Dossier artistique Eloge de l`Amour - février 2017

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«!Nous savons bien que les histoires d’amour passionnent tout le monde.
Nous devons nous demander pourquoi elles nous passionnent!»
Dans une conférence au Festival In d’Avignon, en 2008, le grand philosophe Alain
Badiou a fait de l’amour un éloge vibrant et lumineux. Caroline Ruiz s’empare
aujourd’hui avec jubilation de ce texte, avec le désir de le faire entendre et de le
partager. C’est quoi l’amour? Qu’est ce qui se joue entre deux êtres? L’amour a-t’il
sa place dans le monde d’aujourd’hui confort et sécurité sont devenus le credo
de nos vies? L’amour est-il menacé? Et comment faire du théâtre avec de la
philosophie? Comment mettre en scène le sens? Dans une adresse simple et
directe au public, entre conférence et parole intime, avec le soutien discret de la
vidéo et de la musique, en compagnie d’Arletty, de Dalida et de Cyrano, cette
proposition pleine d’humour et de vie parle de rencontre, de déclaration d’amour,
de Meetic, de Platon, (d’individualisme) d’identité et de différence, de fidélité,
d’obstination, d’aventure, de construction, des sceptiques, du risque, et des corps
qui brûlent… Une autre façon de parler de l’Amour… Une parole indispensable…
«!L’amour est une aventure obstinée. Le côté aventureux est nécessaire, mais
ne l’est pas moins l’obstination…!»
Adaptation, jeu, mise en scène: Caroline Ruiz
Oeil extérieur / Direction d’acteur: Stephan Pastor
Régie générale / lumières : Jean-Louis Alessandra !
Création vidéo : Olivier Durand
Diffusion : Margot Larcher
Production : Hangar Palace
Durée : 1h
Livre de chevet pour beaucoup de monde, ce texte n’a jamais été porté sur
une scène. C’est la première fois, huit ans après la désormais célèbre
conversation Badiou/Truong dans le In d’Avignon, en 2008…
"Chère Caroline, j'ai lu attentivement ce que vous comptez faire avec mon "Eloge
de l'Amour". Cela m'a donné confiance en vous. Votre passion me fait plaisir et je
suis toujours heureux que quelqu'un veuille faire ainsi vibrer, en public, quelques
fortes idées." ! Alain Badiou - 12 juin 2016"
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Au départ, un texte…
Eloge de l’Amour est au départ une discussion en public entre le philosophe Alain
Badiou et le journaliste Nicolas Truong, au Festival In d’Avignon de 2008, dans le
cadre du Théâtre des Idées. Le journaliste du Monde avait invité le philosophe à faire,
à l’instar du Banquet de Platon, son éloge de l’Amour. C’est bien la figure maîtresse de
Platon qui traversecette conversation: «!Qui ne commence pas par l’amour ne saura
jamais ce que c’est que la philosophie!», écrivait le Grec, l’expérience amoureuse
étant accès à l’Idée. Vous êtes épris d’un beau corps? N’en rougissez surtout pas. En
langage platonicien, cela veut dire que vous êtes en passe d’atteindre l’idée du Beau.
Construit autour de grandes séquences #les philosophes et l’amour, la construction
amoureuse, la vérité de l’amour, les liens entre amour et politique, et amour et art#–,
Éloge de l’amour s’ouvre sur un scénario bel et bien ancré dans le monde
contemporain. Une campagne d’affichage pour le site de rencontre, Meetic, qui égrène
comme slogan: «#Ayez l’amour sans
le hasard!#». Alain Badiou en est
intimement convaincu: l’amour est
aujourdhui menacé par la vision
sécuritaire d’un amour-contrat à zéro
risque, version à peine déguisée de la
propagande ubuesque pour la guerre
«#zéro mort#». Il est aussi par ceux qui
en fo n t un simp l e av a t ar d e
lhédonisme sexuel. Et par les
cyniques. Les affres et pulsations du
cœur sont ainsi encerclées de toutes
parts: «!Je crois en effet que libéral et
libertaire convergent vers l’idée que
l’amour est un risque inutile. […] Il faut réinventer le risque et l’aventure, contre la
sécurité et le confort!», proclame le philosophe.
Pour lui, le grand mystère de l’amour tient dans le fait que d’un hasard découle une
épreuve de vérité: «!la vérité sur le Deux!». L’amour nous fait expérimenter l’univers
autrement qu’en solitaire, il nous met en présence du monde, «#d’un seul monde où se
déchiffre que nous sommes deux!». Différence contre identité. Contre la mythologie de
la rencontre qui consume l’amour, le foudroie, et sépare les amants du monde, Badiou
fait de l’amour une construction, inscrite dans une durée.
La déclaration d’amour étant une des étapes centrales de cette construction…
«!Déclarer l’amour, c’est passer de l’événement-rencontre au commencement
d’une construction de vérité. C’est fixer le hasard de la rencontre sous la
forme d’un commencement.!»
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Pourquoi ce texte…
Un homme m’a quitté. Un homme m’a trouvé. Un homme a fait de moi une mère. Un
homme a fait de moi une femme. Une femme amoureuse. Pas une jeune femme, non.
