bien contrôlée, l' hématome qui est circonscrit est éva-
cué, de même que les fragments osseux et les débris
tissulaires. La rupture uréthrale est encore fraiche avec
des extrémités uréthrales souples. L'anastomose termi-
no-terminale est effectuée en s'assurant que la suture
prend bien la muqueuse uréthrale des 2 côtés. Les
résultats concernant la qualité du jet mictionnel sont
supérieurs à 80% [10, 16]. Dans notre série, ce résultat
était de 81,25%.
Dans les cas de traumatismes graves avec instabilité
hémodynamique, ou lésion viscérale ou cutanée
importante, la réparation uréthrale n'est pas une priori-
té. Ces malades sont pris en charge tardivement au delà
du 3ème mois. Cette attitude que nous adoptons de
nécessité est suivie de principe par un ensemble d’au-
teurs [12, 13, 14, 15, 19, 20, 21, 22]. Le délai d'attente
permet la réparation des autres lésions associées mais
aussi la cicatrisation locale et la résorption de l’héma-
tome pelvien, ce qui prend 3 à 4 mois [19].
A ce stade, la rupture uréthrale s'est alors transformée
en une sténose uréthrale avec décalage des deux extré-
mités. En effet, les deux extrémités uréthrales sont
séparées par un cal fibreux, dû à l' organisation de l'hé-
matome. La longueur de ce cal dépend de l'importance
de la résorption de l'hématome, du degré de la descen-
te du bloc vesico-prostatique et de l’importance du
déplacement osseux. La distance entre les deux extre-
mités n'est ainsi pas dûe à une perte de substance mais
à un déplacement vers le haut de la prostate et une
rétraction vers le bas de l'uréthre bulbaire. Si l'hémato-
me est massif et l’écartement des deux extrêmités uré-
thrales est important, il est peu probabale d'avoir une
descente spontanée vers une position normale, et il faut
s'attendre à une sténose longue [20]. Pour juger l’éten-
due de la sténose, et l'importance du décalage, l’uré-
throcystographie rétrograde combinée à l’uréthrogra-
phie mictionnelle est d' un grand apport. Des artifices
techniques pourraient être utilisés chez les patients qui
ont des difficultés à uriner durant l'examen [4].
La majorité de ces sténoses sont réparées par une voie
d’abord périnéale. Dans les cas difficiles cependant,
lorsque le manque est étendu, et l'uréthre proximal est
fixé en position haute par rapport à la symphyse
pubienne, il devient nécessaire d'associer une voie
d'abord transsymphysaire, afin d'avoir un jour sur le
bout proximal de l'uréthre. La voie transsymphysaire
est plus simple et ne nécessite pas de pubectomie
quand il y a un diastasis pubien important. C'est le cas
de nos trois malades. En l'absence de diastasis de la
symphyse pubienne, une symphysiotomie ou une
pubectomie est effectuée classiquement par voie haute.
La possibilité de lésion des nerfs érecteurs augmentant
le pourcentage des dysérections a été soulevée [6].La
voie périnéale permet d'effectuer une pubectomie infé-
rieure qui donnerait moins de complications et moins
de déperdition sanguine [20, 21]. Dans tous les cas, il
faut résequer tout le callus fibreux, disséquer les deux
extrémités uréthrales puis effectuer une anastomose
termino-terminale sans tension. Dés que la sténose
dépasse 2,5 cm., il y aurait un risque de suture sous ten-
sion de l'uréthre avec raccourcissement et déviation de
la verge [5]. Aucun de nos patients n'a présenté une
telle complication. D’autres techniques chirurgicales
ont été effectuées dans les cas de sténose étendue ou
complexe : uréthroplastie cutanée en un ou deux temps
[20].
Les résultats de la résection-anastomose des sténoses
traumatiques de l’uréthre membraneux sont dans l'en-
semble satisfaisants avec un jet mictionnel correct dans
85 % (15) à 87% [1]. Le taux d’incontinence est faible
et de 2,7% [7]. Les sténoses itératives sont observées
dans 11% des cas (15) et répondent avec succés à l’uré-
throtomie endoscopique dans 72% [17]. Les taux de
succés élevés de l’uréthrotomie optique comme com-
plément à une uréthrorraphie termino-terminale sont
expliqués par le fait qu’il s’agit de sténoses courtes réa-
lisant un anneau fibreux fin au niveau de l’anastomose.
Deux complications majeures peuvent s'observer après
traitement chirurgical des ruptures traumatiques de
l'urèthre : les dysfonctionnements érectiles et l'inconti-
nence urinaire. Leur origine dûe au traumatisme ou à
l'intervention est controversée.
Le dysfonctionnement érectile est observé dans 11,6%
à 44% [20]. Il est d'origine nerveuse et vasculaire.
L'origine nerveuse serait la plus fréquemment en cause
puisque les taux de succés par traitement pharmacolo-
gique sont élevés [11]. Les études anatomiques ont par
ailleurs montré que les les branches de l’artére honteu-
se interne, ainsi que les nerfs érecteurs cheminent de
part et d’autre de l’uréthre membraneux. Ces éléments
peuvent être lésés au cours de la fracture du bassin ou
au cours d’une intervention chirurgicale [2]. Les taux
les plus élevés sont observés après intervention chirur-
gicale en urgence immédiate par suture termino-termi-
nale alors que les taux les plus faibles sont observés
après cystostomie sus pubienne seule. Ceci suggére la
responsabilité de la mobilisation intempestive du bloc
vésicoprostatique dans la genése de l'impuissance
sexuelle [8]. C’est d’ailleurs la mobilisation prosta-
tique qui rend compte du taux élevé d’impuissance
sexuelle après réparation en urgence différée dans
notre série et non la voie d’abord. Dans les cas où
aucun geste n'a été effectué, l'impuissance sexuelle
serait alors directement en rapport avec la sévérité du
traumatisme [9]. Ainsi, dans les cas nécessitant une
intervention en urgence immédiate, il faut éviter une
ouverture du fascia endopelvien, et la mobilisation de
la région périprostatique.
L'incontinence urinaire est observée dans 0 à 44%. La
aussi, les taux les plus faibles sont rapportés après cys-
tostomie sus pubienne seule, alors que les taux les plus
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R. Aboutaieb et coll., Progrès en Urologie (2000), 10, 58-64