À propos de la réciproque d’une fonction (deuxième partie) Denis Tanguay, UQAM, Département de mathématiques, section didactique [email protected] Michel Warisse, retraité au travail [email protected] Dans le précédent numéro de la revue, nous vous avons présenté certaines réflexions et remarques d’ordres mathématique et didactique à propos des fonctions réciproques, sujet particulièrement délicat en 4e et 5e secondaires des séquences Sciences Naturelles et Technico-Sciences. Nous reprenons le sujet, en proposant une procédure pratique qui permet de trouver la réciproque d’une fonction donnée, sous certaines conditions. 5. Réciproques et procédures Le fait qu’une fonction g soit la réciproque de la fonction f peut se traduire par l’énoncé suivant : si le point (x, y) appartient au graphique de f, alors le point (y, x) appartient au graphique de g. Cette dernière conclusion peut aussi s’écrire : si y = f(x), alors x = g(y). Qu’en est-il de la LUI ENVOYER UNE COPIE PDF FINALE AVANT LA PUBLICATION réciproque d’une fonction polynomiale du second degré, À PROPOS LA RÉCIPROQUE dont la règle estDEdonnée par : D’UNE FONCTION (2e partie) Denis Tanguay, UQAM, Département de mathématiques, f(x) = ax² + bx +section c, didactique [email protected] Michel retraité au travail noter y = ax² + bx + c? Isoler x dans que Warisse, l’on peut aussi [email protected] cette équation pour l’exprimer en fonction de y n’est pas Dans le précédent numéro de la revue, nous vous avons présenté certaines réflexions et du toutd'ordre évident. Par etcontre si àlapropos règledesde la fonction remarques mathématique didactique fonctions réciproques, est sujet particulièrement délicat en 4e et 5e secondaires des séquences Sciences Naturelles et Technicoécrite Nous sous sa forme soit : pratique qui permet de trouver la Sciences. reprenons le sujet, canonique, en proposant une procédure réciproque d'une fonction donnée, sous certaines conditions. f(x) = a (x – h)2 + k, 5. Réciproques et procédures alors le « montage » des deux règles (celle de f et celle de Le fait qu’une fonction g soit la réciproque de la fonction f peut se traduire par l’énoncé suivant : si le qu’une point (x, y) appartient au graphique de f, alors le (y, x) appartient au graphique g) n’est suite de composition depoint fonctions, bref une de g. Cette dernière conclusion peut aussi s’écrire : si y = f (x), alors x = g(y). Qu’en est-il de la réciproque fonction polynomiale du degré, dont la règle par suite ded’une « procédures ». Lesecond montage pour g est sedonnée détermine en f (x) = ax² + bx + c, que l’on peut aussi notercelui y = ax² + c ? Isoler x dans cette équation pour l’exprimer en « démontant » de+ bxf pour le refaire ensuite à l’envers, fonction de y n’est pas du tout évident. Par contre si la règle de la fonction est écrite sous sa danscanonique, le sens forme soitinverse et avec les règles réciproques. Ainsi, f (x) = a (x – h)2 + k, pour l’image quelconque x par f,de alors le «évaluer montage » des deux règles d’une (celle de f valeur et celle de g) n’est qu’une suite de de composition fonctions, bref une suite de « procédures ». Le montage pour g se détermine en « démontant » on suit le chemin suivant : celui de f pour le refaire ensuite à l’envers, dans le sens inverse et avec les règles réciproques. Ainsi, pour évaluer l’image d’une valeur quelconque de x par f, on suit le chemin suivant : Ci-dessus, nous avons décrit : 1. sur la première ligne, les étapes des compositions nécessaires pour obtenir f, 2. sur la deuxième ligne, la suite des procédures correspondantes, à appliquer avec une calculatrice de type scientifique (AOSTM)1, 3. sur la troisième ligne, les actions, décrites en mots, pour évaluer. Ci-contre, nous avons décrit : a) sur la première ligne, les étapes des compositions nécessaires pour obtenir f, b) sur la deuxième ligne, la suite des procédures correspondantes, à appliquer avec une calculatrice de type scientifique (AOSTM)1, c) sur la troisième ligne, les actions, décrites en mots, pour évaluer. À l’envers ou à l’inverse, le « démontage » est simple à suivre. Nous devons proposer deux chemins possibles selon la fonction réciproque que nous cherchons à obtenir. En effet, comme f n’est pas injective, elle donne lieu à deux réciproques selon le domaine où on la restreint pour « l’inverser » (voir §3). 