Si on vous demandait de comparer deux villes, sur quoi vous baseriez-vous ? Rapidement, cette
question mène à réfléchir aux indicateurs à utiliser ainsi qu’au concept d’échelle spatiale. Par
exemple, on pourrait se pencher sur les briques utilisées dans la construction des bâtiments
(échelle la plus fine). On pourrait aussi « élargir » notre perspective en comparant ensuite les
immeubles, puis le centre-ville, puis la région toute entière incluant les banlieues. Chaque échelle
permettrait de distinguer des caractéristiques de chacune des villes, et même si les briques
utilisées étaient les mêmes, un agencement et une architecture différents pourraient entraîner
des patrons très hétérogènes à d’autres échelles.
C’est un peu l’approche qu’ont adopté Sybille Haeussler, qui a obtenu son doctorat à l’UQAM en
2004 et qui travaille maintenant à l’Université de Colombie-Britannique, et Yves Bergeron,
titulaire de la Chaire industrielle CRSNG-UQAT-UQAM en aménagement forestier durable. En
utilisant comme indicateurs la composition et la structure des communautés végétales et comme
échelle spatiale cinq niveaux allant du micro-site à la région, les deux chercheurs ont comparé
des brûlis et des coupes totales issus de peupleraies. Les sites à l’étude ont été échantillonnés
trois ans après perturbation, dans la région de Timmins, en Ontario, et les résultats ont été
publiés dans la Revue canadienne de recherche forestière en
2004.
Les auteurs ont appuyé leur étude sur le principe de
l’aménagement écosystémique, qui repose sur l’hypothèse que si
l’on tente de reproduire des perturbations naturelles lors de nos
interventions en forêt, l’impact sur les processus et les attributs
des écosystèmes sera minimisée (voir la chronique
«L’aménagement écosystémique, ou comment passer de
l’écosystème à l’aménagement»). Les feux de forêt et les coupes
totales constituant des perturbations très intenses, on pourrait
s’attendre à ce qu’ils partagent certaines caractéristiques, mais
qu’en est-il vraiment ? À quel point les réponses des écosystèmes
sont-elles semblables ?
L’analyse des auteurs a permis de distinguer en plusieurs points
les stations brûlées des stations coupées. En regard de la
composition, ils ont entre autres observé une plus forte abondance de rejets de tremble dans les
brûlis et d’arbustes et de plantes herbacées dans les coupes.
Chicots abondants après le
passage d'un feu. Photo :
Virginie Angers
Regénération abondante de peuplier dans un parterre de coupe. Photo : Marie-Eve Sigouin
Certains changements sont perceptibles à toutes les échelles,
comme la diversité en espèces qui était plus forte dans les
coupes que dans les brûlis, notamment grâce à la présence
combinée d’espèces pionnières et d’espèces de fin de
succession ayant survécu à la coupe. En regard de la
structure, les différences changeaient en fonction de l’échelle
étudiée, mais la différence la plus importante concernait la
rareté des chicots dans les coupes par comparaison avec les
brûlis.
En plus de contribuer à documenter les différences en types
de perturbations, cette étude a permis de soulever des
questions importantes du point de vue de l’aménagement
forestier. Par exemple, est-ce que la plus faible régénération
en peuplier et la plus forte abondance en espèces non
commerciales comme l’érable à épis et le noisetier dans les coupes menacent la productivité des
peupleraies dans la région ? Ensuite, bien que des différences de composition et de structure
aient été observées, ces changements ont-ils réellement un impact sur l’intégrité écologique des
écosystèmes ? Bref, une étude qui apporte autant de question que de réponses et qui permettra
aux chercheurs de la Chaire AFD de poursuivre leurs travaux !
« Lorsqu’on base
l’aménagement forestier
s
ur les processus
naturels, on doit garder à
l’esprit que les
caractéristiques propres
aux écosystèmes issus de
p
erturbations naturelles
ou anthropiques peuvent
différer selon l’échelle à
laquelle elles sont
observées »
Pour information :
Yves Bergeron
Chaire industrielle CRSNG-UQAT-UQAM en aménagement forestier durable
Tél. : 819-762-0971 poste 2347
Courriel : yves.bergeron@uqat.ca
Rédaction :
Virginie-Arielle Angers, ing.f. M.Sc.
Candidate au doctorat en biologie
Chaire industrielle CRSNG-UQAT-UQAM en aménagement forestier durable
Université du Québec à Montréal
Selon l’article :
HAEUSSLER, S. and BERGERON, Y. 2004 Range of Variability in Boreal Aspen Plant Communities
after Wildfire and Clearcutting. Can. J. For. Res. 34(2), 274-288.
1 / 3 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !