THÉRAPEUTIQUES Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 05/06/2017. Michel Gerson Centre hospitalier de Colmar [email protected] Brèves de pharmacovigilance La diacéréine reste sur le marché ! En décembre 2013, la Commission d’AMM de l’ANSM avait jugé le rapport bénéfice/risque de l’« antiarthrosique » diacéréine (Art 50®, Zondar® et génériques) défavorable ; nous avions conseillé de ne plus utiliser ce médicament [1]. Néanmoins, l’organisme de pharmacovigilance européen, le PRAC, a considéré que ce rapport bénéfice/risque demeurait favorable sous réserve d’une modification de l’information : le médicament est désormais déconseillé après 65 ans ; sa posologie initiale est réduite et la fonction hépatique doit être surveillée [2]. Une position étonnante... Rappelons que la diacéréine est associée à des cas fréquents de diarrhée, parfois sévères avec déshydratation et hypokaliémie, à des atteintes hépatiques cytolytiques et à des réactions cutanées graves. Mots clés : arthrose ; effets des médicaments et substances chimiques [Drug Effects; Osteoarthritis] Références : 1. Gerson M. Ne plus traiter par diacéréine : rapport bénéfice-risque défavorable. Médecine. 2013;9(10):442. 2. Art 50 mg, Zondar 50 mg et générique : nouvelles restrictions d’utilisation et recommandations spécialités contenant de la diacéréine – Lettre aux professionnels de santé. 8/12/2014. www.ansm.sante.fr de pharmacovigilance (MHRA) de 1998 à 2011 et s’est intéressée aux médicaments le plus souvent concernés par les notifications de dépression, de suicide et de tentative de suicide [1]. Pour la dépression arrivent en tête deux médicaments du sevrage tabagique, la varénicline et le bupropion, puis un antidépresseur la paroxétine et un traitement de l’acné, l’isotrétinoïne. Pour l’isotrétinoïne, le MHRA a publié une mise en garde invitant à informer les patients et leur famille de ce risque [2]. Pour les suicides et tentatives de suicide, arrivent en tête les antidépresseurs sérotoninergiques, la clozapine et la varénicline. Les auteurs ont calculé le taux de notifications d’effets indésirables psychiatriques rapportées au million de prescriptions ; arrivent en tête (après le rimonabant retiré du marché) l’isotrétinoïne puis la méfloquine, la varénicline et le bupropion. En raison des biais inhérents à la notification spontanée, ces taux ne reflètent pas nécessairement l’incidence réelle de ces effets indésirables. Aussi les auteurs insistent-ils sur l’importance d’un recueil rigoureux des évènements tels que la dépression, les suicides et tentatives de suicides au cours des essais thérapeutiques. Mots clés : dépression ; suicide [Depression; Suicide] Références : Statines et cataracte La responsabilité éventuelle des statines dans la survenue d’une cataracte est controversée en raison d’études aux résultats divergents. Une nouvelle étude cas-témoins portant sur deux cohortes vient d’être publiée [1] : une de Colombie-Britannique (Canada) (162 501 patients appariés à 650 004 témoins) et l’autre des États-Unis (45 065 patients appariés à 450 650 témoins). Dans ces cohortes, tous les patients opérés de cataracte ont été identifiés. Le risque d’intervention pour cataracte était plus élevé chez les utilisateurs de statine : RR 1,27 (1,24-1,30) pour la première cohorte et 1,07 (1,04-1,10) pour la seconde. Mots clés : cataracte ; inhibiteurs de l’hydroxyméthylglutaryl-CoA réductase [Cataract; Hydroxymethyl-glutaryl-CoA Reductase Inhibitors] Référence : DOI : 10.1684/med.2015.1192 1. Wise SJ, Nathoo NA, Etminan M, Mikelberg FS, Mancini GB. Statin use and risk for cataract: a nested case-control study of 2 populations in Canada and the United States. Can J Cardiol 2014;30:1613-9. Médicaments et risque de dépression ou de suicide Une équipe anglaise a analysé les notifications spontanées reçues au Royaume-Uni par le système officiel 58 MÉDECINE février 2015 1. Thomas KH, Martin RM, Potokar J, Pirmohamed M, Gunnell D. Reporting of drug induced depression and fatal and non-fatal suicidal behaviour in the UK from 1998 to 2011. BMC Pharmacology and Toxicology. 2014;15:54. 2. Isotretinoin (Roaccutane). Reminder of possible risk of psychiatric disorderswarn patients and family; monitor patients for signs of depression. Drug Safety Update volume 8 issue 5, December 2014: A2. Ambroxol, bromexhine et réactions allergiques sévères Le PRAC vient de publier ses conclusions sur le risque de réactions allergiques sévères lié à deux expectorants, l’ambroxol (Surbronc® et autres) et la bromhexine (Bisolvon®) [1]. L’EMA avait été saisie en avril 2014 par l’Agence belge du médicament qui avait reçu des notifications de réactions allergiques et d’atteintes cutanées sévères (érythème multiforme et syndrome de Stevens-Johnson) imputées à l’ambroxol ; l’ambroxol étant un métabolite important de la bromhexine, le PRAC avait décidé d’étendre la réévaluation à cette dernière. Le PRAC a conclu que le risque de réaction allergique sévère avec ces médicaments était faible. Rappelons que le service médical rendu par ces spécialités est jugé insuffisant par la Commission de la Transparence qui considère qu’elles n’ont pas de place établie dans la stratégie thérapeutique [2, 3]. Mots clés : anaphylaxie [Anaphylaxis] THÉRAPEUTIQUES Brèves de pharmacovigilance Références : 1. PRAC considers risk of severe allergic reactions with ambroxol- and bromhexine-containing medicines to be small. 