)
Ainsi, le camp du Struthof, comme les autres camps de concentration du IIIè Reich, sont, en 1942, placés
au cœur d’un projet plus vaste, d’ordre économique, qui met en jeu l’ensemble des acteurs de
l’économie allemande (État et grandes entreprises) tout en conservant leur raison d’exister : la répression.
Les camps de concentration sont replacés dans le cadre d’un pays et de son économie, entièrement
tournées vers la guerre totale et dont les coordinateurs ne sont plus seulement Heinrich Himmler et
Oswald Pohl, mais aussi Albert Speer (architecte en titre du IIIè Reich, nommé en 1942 ministre des
armements et de la production de guerre). Enfin, précisons que l’économie du IIIè Reich n’a pas pu
fonctionner sans l’apport des travailleurs forcés, composés de prisonniers de guerre, de travailleurs
d’Europe de l’Est, des ouvriers du STO (Service du travail obligatoire) et des détenus des camps de
concentration.