Introduction à la sémantique
Contrôle continu Examen
29 mai 2012
— Toutes les réponses doivent être justifiées —
Les notes de cours ne sont pas autorisées
Exercice 1
I. Pour chacune des paires d’exemples suivantes, indiquez quelle relation lexicale lie les deux
unités lexicales soulignées.
1. (a) L’entrée au musée est gratuite.
(b) L’entrée à l’exposition est payante.
2. (a) Le sergent a dispersé ses hommes.
(b) Le sergent a rassemblé ses hommes.
3. (a) Ce carton est solide.
(b) Ce carton est fragile.
4. (a) 8 est le double de 4.
(b) 3 est la moitié de 6.
5. (a) On a aperçu un voilier à l’horizon.
(b) On a aperçu une voile à l’horizon.
6. (a) On a aperçu un voilier à l’horizon.
(b) On a aperçu un bateau à l’horizon.
7. (a) Céline connaît la réponse.
(b) Céline ignore la réponse.
8. (a) La sauce est sucrée.
(b) La sauce est salée.
II. Proposez deux converses de avoir peur (en justifiant votre réponse) 1.
Exercice 2
Expliquez la différence de jugements entre la phrase (1) et la phrase (2).
1. #Ce champignon est très mortel.
2. Ce champignon est très toxique.
Exercice 3
A quelles classes sémantiques appartiennent les verbes soulignés dans les exemples suivants :
1. Alice a compris le jeu de mot que je viens de faire.
2. Cet ensemble comprend cinq éléments.
3. Théo écoute la radio dans sa chambre.
4. Théo répare la radio dans sa chambre.
Exercice 4
Décrivez (en justifiant), sous forme de structure de traits, le sens des noms
lampe et feuilleton.
1. Bien sûr, ces deux converses peuvent être synonymes entre eux.
1
Corrigé
Exercice 1 I.
1. (a) L’entrée au musée est gratuite.
(b) L’entrée à l’exposition est payante.
Les adjectifs gratuit et payant sont des antonymes polaires (et même binaires). En
effet ils satisfont les tests logiques de la contradiction et de la complétude : les deux
phrases suivantes sont sémantiquement bizarres « # l’entrée est gratuite et payante »
(contradiction), « # l’entrée n’est ni gratuite ni payante » (complétude). De plus, on
constate aisément qu’ils sont la négation l’un de l’autre : « non gratuit » signifie « payant »
et réciproquement « non payant » signifie « gratuit ».
2. (a) Le sergent a dispersé ses hommes.
(b) Le sergent a rassemblé ses hommes.
Les verbes disperser et rassembler sont des inverses ou antonymes réversifs. En effet,
ils expriment des mouvements ou des évolutions qui vont dans des directions opposées :
disperser exprime une évolution qui va de « groupé » vers « non groupé » et rassem-
bler exprime une évolution qui va de « non groupé » vers « groupé ».
3. (a) Ce carton est solide.
(b) Ce carton est fragile.
solide/fragile sont en relation d’antonymie scalaire (ou encore ils sont contraires). En
effet on peut appliquer le test de la comparaison vu en cours :
Cette tasse est plus solide que ce verre
veut bien dire à peu près la même chose que :
Ce verre est plus fragile que cette tasse
4. (a) 8 est le double de 4.
(b) 3 est la moitié de 6.
Les noms double et moitié sont incompatibles (par exemple 4 ne peut pas être à la
fois le double et la moitié d’un même autre nombre), mais la relation lexicale précise qui
les relie est celle des converses. En effet si on inverse les arguments en changeant d’unité
lexicale, on obtient des phrases sémantiquement équivalentes : « 8 est le double de 4 »
signifie la même chose que « 4 est la moitié de 8 ».
5. (a) On a aperçu un voilier à l’horizon.
(b) On a aperçu une voile à l’horizon.
Voile est un méronyme de voilier (et donc voilier est un holonyme de voile) car
une voile est une partie d’un voilier. On peut en effet dire qu’un voilier (par définition)
possède une (ou plusieurs) voile(s) et qu’une voile est une des parties d’un voilier. On
peut également confirmer cela en constatant que l’on peut facilement avoir une relation
d’anaphore associative entre le groupe nominal défini la voile et l’indéfini un voilier, par
exemple dans la phrase « j’ai acheté un voilier d’occasion, mais la voile est très abîmée ».