12/01/2015. www.ema.europa. eu 2. HAS. Commission de la Transparence. BISOLVON 8 mg, comprimé. 22 juin 2005. www.has-sante.fr 3. HAS. Commission de la Transparence. SURBRONC. 25 mai 2005. www.has-sante.fr l’AMM, notamment le vitiligo, le lichen simplex chronique et la dermatite séborrhéique. Mots clés : tumeurs [Neoplasms] Référence : 1. Réunion du Comité technique de Pharmacovigilance. Séance du 8 juillet 2014. www.ansm.sante.fr Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 05/06/2017. Effets indésirables de l'amoxicilline et essais thérapeutiques Une équipe australienne s’est intéressée à la qualité de l’évaluation des effets indésirables de l’amoxicilline dans les essais thérapeutiques [1]. Les auteurs ont effectué une métaanalyse de 45 essais thérapeutiques randomisés amoxicilline (seul ou en association avec l’acide clavulanique) versus placebo. Seuls 25 essais fournissent des données pertinentes pour l’évaluation des effets indésirables ; des données sur la diarrhée sont disponibles pour seulement 10 des 28 essais avec l’amoxicilline seule. Seuls deux effets indésirables sont statistiquement plus fréquents avec l’amoxicilline qu’avec le placebo : la diarrhée (seulement en association avec l’acide clavulanique) et la candidose alors que des effets indésirables « classiques » de l’amoxicilline ne sont pas plus fréquents qu’avec le placebo : il en est ainsi avec les rashes, les nausées, les vomissements. De plus, comme le note l’éditorial qui accompagne cette étude [2], l’information sur les effets indésirables lorsqu’elle existe est souvent incomplète et de mauvaise qualité ; la surveillance, souvent insuffisamment prolongée, ne permet pas de détecter les effets indésirables tardifs. Au total, le risque est réel d’induire un faux sentiment de sécurité quand le recueil des effets indésirables est d’aussi mauvaise qualité. Mots clés : toxicité des médicaments [Drug Toxicity] Références : 1. Gillies M, Ranakusuma A, Hoffman T, et al. Common harms from amoxicillin: a systematic review and meta-analysis of randomized placebo-controlled trials for any indication. CMAJ. 2015;187:E21-E31. 2. Loke YK, Mattishent M. If nothing happens, is everything all right? Distinguishing genuine reassurance from a false sense of security. CMAJ. 2015;187:15-6. Tacrolimus et risque de cancer Le tacrolimus sous forme de pommade (Protopic®) a pour seule indication la dermatite atopique, essentiellement en cas de réponse inadéquate ou d’intolérance aux autres traitements. En 2012, l’ANSM avait attiré l’attention sur des cas de tumeurs malignes, incluant des lymphomes et des cancers cutanés rapportés chez des patients traités par le tacrolimus pommade. Une nouvelle enquête de pharmacovigilance menée de 2011 à 2013 a identifié 50 notifications de cas de cancer dont une majorité de cancers cutanés et de lymphomes [1]. Le rapporteur de cette enquête conclut qu’aucun nouvel élément ne permet d’écarter un risque de cancer associé au tacrolimus topique. Il souligne la persistance d’un mésusage dans des indications non conformes à Médicaments responsables d'HTA Les médicaments sont une cause sous-estimée d’HTA ou d’aggravation d’une HTA pré-existante [1]. Les médicaments d’utilisation courante impliqués sont les suivants : – les AINS ; l’élévation tensionnelle est dose-dépendante et le risque est plus élevé chez les patients âgés et les insuffisants rénaux. Les inhibiteurs calciques sont proposés comme traitement de première intention ; – les corticoïdes ; – les œstroprogestatifs ; – les décongestionnants nasaux : leur utilisation prolongée est déconseillée ; – un antidépresseur, la venlafaxine (Effexor® et génériques) : des cas de crise hypertensive ont été rapportés. Mots clés : hypertension artérielle [Hypertension] Référence : 1. Serveaux M, Burnier M, Pruijm M. Médicaments : une cause sous-estimée d’hypertension artérielle. Rev Med Suisse. 2014;10:1661-5. Atteintes hépatiques et pulmonaires dues à la nitrofurantoïne De nouvelles données de pharmacovigilance sur la nitrofurantoïne (Furadantine®) portent sur la période 2010-2014 [1] : surtout des atteintes hépatiques de type cytolytique et cholestatique (une seule atteinte chronique), des pneumopathies interstitielles et des fibroses pulmonaires ; ces effets indésirables sont rapportés surtout chez des femmes âgées de plus de 70 ans. Trois évolutions fatales ont été notées. Dans 80 % des observations, un mésusage est noté : prescriptions chez l’homme ; traitements itératifs ou intermittents ; durée de traitement supérieure à la durée recommandée (> 7 jours). Il a aussi été noté de nombreux cas de réintroduction positive après des expositions de courte durée ayant déjà entraîné une première réaction. Les nombreuses mises en garde de l’ANSM n’ont donc pas fait disparaître le mésusage. Mots clés : antibactériens ; infections urinaires [Antibacterials Agents; Urinary Tract Infections] Référence : 1. Réunion du Comité technique de Pharmacovigilance. Séance du 8 juillet 2014. www.ansm.sante.fr. MÉDECINE février 2015 59