présence : fallait-il voir Alesia ou Alexia
(car les manuscrits donnent l'un et l'autre
nom)
dans Alise, en Bourgogne, ou dans Alaise, en Franche-Comté ? La première
opinion était la plus ancienne, et c'est également celle que la commission
impériale a adoptée. Elle a fait elle-même des recherches, pratiqué des fouilles
sur le terrain du mont Auxois, où est Alise. On a trouvé là nombre d'objets
intéressants, l’on y a reconnu des indices d'anciens fossés ; mais ces fossés ne
sont ni en même nombre, ni à la même distance, ni de la même forme que ceux
dont César nous a laissé une description si précise. En outre, l’on a produit
beaucoup d'objections contre l’opinion nouvelle ; mais l’on est loin d'avoir réfuté
toutes celles qui ont été produites contre l’opinion ancienne ; si bien que,
aujourd'hui, en résumé et sans compter nos propres objections qui porteront des
deux côtés à la fois, chacune des deux opinions discutées semble plus ébranlée
par ses adversaires qu'affermie par ses partisans.
En face d'un texte aussi correct que celui de César, après tant d'investigations
poursuivies par des hommes si compétents, l'incertitude est un résultat qui
pourrait paraître surprenant. L'oubli d'un certain nombre de passages essentiels
dans les auteurs, de frappantes erreurs d'interprétation du texte de César, que
nous aurons dans notre travail l'occasion de signaler plus d'une fois,
surprendront encore davantage, de la part de savants dont personne ne peut
mettre en doute ni les connaissances ni la bonne foi scientifique. Certes, l’on a vu
souvent des idées préconçues obscurcir les points les plus lumineux dans les
meilleurs esprits ; mais en considérant l’ensemble des travaux mis au jour sur la
matière qui nous occupe, l’on est frappé d'un caractère général tenant à la
marche qu’on a suivie. A nos yeux, il y aurait là plus que des erreurs
accidentelles : il s'y trouverait un vice fondamental ; quelque chose d'incohérent
s'y reconnaît ; il nous semble qu'il y manque une interprétation large et suivie
des textes, et une vue suffisamment étendue de la question.
On s'est renfermé dans les détails en omettant les caractères généraux. Or ce
sont les caractères généraux qui peuvent fournir les plus sûrs éléments de
certitude.
On s'est appuyé avec confiance sur la similitude entre un nom local et le nom
d'Alésia. Il est vrai que le nom est un indice, mais cet indice est incertain : car le
nom d'Alésia peut n'être pas resté au véritable emplacement do cet oppidum. Ne
voyons-nous pas que les noms de Genabum, d'Avaricum, ont disparu de la
surface du sol de la Gaule ? Et puis, est-il donc impossible que des noms à peu
près semblables aient été donnés à des localités différentes ?
Quant à la similitude entre un terrain et celui de l’oppidum, il la faudrait absolue,
et il est de fait qu'elle n'est ici qu'approximative de part et d'autre.
La situation géographique d'Alésia relativement au pays lingon, au pays séquane,
et dans la direction de la Province romaine, a été discutée ; mais l’on n'a
présenté aucune donnée précise qui servît à la déterminer.
On s'en est tenu là. Or, dans ces tenues, le problème nous parait insoluble ; ainsi
posée, la question est une impasse.
Deux éléments ont manqué dans la discussion, à savoir : la porte de sortie de la
Gaule ; le dessein de Vercingétorix se rendant à Alésia. En d'autres termes, le
nœud de la question est l'attitude militaire des deux ennemis. Car, si l’on arrive à
démontrer que César avait en vue une porte de sortie de la Gaule, et quelle était
celte porte ; que Vercingétorix lui a coupé la retraite, et sur quels points
seulement le fait était possible, il devient facile de déterminer avec certitude les