Prévision externe d`activité : le PMSI un outil stratégique dans le

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DOSSIER T2A
La vocation du PMSI (Programme de médicalisation des
systèmes d'information) est de fournir des informations
quantifiées et standardisées en vue «
d’améliorer la
connaissance et l’évaluation de l’activité et des coûts
et de favoriser l’optimisation de l’offre de soins
». Sa
mise en place répond à une obligation réglementaire,
à la suite de la loi du 31 juillet 1991 portant réforme
hospitalière (Loi n° 91-748 Art. L. 710-5 du Code de
la Santé publique). La tarification à l’activité (TAA ou
T2A) répond à une logique budgétaire qui nécessite
que les établissements adaptent leur réflexion straté-
gique en analysant son activité et en se positionnant
dans son environnement.
L’ANALYSE DACTIVITÉ :
NÉCESSAIREMENT DYNAMIQUE ET
PROSPECTIVE
Dans le cadre de l’EPRD, les établissements doivent
évaluer leurs recettes prévisionnelles. Dans chacune
des disciplines développées par un établissement de
santé, l’activité liée aux séjours hospitaliers est soumise
à de multiples facteurs expliquant son évolutivité :
taille et démographie de la population de la zone
concernée, évolution des comportements de consom-
mation hospitalière dans cette zone (part de marché
de l’établissement, offre proposée), modifications des
pratiques de prise en charge (hospitalisation clas-
sique ou ambulatoire, soins externes). C’est dire l’im-
portance d’une analyse de l’activité dynamique, pro-
spective et comparative, ce qui implique de disposer
d’outils valides et de référentiels fiables.
QUEST CE QUE LA
«PERFORMANCE »ÀLHÔPITAL ?
Outre une meilleure allocation des ressources entre les
établissements, l’un des objectifs de la T2A est de ren-
dre les hôpitaux « performants ».
La performance à l’hôpital consiste à répondre aux besoins
de santé en assurant la qualité des soins dans un souci d’ef-
ficience économique et organisationnelle. Dans cet objec-
tif de performance, les établissements ont, en théorie, à leur
disposition deux axes stratégiques : d’une part, la maximi-
sation des ressources et, d’autre part, la minimisation des
coûts. En réalité, le premier axe se heurte en pratique à une
très faible marge de manœuvre car les tarifs des groupes
homogènes de séjour (GHS) sont fixés et l’adaptation de la
gamme d’activités est limitée : un établissement ne peut pas
arrêter une activité de son propre chef et l’augmentation d’ac-
tivité passe uniquement par une augmentation de la part de
marché de l’établissement. La minimisation des coûts offre,
en revanche, des leviers plus importants : réduction du coût
des facteurs de production (bien que les hôpitaux publics
n’aient que peu de prise sur la masse salariale) et, surtout,
optimisation des procédures, de l’organisation interne et du
degré d’utilisation de ces facteurs de production (affecta-
tion des personnels paramédicaux au niveau de plu-
sieurs services, mise en commun de matériel, etc.).
UTILISATION DU PMSI DANS LE
CADRE DE LA T2A
Dans ce contexte, le PSMI offre aux établissements des
informations permettant de connaître leur propre activité
ontrairement à la dotation globale, le point de départ du calcul de la T2A est l’activité, avec
ses conséquences en termes de recettes et de dépenses. Dans cette logique, les budgets
des hôpitaux sont désormais liés au niveau de leur activité, activité qui génère les recet-
tes. Ainsi, toute dépense est autorisée dès lors qu’elle ne remet pas en cause les équilibres fon-
damentaux de l’évaluation prévisionnelle des recettes et des dépenses (EPRD).
C
Prévision externe d’activité :
le PMSI un outil stratégique dans
le cadre de la T2A
d’après la communication de Catherine DUPILET, consultante en stratégie au Centre national
de l'expertise hospitalière (CNEH), lors du 8eséminaire du SNPHAR – octobre 2005.
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(ce qu’ils font, mais aussi ce qu’ils ne font pas), de se posi-
tionner dans leur environnement (concurrence, partena-
riats éventuels, parts de marché à récupérer) et d’envi-
sager des scénarios sur l’évolution de l’activité. Les
indicateurs issus du PMSI peuvent également révéler de
possibles problèmes d’organisation.
