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ORGANISATION DU PERSONNEL MAÇONNIQUE
PERSONNEL DIRIGEANT. PERSONNEL EXÉCUTANT ET RÉPÉTANT.
Le personnel maçonnique se divise en deux catégories : le personnel dirigeant, infiniment peu nombreux et aussi
parfaitement inconnu du public que des francs-maçons eux-mêmes ; et le personnel exécutant et répétant, organisé en
loges dans chaque nation.
Le premier se cache farouchement. L'autre, hauts dignitaires, 33e degrés, princes sublimes, vénérables, etc., ne sont
que des adjudants et petits caporaux, qui reçoivent les directives, donnent ou transmettent les ordres et veillent à leur
exécution. Le troupeau maçonnique propage, répand, répète dans le public ce qu'il lui a été ordonné de dire, de répandre
et de répéter, pour créer l'OPINION sur chaque sujet.
L'opinion personnelle est interdite en maçonnerie.
GRANDS HOMMES ET PETITS CAPORAUX.
M. Philippe HENRIOT, député de Bordeaux, rapporte le fait suivant, dont tous les députés ont été témoins, à l'occa-
sion de la discussion du Pacte à quatre, pacte qui, en 1935, avait pour objet de substituer à la Société des Nations un
Directoire à quatre : France, Angleterre, Italie, Allemagne.
Je raconterai les faits, dit M. HENRIOT, dans leur nudité tragique :
« Dès que fut connue l'intention de soumettre à la Chambre le Pacte à quatre, le président de la commission des
affaires étrangères, M. Edouard Herriot, en entretint ses collègues de la commission. Il fit devant eux une critique sé-
vère du Pacte, et leur démontra d'une façon émouvante et convaincante, que le Pacte à quatre constituait à la fois
une menace pour la sécurité de la France et la paix du monde.
« Il fut si persuasif, que, dans la commission, deux de nos collègues seulement refusèrent de suivre leur prési-
dent : j'ai nommé M. Pierre Vienot, député pacifiste des Ardennes, et Jean Longuet, député socialiste de Paris.
« Quoi qu'il en soit, l'opinion de M. Herriot avait emporté l'adhésion de la commission à la presque unanimité.
« Et voici que le jour où allait venir en discussion, non le Pacte lui-même, mais la Conférence économique de
Londres, comme l'on avait appris que M. Daladier avait l'intention de demander en même temps une sorte de blanc-
seing pour le Pacte à quatre, à midi trente, je précise, dans la salle des Conférences de la Chambre, où je passais, je
trouvais M. Herriot en conversation avec trois de nos collègues.
« Et comme je passais, M. Herriot m'appela et me dit :
- Henriot, vous savez que cet après-midi, le président du Conseil a l'intention de faire venir le Pacte à quatre ?
- Je sais, je suis prévenu per mes amis.
- Vous savez que c'est une chose très grave pour la France ?
- Je sais les efforts que vous avez faits à la commission des affaires étrangères pour en persuader nos collègues…
- Et j'entends, me dit-il, les refaire devant la Chambre ; et je viens vous demander ceci : Comme nous aurons, ce soir,
séance de nuit, voulez-vous obtenir de vos amis de la Fédération républicaine qu'ils acceptent de me suivre quand je
demanderai le renvoi à 22 heures, et non à 21 heures ? Je voudrais, en effet, que tous nos collègues aient le temps
d'avoir dîné, pour que la Chambre soit vraiment au complet pour entendre les déclarations que j'ai à faire connaître,
qui sont de la plus haute gravité. »
A quoi- je répondis : « Je me porte garant, au nom de tous mes collègues, que leur adhésion vous est d'avance assu-
rée ». Et je quittai M. HERRIOT.
L'après-midi, débat sur la Conférence économique de Londres. Quand les interpellateurs se furent succédé, le prési-
dent DALADIER monta à la tribune, et, ayant-répondu sur l'affaire de Londres, aborda le Pacte à quatre au milieu des
protestations de quelques-uns d'entre nous, qui rappelaient que l'affaire n'était pas à l'ordre du jour.
« Quelques protestations se firent entendre, celles de MM. Ybarnegaray et Franklin-Bouillon, en particulier ; mais
l'un et l'autre, membres de la commission des affaires étrangères, comptant sur l'intervention de leur président, M.
Herriot, se bornèrent à se référer à ce qu'il dirait.
« C'est alors que furent déposés les ordres du jour. L'un d'eux le fut par M. Torrès. Or, pendant que Torrès parlait,
nous vîmes entrer par le couloir de gauche de la Chambre, avec son pas feutré, traînant, son regard de hibou effaré,
son long nez flairant prudemment devant lui, sa haute taille voûtée et inquiète, M. Jammy-Schmidt, président du
groupe maçonnique parlementaire et agent de liaison permanent du Grand-Orient avec le Parlement.
« Je verrai longtemps la scène. Daladier à son banc, et Jammy-Schmidt venant vers lui, le poussant doucement,
s'installant à son côté et dépliant sous ses yeux un minuscule billet, dont la lecture détendit tout à coup les traits du
président du Conseil.
« Ils n'échangèrent pas un seul mot, un signe d'assentiment, et Jammy-Schmidt se retira. Puis il continua de mon-
ter les gradins, lentement, silencieusement, jusqu'au banc où siégeait, tout en haut, à sa place habituelle, M. Herriot.
« A celui-là aussi, il montra le papier. De celui-là, non plus, il n'eut pas de réponse ; un simple geste du regard et
des mains, et M. Jammy-Schmidt redescendit.
« Torrès parlait encore... Et quand il eut terminé, la Chambre entendit avec stupeur son président déclarer : Mes-
sieurs, je suis saisi d'un ordre du jour de M. Herriot. Ceux qui sont d'avis de l'adopter mettront dans l'urne un bulletin
blanc. Avis contraire, bulletin bleu ».
« Ainsi, sans discussion, sans débat, le scrutin tut ouvert sur un ordre du jour rédigé par la franc-maçonnerie et
signé par elle du nom de M. Herriot, sans que celui-ci osât élever la moindre protestation.