CRCG M. Flammarion E. Joseph
Préface
Lorsque M. et É. m’ont demandé si j’étais en mesure de rédiger la préface de leur
grange aux mathématiques, je me suis empressé d’accepter. Non seulement, j’étais
follement amusé par l’idée même d’accomplir cela, mais en plus, j’avais vu grandir
et suivi chaque étape de la croissance de leur travail et bien que j’ose me targuer
d’avoir participé à l’éclaircissement de certains de ses passages, je dois avouer que
le fait d’apporter une pierre véritable à ce bel édifice me hantait plus que de raison.
Je ne suis pas un grand arithméticien. Bien sûr, j’ai appris lorsque j’avais deux ans
que deux et deux font quatre - effort intellectuel plutôt impressionnant, me sens-je
obligé d’ajouter : comment ai-je réussi à appréhender de manière si complète un
nombre deux fois plus grand que moi en matière d’existence, je ne peux toujours pas
l’expliquer aujourd’hui - mais un grand et long vide a suivi cela et c’est seulement
à vingt-deux ans et pratiquement six mois que j’ai découvert l’existence de la borne
dite de Minkowski. J’ai donc peiné à essayer de lire et surtout de comprendre l’en-
semble des raisonnements à venir qui constituent l’essentiel de ce mémoire. Je pense
pourtant, après avoir redoublé d’efforts incommensurables, avoir atteint à ce jour le
stade d’une compréhension globale guère trop erronée des phénomènes sous-jacents
au sujet présenté dans ces pages. Pour résumer brièvement, afin de satisfaire les
étudiants impatients et sans aucun sens du suspense qui souhaiteraient afin d’obte-
nir une bonne note à leur prochain devoir-maison connaître immédiatement la fin
de l’histoire, disons que si vous dessinez quatre carrés identiques sur une feuille de
papier de telle sorte que chacun d’entre eux ait un coin qui touche un coin de cha-
cun des trois autres, vous obtenez, en gommant toutes les lignes internes à la figure
obtenue, un carre ? plus grand, d’aire égale à quatre fois celle des carrés de départ
et de périmètre doublé par rapport aux mêmes. Me sentant d’âme plus géomètre
qu’arithméticienne - c’est d’ailleurs plus facile à prononcer - j’ai préféré aborder l’en-
semble du sujet avec cette approche, plus visuelle que celle suggérée par ses auteurs,
qui utilise le concept de forme modulaire.
Il ne faut pas voir dans le paragraphe précédent une critique, quelle qu’elle soit,
de la méthode utilisée par M. et É pour parvenir à leurs fins. Il est bien évident
que la diversité des points de vue est un atout majeur qu’il ne faut sous aucun pré-
texte négliger en mathématiques, afin d’obtenir un rendement maximal dans leur
développement. Parvenir à raccrocher ensemble des pans des mathématiques qui pa-
raissaient jusqu’alors ne rien avoir en commun, c’est bien souvent donner naissance
à toute une théorie riche et fructueuse et parfois même, résoudre des problèmes res-
tés sans solution. Je m’emballe peut-être un peu vite, mais je sais pourquoi je dis
cela. Il me semble que les travaux contenus dans les pages suivantes vont me mener
bien rapidement à une démonstration de l’hypothèse de Riemann d’une simplicité
surprenante. Il suffisait de tracer le bon pont, de relier les points d’amarrage exacts.
Il n’est pas plus grand que les autres, ce n’est pas une merveille de technologie, mais
il passe au-dessus de flots tumultueux et les deux berges réunies sont différentes à
un point rare : cet édifice fait preuve d’audace et d’imagination et c’est là toute
la force de son caractère. Faire des mathématiques, c’est exactement cela : joindre
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