2 yk h, dont l’ensemble image est [h, +[ et dont le a y − k! Le sommet de graphique est la moitié supérieure d’une parabole d’axe–1horizontal. Attention 2 +h cette parabole n’est plus (h, k) mais bien plutôt (k, h). Pour l’autre réciproqueapossible : On reconstruit ainsi la règle f 1 ( y ) On reconstruit ainsi la règle f (y) = , dont l’ensemble image est [h, + ∞[ et dont le graphique est la moitié supérieure d’une parabole d’axe horizontal. Attention! Le sommet de cette parabole n’est plus (h, k) mais bien plutôt (k, h). Pour l’autre réciproque possible : yk yh, kdont l’ensemble image est [h, +[ et dont le On reconstruit ainsi la règle f 1 ( y ) h . L’ensemble image de g est ]∞, h] et La règle qu’on reconstruit alors est g ( y ) a a graphique est la moitié supérieure d’une parabole d’axe horizontal. Attention ! Le sommet de son graphique est la moitié inférieure d’une parabole d’axe et de sommet (k, h). cette parabole n’est plus (h, k) mais bien plutôt (k, h). Pourhorizontal l’autre réciproque possible : Parler d’axe horizontal pour une parabole qui est le graphique d’une fonction de variable indépendante y peut paraître déstabilisant : nous sommes peu habitués à voir l’axe y à l’horizontal ! Il nous apparaît important, au moins les premières fois, de garder les variables comme nous l’avons fait pour que l’élève saisisse bien ce chemin pris « à l’envers », qui part du bout « y » pour remonter vers le point de départ « x ». Dans une classe où le travail sur les fonctions réciproques a bien été mis en place, quand les élèves commencent à être à l’aise, il n’y a à notre avis pas de problème à redonner à x et à y leur rôle usuel, et à exprimer la règle plutôt sous la forme yk h . L’ensemble image de g est ]∞, h] et La règle qu’on reconstruit alors est g ( y ) ax k y g ( x) h. son graphique est la moitié inférieure d’une parabolead’axe horizontal et de sommet (k, h). C’est chaquehorizontal enseignantpour de bien en sont élèves dans leur fonction compréhension des Parler à d’axe une évaluer paraboleoùqui est lelesgraphique d’une de variable fonctions réciproques d’être conscient des difficultés que peuvent indépendante y peutetparaître déstabilisant : nous sommes peuentraîner habituéssesàchoix. voir l’axe y à l’horizontal ! Il nous apparaît important, au moins les premières fois, de garder les variables On pourra cefait processus les saisisse fonctionsbien quicepeuvent suite comme nousutiliser l’avons pour queavec l’élève chemins’écrire pris « à comme l’enversune », qui partdedu À l’envers ou à l’inverse, le « démontage » est simple à suivre. Nous devons proposer deux compositions de remonter fonctions vers élémentaires (fonctions base) chacune fonction bout « y » pour le point de départ «dex ». Dansadmettant une classe où le une travail sur les 1 chemins possibles selon la fonction réciproque que nous cherchons à obtenir.de En calcul effet, comme Écrire les priorité sous forme canonique facilite l’application processus AOS™ (Algebraic Operating System), processus quif tientréciproque. compte de la des opérations. fonctions réciproques afonctions bien été mis enleur place, quand les élèves commencent à êtredu à l’aise, il n’y n’est pas injective, elle donne lieu à deux réciproques selon le domaine où on la restreint pour puisque la variable indépendante n’est présente qu’une seule fois dans l’écriture. Il faut a à notre avis pas de problème à redonner à x et à y leur rôle usuel, et à exprimer la règle plutôt « l’inverser » (voir §3). cependant bien gérer la question des domaines quand les fonctions de base en jeu doivent être sous la forme restreintes sur leur domaine pour être inversées, comme c’est le cas pour x2 ou pour | x |. Quant à 1 la fonction partie entière, elle cause de sérieux problèmes AOS™ (Algebraic Operating System), processus de calcul qui tient compte de la priorité des opérations. x k « d’inversibilité ». Pourquoi, au fait ? y g ( x) h. a GRMS ENVOL no 162 — été-automne 2013 55 y−k + h. La règle qu’on reconstruit alors est g(y) = − a L’ensemble image de g est ]–∞, h] et son graphique est la moitié inférieure d’une parabole d’axe horizontal et de sommet (k, h). Parler d’axe horizontal pour une parabole qui est le graphique d’une fonction de variable indépendante y peut paraître déstabilisant : nous sommes peu habitués à voir l’axe y à l’horizontal! Il nous apparaît important, au moins les premières fois, de garder les variables comme nous l’avons fait pour que l’élève saisisse bien ce chemin pris « à l’envers », qui part du bout « y » pour remonter vers le point de départ « x ». Dans une classe où le travail sur les