EXEMPLE DES DURÉES DE SÉJOUR
Le calcul de la durée moyenne de séjour permet à
l’établissement de se situer par rapport aux moyennes
nationales, mais aussi de repérer les unités médicales
(UM) ou les groupes homogènes de malades (GHM)
dont les durées de séjour paraissent trop importantes,
mettant ainsi en évidence les files d’attente vers les
structures d’aval. Dans la pratique, cette analyse peut
être un bon point de départ pour favoriser la mise en
place de leviers d’action dans le but d’améliorer la ges-
tion du parcours du patient au sein de l’établissement.
ADÉQUATION ENTRE STRUCTURES ET MALADES
Outre le souci de qualité des soins, l’adéquation entre
structures et malades est importante dans le cadre de
la T2A.
En 2004, les tarifs publics fixaient les suppléments
journaliers en services de soins à :
833 pour la réanimation, dès lors que le patient est
admis dans une UM de réanimation, que le résumé
d’unité médicale inclut au moins un acte de réanima-
tion et que l’index de gravité simplifié est supérieur ou
égal à 15 ;
417 pour les soins intensifs, dès lors que le patient
est admis dans une UM de réanimation sans remplir
les autres conditions cités ci-dessus, ou qu’il est admis
dans une UM de soins intensifs ;
278 pour la surveillance continue, dès lors que le
patient est admis dans une UM de surveillance continue.
Prenons l’exemple d’un établissement X disposant de
10 lits de réanimation autorisés et de 6 lits de sur-
veillance continue, autorisés mais non installés. Le ser-
vice de réanimation réalise 3 072 jours d’hospitalisation ;
cependant, seules 60 % de ces journées sont le fait de
patients relevant de réanimation, 40 % correspondant
à des malades relevant d’une surveillance continue.
De plus, des patients relevant de réanimation doivent
être refusés faute de place. Afin de comparer les hypo-
thèses, les recettes totales de la réanimation de cet
établissement dans son organisation actuelle peuvent
être estimées à :
1,4 million de forfaits des GHS (patients dont le séjour
a comporté au moins deux jours en réanimation)
+ 1,5 million (833 x 3 072 x 0,6) de suppléments réani-
mation
+ 0,5 million (417 x 3 072 x 0,4) de suppléments soins
intensifs
= 3,4 millions d’euros.
Si les 6 lits de surveillance continue autorisés étaient
installés, le service de réanimation pourrait alors, d’une
part, prendre en charge une plus grande proportion de
séjours relevant réellement de la réanimation (par exem-
ple, 80 %) et, d’autre part, assurer l’admission de séjours
supplémentaires. Dans cette hypothèse, les recettes
totales de la réanimation deviendraient :
1,9 million (1,4 + 0,5) de forfaits des GHS
+ 2 millions (833 x 3 072 x 0,8) de suppléments réani-
mation
+ 0,3 million (417 x 3 072 x 0,2) de suppléments soins
intensifs
+ 0,5 million (278 x 1 861) de suppléments surveillance
continue
= 4,7 millions d’euros.
La différence entre ces deux résultats d’estimation de
recettes est, bien sûr, à comparer au coût de la mise en
place des lits de surveillance continue.
INTÉRÊT DES DONNÉES DESCRIPTIVES
L’ÉVENTAIL DES CAS TRAITÉS
Le recueil de ces données est assez simple puisqu’il
consiste à recueillir, par ordre de fréquence dans
l’établissement ou le service considéré, les différents
GHM, diagnostics et actes. Le niveau de spécialisation
de l’établissement peut ainsi être approché : il est
d’autant plus élevé que le nombre de GHM est faible.
Peuvent aussi être identifiées des activités non réalisées
dans l’établissement et qui pourraient être dévelop-
pées.
LES FLUX DE PATIENTS DANS LÉTABLISSEMENT
Un certain nombre de données chiffrées permettent de
décrire ce flux :
entrées en provenance du domicile (programmées
ou en urgence) ;
séjours originaires d’un autre établissement de santé
(courts, moyens ou longs séjours, psychiatrie) ;
sorties vers le domicile ;
séjours transférés vers un autre établissement de
santé (courts, moyens ou longs séjours, psychiatrie) ;
transferts entre UM.
