En quoi les groupes d’intérêt influent-ils sur le fonctionnement de la démocratie ?
Document : Pierre Muller, « La politique agricole française : l’État et
les organisations professionnelles », Économie rurale, 2000.
Les titres et les mots en couleur servent à guider la lecture et ne doivent pas figurer sur la copie.
Introduction
Le fonctionnement démocratique repose sur les partis politiques, représentatifs du peuple, dans le
cadre d’un État de droit où les instances de pouvoir sont soumises dans leurs prises de décisions au
droit, repris dans les lois et la Constitution. Mais d’autres acteurs, tels les groupes d’intérêt,
organisations soudées par un intérêt commun qu’elles cherchent à imposer au pouvoir politique,
participent aussi au fonctionnement démocratique. Comment ceux-ci agissent-ils pour que le
pouvoir politique prenne des décisions conformes à leurs intérêts ?
À l’image de la modernisation de la politique agricole en France dans les années 1960, nous verrons
tout d’abord que les groupes d’intérêt peuvent agir en tant que lobbies (groupes de pression) puis
qu’ils peuvent également s’imposer comme « collaborateurs » des pouvoirs publics.
Développement
Dans un premier temps, les groupes d’intérêt peuvent agir comme deslobbies, c’est-à-dire qu’ils
vont pousser, en amont de la prise de décision politique, les pouvoirs publics à adopter une position
convergente avec leurs intérêts propres. Ce positionnement repose sur une stratégie en deux temps.
Tout d’abord, le groupe d’intérêt doit s’affirmer dans son milieu comme légitime, donc être accepté
et reconnu par le plus grand nombre des acteurs du secteur. Ainsi, au sein du secteur agricole en
France à l’aube des années 1960, le CNJA (Centre national des jeunes agriculteurs) s’affirme
comme « une organisation dont la légitimité dans le milieu paysan n’est pas contestable » ce qui lui
octroie le droit de représenter les paysans auprès du gouvernement. Ensuite, le groupe d’intérêt doit
être en capacité d’influencer les pouvoirs publics, ce qui passe par des invitations à des colloques,
des propositions argumentaires auprès des parlementaires ou encore la participation à des réunions
informelles avec les décideurs publics. C’est ce rôle qu’a rempli le CNJA puisque « au printemps
1960, une série de réunions confidentielles réunissent les représentants du gouvernement et l’état-
major du CNJA », réunions qui conduisent à « modifier de fond en comble les données de la
politique agricole française ».
Dans un second temps, les groupes d’intérêt peuvent devenir des collaborateurs officiels du pouvoir
politique en tant qu’interlocuteurs privilégiés ; cela signifie qu’ils sont alors les représentants d’un
secteur, d’un groupe social auxquels l’État s’adresse quand il s’agit de discuter de problématiques
propres au secteur ou bien lorsqu’il convient de gérer l’application d’une politique décidée
conjointement. Cette situation de cogestion permet alors aux groupes d’intérêt d’avoir la mainmise
sur la défense de leurs intérêts. Le document souligne l’avènement des syndicats agricoles dans la
modernisation de la politique agricole française décidée au printemps 1960 puisque « se met en
place un système de cogestion corporatiste de la politique agricole ».
Conclusion
Les groupes d’intérêt disposent de plusieurs canaux pour influencer les pouvoirs publics (lobbying,
collaboration officielle). Il revient cependant à ces derniers de s’assurer que les intérêts particuliers
convergent avec l’intérêt général.