fonctions réciproques a bien été mis en place, quand les élèves commencent à être à l’aise, il n’y a à notre avis pas de problème à redonner à x et à y leur rôle usuel, et à exprimer la règle plutôt sous la forme : y = g(x) = − x−k + h. a C’est à chaque enseignant de bien évaluer où en sont les élèves dans leur compréhension des fonctions réciproques et d’être conscient des difficultés que peuvent entraîner ses choix. On pourra utiliser ce processus avec les fonctions qui peuvent s’écrire comme une suite de compositions de fonctions élémentaires (fonctions de base) admettant chacune une fonction réciproque. Écrire les fonctions sous leur forme canonique facilite l’application du processus puisque la variable indépendante n’est présente qu’une seule fois dans l’écriture. Il faut cependant bien gérer la question des domaines quand les fonctions de base en jeu doivent être restreintes sur leur domaine pour être inversées, comme c’est le cas pour x2 ou pour | x |. Quant à la fonction partie entière, elle cause de sérieux problèmes « d’inversibilité ». Pourquoi, au fait? 6. Et les fonctions trigonométriques? Allons maintenant faire un tour du côté des fonctions trigonométriques... Définition : une fonction f de la variable réelle x est dite périodique, de période p strictement positive, si et seulement si f(x + p) = f(x), pour tout x dans le domaine de f. 2 Si p est une période pour la fonction f, alors tous les multiples entiers de p sont aussi des périodes pour f. Pourquoi, au fait? Bien sûr, on cherchera à déterminer la plus petite valeur positive non nulle possible pour p, et c’est elle qu’on donnera pour période. Par exemple, pour les fonctions trigonométriques de base : • les fonctions sinus et cosinus sont périodiques de période 2�, quand x correspond à la mesure d’un angle en radians, • la fonction tangente est périodique de période �, toujours quand x est une mesure en radians. 3 Étant des fonctions périodiques, les fonctions trigonométriques sont donc éminemment peu injectives : 6. elles Et les fonctions trigonométriques prennent une valeur? donnée y0 de leur ensemble Allons maintenant faire un tour du côté des fonctions trigonométriques... image une infinité de fois, pour une infinité de pré-images, Définition : une fonction f de la variable réelle x est dite périodique, de période p strictement ces pré-images étantsi toutes elles distances positive, si et seulement f (x + p) = f entre (x), pour tout x dansàle des domaine de f. Si pqui est une période pour la fonction f, alors tous les multiples entiers de p sont aussi des périodes sont des multiples entiers de �. Pour déterminer leur pour f. Pourquoi, au fait ? Bien sûr, on cherchera à déterminer la plus petite valeur positive non nulle possible pour p, on et c’est elledonc qu’on donnera pour période. Par exemple, les fonctions réciproque, doit restreindre chacune despour fonctions trigonométriques de base : trigonométriques à une de deson domaine elle est les fonctions sinus et cosinus sontpartie périodiques période 2, quand où x correspond à la mesure d’un angle en radians, injective. Selon la partie du domaine choisie, on dit qu’on la fonction tangente est périodique de période , toujours quand x est une mesure en radians. a affaire à l’une ou l’autre des « branches » de la fonction Étant des fonctions périodiques, les fonctions trigonométriques sont donc éminemment peu trigonométrique réciproque enleurcause. c’est abus injectives : elles prennent une valeur donnée y0 de ensemble Mais image une infinitéun de fois, pour une infinité de pré-images, ces pré-images étant toutes entre elles à des distances qui sont des de langage, il s’agit en fait de fonctions différentes. multiples entiers de . Pour déterminer leur réciproque, on doit donc restreindre chacune des fonctions trigonométriques à une partie de son domaine où elle est injective. Selon la partie du domaine choisie, on dit qu’on a affaire à l’une ou l’autre des « branches » de la fonction trigonométrique réciproque en cause. Mais c’est un abus de langage, il s’agit en fait de fonctions différentes. Exemple : supposons qu’on veuille trouver une réciproque pour la fonction y = f(x) = sin (x). Exemple : supposons qu’on veuille trouver une réciproque pour la fonction y = f (x) = sin (x). : le graphique de la fonction f (x) = sin (x) Figure Figure 4 : le4graphique de la fonction f(x) = sin (x) Une des branches de la fonction réciproque du sinus, la fonction « arcsinus », est : arcsin : [–1, 1] → , y arcsin(y), fonction qui a ses images dans [-�/2, �/2] et qui à y associe l’angle en radians (et donc la longueur de l’arc2, d’où le nom « arcsin »!) entre –�/2 et �/2 qui a y pour sinus. Par Pour une discussion plus complète sur le lien entre les radians et les arcs de cercle, le lecteur pourra consulter Tanguay (2007). 