
1) Les problèmes posés, pris dans toute leur ampleur, sont considérables. Compte-tenu des
contraintes du temps qui lui ont été imposées, le Comité n'a pu examiner que certains
aspects de ces problèmes et se réserve de poursuivre son étude au cours des prochains
mois.
2) Les données des problèmes sont essentiellement évolutives. Les observations formulées
ne sont donc valables qu'en l'état actuel de la situation.
3) Sur le plan juridique, le gouvernement tient de la législation en vigueur, notamment de
l'article L.18 et des articles L.355-22 et suivants du Code de la Santé publique, de très
larges pouvoirs, et est en mesure de prendre toute mesure efficace pour prévenir la maladie
et en éviter ou limiter la diffusion. Ces pouvoirs ne trouvent leur limite que dans les règles
résultant de la jurisprudence générale en matière de police, à savoir l'obligation où se
trouvent les pouvoirs publics de réaliser un équilibre entre les contraintes qu'exige l'ordre
public, ici la lutte contre la maladie, et là, la garantie des libertés individuelles et collectives.
A cet égard, comme du point de vue éthique, la légitimité des mesures prises ou à prendre
repose sur un arbitrage permanent commandé par le degré de gravité que représente
l'épidémie à combattre. Le Comité a constaté qu'un important effort a déjà été entrepris par
les pouvoirs publics pour lutter contre la diffusion de l'infection VIH avec des résultats qui,
pour être encore limités, sont loin d'être négligeables et qui vont dans le sens souhaitable.
L'on est en présence d'une épidémie dont la gravité est manifeste par les perspectives
inquiétantes que présente sa diffusion en l'absence actuelle de toute thérapeutique,
situation appelée à se prolonger pendant encore au moins plusieurs années, et qui peut
donc justifier des contraintes exceptionnelles. L'effort à entreprendre doit naturellement, en
l'état de cette situation, porter sur la limitation de la transmission de la maladie et justifier
une action soutenue pour prévenir cette transmission, action légitimant des sacrifices
importants, tant sur le plan financier que par les limitations qu'elle pourrait apporter aux
libertés individuelles et collectives.
4) Sur le plan scientifique, la pandémie mondiale d'infection par le VIH, apparue dans les
années 1970, groupe trois épidémies :
- La première épidémie concerne les personnes infectées : environ 5 à 10 millions de
personnes dans le monde, 200 000 à 400 000 personnes en France. Le seul critère
d'infection aisément disponible est la recherche de la séro-positivité anti-VlH. En l'absence
de thérapeutique curative, prévenir la transmission est le seul objectif à la portée des
sociétés humaines. L'efficacité des mesures de prévention se traduit par l'infléchissement de
la courbe de croissance du nombre de personnes séro-positives.
- La deuxième épidémie concerne les cas de SIDA avérés, phase terminale de l'infection :
environ 250 000 à 300 000 personnes dans le monde et environ 5 000 en France. Le
nombre de cas double actuellement tous les six à neuf mois, et cette croissance se
poursuivra pendant plusieurs années, quelle que soit l'efficacité des mesures de prévention,
car elle traduit l'histoire naturelle de l'infection chez les personnes déjà contaminées ; le
SIDA est précédé d'une incubation de six mois à quinze ans probablement plus.
- La troisième épidémie est celle des conséquences sociales, culturelles, économiques et
politiques, engendrées par les deux premières épidémies et la peur qu'elles provoquent, elle
sera alimentée par les statistiques de la deuxième épidémie, celle des SIDA avérés.
L'infection par le VIH est transmissible par inoculation de sang lors des contacts intimes des
relations sexuelles, et de la mère à l'enfant lors de la grossesse. La détection des sujets
porteurs du virus repose sur la recherche des facteurs de risques que sont :
l'homosexualité, la bisexualité, la multiplicité des partenaires, les antécédents de maladies
sexuellement transmissibles, la toxicomanie par injection et le séjour dans un pays à très
forte endémie, et sur la recherche de séropositivité. De ce fait, la séro-positivité n'est