DOSSIER T2A
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DOSSIER T2A
À partir de ces données, l’analyse de la filière de soins peut
porter sur les structures d’aval, les flux entre les différen-
tes unités de l’établissement et la part des hospitalisations
non programmées.
COMMENT SITUER UN ÉTABLISSEMENT
DANS SON ENVIRONNEMENT ?
La réponse à cette question passe en premier lieu par la
constitution d’une échelle géographique opérationnelle.
Les établissements peuvent définir leur zone d’influence
à partir du PMSI, qu’il s’agisse de leur zone de recrutement
ou de leur bassin de santé hospitalier.
LA ZONE DE RECRUTEMENT
Bien préciser les zones de recrutement (en renseignant
la provenance des patients) permet aux établissements de
connaître le poids des communes dans leur activité. Il faut
cependant souligner que les zones de recrutement ne
prennent pas en compte la taille des communes ; ainsi, un
établissement proche d’une grosse agglomération peut
compter celle-ci dans sa zone de recrutement, alors que
les patients en provenance de cette agglomération ne
sont, en fait, que marginalement admis dans l’établissement.
LE BASSIN DE SANTÉ HOSPITALIER
Construit directement à partir des flux domicile-hôpital
recensés par le PMSI, le bassin de santé hospitalier d’un
établissement est constitué de l’ensemble des cantons,
communes ou codes postaux dans lesquels les patients
s’orientent majoritairement vers ce pôle hospitalier.
Au contraire de la zone de recrutement, la notion de
bassin de santé hospitalier met le patient au cœur du
dispositif puisqu’on part de son lieu de résidence et de
l’endroit où il va se faire soigner, avec donc une
analyse des flux réels domicile-hôpital.
Plusieurs niveaux de construction des bassins de santé
hospitaliers peuvent être envisagés concernant la tota-
lité de l’activité de l’établissement, les spécialités, les dis-
ciplines, les GHM ou les groupes de GHM (
figure 1
).
LES PARTS DE MARCHÉ
Une fois la zone d’influence définie, l’établissement peut
calculer ses parts de marché : nombre d’hospitalisés de
la zone d’influence pris en charge par l’établissement
X/nombre total d’hospitalisés de la zone d’influence.
Outre permettre le calcul de sa part de marché, le
PMSI renseigne l’établissement sur les fuites, tant par
nature - selon les GHM -, que par destination (vers les
autres établissements) (
tableaux 1 et 2
).
DÉVELOPPEMENT OU ABANDON DACTIVITÉ
La décision de développer ou, au contraire, d’abandon-
ner une activité ne doit pas reposer sur la seule notion de
rentabilité. Elle doit prendre en compte le potentiel de l’ac-
tivité considérée, en se basant sur la différence entre le
nombre total de séjours de la zone d’influence et le nom-
bre de séjours pris en charge par l’établissement (fuites
récupérables). De plus, aucune activité ne peut être consi-
dérée isolément, toute cessation ayant des répercus-
sions sur l’ensemble de l’établissement. Un arrêt d’acti-
vité est soumis à l’accord de l’Agence régionale de
l’hospitalisation.
ÉVALUATION PROSPECTIVE ET
PRÉVISION DACTIVITÉ
Le PMSI permet à l’établissement de connaître son acti-
vité à un moment donné et de situer cette activité dans son
environnement, mais aussi de se projeter dans l’avenir.
LES PROJECTIONS DÉMOGRAPHIQUES DE LOUTIL
OMPHALE
L’Institut national de la statistique et des études écono-
miques (INSEE) a développé l’outil OMPHALE (Outil
méthodologique de projections d’habitants, d’actifs, de
logements et d’élèves) qui fournit des projections de
population à l’horizon 2030, par sexe et par tranches
d’âge de 5 ans. Plusieurs scénarios existent, parmi ceux-
ci, le scénario central (« U ») est basé sur les observations
Tableau 1. Part de marché d’un établissement X en orthopédie.
Établissements Nombre de séjours Parts de marché
CH 794 54,5 %
CHU 125 8,6 %
Établissement A 67 4,6 %
Établissement X 61 4,2 %
Autres 410 28,1 %
Total orthopédie 1 457 100 %
Tableau 2. Exemple de potentiel d’activité par GHM.
