Avant-propos
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Le succès qu’a connu la Chine dans ses efforts de
développement économique est tout à fait
extraordinaire et a fait l’objet d’innombrables
études. Toutefois, il n’a guère été accordé
d’attention au fait que c’est principalement grâce à
l’amélioration de l’agriculture et de la nutrition que
des centaines de millions de personnes ont pu
échapper à la pauvreté et à la faim.
Il y a trente ans, lorsque le Programme
alimentaire mondial (PAM) a pour la première fois
été appelé à fournir une assistance à la Chine, un
Chinois sur trois souffrait de dénutrition. Les
pénuries alimentaires constituaient un fléau
séculaire pour cet immense pays et étaient à
l’origine des nombreux changements de dynasties
qui avaient marqué son histoire. Aujourd’hui, la
Chine produit assez d’aliments pour nourrir un
cinquième de la population mondiale avec
moins d’un dixième des terres arables. Ces
dernières années, elle a même été exportateur
net de céréales.
À un moment où le nombre de ceux qui ont faim a
recommencé à augmenter et où l’on s’interroge sur
la capacité du globe de continuer de produire assez
d’aliments pour nourrir une population croissante
malgré les défis représentés par les changements
climatiques et la hausse des coûts, il n’est pas
inutile d’analyser le cas chinois pour tirer les
enseignements qui s’imposent des succès qu’a
connus le pays et des domaines qui continuent
d’appeler des améliorations.
L’élément qui a peut-être le plus directement
contribué au succès des efforts du développement
agricole a été un gouvernement stable conscient de
l’importance fondamentale de la sécurité
alimentaire pour la stabilité nationale. "À ventre
plein, coeur en paix". Ce vieil adage chinois
paraît avoir été, pour une large part, le fondement
même de l’œuvre entreprise par le gouvernement
pour promouvoir le développement de l’agriculture
et la production vivrière.
Depuis qu’une économie agricole dirigée a fait
place, en 1978, au système de responsabilité des
ménages, la production agricole s’est accrue de
façon spectaculaire, ce qui n’a pas manqué d’avoir
de multiples effets positifs pour la qualité de vie des
personnes et pour l’économie: l’apport calorique
s’est accru et le régime alimentaire s’est diversifié,
les travailleurs ruraux ont pu s’orienter vers des
emplois non agricoles plus rentables, de nouvelles
entreprises de traitement des produits alimentaires
et de nouvelles entreprises de fabrication ont créé
des emplois, et les revenus ont augmenté. Une
politique de limitation de l’accroissement
démographique a également contribué à maîtriser
la demande de ressources dont la disponibilité était
limitée.
Les améliorations qui ont caractérisé la sécurité
alimentaire et la nutrition au cours des trente
dernières années ont été imputables pour une large
part à l’accroissement des approvisionnements
alimentaires et des revenus. Paradoxalement, les
interventions nutritionnelles directes ont été rares.
Il y a certes eu quelques initiatives dans ce
domaine, par exemple pour distribuer des
suppléments de vitamine A, mais elles ont rarement
eu une envergure nationale. C’est ainsi par exemple
qu’en Chine, l’enrichissement de la farine de blé
n’est pas encore obligatoire.
En dépit des remarquables progrès accomplis et des
efforts soutenus déployés par le gouvernement
pour satisfaire les besoins les plus essentiels de la
population dans des domaines comme
l’alimentation, l’habillement et le logement, il
ressort d’une étude de la situation de la sécurité
alimentaire en Chine réalisée pour la FAO, le Fonds
international de développement agricole (FIDA) et
le PAM que 90 millions de personnes, dans 266 des