56 ENVOL no 162 — été-automne 2013 GRMS exemple la valeur de arcsin(0,5) est la mesure en radians 4 de l’angle dont le sinus est 0,5, soit �/6. éciproque du in( y), 2 et qui à y longueur de e –/2 et /2 0,5) c’est la sinus est 0,5, Figure 5 : la branche principale de la fonction arcsinus Figure 5 : la branche principale de la fonction arcsinus Mais on peut aussi décider d’inverser la fonction sinus entre –3�/2 et –�/2, pour ainsi obtenir une autre fonction, appelons-la la fonction « arcsin bis » : verser la pour ainsi arcsin bis : [–1, 1] → , y arcsin bis (y), ons-la la fonction qui a ses images dans [-3�/2, -�/2], qui à y associe n bis (y), l’angle ayant y pour sinus, et dont la mesure en radians est comprise entre –3�/2 et –�/2. , 2 et 4 Vous aurez remarqué qu’encore une fois, le nom des axes sinus, et et le nom des variables de la règle ne sont pas habituels. de la fonction rise entre réciproque du arcsinus », est Mais comme cela a été dit plus haut, si certains élèves 1] , y arcsin( y), trop mages dans 2sont à y troublés par la règle d’une fonction dont la , 2 et qui adians (et donc la longueur deindépendante serait y, on pourra changer y pour variable e« arcsin fois,» !) le entre –/2 et /2 bles de lat ou s, ou… Mais au fait, et pourquoi pas pour x? Belle mme cela aoccasion aleur de arcsin (0,5) c’est la de leur montrer que le nom des variables peut desont l’angle trop dont le sinus est 0,5, être choisi selon nos préférences ou encore, selon la n dont latradition! L’important est de comprendre ce que l’on fait Figure 5 : la branche principale de la fonction n pourra et de garder le contrôle.arcsinus au fait, et n de leur ussi décider d’inverser la epeut –3/2 etêtre –/2, pour ainsi fonction, appelons-la la e, s » selon la rendre ce (y), , y arcsin bisFigure 6 : une autre « branche » de la fonction arcsinus images dans 32 , 2 et ngle ayant y pour sinus, et radians est comprise entre 7. D es conventions en guise de conclusion La branche principale des fonctions trigonométriques réciproques est celle qui est considérée par défaut, quand rien n’est précisé. C’est aussi celle qui correspond à ce que calcule la calculatrice quand on utilise les touches des fonctions réciproques, qui sont généralement situées au « deuxième étage » des touches usuelles, auquel on accède en combinant ces touches usuelles avec la touche désignée par « shift » ou « 2nd » ou « inv », selon les calculatrices. Pour les fonctions sinus, cosinus et tangente, les branches principales sont universellement celles données cidessous. Nous les donnons ici en radians, à vous de faire les conversions pour avoir le domaine et l’image des branches principales des fonctions trigonométriques réciproques en degrés. arcsin : [–1, 1] → [-�/2, �/2] arccos : [–1, 1] → [0, �] arctan : = ]–∞, ∞[ → ]-�/2, �/2[ Certains s’étonneront de ne pas y voir les fonctions sécantes, cosécantes et cotangentes ainsi que leurs réciproques. C’est une prise de position voulue. En effet, elles sont tombées en désuétude presque partout dans le monde. Même les règles à calcul et les calculatrices s’en sont toujours affranchies. Les nostalgiques de la simplification des expressions pourront toujours les réintroduire… Références Corriveau, C. et Tanguay, D. (2007). Formalisme accru du secondaire au collégial : les cours d’Algèbre linéaire comme indicateurs. Bulletin AMQ, vol. 47, n°1, pp. 6-25. Tanguay, D. (2007). Degrés, radians, arcs et sinusoïdes. Envol, n°139, pp. 9-16. Warisse, M. (2010). Des maths avec un peu de physique. Envol, Première partie n°152, pp. 29-34, deuxième partie n°153, pp. 27-30. qué qu’encore une fois, le e nom des variables de la abituels. Mais comme cela a et les arcs de cercle, le lecteur pourra consulter lien entre les radians si certains élèves sont trop gle d'une fonction dont la ante serait y, on pourra ou s, ou… Mais au fait, et x ? Belle occasion de leur m des variables peut être éférences ou encore, selon la tant est de comprendre ce Figure 6 : une autre de la fonction arcsinus Figure 6 : une autre «« branche » branche » de la fonction arder le contrôle. arcsinus GRMS ENVOL no 162 — été-automne 2013 57