Exemple : GHM 830 (endoscopies sous anesthésie, en ambulatoire).
Établissements Nombre de séjours Parts de marché
CH 371 69,1 %
CHU 83 15,5 %
Établissement A 16 3,0 %
Établissement X 12 2,2 %
Autres 55 10,2 %
Total bassin 537 100 %
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DOSSIER T2A
de la période 1990-1999 : hypothèses d’une fécondité
constante (maintien de l’indicateur conjoncturel de fécon-
dité de 1999), d’une baisse tendancielle de la mortalité et
d’un solde migratoire entre les différentes régions cons-
tants par rapport à la période de référence.
Les hypothèses de ce modèle –qui supposent que les ten-
dances observées sur la période 1990-1999 se prolon-
gent– en constituent une des limites. Par ailleurs, ces
projections sont d’autant moins fiables qu’elles sont
appliquées à une population peu nombreuse (< 50 000
habitants) et que l’horizon temporel est lointain
(> 2010-2015).
APPLICATION À LÉVALUATION PROSPECTIVE DES RECOURS
HOSPITALIERS
Connaissant, d’une part, à partir du PMSI, les taux de
recours hospitaliers (par GHM, par sexe et par classes
d’âge de 5 ans) et, d’autre part, l’évolution de la popula-
tion grâce à l’outil INSEE, il est possible d’estimer l’évo-
lution des recours à l’horizon 2010 (
figure 2
). Une telle
évaluation repose sur plusieurs hypothèses de stabilité :
morbidité hospitalière constante ;
modes de prise en charge des pathologies identiques ;
évolution démographique de la patientèle de l’établisse-
ment, considérée identique à celle de la population
départementale ;
comportement de consommation hospitalière de la
population stable (les parts de marché sont supposées
constantes).
Il s’agit donc d’une évolution toutes choses étant égales
par ailleurs, hormis les projections démographiques. Mais
d’autres hypothèses peuvent être prises comme, par
exemple, le développement de l’hospitalisation de jour ou
le glissement de certaines prises en charge vers l’ambu-
latoire. Le modèle peut aussi être enrichi selon des hypo-
thèses de développement des spécialités, d’évolution de
l’environnement de l’offre, du taux de recours de la popu-
lation, etc.
La confrontation des différentes hypothèses fournit des
éléments de comparaison pour hiérarchiser les priorités
de l’établissement.
IMPLICATIONS PRATIQUES
L’évaluation prospective permet d’éclairer les choix stra-
tégiques de l’établissement en termes de prévision d’ac-
tivité. Elle met d’emblée en lumière les implications de ces
choix en termes de capacité, de plateau technique, de per-
sonnel, etc. Cependant, aucune conclusion ne peut être
portée sur une activité sans avoir confronté l’analyse des
données chiffrées à la connaissance de terrain et à l’ex-
périence des médecins et des équipes soignantes. La
consultation des praticiens est incontournable pour connaî-
tre leur ressenti quant à l’évolution de leurs activités, tout
comme pour fixer des objectifs communs d’activité.
Propos recueillis par A. LE MASNE
QUELQUES LIENS UTILES :
• Legifrance :
www.legifrance.gouv.fr
• Agence technique de
l'information sur
l'hospitalisation :
www.atih.sante.fr
• Institut national de la statistique
et des études économiques :
www.insee.fr
• Ministère de la santé et des
solidarités : www.sante.gouv.fr
Figure 1. Construction d’un bassin de santé hospitalier.
0
200
400
600
800
1 000
1 200
1 400
1 600
1 800
2 000
Disciplines
ORTHOPÉDIE
+ 10,0 %
NEUROLOGIE
+ 10,1 %
ENDOCRINOLOGIE
+ 10,9 %
CARDIOLOGIE
+ 11,6 %
CHIRURGIE DIGESTIVE
+ 8,8 %
- 5,5 %
OBSTÉTRIQUE
+ 6,2 %
TRAUMATOLOGIE
+ 8,5 %
UROLOGIE
Projections d'activité de l'établissement A
2010
2002
Nombre de RSA
Figure 2. Application des taux d’évolution entre 2002 et 2010.
(Sources : PMSI 2002, INSEE OMPHALE, CNEH 2004)
Tous les séjours de la zone bleue sont orientés majoritairement vers le pôle A
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