6. (a) On a aperçu un voilier à l’horizon.
(b) On a aperçu un bateau à l’horizon.
Bateau est un hyperonyme de voilier (et donc voilier un hyponyme de bateau) car
on sait que la phrase « ceci est un voilier » implique nécessairement « ceci est un bateau »
(et également que la phrase « tous les voiliers sont des bateaux » est vraie).
7. (a) Céline connaît la réponse.
2
(b) Céline ignore la réponse.
connaître et ignorer sont des complémentaires, ou des antonymes polaires (ou bi-
naires). En effet on ne peut pas dire « Céline connaît et ignore la réponse » (incompatibles)
ni « Céline ne connaît pas et n’ignore pas la réponse » (complémentaires).
8. (a) La sauce est sucrée.
(b) La sauce est salée.
salé et sucré ne sont pas des antonymes, car ils ne sont pas incompatibles : un plat, par
exemple, peut être sucré et salé (on dit sucré-salé)2. Ils sont donc en relation de contraste,
car culturellement, au moins dans certaines cuisines, on a tendance à les opposer (le sucré
étant réservé au desserts, aux patisseries, confiseries etc...)
II. Pour trouver des converses de avoir peur il suffit de trouver un verbe ou une locution
verbale V tel que, par exemple, la phrase « Marie a peur de Max » a le même sens que la phrase
« Max V Marie » (ainsi on sera bien dans le cas avoir peur et V signifient la même chose
en inversant leurs arguments).
On peut donc proposer pour V la locution faire peur (à),effrayer,terrifier ou d’autres
synonymes plus ou moins intensifs (inquiéter,horrifier,épouvanter...). En effet « Marie
à peur de Max » dit bien la même chose que « Max fait peur à Marie » 3et que « Max effraie
Marie ». En revanche, des verbes comme craindre ou redouter ne sont pas des converses
de avoir peur (mais plutôt des synonymes), car « Marie a peur de Max » ne veut pas du tout
dire la même chose que « Max craint Marie » (il ne faut jamais oublier d’inverser les arguments
avec les converses).
Exercice 2 Ces exemples nous montrent que toxique est un adjectif gradable (ou scalaire)
puisqu’il peut être modifié par très (d’ailleurs on se doute bien qu’il existe une échelle de
toxicité : quelque chose peut-être plus ou moins toxique). Et c’est pour cette raison que la
phrase (2) est jugée comme acceptable. Au contraire ce n’est pas le cas de mortel, qui n’est
donc pas un adjectif gradable. Un champignon est mortel ou ne l’est pas, mais il ne peut pas
être plus ou moins mortel 4.
Exercice 3 Pour déterminer les classes sémantiques (aspectuelles) des verbes, on applique les
tests vus en cours.
1. Alice a compris le jeu de mot que je viens de faire.
On peut d’abord constater qu’ici comprendre n’est pas un verbe statif car il est com-
patible avec « être en train de » : « Alice est en train de comprendre le jeu de mot » est
acceptable 5.
Ensuite on constate que comprendre est un verbe télique car il est compatible avec en
et pas avec pendant, ce qui apparaît en comparant les deux phrases suivantes :
(a) Alice a compris le jeu de mot en 5 secondes.
2. En particulier, le ketchup est une sauce à la fois salée et sucrée.
3. NB : Quand on dit que Max fait peur à Marie, cela ne signifie pas nécessairement que Max fait quelque
chose de particulier pour lui faire peur ni même qu’il le fait exprès. Par exemple, si Marie est une enfant, Max
peut lui faire peur parce qu’il a une grosse voix, qu’il a de grandes mains, qu’il louche etc.
4. Bien sûr, ici mortel ne signifie pas « qui meurt un jour ou l’autre » (s’opposant en cela à immortel),
mais signifie « qui cause la mort ».
5. Bien sûr cette phrase laisse entendre qu’Alice est particulièrement lente dans sa réaction, ce qui peut
sembler inhabituel, mais la phrase n’est pas pour autant incorrecte; c’est par exemple une phrase qui pourrait
être prononcée par des psychologues, neurologues ou cogniticiens qui font expérience et sont en train d’observer
très attentivement les expressions ou les réactions cérébrales d’Alice.
3
(b) #Alice a compris le jeu de mot pendant 5 secondes.