Ni vieille, ni incroyable, ni laide, ni belle. Une femme. Une femme qui (re)découvre
l’amour. Ses joies. Ses tourments. Son Obsession. Ses montagnes russes. Aimer et
être Aimée. La grande affaire. L’Amour avec un grand A. Le vrai, le pur, le si rare.
L’évidence. J’ai eu deux grands amours dans ma vie. Le premier à 20 ans, le
deuxième à 46 ans. J’en ai à présent 49 et cela fait presque trois ans que cet Amour
me remplit et me bouleverse. On n’aime pas de la même manière à 20 ans et à 49
ans. On n’est pas aimée pareil. Après trois mises en scène jeune public, c’est de ça
dont j’ai eu envie de parler. L’amour entre deux êtres, corps et âme. L’amour ici et
maintenant. Pas l’amour de la Carte du Tendre, ni celui de Belle du Seigneur, encore
moins celui des magazines féminins. Pas la stratégie ni le cynisme, la mièvrerie et le
romantisme fleur bleue. Pas l’amour des adolescents ni celui des personnes âgés.
Non. Besoin de parler de celui que je connais, celui qui me soulève du sol et me
brûle. Ce cadeau tombé un jour au coin de la rue. Envie de comprendre.
Pourquoi lui ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi
comme ça, à ce point, si fort ? Comprendre ce qui se joue.
Comprendre cette révolution en soi. Cette renaissance. Ce
vertige. Cette évidence. L’Amour, finalement, comment ça
marche ?
J’ai eu un véritable coup de foudre pour Eloge de
l’Amour. Comme un coup de foudre amoureux. Comme si
ce livre avait été écrit pour moi. Il y a des textes qui viennent
tellement taper dans notre sensibilité et dans nos entrailles que
l’on sent qu’il y a une urgence à prolonger l’expérience de la
lecture dans l’expérience de l’incarnation.
J’ai présenté un premier dossier au festival Dire des Femmes du Théâtre
du Petit Matin à Marseille en janvier 2016. 9 projets de femmes, 9 chantiers
en cours, 3 propositions de travail de 30 minutes par soir, une question à poser
au public… Laboratoire parfait pour mon expérimentation. J’ai laissé tomber l’idée
de mélanger ce texte avec des textes du répertoire, histoire de faire un peu plus
«#théâtre#»… Non. J’ai fait le pari de donner à entendre seulement Badiou et son
Eloge, avec quand même un bout de Dalida, et le moment de la rencontre dans les
Enfants du Paradis. Sentir comment j’allais le porter, comment le public allait réagir.
C’était véritablement un quitte ou double. Comme en amour, il fallait que la rencontre
se fasse. L’accueil fut enthousiaste. A la question posée au public : «#si j’allais plus
loin, que souhaiteriez vous entendre? Plus de Badiou ou plutôt d’autres textes sur
l’amour?#», la réponse fut unanime: plus de Badiou!! Ce texte avait résonné aussi fort
chez eux que chez moi… Cette soirée m’a poussé dans le dos. Et c’est avec
obstination que j’ai décidé de poursuivre cette aventure.
Caroline Ruiz
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Oui, mais comment…
Les grandes questions étaient «#comment porter de la
philosophie sur un plateau de théâtre? Comment faire
entendre ce texte - même s’il est déjà très vivant
puisqu’il a été dit en public avant même d’être écrit et
qu’il conserve ainsi l’énergie et la spontanéité de la
parole parlée? Comment passer du «#je pense que
l’amour c’est…#», de Badiou, à une parole plus
ouverte qui dirait «#l’amour, c’est…#»?
Et comment faire entendre le sens d’un texte qui n’est
pas toujours simple, comment mettre en scène le
sens?
Caroline Ruiz a adapté ce texte en choisissant les
passages qui résonnaient le plus en elle et qui
mettent en jeu l’amour entre deux personnes en
prenant garde à respecter le sens et la mise à nu du
processus amoureux qui va du hasard de la rencontre
à la déclaration d’amour et à la construction d’une
vérité, avec en parallèle cette lutte de la différence
contre l’identité. Elle y a introduit trois monuments de
la culture populaire qui, elle, contrairement à la
philosophie, et c’est Badiou qui le dit, a toujours traité
le sujet de l’amour: la rencontre dans les Enfants du
Paradis de Marcel Carné, la déclaration d’amour de
Cyrano à Roxane et une chanson de Dalida… Elle a
construit une dramaturgie qui fait glisser doucement
de la conférence à une parole plus intime tout en
suivant l’avancée du processus amoureux…
La comédienne entre sur le plateau avec l’irrésistible envie de raconter sa propre
histoire d’amour… «#J’aimerais tellement vous dire comment j’ai rencontré mon…#»
Mais cela n’est pas possible, n’est ce pas? Pourquoi raconter sa vie? Qui cela pourrait
il intéresser? Alors elle raconte le mythe d’Aristophane sur l’amour, dans le Banquet de
Platon. La belle histoire de ces êtres coupés en deux qui passeront leur vie à se
chercher…. Un préambule comme un conte, avant de plonger dans la pensée de
Badiou…
Partager la jubilation d’une lecture…
Partager de l’intelligence…
L’Amour, la grande affaire de tous…
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