La Lettre du Cardiologue - n° 308 - mars 1999
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cialisés de médecine du sport (détente verticale, charge-vitesse,
test de Wingate...).
L’évaluation de la puissance maximale théorique du sportif avant
le test va aider à programmer le protocole du test. Celle-ci peut
être appréciée à partir du niveau d’entraînement et de l’âge. Chez
le sportif, le cardiologue va être confronté à des valeurs large-
ment supérieures à celles qu’il utilise chez le sédentaire.
La durée du test dépend des renseignements que l’on en attend.
Ainsi, de façon schématique, plus le test comprend de paliers,
plus fine est la détection des “seuils” métaboliques, mais plus la
VO2max risque d’être sous-estimée (à cause de l’accumulation de
fatigue). Dans tous les cas, le test ne doit pas être trop long (10 à
25 minutes). Il doit durer d’autant plus longtemps que les spor-
tifs sont âgés et endurants. L’effort initial ne doit pas être trop
brutal, pour ne pas solliciter trop les systèmes anaérobies, ni trop
faible pour les sportifs très endurants, d’où l’intérêt d’un échauf-
fement. Au-delà de 70 % de la charge maximale, les incréments
de charge devraient théoriquement être plus progressifs pour une
meilleure détermination des “seuils” aérobie et anaérobie.
Sur ergocycle, des seuils de 50 watts toutes les deux à
trois minutes sont souvent utilisés pour les sportifs de haut niveau
(performance supérieure à 350 watts).
Sur tapis roulant, le protocole de Bruce est généralement le plus
utilisé pour les sportifs amateurs (les mesures de VO2sont cepen-
dant imprécises au quatrième palier selon qu’il est couru ou mar-
ché). Cependant, la brutalité des changements de pente et de
vitesse entre les troisième, quatrième et cinquième paliers ren-
dent la détermination du seuil ventilatoire souvent difficile pour
les athlètes de très haut niveau ; il est préférable d’augmenter plu-
tôt la vitesse que la pente en fin d’effort (risque de lésion tendi-
neuse). En fait, dans un souci de mieux reproduire les conditions
de terrain, il est logique, sur tapis roulant, de ne jouer que sur la
vitesse en programmant une faible pente constante (1 à 2 %) simu-
lant la résistance à l’air. Une dualité existe entre le souci d’uni-
formiser les protocoles et la nécessité de les adapter aux sportifs
testés (niveau amateur, national ou international).
En dehors des causes d’arrêt prématuré, le test est terminé quand
le sportif atteint l’épuisement (et que la fréquence cardiaque
atteinte rejoint ou dépasse la classique mais imparfaite formule
220 – âge).
En récupération, deux à trois minutes de marche ou de pédalage
supplémentaires au premier palier d’effort permettent d’éviter les
malaises vagaux post-exercice et d’enregistrer d’éventuelles ano-
malies électrocardiographiques ne survenant qu’en récupération.
ÉPREUVE D’EFFORT À VISÉE CARDIOLOGIQUE CHEZ LE
SPORTIF
Elle est toujours indiquée chez un sujet symptomatique et doit
être réalisée au moindre doute sur des données cliniques et/ou
électriques. Elle permet souvent, mais pas toujours, de lever des
doutes sur des particularités ECG du cœur du sportif. La mesure
directe concomitante de la VO2empêche le dialogue avec le sujet,
altère quelque peu la performance et n’est donc pas toujours
recommandée dans le cadre du dépistage d’une anomalie car-
diovasculaire.
Les systèmes à électrode non jetable par aspiration ont leurs par-
tisans, pour des raisons économiques et pratiques, pour les tests
sur ergocycle ; les réactions sudorales importantes des sportifs
réalisant des performances élevées exigent des électrodes de qua-
lité et un rasage pas toujours bien accepté ! Il existe maintenant
de nombreux enregistreurs d’excellente qualité permettant l’ac-
quisition en temps réel et par moyennage des tracés durant l’ef-
fort, en limitant les artéfacts dus à la respiration et la dégradation
des tracés liée à la transpiration ; l’interprétation automatique
informatisée (point J, amplitude de l’onde R, pente et sous-déca-
lage du segment ST) en facilite l’interprétation. Un repérage
constant des points de mesures (ligne de base de référence avant
le QRS, point J à la fin du QRS et mesure de ST à 0,06 plutôt que
0,08 seconde après J) au cours de l’épreuve et leur correction pos-
sible au cours du test sont souhaitables (fréquence des faux posi-
tifs liés à un PQ descendant et une déviation à gauche du repé-
rage de la ligne de base). Outre les modifications du segment JT,
les paramètres rythmiques et tensionnels classiques sont réguliè-
rement surveillés lors du test.
Une bradycardie d’effort excessive peut témoigner d’une prise
médicamenteuse (bêtabloquants), plus rarement d’une maladie
du sinus ou d’une forme particulière de coronaropathie droite
(mais elle est alors rarement silencieuse sur l’électrocardio-
gramme ou la clinique par ailleurs). Les sujets plus jeunes et plus
émotifs ont souvent une fréquence cardiaque avant l’effort plus
élevée mais qu’ils compensent par une moindre augmentation de
celle-ci au cours de l’effort dans les premiers paliers, à l’inverse
des sujets déconditionnés ou souffrant d’asthénie neurocircula-
toire. Il existe une relation linéaire entre la consommation maxi-
male d’oxygène et la fréquence cardiaque au cours de l’effort
(sauf dans ses parties initiales et surtout terminales). La fréquence
cardiaque maximale atteinte à l’effort diminue avec l’âge mais
les coefficients de corrélation entre l’âge et la fréquence cardiaque
maximale sont médiocres. La valeur maximale théorique de
220 – âge ou 210 – (0,65 x âge) est très grossière. Certains spor-
tifs atteignent des fréquences sinusales (morphologie des ondes
P similaires tout au long du test) supérieures à 210 bpm ; à l’in-
verse, certains sportifs – tout au moins en laboratoire – ne peu-
vent dépasser une fréquence cardiaque de 175 bpm malgré un
plateau de la VO2atteint en fin d’effort. Le (relatif) changement
de pente, décrit par Conconi et coll. (3),de la fréquence cardiaque
dans les dernières minutes du test d’effort (relations FC – VO2et
FC-lactatémies) a été utilisé comme témoin du “seuil anaérobie” ;
cette méthode est cependant contestée (voir p. 22).
La montée tensionnelle systolique à l’effort est fonction du débit,
qui augmente, et des résistances périphériques, qui diminuent glo-
balement (vasodilatation des territoires musculaires en activité,
contrastant avec la vasoconstriction des autres territoires par acti-
vation sympathique). Une montée inadéquate ou une chute ten-
sionnelle en fin d’effort témoignent d’un obstacle éjectionnel ou
d’un défaut de la contractilité myocardique primitive ou plus sou-
vent ischémique. À l’inverse, des HTA uniquement d’effort peu-
vent se démasquer, portant le plus souvent sur la minima en cas
d’excès pondéral. Chez le sujet sain au système artériel très com-
pliant, il est fréquent de ne pouvoir fixer correctement la tension
artérielle diastolique (bruits perçus jusqu’au zéro). Des abaques
de normalité ont été décrits selon l’âge et le sexe (4).
ÉPREUVE D’EFFORT
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Chapitre II - F. Carré 1/04/03 15:55 Page 16