Les corbeaux, leur bête noire

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LE JOURNAL DE SAÔNE-ET-LOIRE
CHASSE / MON DIMANCHE
Dimanche 7
février 2016
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RÉGULATION. Les initiatives pour s’en débarrasser se multiplient.
Les corbeaux, leur bête noire
SOCIABLE
En hiver, leur plus grand
nombre, leur errance à la re­
cherche de nourriture rend
les évolutions des corbeaux
plus spectaculaires, parfois
impressionnantes.
L’
ombre des corbeaux plane sur la Saône-et-Loire,
la Côte-d’Or et l’Ain. Les
agriculteursnesontpaslesseulsà
seplaindre.Lesriverainsdesdortoirs à corbeaux, à proximité de
parcs en pleine ville, sont exaspérés par les nuisances subies. Chacun, à sa manière, rivalise d’idées
pour les faire fuir ou pour protéger les cultures. Mais ils sont toujours là et bien là. La dernière initiative pour faire la chasse aux
corbeaux est à mettre au crédit
du sous-préfet de Louhans,
Georges Bos. Les piégeurs et les
chasseurs toucheront une prime
de 50 centimes par corbeau prélevé, afin de diminuer le nombre
d’attaques sur les élevages de volailledeBresse.Cettemesure-qui
nefaitpasl’unanimité,serafinancée à hauteur de 3 000 €. Le financementseraeffectuépourun
tierschacunparlaFédérationdépartementale des chasseurs, la
Chambre d’agriculture et la Coopérative agricole.
Unkitderégulation
Dans un autre registre, la Fédération des chasseurs de Côte
d’Or (FDC21) met à la disposition de ses adhérents des kits
pour réguler les corbeaux freux
et corneilles noires, espèces classées nuisibles, grands prédateurs
Dès qu'un agriculteur laboure, dans la terre fraîchement remuée... c’est la ruée. Photo FDC21
pour la petite faune. Pour 100 €,
unprésidentdesociétédechasse
peut espérer, avec un filet de camouflage, un appeau et trois formes noires et mouvantes, faire
approcher des corvidés suffisamment près pour les tirer. En
fait, deux modalités existent
pour réduire le nombre des espèces nuisibles : le piégeage effec-
tué par un piégeur agréé et les
opérations de tir réalisées par les
louvetiers et/ou les chasseurs.
Ces modalités seront amenées à
se multiplier car aux dires des
spécialistes, « les corbeaux qui
ne sont pas une espèce sur le déclin à la différence d’autres, possèdent les meilleures chances de
pouvoir s’adapter à un environ-
nement en mutation. » Tout le
monde est conscient qu’il faut
« s’unirpourluttercontrelescorbeaux. » Les spécialistes font valoir que « les corbeaux ont des
comportements considérés
comme des vertus par les hommes :fidélité,courage,prudence,
intelligenceetsociabilité. »
JEAN­PIERRE TISSIER
L’autorisation de régulation
La régulation est autorisée :
£ Entre la date de clôture gé­
nérale de la chasse et le 31 mars inclus (sans deman­
de particulière).
£ Du 1er avril jusqu’au 10 juin,
si aucune autre solution satis­
faisante n’est possible (sur autorisation individuelle du préfet).
£ Du 11 juin au 31 juillet, si aucune autre solution satisfai­
sante n’est possible et exclu­
sivement pour prévenir des dommages importants aux activités agricoles (sur autori­
sation individuelle du préfet).
£ Le tir du corbeau freux peut s’effectuer dans l’en­
ceinte de la corbeautière ou à
poste fixe matérialisé de main
d’homme en dehors de la corbeautière. Le tir dans les nids est interdit.
« Le corbeau freux mesure de 40 à 47 cm avec une envergure de 77 à 90 cm et pèse de 380 à 520 g », indiquent les spécialistes.
« Sa longévité est de 20 ans. Son plumage est uniforme de couleur noire avec un éclat légèrement violet­bleuâtre. En outre, la crête et la nuque offrent des
reflets verts ou violet métallique et ce selon l’éclairage. De plus, la base
du bec du freux adulte est dénudée, légèrement creusée et blanchâtre.
Son bec pointu, légèrement
recourbé vers le bas est plus fin que celui de la corneille.
Le corbeau freux est un animal très sociable, il vit en
colonie bruyante en haut de
grands arbres. Il vit en colonie qui représente le centre de la vie sociale. Même pendant la période de nidification, les corbeaux
nichent dans la colonie où les nids sont bâtis les uns à
côté des autres.
De plus, il se nourrit facilement à l’aide du bec dénudé qui lui permet de fouiller le sol à la recherche de la nourriture. Il vit généralement en campagne, mais il peut vivre également en villes où
il visite le plus souvent les jardins. »
COMME LES HUMAINS, LES CORBEAUX PEUVENT IMAGINER QU’ILS SONT OBSERVÉS
Dans une série d’expériences, des chercheurs ont
montré que ces oiseaux connus pour leur intelligence
prennent un soin particulier à cacher leur nourriture
s’ils soupçonnent que leurs mouvements sont épiés
par un autre corbeau, même si ce dernier n’est pas présent. Leurs conclusions, parues dans la revue Nature
Communications, suggèrent que les corbeaux - sans
recourir à une observation directe - sont capables de
comprendre ce qui peut se passer dans la tête d’un
autre individu. « Cela montre que des caractéristiques
que nous considérons comme + uniquement humaines + peuvent exister aussi chez les animaux », explique l’un des auteurs de l’étude, Thomas Bugnyar, professeur à l’Université de Vienne et spécialiste de la
cognition sociale chez les animaux.
Dix corbeaux élevés en captivité
Les chercheurs ont étudié dix corbeaux élevés en captivité durant une période de six mois. Les expériences
se sont déroulées dans deux salles adjacentes reliées
par des fenêtres susceptibles d’êtres occultées par des
panneaux en bois. Deux trous pouvant être ouverts ou
avec les fenêtres et les judas fermés, empêchant ainsi
les oiseaux de se voir. Puis ils ont réalisé le test avec les
vitres couvertes mais un judas ouvert, de manière à ce
que l’oiseau cachant sa nourriture puisse être observé
par un autre qu’il ne voit pas. Les chercheurs ont alors
diffusé un enregistrement de cris de corbeau alors
qu’un corbeau était en train de stocker sa nourriture.
Des généralisations basées sur leur expérience
Photo DR
fermés ont été percés dans les panneaux.
On a appris aux corbeaux qu’ils pouvaient regarder et
être vus à travers ces trous. Les chercheurs ont donné à
un oiseau de la nourriture à cacher - un comportement
typique des corbeaux -, tandis qu’un autre le regardait
à travers la vitre. Ils ont répété l’expérience, chaque
oiseau observant ou cachant la nourriture, cette fois
Le corbeau a mis un soin particulier à cacher sa nourriture uniquement quand le judas était ouvert. S’il restait
fermé, même si les cris de corbeaux étaient audibles, il
considérait d’une certaine manière qu’il ne pouvait
pas être épié.
Ces observations « suggèrent fortement que les corbeaux font des généralisations basées sur leur expérience et ne se contentent pas d’interpréter et de réagir
à des signes donnés par d’autres oiseaux », a souligné
M. Bugnyar. Les chercheurs ont établi que l’oiseau cachant sa nourriture pensait être observé quand il s’est
dépêché de la cacher ou quand plus tard, une fois le
danger passé, il s’est mis à améliorer sa cachette.
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