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de fonds, transfert de technologie et du savoir, rayonnement international et lobbying, développement
local,...) peut constituer un levier pour accélérer la croissance et participer de manière efficace au développe-
ment. Il est évident que cette problématique est complexe, multidimensionnelle et pluridisciplinaire; la traiter
dans son ensemble dépasserait le cadre de ce travail. Pour l’ensemble de ces raisons, nous essaierons de
cerner, tout particulièrement, le lien entre migration internationale et développement humain. Il est connu
que les mouvements migratoires sont expliqués, entre autre, par les différences du niveau de développe-
ment. D’un point de vue théorique, le choix d’un individu de migrer est un choix rationnel qui peut être expli-
qué par les différences de rémunération, la recherche d’un avenir meilleur ou encore d’une meilleure
sécurité. Une fois installé dans le pays d’accueil, l’immigré cherche à tisser des liens avec les membres de sa
communauté. Ce capital social facilite l’installation de nouveaux arrivants en diminuant le risques attaché à
l’expatriation, de sorte que la migration devient un phénomène auto-entretenu; la présence d’anciens appelle
l’arrivée de nouveaux immigrés.
L’histoire des rapports entre migration et développement est celle d’un rapport par deux fois déçu. Au
moment où les flux migratoires – vers l’Europe et les États-Unis – étaient intenses à la faveur des trente glo-
rieuses, on se plaisait à considérer la migration comme une source de transmission de développement
économique. Quand les pays développés ont décidé de restreindre dans un premier temps avant de stopper
l’entrée des émigrés – qu’il s’agisse des programmes Bracero ou de fermeture des frontières en Europe
1973-74 – le mot d’ordre de l’époque était de trouver des alternatives à la migration. Ainsi, les programmes
d’aide à la coopération, l’investissement direct étranger (IDE) ou l’ouverture à travers le commerce sont-ils
considérés comme la panacée pour réduire la propension à émigrer (Tapinos 1994).
Les deux cheminements qu’on vient de citer dépendent évidemment de la capacité d’absorption ou du
contexte institutionnel du pays d’origine de sorte qu’il est difficile d’avoir une conclusion générale des effets
de la migration sur le développement du pays d’origine. Il est cependant évident que la mobilité inter-
nationale permet à l’émigré d’améliorer son bien être ainsi que celui de sa famille. En revanche, l’impact de
l’ouverture aux échanges commerciaux, de l’aide publique au développement ou encore des IDE sur la pro-
pension à émigrer demeure faible. Le problème de fond est qu’il existe des différences fondamentales dans
les deux processus qui sous-tendent la migration (amélioration du bien-être de l’émigré d’une part, et déve-
loppement durable du pays d’origine d’autre part). D’abord, le premier se situe au niveau microéconomique
(décision individuelle de migrer) et l’autre au niveau macroéconomique (décision au niveau des autorités du
pays d’origine et/ou du pays d’accueil). Ensuite, les conséquences sont immédiates dans un cas et sont à
plus long terme dans un autre. Les deux cheminements ont en commun, cependant, un objectif final à savoir
l’amélioration du bien être individuel et familial. Par conséquent, il faudrait nuancer l’opposition qui existe
entre migration et développement.
Par ailleurs, le chômage endémique que connaît le Maroc depuis plusieurs décennies conjugué aux
besoins importants de main-d’œuvre des pays d’Europe et de certains pays arabes explique dans une large
mesure l’intensification des flux migratoires en provenance du Maroc. Cette situation introduit des effets de
coopération et même de dépendance bilatérale entre le pays émetteur – le Maroc – et les pays récepteur –
l’Europe en particulier – de main d’œuvre. En effet, les besoins en main d’œuvre des pays du Nord, à la
faveur des « trente glorieuses » des pays du vieux Continent, et les taux élevés de fécondité qu’a connus le
Maroc ont poussé les deux partenaires à organiser la migration (section 2).
Tant pour les responsables politiques que pour les chercheurs, l’impératif de données sur la mobilité inter-
nationale paraît évident. Cependant, force est de constater qu’au Maroc, comme d’ailleurs dans la plupart
des PVD, les données relatives à la migration demeurent lacunaires malgré les efforts de quelques orga-
nismes en charge de la question. La section 3 essaiera de quantifier les flux migratoires du Maroc vers les
pays du Nord depuis l’indépendance jusqu’à aujourd’hui.
Au-delà et face à la crise économique des années 70 et 80 et au ralentissement des mouvements migra-