Comprendre est donc soit un verbe d’accomplissement ou un verbe d’achèvement. Pour
trancher, on regarde si les phrases (c) et (d) disent la même chose :
(c) Alice à mis 5 secondes à comprendre le jeu de mot.
(d) Alice à mis 5 secondes avant comprendre le jeu de mot.
Elles transmettent la même information, cela démontre donc que dans (1) le verbe com-
prendre est un verbe d’achèvement.
2. Cet ensemble comprend cinq éléments.
Commençons par tester si comprendre est compatible avec « être en train de » :
(a) #Cet ensemble est en train de comprendre cinq éléments.
Ce n’est pas le cas, la phrase est très bizarre. On en conclut qu’ici comprendre est un
verbe d’état.
3. Théo écoute la radio dans sa chambre.
Écouter n’est pas un verbe d’état, car il est compatible avec « être en train de », la
phrase suivante est parfaitement acceptable :
(a) Théo est en train d’écouter la radio dans sa chambre.
Pour voir s’il est télique ou non, on compare ses emplois avec en et pendant (rappel :
pour que ce test fonctionne bien, il est préférable de conjuguer les phrases au pas
composé) :
(b) #Théo a écouté la radio dans sa chambre en 2 heures.
(c) Théo a écouté la radio dans sa chambre pendant 2 heures.
Le verbe est clairement compatible avec pendant et pas avec en, il est donc atélique et
appartient à la classe des verbes d’activité.
4. Théo répare la radio dans sa chambre.
Réparer n’est pas un verbe statif car il est compatible avec « être en train de » :
(a) Théo est en train de réparer la radio dans sa chambre.
C’est un verbe télique car il s’emploie plus naturellement avec en qu’avec pendant (de
plus (c) sous-entend que la réparation n’est pas terminée) :
(b) Théo a réparé la radio en 5 minutes.
(c) #Théo a réparé la radio pendant 5 minutes.
Comparons maintenant (d) et (e) :
(d) Théo a mis 5 minutes à réparer la radio.
(e) Théo a mis 5 minutes avant réparer la radio.
Les deux phrases ne disent pas la même chose : dans (d), 5 minutes mesure le temps de
la réparation proprement dit, alors que dans (e) cela renvoi à une durée qui précède le
début de la réparation. On en conclut que réparer est un verbe d’accomplissement.
4
Exercice 4
lampe :
lampe(x)
form =objet(x), physique(x)
fonct =éclairer(x,y)
orig =fabriquer(z,x)
Justifications. Le trait form est renseigné par objet(x) car lampe est un nom comptable :
on dit naturellement « une lampe » et très difficilement « de la lampe ». Il n’est pas vraiment
nécessaire de renseigner le trait const car une lampe peut avoir divers aspects (et elles ne sont
pas toutes électriques, elles n’ont forcément une ampoule, cf. celle d’Aladin). Le trait fonct est
le plus important, sa valeur est éclairer(x,y), car une bonne lampe est une lampe qui éclaire
bien. Enfin, le trait orig indique que les lampes ne sont pas des objets naturels mais artificiels,
et on peut le vérifier en constatant que, sans autre information, « commencer une lampe » se
comprendra, au mieux, comme « commencer à la fabriquer ».
feuilleton :
feuilleton(x)
form =objet(x)
const =épisode(z),histoire(w), ...
fonct =regarder(y,x) ou lire(y,x)
orig =réaliser(z,x) ou filmer(z,x) ou écrire(z,x)
Justifications. Comme précédemment, feuilleton a pour trait form objet(x), car on dit « un
feuilleton » plutôt que « du feuilleton ». Le trait const est important car il permet, entre autres,
de distinguer un feuilleton d’un film ou d’un roman : le propre d’un feuilleton est d’être composé
d’épisodes. On peut également y ajouter d’autres méronymes, comme histoire,titre, etc. que
l’on peut retrouver dans des relations d’anaphores associatives (ex : « j’ai regardé un feuilleton,
je n’ai rien compris à l’histoire »). Le trait fonct est regarder(y,x) ou lire(y,x) (selon qu’il
s’agit d’un feuilleton filmé ou écrit), car une manière de comprendre, par défaut, « commencer
un feuilleton » est « commencer à le regarder ou à le lire ». De même le trait orig indique que
« commencer un feuilleton » peut aussi se comprendre en « commencer à le réaliser ou l’écrire ».
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